CASSATION et règlement de juges sur le pourvoi formé par :
- X... Françoise, veuve Y...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bastia, en date du 30 juillet 1987, qui, sur appel de la partie civile contre l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction, l'a renvoyée devant le tribunal correctionnel du chef d'abus de blanc-seing.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Vu l'article 574 du Code de procédure pénale ;
Sur le moyen relevé d'office, et pris de la violation des articles 104, 114 et 170 du Code de procédure pénale et des droits de la défense ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 218 du Code de procédure pénale ;
Attendu, d'une part, que selon l'article 104 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 décembre 1987, le juge d'instruction ne peut entendre comme témoin une personne nommément visée par la plainte avec constitution de partie civile sans lui donner connaissance de celle-ci et l'aviser qu'elle peut refuser de déposer ;
Attendu, d'autre part, que nul ne peut être renvoyé devant la juridiction de jugement sans avoir été inculpé ou dûment appelé ;
Attendu que sur plainte avec constitution de partie civile de Louise Y..., épouse Z..., mettant en cause Françoise X..., une information a été ouverte contre personne non dénommée des chefs de faux et usage de faux ; qu'après avoir entendu comme témoin notamment Françoise X... sans lui avoir donné l'avertissement prévu par l'article 104 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu ;
Que, sur appel de la partie civile, la chambre d'accusation, par arrêt du 5 février 1986, a ordonné un supplément d'information aux fins de rechercher si Françoise X... avait fait usage de la pièce arguée de faux et, dans l'affirmative, à quelle date ; que le juge d'instruction commis pour y procéder a vainement convoqué par voie administrative à titre de témoin la susnommée qui avait provisoirement changé d'adresse ; que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a renvoyé Françoise X... devant le tribunal correctionnel du chef d'abus de blanc-seing ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de constater d'office la nullité du procès-verbal d'audition en qualité de témoin de Françoise X... nommément désignée par la plainte de la partie civile et que la susnommée n'avait été ni inculpée ni régulièrement appelée par un mandat de justice, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
Que, dès lors, la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les moyens proposés :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bastia du 30 juillet 1987, et, pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Et pour le cas où la chambre d'accusation de la Cour de renvoi déclarerait qu'il existe des charges suffisantes contre Françoise X... à l'égard de la poursuite ;
Réglant de juges par avance ;
ORDONNE que la chambre d'accusation renverra l'inculpée devant le tribunal correctionnel d'Ajaccio pour y être jugée.