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13/10/1988 | FRANCE | N°85-43533

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 octobre 1988, 85-43533


Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Caen, 6 juin 1985), que M. X... a été engagé par l'Association de formation professionnelle des adultes (AFPA) à compter du 5 avril 1976, suivant un contrat de travail qui comportait une obligation de mobilité interdisant au salarié de refuser les déplacements momentanés ou définitifs ordonnés par son employeur, et a été affecté au centre FPA de Caen ; qu'en janvier 1982, l'association lui a notifié son affectation temporaire au centre FPA de Rennes, en lui indiquant qu'il bénÃ

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Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Caen, 6 juin 1985), que M. X... a été engagé par l'Association de formation professionnelle des adultes (AFPA) à compter du 5 avril 1976, suivant un contrat de travail qui comportait une obligation de mobilité interdisant au salarié de refuser les déplacements momentanés ou définitifs ordonnés par son employeur, et a été affecté au centre FPA de Caen ; qu'en janvier 1982, l'association lui a notifié son affectation temporaire au centre FPA de Rennes, en lui indiquant qu'il bénéficierait d'une indemnité de double résidence ; que prétendant avoir droit à des frais de mission, M. X... a refusé de rejoindre ce poste et a persisté dans ce refus, bien que le 19 février 1982 son employeur l'ait averti qu'à défaut d'obéir à cet ordre, il serait soumis à la procédure disciplinaire prévue par le statut ; qu'il a en conséquence comparu le 17 mai 1982 devant la commission administrative paritaire ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à la condamnation de l'AFPA à lui payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant des poursuites engagées contre lui, alors, selon le moyen, que, de première part, il est constant que le refus de M. X... d'exécuter les ordres de mission était fondé sur le refus de l'AFPA de lui verser des frais de mission ; que si M. X... avait accepté le principe de mobilité sur tout le territoire, il était en droit, de par le jeu de l'exception d'inexécution, de refuser un déplacement en mission dès lors que l'employeur lui avait fait savoir qu'il ne lui verserait pas de frais de mission ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du Code civil, alors que, de deuxième part, M. X... n'a jamais reproché à son employeur de lui avoir demandé d'effectuer un déplacement en mission d'une durée supérieure à six mois ; qu'il s'est seulement opposé à ce que ses déplacements ne donnent pas lieu à l'allocation de frais de mission ; qu'ainsi, le point de savoir si le cas de M. X... relevait ou non d'une dérogation à la limite maximale de six mois assignés à la durée des déplacements, était étranger au litige sur lequel il ne pouvait avoir aucune incidence ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil ; alors que, de troisième part, l'AFPA n'était fondée à engager et à poursuivre une procédure disciplinaire à l'encontre de M. X... qu'autant que les refus de celui-ci d'obéir aux ordres de mission étaient injustifiés ; que l'appréciation du caractère justifié ou non du refus de M. X... supposait résolue la question du droit, pour ce dernier, à percevoir des frais de mission ; qu'en s'abstenant de rechercher si l'AFPA était tenue de verser à M. X... des frais de mission pour les déplacements qui lui étaient demandés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134, 1137, 1147 et 1382 du Code civil ; alors que, de quatrième part, M. X... faisait valoir, dans ses écritures d'appel, qu'il se trouvait toujours sous le coup de sanctions disciplinaires qui étaient seulement suspendues mais non rapportées ; que ce chef de préjudice

moral, sur lequel la cour d'appel ne s'est pas expliquée, devait donner lieu à réparation dès lors que l'AFPA n'était pas fondée à engager une procédure disciplinaire à l'encontre de M. X... ; qu'ainsi, les juges du second degré ne pouvaient se dispenser de dire si M. X... était ou non en droit de percevoir des frais de mission pour les déplacements qui lui étaient demandés ; d'où il suit que l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des articles 1134, 1147 et 1382 du Code civil ; alors qu'enfin, il importait peu qu'il n'y eût ni déplacement, ni sanction, dès lors que l'engagement d'une procédure disciplinaire et la menace d'un licenciement - qui s'est prolongée au moins pendant six mois, jusqu'à la suspension des sanctions - avaient causé à M. X... un préjudice moral dont il demandait l'indemnisation et sur l'existence duquel les juges du fond ne se sont pas expliqués ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel ne pouvait se dispenser de dire si l'AFPA était fondée à refuser de prendre en charge les frais de mission de M. X... ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué est entaché d'un défaut de base légale au regard des articles 1134, 1137, 1147 et 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que le contrat de travail de M. X... stipulait que les enseignants de l'AFPA doivent accepter le principe de la mobilité sur l'ensemble du territoire, les juges du fond ont retenu que les refus réitérés du salarié de rejoindre la ville où il était affecté pour une durée supérieure à six mois constituaient par eux-mêmes une violation de cette disposition ; qu'ils ont relevé ensuite que le règlement interne de l'AFPA dispose qu'aucune mission ou tournée ne peut se prolonger au-delà d'une durée de six mois, sauf dérogation particulière, et qu'une contestation opposait en conséquence M. X... à son employeur quant à l'octroi de frais de mission ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel, appréciant souverainement si l'inexécution par l'employeur de cette obligation était de nature à affranchir le salarié de son obligation de fournir sa prestation de travail, a estimé que M. X... aurait dû accepter sa nouvelle affectation et faire ensuite trancher par l'autorité ou la juridiction compétente le litige relatif aux indemnités dues à raison de ce déplacement ; qu'en ses trois premières branches, le moyen ne tend, sous le couvert de défaut de base légale et de violation de la loi, qu'à remettre en cause cette appréciation des juges du fond ;

Attendu en second lieu qu'ayant retenu que le salarié n'était pas fondé à se soustraire à l'obligation lui incombant, la cour d'appel a pu en déduire, sans avoir à suivre M. X... dans le détail de son argumentation, que l'AFPA n'avait commis aucune faute en engageant une procédure disciplinaire devant la commission administrative paritaire ; que le moyen n'est pas fondé en ses quatrième et cinquième branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 85-43533
Date de la décision : 13/10/1988
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Défaut d'exécution - Exception non adimpleti contractus.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Salaire - Cause - Travail du salarié - Refus d'exécuter le travail proposé par l'employeur - Effet.

1° Les juges du fond apprécient souverainement si l'inexécution par l'employeur de son obligation était de nature à affranchir le salarié de son obligation de fournir sa prestation de travail .

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Abus - Attitude fautive du salarié.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Responsabilité - Faute - Engagement d'une procédure disciplinaire justifiée.

2° Dès lors que le salarié n'est pas fondé à se soustraire à son obligation, l'employeur ne commet aucune faute en engageant une procédure disciplinaire devant la commission administrative paritaire


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 06 juin 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 oct. 1988, pourvoi n°85-43533, Bull. civ. 1988 V N° 497 p. 322
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1988 V N° 497 p. 322

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Goudet, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Ecoutin
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Saintoyant
Avocat(s) : Avocats :M. Foussard, la SCP Desaché et Gatineau .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:85.43533
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