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24/10/1989 | FRANCE | N°85-91647

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 octobre 1989, 85-91647


ACTION PUBLIQUE ETEINTE et REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 5 mars 1985 qui, pour diffamation publique envers un particulier, l'a condamnée à 1 000 francs d'amende ainsi qu'à des réparations civiles.
LA COUR,
Sur l'action publique :
Attendu que l'infraction poursuivie, qui a été commise avant le 22 mai 1988, est amnistiée par application de l'article 2.6° de la loi du 20 juillet 1988 ;
Sur l'action civile :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premi

er moyen de cassation, pris de la violation des articles 29, 30, 31, 35, 55 et 56 de...

ACTION PUBLIQUE ETEINTE et REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 5 mars 1985 qui, pour diffamation publique envers un particulier, l'a condamnée à 1 000 francs d'amende ainsi qu'à des réparations civiles.
LA COUR,
Sur l'action publique :
Attendu que l'infraction poursuivie, qui a été commise avant le 22 mai 1988, est amnistiée par application de l'article 2.6° de la loi du 20 juillet 1988 ;
Sur l'action civile :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 29, 30, 31, 35, 55 et 56 de la loi du 29 juillet 1881, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a écarté des débats des éléments de preuve au moyen desquels la demanderesse entendait rapporter la preuve de la vérité du fait diffamatoire ;
" aux motifs qu'elle n'est fondée à le faire qu'à l'aide d'éléments de preuve qu'elle possédait déjà au moment où elle a avancé son imputation et qui ont été dénoncés tant à la partie civile qu'au ministère public dans les formes prévues par l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 ; qu'il résulte de la procédure que la prévenue a fait régulièrement signifier à la sarl Y... et au ministère public 27 pièces ; seules ces pièces peuvent éventuellement servir à établir la vérité du fait imputé, à l'exclusion de tous autres documents, tel le rapport de Z..., qu'elle a produit aux débats ;
" alors, d'une part, que Mme X... a fait régulièrement signifier à la sarl Y... et au ministère public 5 pièces à l'appui desquelles elle entendait rapporter la preuve du fait diffamatoire ; que les 27 pièces analysées par la Cour comme ayant été signifiées par la demanderesse pour établir la vérité du fait imputé sont en réalité les pièces signifiées par la société plaignante qui entendait faire la preuve du contraire ; qu'ainsi, et du fait de cette erreur, la Cour n'a pas apprécié la sincérité et la valeur des 5 documents qui lui étaient soumis par la demanderesse et a privé l'arrêt attaqué de toute base légale ;
" alors, d'autre part, que l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 n'impose au prévenu de diffamation aucune autre obligation que de faire signifier au ministère public ou au plaignant, dans le délai de 10 jours après la signification de la citation, les faits desquels il entend prouver la vérité, la copie des pièces et les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve ; qu'ainsi, ce texte n'exige pas que les pièces signifiées soient antérieures à la perpétration de la diffamation poursuivie ; que, dès lors, en imposant une condition qui n'était pas prévue par la loi, la cour d'appel a violé le texte précité " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 29 et 35 de la loi du 29 juillet 1881, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mme X... coupable du délit de diffamation envers un particulier, la condamnant à une amende de 1 000 francs et à 5 000 francs de dommages et intérêts à l'encontre du plaignant ;
" aux motifs que, non seulement X..., n'était pas en mesure d'administrer cette preuve au jour de la diffusion de l'émission, mais il résulte du dossier qu'elle a manqué à la prudence élémentaire que doit observer toute personne qui entend informer le public ; qu'en effet, avant de réaliser son émission, elle s'est bornée à vérifier les affirmations des époux A... auprès de l'un de leurs voisins, démarche tout à fait insuffisante ; qu'elle aurait dû, à tout le moins, recueillir les observations de la société mise en cause par ceux-ci et se renseigner auprès d'organismes qualifiés sur les pratiques habituelles en matière de tarification des professionnels de la plomberie ; qu'un tel manque de prudence est exclusif de la bonne foi ;
" alors, d'une part, que Mme X... agissait en qualité de représentante de l'association des familles de Besançon, laquelle est un groupement régional de l'une des principales organisations de consommateurs de France, et dans le cadre d'une convention conclue avec le ministère de l'Economie confiant à cette association le soin d'assurer les émissions de télévision destinées à renforcer l'information des consommateurs ; qu'ainsi, elle présentait toutes les qualités pour pouvoir apprécier les pratiques habituelles en matière de tarification des professionnels de la plomberie et que, au surplus, s'étant renseignée préalablement auprès du consommateur qui avait signalé l'opération litigieuse ainsi qu'auprès de son voisin, elle a donc agi en toute connaissance de cause et sans hâte, démontrant ainsi la bonne foi avec laquelle elle accomplissait la légitime mission régionale d'information des consommateurs qui avait été confiée à son association ;
" alors, d'autre part, qu'un prévenu peut citer comme témoins, en vue de prouver sa bonne foi, les personnes dont le témoignage a été écarté pour prouver la véracité du fait diffamatoire ; qu'en l'espèce, la Cour, qui ne s'est pas prononcée sur les témoignages contenus dans les pièces versées au débat par la demanderesse, qui entendait ainsi faire la preuve de sa bonne foi, n'a pas légalement justifié sa décision de condamnation " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'étant renvoyée devant la juridiction répressive du chef de diffamation publique envers un particulier pour avoir, le 5 novembre 1982, lors d'une émission télévisée, imputé par discours et images un fait de nature à porter atteinte à la considération de la Sarl Y... à savoir que cette entreprise avait facturé 3 heures de main d'oeuvre pour une intervention au domicile des époux A... qui n'aurait en réalité duré que 2 heures, X..., vice-président de l'association des familles de Besançon, a offert de rapporter la preuve de la vérité des faits diffamatoires, après avoir fait régulièrement signifier 5 pièces au plaignant et au ministère public ; qu'il s'agissait des copies de 3 procès-verbaux d'audition par le juge d'instruction ou sur commission rogatoire de ce magistrat, de Y..., de A... et du salarié de l'entreprise Y... qui avait procédé aux travaux, de la facture remise aux époux A... et d'un rapport établi le 20 avril 1984 par un technicien à la demande de l'association des familles de Besançon et déterminant le temps effectivement nécessaire à la réalisation, dans le cas de l'espèce, des travaux conformes aux normes en vigueur ;
Attendu que pour dire la prévention établie, la cour d'appel a déclaré écarter les " vingt-sept " documents produits par X..., et notamment le rapport susvisé, dont la prévenue n'était pas en possession au moment de l'émission télévisée, ainsi que la facture qui n'apportait aucun élément particulier ; qu'elle a ensuite ajouté qu'en concevant et en diffusant une émission télévisée au cours de laquelle avaient été dénoncés les agissements d'une société consistant à majorer indûment sur une facture les heures de travail accomplies chez un client, fait contraire à la probité, X..., qui n'avait pas établi la vérité du fait dénoncé ni justifié avoir respecté la prudence s'imposant à toute personne informant le public, a imputé un fait de nature à porter atteinte à la considération de cette société et ainsi commis le délit de diffamation ;
Attendu qu'en cet état, et malgré l'erreur commise par les juges du second degré dans le nombre de pièces produites par la demanderesse, la cour d'appel, qui d'ailleurs n'avait pas été saisie par celle-ci de conclusions tendant à lui reconnaître le bénéfice de la bonne foi, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués au moyen ; qu'outre la facture et le rapport du technicien concernant des faits postérieurs à l'imputation en cause, X... ne pouvait utilement invoquer les autres documents par elle signifiés, la preuve de la vérité des faits diffamatoires n'étant susceptible de résulter que du débat auquel il est procédé devant la juridiction de jugement et non d'éléments ayant pu être recherchés dans ce but au cours de l'instruction préalable ;
Que, dès lors, les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
DECLARE l'action publique éteinte ;
Et pour le surplus,
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 85-91647
Date de la décision : 24/10/1989
Sens de l'arrêt : Action publique éteinte et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESSE - Diffamation - Preuve de la vérité des faits diffamatoires - Moyens - Documents légalement signifiés - Pièces portant sur des faits antérieurs à la diffamation

Il résulte de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 que, pour être admis au titre de l'offre de preuve, les écrits et témoignages prévus par ce texte doivent, quelle que soit leur date, concerner des faits antérieurs à la perpétration de la diffamation (1).


Références :

Loi du 29 juillet 1881 art. 55

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon (chambre correctionnelle), 05 mars 1985

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1964-01-28 n° 90.954-63, Calvel René (rejet) ; Chambre criminelle, 1979-12-17 , Bulletin criminel 1979, n° 360, p. 974 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 oct. 1989, pourvoi n°85-91647, Bull. crim. criminel 1989 N° 379 p. 913
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1989 N° 379 p. 913

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Berthiau, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Libouban
Rapporteur ?: Rapporteur :Mme Guirimand
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet et Farge, la SCP Célice et Blancpain

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1989:85.91647
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