LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, statuant en chambre du conseil, le neuf août mil neuf cent quatre vingt neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DARDEL, les observations de la société civile professionnelle WAQUET et FARGE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LECOCQ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Georges,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de RENNES en date du 3 mai 1989 qui, après cassation, l'a renvoyé devant la cour d'assises du département de la MANCHE, sous l'accusation de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner et de délits connexes de coups et blessures volontaires avec arme ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de huit jours ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 309, 311, 325 et 328 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé l'inculpé devant la cour d'assises de la Manche des chefs de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner sur la personne de Michel Y... d'une part, et de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail personnel pendant plus de huit jours sur les personnes de Jean-Claude Z... et Alban A..., d'autre part ;
" alors que le meurtre ainsi que les blessures et les coups sont excusables s'ils ont été provoqués par des coups ou violences graves envers les personnes ; que, par ailleurs, il n'y a ni crime ni délit lorsque l'homicide et les coups étaient commandés par la nécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou d'autrui ; qu'en l'espèce il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Y..., A... et Z... se sont présentés à l'heure du dîner chez les parents de l'inculpé, qu'ils ont pénétré sans y être invités à l'intérieur de l'habitation et que Z..., immédiatement, intimait à ce dernier l'ordre de sortir pour avoir une explication sur un différend qui les opposait ; que, sur son refus d'obtempérer, Z... se précipitait sur lui pour l'y contraindre et qu'une première scène de violences s'ensuivait, au cours de laquelle l'inculpé s'est défendu ; qu'étant parvenu à s'échapper, l'inculpé est redescendu de l'étage où il était monté, armé d'une carabine et ordonnant aux trois intrus de partir, et qu'il n'a tiré qu'après que la victime, au lieu de se retirer, eut fait un pas dans sa direction ; que ces circonstances démontrent que l'inculpé, qui avait été agressé et provoqué, se trouvait, au moment des faits, en état de légitime défense, qui excluait que les infractions qui lui sont reprochées fussent constituées " ;
Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le 8 septembre 1983, Jean-Claude Z..., accompagné de Michel Y... et d'Alban A... aurait fait irruption au domicile des époux X... avec l'intention de demander au fils de ces derniers raison d'un différend ; qu'au cours de la scène de violences qui aurait suivi, Georges X... aurait porté deux coups de couteau à Z... ; qu'après avoir conduit ses enfants au premier étage, X... en serait descendu avec une carabine armée, aurait intimé l'ordre de partir aux trois hommes mais que ceux-ci s'avançant au contraire vers lui, il aurait tiré un coup de feu blessant mortellement Y... et moins gravement les deux autres ;
Attendu qu'en statuant ainsi sur les charges de culpabilité relevées à l'encontre de X..., la chambre d'accusation a souverainement apprécié tous les éléments constitutifs du crime et des délits connexes retenus à l'encontre de l'inculpé ; que la Cour de Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier si la qualification donnée aux faits justifie le renvoi devant la cour d'assises ;
Attendu que les faits relevés à l'encontre de X..., à les supposer établis, constituent le crime de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner et les délits connexes de coups et blessures volontaires avec arme ayant entraîné une incapacité de travail de plus de huit jours, prévus et réprimés par les articles 309, § 6 et 311, § 1 et 2 du Code pénal ;
Attendu que les juges n'étaient pas tenus de s'expliquer plus amplement dès lors que dans le mémoire régulièrement produit devant la chambre d'accusation aucune articulation n'invoquait ni le fait justificatif de légitime défense ni l'excuse de provocation ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits principaux objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi
Condamne le demandeur aux dépens ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en chambre du conseil, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : MM. Berthiau conseiller doyen faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Dardel conseiller rapporteur, Angevin, Morelli, Dumont, Fontaine, Blin conseillers de la chambre, Mme Bregeon, M. de Mordant de Massiac conseillers référendaires, M. Lecocq avocat général, Melle Collet greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.