CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
1°) X... Annie, épouse Y...,
2°) Z... Claude,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 30 octobre 1987, qui les a renvoyés devant le tribunal correctionnel du chef de détournement de gage.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu l'article 574 du Code de procédure pénale ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation proposé au nom d'Annie X... et pris de la violation des articles 1317 à 1320 du Code civil, 60 et 400 du Code pénal, 213 et 689 du Code de procédure pénale, ensemble 593 de ce même Code, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Mme X..., épouse Y..., devant le tribunal correctionnel, du chef de détournement de gage ;
" aux motifs que l'immeuble vendu constituant le seul élément d'actif de la société dont M. A... a nanti ses parts en connaissance de ce fait et la vente étant volontaire, les éléments du délit peuvent être caractérisés ; que les trois associés ont dû contribuer à l'acte de vente qui ne pouvait être régularisé que de leur commun accord ; que, bien que Mme X..., épouse Y..., conteste sa participation, la mention selon laquelle elle y a concouru, portée dans l'acte authentique, fait foi jusqu'à inscription de faux ; que, dès lors, le détournement est bien l'oeuvre commune des trois associés, M. Z...et Mme X..., épouse Y..., étant au courant de la situation de l'actif social et ayant probablement participé avec connaissance à l'acte de vente litigieux ;
" alors que, d'une part, les faits incriminés, commis à l'étranger, en l'espèce à Abidjan en Côte-d'Ivoire, ne pouvaient être soumis à la juridiction répressive française qu'à la condition que la loi du lieu de leur perpétration réprime également les mêmes faits ; que faute, de l'avoir constaté, la chambre d'accusation, qui n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la juridiction française était compétente, n'a pas justifié sa compétence ;
" alors que, d'autre part, Mme X..., épouse Y..., avait fait valoir dans ses conclusions qu'elle n'avait jamais donné de pouvoir relatif à la vente du terrain en cause ; qu'en lui déniant la faculté de contester l'authenticité du pouvoir mentionné dans l'acte de vente, sans rechercher si la signature de Mme X..., épouse Y..., résultait d'une constatation personnelle du notaire, faisant seule foi jusqu'à inscription de faux, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
" alors que, de troisième part, il ne peut y avoir détournement d'objet remis en gage que si le débiteur a accompli un acte de nature à compromettre l'existence du gage ou à en empêcher la mise en oeuvre ; qu'en s'abstenant de répondre au chef péremptoire des conclusions de Mme X..., épouse Y..., selon lequel le gage était dès l'origine dénué de toute valeur, le bien constituant l'actif de la société étant hypothéqué et le créancier nanti ayant eu connaissance de cet état de fait lors du nantissement d'où il se déduisait que la vente du terrain était sans effet sur la valeur du gage, la chambre d'accusation n'a pas justifié sa décision ;
" alors qu'enfin, le détournement de gage ne peut être commis que par celui ou ceux qui ont donné un bien en gage ; que la chambre d'accusation qui a constaté que seul M. A... avait nanti ses parts de la SCI Bimbois Afrique ne pouvait considérer que Mme X..., épouse Y..., qui, elle, n'avait donné aucun gage, se serait rendue coupable d'un détournement ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés " ;
Sur le moyen relevé d'office à l'égard de Claude Z... et pris de la violation des articles 400 du Code pénal, 213, 593 et 689 du Code de procédure pénale ;
Les moyens étant réunis ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 689, alinéa 2, du Code de procédure pénale tout citoyen français qui, en dehors du territoire de la République, s'est rendu coupable d'un fait qualifié délit par la loi française peut être poursuivi et jugé par les juridictions françaises si le fait est puni par la législation du pays où il a été commis ;
Attendu qu'il résulte des constatations des juges du fond que les faits ont été commis en territoire étranger ; qu'il appartenait à la juridiction saisie de rechercher si ces faits, à les supposer susceptibles d'une qualification pénale, étaient également punis par la législation en vigueur au lieu de leur perpétration ; que, faute de l'avoir fait, l'arrêt a méconnu les dispositions de l'article 689 du Code de procédure pénale ci-dessus rappelées ;
Que la cassation est dès lors encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 30 octobre 1987 mais en ses seules dispositions relatives à Annie X... et Claude Z..., et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, autrement composée.