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11/10/1988 | FRANCE | N°86-91596

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 octobre 1988, 86-91596


ACTION PUBLIQUE ETEINTE, REJET et CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur les pourvois formés par :
1°) X..., prévenu,
2°) Y... Paul, Z... Claudette, épouse Y..., Z... Raymond, A... Marguerite, épouse Z..., parties civiles,
contre un arrêt de la cour d'appel de Lyon (4e chambre), en date du 25 février 1986 qui a condamné X... à 8 mois d'emprisonnement avec sursis pour homicide involontaire ainsi qu'à 500 francs d'amende pour défaut de maîtrise, a ordonné la suspension de son permis de conduire pendant 2 ans et s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR, >Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;...

ACTION PUBLIQUE ETEINTE, REJET et CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur les pourvois formés par :
1°) X..., prévenu,
2°) Y... Paul, Z... Claudette, épouse Y..., Z... Raymond, A... Marguerite, épouse Z..., parties civiles,
contre un arrêt de la cour d'appel de Lyon (4e chambre), en date du 25 février 1986 qui a condamné X... à 8 mois d'emprisonnement avec sursis pour homicide involontaire ainsi qu'à 500 francs d'amende pour défaut de maîtrise, a ordonné la suspension de son permis de conduire pendant 2 ans et s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, propre à X... et pris de la violation des articles R. 10 du Code de la route, 319 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'homicide involontaire par inobservation de l'article R. 10 du Code de la route ;
" aux motifs qu'en s'engageant à une vitesse de 55 km / h dans le couloir réservé aux autobus dont la largeur était à demi obstruée par un autobus en stationnement, il aurait dû réduire sa vitesse puisqu'un feu tricolore et un passage réservé pour piétons n'étaient distants qu'à une trentaine de mètres, qu'en sa qualité de chauffeur d'autocar, il pouvait prévoir qu'un passager pouvait traverser brusquement la chaussée en face d'un arrêt de transports en commun ;
" alors que, d'une part, en ne répondant pas aux conclusions du prévenu desquelles il résultait qu'en freinant énergiquement, en ligne droite, alors qu'il circulait à une vitesse autorisée, sur un couloir exclusivement réservé aux autobus, hors de tout passage protégé, son véhicule était en cours de ralentissement, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" alors que, d'autre part, il résultait du dossier pénal que la vitesse du véhicule en phase de décélération au moment du freinage n'était que de 55 km / h dans un couloir où la priorité absolue était réservée aux autobus, hors d'un passage protégé ; qu'en caractérisant le défaut de maîtrise en dépit de ces circonstances, la cour d'appel a violé l'article R. 10 du Code de la route dans sa rédaction antérieure au décret du 30 juillet 1985 et, par voie de conséquence, l'article 319 du Code pénal " ;
Attendu qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 20 juillet 1988, la contravention visée dans la prévention est amnistiée et que l'action publique est éteinte en ce qui la concerne ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'un autocar conduit par X... a heurté et mortellement blessé la jeune Sophie Y... qui, à pied, traversait la route devant lui ;
Attendu que pour déclarer le prévenu coupable d'homicide involontaire, la juridiction du second degré, après avoir relevé que X... s'était engagé à la vitesse de 55 km / h sur une portion de chaussée réservée à la circulation des autobus mais partiellement obstruée par l'un de ces véhicules à l'arrêt, énonce que ce conducteur " aurait dû réduire d'autant plus sa vitesse qu'un feu tricolore et un passage réservé aux piétons n'étaient distants que d'une trentaine de mètres " ; qu'elle ajoute " qu'en sa qualité de chauffeur d'autocar il devait légitimement prévoir qu'en face d'un arrêt de transports en commun un passager pouvait traverser brusquement la chaussée " ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs exempts d'insuffisance la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre le demandeur dans le détail de son argumentation, a caractérisé le délit, objet de la poursuite, et justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen de cassation, propre à X... et pris de la violation des articles 3, 5 et 6 de la loi du 5 juillet 1985 :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné X... à indemniser l'entier préjudice corporel subi par les ayants droit de la victime ;
" aux motifs que l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985 donne aux tiers le droit d'obtenir réparation du préjudice résultant des dommages causés à la victime directe en tenant compte des limitations ou exclusions applicables à l'indemnisation de ces dommages ;
" alors que, d'une part, les limitations ou exclusions exceptionnellement écartées par l'article 3 paragraphe 2 de la loi du 5 juillet 1985 en considération de l'âge de la victime ne sauraient être inopposables aux victimes indirectes ; qu'en statuant autrement, la cour d'appel a violé les articles 3 paragraphes 2, 5 paragraphes 1 et 6 de la loi du 5 juillet 1985 ;
" et alors que, d'autre part, seules sont indemnisées de leur préjudice corporel intégral les " victimes " au sens de l'article 3 de la loi du 5 juillet 1985, qu'en étendant ce bénéfice aux " tiers " définis par l'article 6 de la loi, la cour d'appel a violé derechef les articles 3 § 2, 5 § 1 et 6 de la loi du 5 juillet 1985 " ;
Attendu qu'après avoir estimé que Sophie Y... avait commis une faute en s'engageant sans précautions sur la chaussée, les juges retiennent que cette faute, commise par une victime âgée de moins de 16 ans, non conductrice d'un véhicule terrestre à moteur, ne peut limiter la réparation des dommages résultant des atteintes à sa personne ; qu'ils en déduisent que le préjudice moral subi par ses ayants droit du fait de son décès doit lui-même être réparé intégralement ;
Attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel, loin de violer les textes visés au moyen, en a fait l'exacte application ;
Qu'en effet il résulte de l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985 que le préjudice subi par un tiers du fait des dommages causés à la victime directe d'un accident doit être intégralement réparé si aucune limitation ou exclusion n'est applicable à la réparation desdits dommages ;
Que le moyen doit donc être écarté ;
Mais sur le moyen unique de cassation, propre aux consorts Y...- Z... et pris de la violation des articles 1, 3, 6 de la loi du 5 juillet 1985, 3 et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné X... à payer une somme de 14 000 francs seulement aux époux Y..., pour les frais funéraires qu'ils ont dû engager à la suite du décès accidentel de leur fille, laissant à leur charge le tiers de la responsabilité de l'accident ;
" aux motifs qu'" il convient de suivre l'évaluation des premiers juges et de réduire à la somme de 21 000 francs le montant du préjudice matériel (édification d'un monument funéraire) si bien que, compte tenu du partage de responsabilité, la somme de 14 000 francs devra être allouée à ce titre à la victime " ;
" alors que les époux Y... ont droit de ce chef à une réparation intégrale, puisque ce dommage est la conséquence de la mort de leur fille et constitue un élément de préjudice résultant pour eux de l'atteinte à l'intégrité physique de celle-ci " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les frais funéraires supportés par les ayants droit de la victime d'un accident mortel sont pour eux la conséquence de l'atteinte portée à la personne de cette victime ;
Attendu qu'ayant évalué à 21 000 francs les frais funéraires consécutifs au décès de Sophie Y..., la juridiction du second degré, faisant application du partage de responsabilité découlant de la faute de la victime au motif que ces frais constituaient un " préjudice matériel ", limite à 14 000 francs l'indemnité due de ce chef par X... ;
Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ; qu'il s'ensuit que la cassation est encourue ;
Attendu, cependant, que la Cour de Cassation trouve dans les constatations des juges du fond, qui ont souverainement apprécié le dommage, les éléments lui permettant d'appliquer la règle de droit appropriée et de mettre fin au litige ; qu'il n'y a pas lieu de modifier la condamnation aux dépens ;
Par ces motifs :
Sur le pourvoi de X... :
DECLARE éteinte l'action publique en ce qui concerne la contravention ;
REJETTE le pourvoi pour le surplus ;
Sur le pourvoi des consorts Y...- Z... :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, en date du 25 février 1986, mais seulement en ce qu'il a fixé à 14 000 francs l'indemnité due par X... au titre des frais funéraires ;
Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire, fixe à 21 000 francs ladite indemnité ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-91596
Date de la décision : 11/10/1988
Sens de l'arrêt : Action publique éteinte, rejet et cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Victime d'un accident de la circulation - Victime autre que le conducteur - Victime âgée de moins de seize ans - Préjudice des ayants droit - Réparation intégrale.

1° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Réparation intégrale - Victime d'un accident de la circulation - Loi du 5 juillet 1985 sur l'indemnisation des victimes - Victime âgée de moins de seize ans - Préjudice des ayants droit.

1° Il résulte de l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985 que le préjudice subi par un tiers du fait des dommages causés à la victime directe d'un accident doit être intégralement réparé si aucune limitation ou exclusion n'est applicable à la réparation desdits dommages (1).

2° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Réparation intégrale - Victime d'un accident de la circulation - Ayants droit - Frais funéraires - Inclusion.

2° Les frais funéraires supportés par les ayants droit de la victime d'un accident mortel sont pour eux la conséquence de l'atteinte portée à la personne de cette victime (2).


Références :

Loi 85-677 du 05 juillet 1985 art. 6

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 25 février 1986

CONFER : (1°). Chambre criminelle, 1987-12-15 , Bulletin criminel 1987, n° 459, p. 1212 (annulation partielle). CONFER : (2°). A rapprocher : Chambre sociale, 1981-01-08 Bulletin 1981, V, n° 22, p. 16 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 oct. 1988, pourvoi n°86-91596, Bull. crim. criminel 1988 N° 339 p. 910
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1988 N° 339 p. 910

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bonneau, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. de Bouillane de Lacoste
Avocat(s) : Avocats :M. Goutet, la SCP Waquet et Farge

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:86.91596
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