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01/02/1990 | FRANCE | N°85-93302

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 février 1990, 85-93302


ACTION PUBLIQUE ETEINTE et REJET sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, chambre correctionnelle, en date du 4 juin 1985, qui, pour refus d'acquitter le montant du péage autorisé sur une autoroute, l'a condamné à 250 francs d'amende ainsi qu'à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu que la contravention poursuivie qui a été commise avant le 22 mai 1988 est amnistiée aux termes de l'article 1er de la loi du 20 juillet 1988 ; que, dès lors, l'action publique est éteinte ;>Mais attendu qu'en application de l'article 24 de ladite loi, il y a lieu d'exa...

ACTION PUBLIQUE ETEINTE et REJET sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, chambre correctionnelle, en date du 4 juin 1985, qui, pour refus d'acquitter le montant du péage autorisé sur une autoroute, l'a condamné à 250 francs d'amende ainsi qu'à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu que la contravention poursuivie qui a été commise avant le 22 mai 1988 est amnistiée aux termes de l'article 1er de la loi du 20 juillet 1988 ; que, dès lors, l'action publique est éteinte ;
Mais attendu qu'en application de l'article 24 de ladite loi, il y a lieu d'examiner le pourvoi au regard des intérêts civils en cause ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 18 et 35 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 relative aux prix, de l'arrêté n° 75-17 P relatif aux péages sur les autoroutes, des articles R. 43-9 et R. 235-1 du Code de la route, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable d'avoir omis d'acquitter les droits de péage sur l'autoroute ;
" au motif que le prix de F 80 réclamé à Limas avait été fixé conformément à la législation en vigueur au moment des faits en application de l'arrêté du 7 mars 1975 en accord avec les ministères intéressés et doit être considéré comme étant conforme au tarif légalement autorisé ;
" alors que les juges du fond qui constataient qu'il n'était pas contesté par la Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône qu'à la date du 19 mai 1982 divers travaux avaient été entrepris sur l'autoroute utilisée par le prévenu qui avait été obligé de rouler la majeure partie du parcours sur une seule file en raison des travaux et de portions de chaussée interdite à la circulation et qui avait par voie de conséquence au moment de payer le coût du péage, versé la somme de F 40 soit la moitié de ce qui était dû et qui énonçaient par ailleurs que devait être considéré comme péage autorisé au sens des articles R. 43-9 et R. 235-1 du Code de la route le péage fixé en application de l'arrêté n° 75-17 P relatif au péage sur les autoroutes, ne pouvaient sans se contredire refuser d'appliquer les principes d'ordre public de l'ordonnance du 30 juin 1945 expressément visés par ce texte et de constater par voie de conséquence que le tarif exigé le 19 mai 1982 par la Société Paris-Rhin-Rhône était illicite au regard des articles 18 et 35 de l'ordonnance susvisée comme n'ayant pas tenu compte de la réduction de la prestation normalement offerte à l'usager " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que X... a emprunté une autoroute à péage sur laquelle étaient effectués des travaux entraînant l'obligation de circuler sur une seule voie pendant la plus grande partie du parcours ; qu'en raison de cette gêne, il n'a accepté de verser que la moitié de la somme prévue par le tarif ;
Attendu que pour déclarer le prévenu coupable de l'infraction poursuivie et écarter sa prétention, reprise au moyen, d'illicéité du montant du péage, la cour d'appel énonce que ce dernier " ne peut être modulé à la seule initiative de l'usager et ce, en application des textes légaux régissant le paiement des péages, qui ne se prêtent à aucune interprétation et qui ne peuvent, dans certains cas, comme le sien, devenir illicites ou illégaux " ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a, sans contradiction ni insuffisance, justifié sa décision ;
Qu'en effet, selon la loi du 18 avril 1955, modifiée par les décrets du 4 juillet 1960 et du 12 mai 1970, par dérogation exceptionnelle au principe de la gratuité de l'usage des autoroutes, des péages peuvent y être établis en vue d'assurer le remboursement des avances et dépenses de toute nature faites par l'Etat et les collectivités ou établissements publics, pour l'exploitation et l'entretien et éventuellement l'extension de l'autoroute, la rémunération et l'amortissement des capitaux investis par le concessionnaire ; que, dès lors, les sommes versées par les usagers d'une autoroute à péage ont le caractère d'une contribution aux charges d'un service public administratif déterminé, quel que soit son mode d'exploitation, et aux frais d'établissement, de gestion et d'extension d'ouvrages publics définis ; qu'il s'ensuit que ladite contribution, dont le montant est légalement fixé, est due intégralement par l'usager, du seul fait de l'utilisation de l'autoroute ;
Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de la loi des 16-24 août 1790, du décret du 16 fructidor an III, de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, de l'arrêté 75-17 P du 7 mars 1975 relatif aux péages sur les autoroutes, des articles 384, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'illégalité du prix du péage soulevée par l'usager poursuivi pour avoir omis d'acquitter les droits de péage de l'autoroute ;
" aux motifs que le péage ne peut être modulé à la seule initiative de l'usager, et ce en application des textes légaux qui ne se prêtent à aucune interprétation, les relations de l'usager avec la société concessionnaire étant de nature statutaire et non pas contractuelle ; qu'en conséquence ledit péage ne saurait sérieusement être discuté en son principe et en son quantum à la seule initiative de l'usager ; que si le prévenu affirme que le taux réclamé est illicite ou illégal, il n'a pas jugé utile de saisir jusqu'à ce jour la juridiction compétente pour faire déterminer le taux qui serait licite ; que le Conseil d'Etat a admis le caractère réglementaire de l'acte de concession, ce qui interdit aux concessionnaires de déroger par voie d'accords avec les usagers aux prescriptions des cahiers des charges ; que le cahier des charges de la concession de la SAPRR approuvé par le décret du 28 septembre 1978 et publié au Journal officiel du 4 octobre 1978, dispose notamment en son article 27 que la société reste toujours libre d'imposer sans modification de tarifs, les mesures restrictives nécessaires afin d'assurer la sécurité des usagers ou des ouvrages et pour l'installation et la protection des chantiers de travaux d'entretien ou de modifications ;
" alors qu'il appartient aux juridictions pénales de vérifier, particulièrement lorsqu'elles en sont requises, si les actes administratifs réglementaires auxquels il leur est demandé d'attribuer sanction ont été légalement pris par l'autorité compétente ; qu'en se refusant à apprécier la légalité de l'article 27 du cahier des charges de la concession de la SAPRR dérogeant expressément aux dispositions d'ordre public des articles 18 et 35 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 invoqué devant eux, les juges d'appel qui ont par ailleurs fondé leur décision de condamnation sur cette disposition du cahier des charges ont méconnu l'étendue de leurs attributions " ;
Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 17 et 27 du cahier des charges de la Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (SAPRR), des articles R. 43-9 et R. 235-1 du Code de la route, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable d'avoir omis d'acquitter les droits de péage sur l'autoroute ;
" aux motifs qu'il n'est pas contesté par la Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône qu'à la date du 19 mai 1982 divers travaux avaient été entrepris sur l'autoroute utilisée par le prévenu ; que celui-ci avait été obligé de rouler la majeure partie du parcours sur une seule file en raison de travaux et de portions de chaussée interdites à la circulation ; que le cahier des charges de la concession de la SAPRR approuvé par décret du 28 septembre 1978 et publié au Journal officiel du 4 octobre 1978 dispose notamment en son article 27 que la société reste toujours libre d'imposer, sans modification de tarifs, les mesures restrictives nécessaires afin d'assurer la sécurité des usagers ou des ouvrages et pour l'installation et la protection des chantiers de travaux d'entretien, d'améliorations ou de modifications ; que le prévenu était tenu en conséquence de s'acquitter du péage de F 80 correspondant au parcours Paris-Limas et à la catégorie de son véhicule ;
" alors qu'abstraction faite du problème de la légalité des dispositions de l'article 27 du cahier des charges, son application reste en tout état de cause subordonnée au respect des dispositions de l'article 15 du même cahier des charges aux termes duquel toute restriction importante ou interruption de trafic doit être portée à la connaissance du public par les soins de la société concessionnaire au moins 15 jours à l'avance ; que l'arrêt qui n'a pas constaté que la Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône ait procédé à cette formalité qui seule était susceptible d'autoriser le prix du péage qu'elle continuait à exiger des usagers nonobstant l'existence de travaux importants, n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que le demandeur n'a pas soulevé, devant les juges du fond, l'illégalité de l'article 27 du cahier des charges de la convention de concession approuvée par le décret du 29 septembre 1978, ni le défaut d'avis de restriction des modalités de circulation ;
Que les moyens sont nouveaux, mélangés de fait et de droit et comme tels irrecevables ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
DECLARE l'action publique éteinte ;
REJETTE le pourvoi pour le surplus.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 85-93302
Date de la décision : 01/02/1990
Sens de l'arrêt : Action publique éteinte et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CIRCULATION ROUTIERE - Autoroute - Péage - Nature juridique

REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Prix - Pratique illicite - Autoroute - Péage (non)

Selon la loi du 18 avril 1955 modifiée, peuvent être établis, par dérogation au principe de la gratuité de l'usage des autoroutes, des péages en vue d'assurer le remboursement des avances et dépenses de toute nature faites par l'Etat ou les collectivités ou établissements publics pour l'exploitation, l'entretien et, éventuellement, l'extension de l'autoroute, la rémunération et l'amortissement des capitaux investis par le concessionnaire. Dès lors, les sommes versées par les usagers d'une autoroute à péage n'ont pas le caractère d'une taxe ni d'un prix de prestation de service, mais celui d'une contribution aux charges d'un service public administratif déterminé, quel qu'en soit le mode d'exploitation, et aux frais d'établissement, de gestion et d'extension d'ouvrages publics définis. Il s'ensuit que ladite contribution dont le montant est légalement fixé, est due intégralement, du seul fait de l'utilisation de l'autoroute (1).


Références :

Arrêté 75-17 P du 07 mars 1975
Code de la route R43-9, R235-1
Ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945 art. 18, art. 35

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon (chambre correctionnelle), 04 juin 1985

CONFER : (1°). (1) Cf. Tribunal des conflits, 1965-06-28 affaire Mlle X..., Recueil Lebon 1965, p. 816 ;

Conseil d'Etat, 1977-05-13 affaire Cofiroute ;

Conseil d'Etat, 1985-10-20 affaire Y... ;

Cour d'appel de Versailles, 1981-01-14 affaire Z... c/ Société Cofiroute ;

Réponse ministérielle à question parlementaire n° 3983 du 1986-06-29 (Journal officiel, Assemblée nationale, 1986-08-25 p. 2821)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 fév. 1990, pourvoi n°85-93302, Bull. crim. criminel 1990 N° 54 p. 147
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1990 N° 54 p. 147

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Rabut
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Louise
Avocat(s) : Avocats :la SCP Delaporte et Briard, la SCP Waquet et Farge

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1990:85.93302
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