IRRECEVABILITE et CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Impôts,
contre l'arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Riom, en date du 4 février 1987 qui, se prononçant contradictoirement à l'encontre de la SARL Expression, mais par défaut à l'encontre de X... Pierre, les a condamnés à diverses amendes, pénalités ou confiscations fiscales des chefs d'ouverture sans déclaration de 2 débits de boissons, de défaut de paiement du droit de licence et de la taxe spéciale, d'introduction irrégulière de spiritueux dans lesdits débits de boissons, mais qui les a relaxés pour l'infraction à la législation sur la billetterie des spectacles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
I-Sur la recevabilité du pourvoi à l'égard de X... Pierre :
Attendu, d'une part, que le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire ouverte seulement contre les arrêts ou jugements en dernier ressort qui ne sont pas susceptibles d'être attaqués par les voies de recours ordinaires au moment où le recours est formé ;
Attendu, d'autre part, que les dispositions de l'article 568, dernier alinéa, du Code de procédure pénale, aux termes desquelles, à l'égard du ministère public, le délai du pourvoi contre les arrêts de défaut court à compter de l'expiration du délai de 10 jours qui suit la signification, sont applicables au pourvoi formé par l'administration des Impôts, partie poursuivante, exerçant conformément à l'article L. 235 du Livre des procédures fiscales l'action fiscale en matière de contributions indirectes ;
Attendu que l'arrêt attaqué, condamnant X... du chef de diverses infractions à la législation sur les contributions indirectes, le relaxant pour l'une d'elles, celle concernant la billetterie des spectacles, a été rendu par défaut à l'égard de ce prévenu et lui a été signifié le 24 février 1987 ; que le pourvoi du Directeur des services fiscaux, formé le 9 février 1987, alors que la décision était susceptible d'opposition, n'est pas recevable comme prématuré ;
II-Sur le pourvoi en ce qu'il concerne la SARL Expression :
Sur le moyen unique de cassation proposé et pris, de la violation de l'article 17- III de la loi n° 70-1199 du 21 décembre 1970 article 290 quater du Code général des impôts-et de l'arrêté d'application du 23 juin 1981- articles 50 sexies B à 50 sexies H de l'annexe IV au Code général des impôts-, de l'article 17- II de la loi n° 80-30 du 18 janvier 1980- article 290 quater, paragraphe II, du Code général des impôts-et du décret d'application n° 80-824 du 17 octobre 1980- articles 96 B à 96 E de l'annexe III au Code général des impôts-, des articles 1788 bis à 1791 du Code général des impôts, des principes applicables en matière de contributions indirectes, ensemble violation des articles 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé les prévenus des fins de la poursuite fiscale exercée à leur encontre pour infraction à la réglementation de la billetterie des établissements de spectacles ;
" aux motifs, d'une part, que les déclarations de l'exploitant relatives au système de billetterie en vigueur dans son établissement, c'est-à-dire un système mixte consistant en la remise aux spectateurs d'un ticket de caisse et d'une contremarque (ticket à souche non réglementaire) permettant la remise d'une consommation, n'ont pas été mises en cause par l'Administration qui tolère ce système et que, dès lors, les irrégularités relevées par les gendarmes relatives aux contremarques ne sauraient à elles seules caractériser une éventuelle infraction, le billet réglementaire étant constitué par le ticket de caisse ; que, d'autre part, le caractère sommaire et parfaitement contestable du calcul effectué par l'Administration du nombre de billets irréguliers délivrés interdisait en toute hypothèse de prononcer les condamnations édictées par les premiers juges ;
" alors, d'une part, dès lors qu'il est perçu un prix d'entrée dans les établissements de spectacles, ce que l'arrêt a reconnu implicitement en l'espèce, seul le dispositif de la billetterie classique est applicable-billet en deux parties tiré d'un carnet à souches-à l'exclusion du système du ticket émis par une caisse enregistreuse ; il importait peu que des tickets de caisse aient été délivrés dans des conditions régulières dès lors qu'ils étaient inapplicables ;
" alors, d'autre part, que la tolérance de l'autorité administrative, revêtirait-elle la forme d'une instruction, ne saurait servir d'excuse à une contravention ;
" et qu'enfin, il appartenait à la Cour, si elle estimait sommaire et contestable la quantité de billets irréguliers reconstituée par l'Administration, d'ordonner les mesures d'instruction utiles à l'appréciation du quantum de la fraude ou, à tout le moins, de demander à la partie adverse de lui communiquer les éléments nécessaires à cette appréciation, mais non de relaxer purement et simplement les prévenus de l'infraction à la réglementation de la billetterie, d'autant que la valeur des recettes saisies, évaluée de gré à gré entre l'Administration et les contrevenants, s'imposait aux juges pour le prononcé de la peine de confiscation " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu, d'une part, qu'aux termes de l'article 290 quater, paragraphe Ier, du Code général des impôts, dans les établissements de spectacles comportant un prix d'entrée, les exploitants doivent délivrer un billet à chaque spectateur avant son accès dans les lieux, les normes des billets à délivrer ayant été fixées par l'arrêté du 23 juin 1971 codifié depuis sous l'annexe IV, article 50 sexies B à 50 sexies H du même Code ;
Attendu, d'autre part, qu'aux termes de l'article 290 quater, paragraphe II, dudit Code, lorsque les exploitants des discothèques et des cafés dansants ne sont pas tenus à la délivrance de billets, parce que l'accès à leurs établissements ne comporte pas le règlement préalable d'un prix d'entrée, ils doivent cependant remettre à leurs clients un ticket émis par une caisse enregistreuse en respectant les règles instaurées par le décret du 17 octobre 1980 codifié depuis sous l'annexe III du Code général des impôts, article 96 B à 96 E ;
Attendu que, pour infirmer sur ce point la décision des premiers juges et relaxer les prévenus poursuivis du chef d'infraction à la législation sur la billetterie des spectacles, l'arrêt attaqué, après avoir constaté et énoncé que l'accès aux 2 établissements de spectacles dénommés " L'Artishow " et " Le Pierrot ", exploités alors par la SARL Expression, supposait le paiement préalable de prix d'entrée, d'ailleurs différenciés, fait valoir que, bien que le système de billetterie utilisé ne comportât pas la délivrance d'un ticket extrait du carnet à souches, tel que prévu par l'arrêté du 23 juin 1971, il n'en demeurait pas moins que les billets délivrés à la clientèle avaient été émis par une caisse enregistreuse et qu'il avait été justifié, devant la Cour, de la conformité de ce matériel d'enregistrement par rapport aux normes exigées pour ces caisses par les articles 96 B à 96 E de l'annexe III du Code général des impôts ; que d'ailleurs, selon l'arrêt, le système de contrôle mixte instauré à l'entrée de ces établissements, par la délivrance simultanée de contremarques, avait été tolérée par l'Administration poursuivante ; qu'enfin, l'arrêt énonce que le caractère sommaire des calculs, effectués par la partie poursuivante pour évaluer le nombre exact des billets irrégulièrement délivrés par les prévenus, ne permettait pas de prononcer le nombre de pénalités tel qu'il avait été décidé par les premiers juges ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, d'une part, la tolérance alléguée de l'Administration ne constituait pas une excuse absolutoire à l'infraction matériellement constituée et que, d'autre part, il appartenait aux juges du fond d'ordonner toute mesure d'instruction nécessaire pour déterminer le nombre de billets irrégulièrement délivrés, la cour d'appel, qui a fait application des règles instaurées en cas d'entrée gratuite à des salles de spectacles dont l'accès comportait le paiement préalable d'un droit, a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
Que par suite, l'arrêt attaqué encourt de ce chef la cassation ;
Par ces motifs :
DECLARE irrecevable le pourvoi du Directeur général des Impôts, en ce qu'il est dirigé contre X... Pierre et condamne, de ce chef, le demandeur aux dépens ;
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Riom du 4 février 1987 mais dans ses seules dispositions visant la SARL Expression et l'infraction à la réglementation sur la billetterie des spectacles dont elle avait à répondre, et, pour être jugé à nouveau conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon.