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11/07/1988 | FRANCE | N°86-14029

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juillet 1988, 86-14029


Attendu que Mlle Y... a assigné le 4 juin 1984 M. X..., huissier de justice, en paiement d'un somme de 5 000 francs à titre de dommages-intérêts, en lui faisant grief d'avoir procédé, le 17 mars 1983, sans cause et hors sa présence, en violation des dispositions des articles 18 de la loi du 13 juillet 1967 et 35 du décret du 22 décembre 1967, à l'inventaire de son patrimoine et, le 11 janvier 1984, à un nouvel inventaire dans des conditions analogues ; que le tribunal d'instance a débouté Mlle Y... de sa demande ;

Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la défense

:

Attendu que M. X... fait valoir que Mlle Y..., dont la liquidatio...

Attendu que Mlle Y... a assigné le 4 juin 1984 M. X..., huissier de justice, en paiement d'un somme de 5 000 francs à titre de dommages-intérêts, en lui faisant grief d'avoir procédé, le 17 mars 1983, sans cause et hors sa présence, en violation des dispositions des articles 18 de la loi du 13 juillet 1967 et 35 du décret du 22 décembre 1967, à l'inventaire de son patrimoine et, le 11 janvier 1984, à un nouvel inventaire dans des conditions analogues ; que le tribunal d'instance a débouté Mlle Y... de sa demande ;

Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la défense :

Attendu que M. X... fait valoir que Mlle Y..., dont la liquidation des biens a été prononcée par jugement du 10 novembre 1983, est dessaisie de toutes ses actions à caractère patrimonial, en application de l'article 15, alinéa 2, de la loi du 13 juillet 1967 ;

Mais attendu que dans la mesure où l'action engagée par Mlle Y... tend à obtenir réparation du préjudice moral résultant du manquement de l'huissier de justice à ses obligations, il s'agit d'une action exclusivement attachée à sa personne ; que son pourvoi est, dès lors, recevable ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Attendu que Mlle Y... reproche au tribunal d'instance de l'avoir déboutée de sa demande, au motif que, nonobstant le comportement de l'huissier de justice et du syndic, son préjudice n'était pas établi, alors, selon le moyen, qu'en se bornant à déclarer que l'inventaire litigieux n'avait pas fait grief à Mlle Y... dans l'enquête préliminaire diligentée par le procureur de la République, et sans examiner si, comme celle-ci le soutenait, cet acte illégal n'avait pas servi de fondement à la plainte pour banqueroute du juge commissaire dirigée contre elle et lui ayant causé au moins un dommage moral, le jugement attaqué est privé de base légale ;

Mais attendu qu'en énonçant que la preuve n'était pas rapportée que l'un ou l'autre des actes accomplis par l'huissier de justice ait pu faire grief à Mlle Y... dans l'enquête ouverte contre elle du chef de banqueroute, le tribunal a implicitement mais nécessairement retenu que les actes accomplis par l'huissier de justice ne se trouvaient pas à l'origine de cette enquête ; d'où il suit que, pris en cette branche, le moyen n'est pas fondé ;

LE REJETTE ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, et sur le second moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1382 du Code civil ensemble les articles 18 de la loi du 13 juillet 1967 et 35 du décret du 22 décembre 1967 ;

Attendu que pour débouter Mlle Y... de sa demande de dommages-intérêts, le tribunal d'instance énonce encore qu'elle ne rapporte pas la preuve que " l'action prématurée ", accomplie le 17 mars 1983 par l'huissier de justice, " qui eût été nécessairement et à très bref délai exécutée dès le prononcé du règlement judiciaire " ait compromis la poursuite de ses activités et que la nouvelle " démarche " faite par M. X... le 11 janvier 1984 était exempte de toute critique ;

Attendu qu'en se prononçant par de tels motifs sans rechercher si les circonstances dans lesquelles l'huissier de justice est intervenu à deux reprises au domicile de Mlle Y..., aux fins d'inventaire, sans qu'elle ait été présente ou dûment appelée, ne lui avaient pas causé un préjudice moral, le tribunal d'instance n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu, le 28 novembre 1984, entre les parties, par le tribunal d'instance de Thionville ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Metz


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 86-14029
Date de la décision : 11/07/1988
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° REGLEMENT JUDICIAIRE - LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Action en justice - Débiteur en état de liquidation des biens - Exercice - Exercice par le débiteur - Action en réparation d'un préjudice moral - Intervention irrégulière d'un huissier au domicile du débiteur.

1° REGLEMENT JUDICIAIRE - LIQUIDATION DES BIENS (loi du 13 juillet 1967) - Action en justice - Action intéressant la personne du failli - Exercice.

1° L'action en réparation du préjudice moral causé à un débiteur en liquidation des biens par les manquements d'un huissier de justice à ses obligations constitue une action exclusivement attachée à la personne de ce débiteur qui peut l'exercer seul .

2° OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Huissier de justice - Responsabilité civile - Faute - Inventaire au domicile d'un débiteur absent non appelé - Préjudice moral - Recherche nécessaire.

2° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASIDELICTUELLE - Dommage - Réparation - Préjudice moral - Huissier de justice - Intervention irrégulière au domicile d'un débiteur - Recherche nécessaire.

2° Ne donne pas de base légale à sa décision le tribunal qui, pour rejeter une demande en dommages-intérêts formée par un débiteur en règlement judiciaire contre un huissier de justice pour avoir établi à son domicile un inventaire de son patrimoine hors sa présence et sans l'avoir appelé, énonce qu'il n'est pas établi que la démarche de l'huissier ait compromis la poursuite des activités de ce débiteur sans rechercher si les circonstances dans lesquelles cet huissier était intervenu n'avaient pas causé à ce débiteur un préjudice moral


Références :

Code civil 1382
Décret 67-1120 du 22 décembre 1967 art. 35
Loi 67-563 du 13 juillet 1967 art. 18

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Thionville, 28 novembre 1984

A RAPPROCHER : (1°). Chambre commerciale, 1967-10-18 Bulletin 1967, III, n° 332, p. 317 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 jui. 1988, pourvoi n°86-14029, Bull. civ. 1988 I N° 237 p. 165
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1988 I N° 237 p. 165

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ponsard
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Viennois
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet et Farge, M. Garaud .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:86.14029
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