CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Toulouse, en date du 29 juin 1989, qui, dans la procédure suivie contre lui pour vol aggravé, infirmant l'ordonnance du juge d'instruction accueillant sa demande de mise en liberté, a dit que le mandat de dépôt criminel décerné contre lui le 20 juin 1988 reprendrait son cours.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 223-2 du Code de l'organisation judiciaire, 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que les débats ont eu lieu en présence de M. Rabastens, avocat général ;
" alors qu'un magistrat désigné par le procureur général est spécialement chargé, au Parquet de la cour d'appel, des affaires de mineurs ;
" et que faute de constater que M. Rabastens avait été désigné par le procureur général pour suivre les affaires de mineurs, l'arrêt attaqué a violé les textes susvisés " ;
Attendu que l'arrêt attaqué, rendu par la chambre d'accusation contre X..., mineur de 18 ans au moment des faits, mentionne, sans autre précision, que l'affaire a été jugée " en présence de M. Rabastens, substitut du procureur général " ;
Attendu en cet état que si l'article L. 223-2 du Code de l'organisation judiciaire prévoit la désignation par le procureur général d'un magistrat spécialement chargé au Parquet de la cour d'appel des affaires de mineurs, aucune disposition n'exige que ce magistrat soit nécessairement le représentant du ministère public aux audiences de la chambre d'accusation appelée à connaître de telles affaires ;
Qu'ainsi le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 12 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 et 591 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné le placement en détention de X... ;
" alors que le service de l'Education surveillée compétent doit être obligatoirement consulté avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire d'un mineur ; que cette formalité, essentielle aux droits du mineur, s'applique quelle que soit la juridiction susceptible de prononcer la mise en détention ; qu'ainsi, la chambre d'accusation a méconnu le texte susvisé " ;
Attendu que si l'article 12 de l'ordonnance du 2 février 1945, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 1985, prescrit qu'avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire d'un mineur, le service de l'Education surveillée compétent doit obligatoirement être consulté, cette exigence ne saurait être étendue aux cas où le juge est appelé à se prononcer, au cours de cette détention, sur la validité ou l'opportunité du maintien de la mesure ;
Qu'il en est ainsi lorsque, comme en l'espèce, saisie comme juridiction d'appel, la chambre d'accusation, infirmant l'ordonnance du juge d'instruction remettant en liberté le mineur détenu, rend son plein effet au titre de détention initial ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 11 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945, 145 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné le placement en détention de X... ;
" aux motifs que s'il est exact que X... était mineur au moment des faits, il avait néanmoins 17 ans et demi, âge auquel il est possible d'avoir un discernement suffisant ; qu'un précédent arrêt du 18 avril 1989 de la chambre d'accusation a confirmé une ordonnance de refus de mise en liberté ; qu'aucun élément nouveau n'est intervenu depuis lors, bien au contraire, puisque la victime a confirmé, à l'occasion de la confrontation du 12 juin 1989, ses accusations contre X... ;
" alors que la chambre d'accusation, qui s'est prononcée par un motif général, en se référant à une précédente décision intervenue à une date à laquelle l'instruction n'était pas close tandis que dans l'ordonnance entreprise, le juge d'instruction avait observé que l'information était achevée, et qui ne s'en est pas expliquée, a privé sa décision de base légale " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 144 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 144 et 148 du Code de procédure pénale que la décision d'une juridiction d'instruction statuant sur la détention provisoire doit être spécialement motivée d'après les éléments de l'espèce par référence aux dispositions du premier de ces textes ;
Attendu que pour infirmer l'ordonnance du juge d'instruction faisant droit à la demande de mise en liberté présentée par X..., mineur âgé de 17 ans au moment des faits, inculpé de vol aggravé, et pour le maintenir en détention sur le fondement du mandat de dépôt criminel initial, après avoir exposé les faits, l'arrêt attaqué se borne à énoncer qu'aucun élément nouveau n'est intervenu depuis son dernier arrêt du 18 avril 1989 ayant notamment relevé que les faits reprochés avaient troublé l'ordre public ;
Mais attendu qu'en omettant de préciser si, d'après les éléments de l'espèce, la détention était toujours nécessaire pour préserver l'ordre public du trouble actuellement causé par l'infraction, voire si d'autres circonstances justifiaient, au regard de l'article 144 du Code précité, le maintien d'une telle mesure, la chambre d'accusation n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Toulouse, en date du 29 juin 1989, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Agen ;
DIT que l'intéressé sera remis en liberté s'il n'est détenu pour autre cause.