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04/05/1988 | FRANCE | N°87-83273

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 mai 1988, 87-83273


CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Alain,
- Y... Jacky,
- Z... Bernard,
contre un arrêt du 21 mai 1987 de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, composée conformément aux dispositions de l'article 698-6 du Code de procédure pénale, qui pour assassinat les a condamnés à 20 ans de réclusion criminelle chacun.
LA COUR,
Vu la connexité, joignant les pourvois ;
Vu le mémoire produit, commun aux trois demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, des articles 310, 3

05, 698-6, 706-16 et 706-25 du Code de procédure pénale, excès de pouvoir, ensemble ...

CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Alain,
- Y... Jacky,
- Z... Bernard,
contre un arrêt du 21 mai 1987 de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, composée conformément aux dispositions de l'article 698-6 du Code de procédure pénale, qui pour assassinat les a condamnés à 20 ans de réclusion criminelle chacun.
LA COUR,
Vu la connexité, joignant les pourvois ;
Vu le mémoire produit, commun aux trois demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, des articles 310, 305, 698-6, 706-16 et 706-25 du Code de procédure pénale, excès de pouvoir, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce qu'il résulte des mentions du procès-verbal des débats qu'au début de l'audience le président a interrogé la défense sur le point de savoir si elle entendait se prévaloir d'une nullité de l'ordre de celles prévues par l'article 305-1 du Code de procédure pénale et a obtenu une réponse négative ;
" alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958, la loi fixe les règles concernant la procédure pénale et qu'en conséquence les restrictions apportées par le législateur à l'exercice des droits de la défense ne sauraient être entendues au-delà de leur terme ; qu'il résulte des dispositions combinées des articles 305-1, 698-6 et 706-25 du Code de procédure pénale que la restriction apportée par l'article 305-1 à l'exercice du droit qui appartient à la défense d'invoquer les nullités de la procédure antérieures à l'ouverture des débats, est inapplicable lorsque les faits, objet de l'accusation, entrent dans le champ d'application de l'article 706-16 du Code de procédure pénale ;
" alors enfin qu'il résulte des dispositions de l'article 305-1 du Code de procédure pénale que la Cour est seule compétente pour se prononcer sur l'exception tirée d'une nullité entachant la procédure qui précède l'ouverture des débats et que dès lors le président ne pouvait, comme il l'a fait, empiéter sur les pouvoirs de la Cour en intervenant dans un domaine réservé à celle-ci par la loi " ;
Attendu que bien que la cour d'assises composée conformément aux dispositions de l'article 698-6 du Code de procédure pénale notamment pour le jugement des crimes énumérés à l'article 706-16 du même Code, ne comporte pas de jury, aucun texte de loi n'exclut les affaires de sa compétence du champ d'application de l'article 305-1 ;
Que, dès lors, les accusés ne sauraient se faire un grief de ce que le président, dans leur propre intérêt, leur ait rappelé, bien qu'il n'en eût pas l'obligation, que s'ils entendaient invoquer des nullités entachant la procédure antérieure, ils devaient le faire à ce moment, à peine de forclusion ;
D'où il suit que le moyen doit être rejeté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 310 du Code de procédure pénale :
" en ce qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats que le ministère public a par deux fois au cours des débats produit des pièces nouvelles ;
" alors que la production de pièces nouvelles relève exclusivement du pouvoir discrétionnaire du président ; que cette règle est d'ordre public et qu'ainsi le ministère public ne pouvait empiéter sur les attributions du président " ;
Attendu que le procès-verbal des débats constate qu'à deux reprises, au cours de ceux-ci, le représentant du ministère public a déposé sur le bureau de la Cour des pièces nouvelles, qu'à chaque fois le président a ordonné une suspension d'audience et a fait délivrer immédiatement copie de ces pièces à toutes les parties et qu'à chaque fois également il a ensuite donné la parole à celles-ci, les accusés étant entendus séparément et les derniers ;
Attendu qu'en cet état, il n'en résulte aucune violation du texte visé au moyen ;
Qu'en effet la parole du ministère public à l'audience est libre ; qu'il est indépendant dans l'exercice de ses fonctions ; qu'il a le droit de dire tout ce qu'il croit convenable au bien de la justice, comme de produire tous les documents et de donner toutes les explications qui lui paraissent utiles, sauf, le droit des parties en cause d'examiner les pièces produites et de combattre les arguments présentés par le ministère public, droit qui a été respecté en l'espèce ;
Qu'ainsi c'est à tort que le moyen reproche au ministère public d'avoir empiété sur les attributions du président ;
Que dès lors le moyen doit être écarté ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 315, 316 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation du principe de l'oralité des débats et des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé de faire droit aux conclusions des accusés X... et Y... sollicitant un supplément d'information ;
" alors, de première part, qu'en fondant sa décision même partiellement sur une pièce ne figurant pas dans la procédure et qui n'avait pas été soumise aux débats contradictoires, la Cour a méconnu les droits de la défense et les principes du procès équitable au sens de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" alors, de seconde part, que les motifs de l'arrêt préjugent du fond en insinuant clairement que l'éventuelle culpabilité des accusés X..., Y... et Z... n'est pas en question alors que celle de A... le serait ;
" alors, de troisième part, que selon les propres énonciations de l'arrêt incident reprises de celles de l'arrêt de renvoi, la complicité d'assassinat aurait consisté à commanditer l'assassinat reproché à X..., Y... et Z... et que dès lors l'arrêt attaqué ne pouvait sans se contredire, pour refuser à certains accusés le supplément d'information qu'ils demandaient et l'accorder à un autre, se borner à affirmer que les faits d'assassinat et de complicité de ce crime reprochés aux accusés ne sont pas absolument indivisibles ;
" alors enfin que le conseil de Y... avait demandé dans ses conclusions qu'il lui soit donné acte de ce qu'il s'associait aux conclusions de A... et que ces dernières conclusions n'étant pas au dossier de la Cour de Cassation, celle-ci n'est pas en mesure de vérifier que l'arrêt a répondu aux conclusions de Y... qui lui étaient soumises " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 316, alinéa 2, du Code de procédure pénale les arrêts incidents ne peuvent préjuger du fond ;
Attendu que statuant sur des conclusions des conseils de X..., Y... et A...- ce dernier non demandeur au pourvoi-tendant à un complément d'information à l'effet d'entendre une personne mise en cause, la Cour a, par arrêt incident inséré au procès-verbal, rejeté les conclusions de X... et de Y..., décidé la disjonction des poursuites contre A..., accusé de complicité d'assassinat, et en ce qui concerne ce dernier seulement, ordonné un supplément d'information ;
Attendu que cet arrêt relève notamment que X... désigne comme commanditaire de l'assassinat qui lui est reproché, un certain B... Edouard dit C... résidant à l'étranger ; que la Cour énonce que " ces déclarations impliquent que ce dernier peut être considéré comme un complice des accusés X..., Y... et Z... ;
Mais attendu que ces énonciations, non indispensables à la motivation de l'arrêt et d'où il résulte que la personne ainsi mise en cause serait complice de X..., Y... et Z..., préjugent la culpabilité de ceux-ci ;
D'où il suit que le moyen doit être accueilli ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le quatrième moyen de cassation :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé du 21 mai 1987 de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, qui a condamné X..., Y... et Z... à 20 ans de réclusion criminelle chacun, ensemble la déclaration de la Cour et du jury et les débats qui l'ont précédée, et pour être à nouveau statué conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises de Paris, composée conformément aux dispositions de l'article 698-6 du Code de procédure pénale.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-83273
Date de la décision : 04/05/1988
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COUR D'ASSISES - Cour d'assises en sa formation prévue par l'article du Code de procédure pénale - Procédure antérieure aux débats - Nullités - Exception - Avertissement du président - Nécessité (non).

1° Les dispositions de l'article 305-1 du Code de procédure pénale relatives au moment où doivent être soulevées les exceptions tirées d'une nullité entachant la procédure qui précède l'ouverture des débats, sont applicables aux affaires soumises aux cours d'assises composées, conformément aux dispositions de l'article 698-6 du même Code, pour le jugement des crimes énumérés en son article 706-16. Dès lors, les accusés ne sauraient se faire un grief de ce que le président, dans leur propre intérêt, leur ait rappelé, bien qu'il n'en eut pas l'obligation que, s'ils entendaient invoquer des nullités entachant la procédure antérieure, ils devaient le faire à ce moment, à peine de forclusion.

2° MINISTERE PUBLIC - Audience - Production de pièces - Etendue de ce droit.

2° COUR D'ASSISES - Débats - Ministère public - Production de pièces - Etendue de ce droit 2° MINISTERE PUBLIC - Cour d'assises - Débats - Production de pièces - Etendue de ce droit.

2° Le ministère public a le droit de produire à l'audience tous les documents qui lui paraissent utiles, sauf le droit de discussion des parties en cause.

3° COUR D'ASSISES - Arrêts - Arrêt incident - Motifs - Motifs préjugeant du fond - Effet.

3° COUR D'ASSISES - Arrêts - Arrêt incident - Motifs - Motifs préjugeant du fond - Définition.

3° Aux termes de l'article 316, alinéa 2, du Code de procédure pénale, les arrêts incidents ne peuvent préjuger du fond. Doit ainsi être annulé l'arrêt qui relève que les déclarations d'un accusé mettant en cause un tiers " impliquent que ce dernier peut être considéré comme un complice des accusés ... ".


Références :

Code de procédure pénale 305-1, 698-6, 706-16
Code de procédure pénale 310
Code de procédure pénale 316 al. 2

Décision attaquée : Cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, 21 mai 1987

CONFER : (1°). Chambre criminelle, 1987-02-11 , Bulletin criminel 1987, n° 69, p. 188 (rejet). CONFER : (2°). Chambre criminelle, 1976-05-13 , Bulletin criminel 1976, n° 150, p. 390 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1976-06-17 , Bulletin criminel 1976, n° 219, p. 573 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1976-11-30 , Bulletin criminel 1976, n° 395, p. 882 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1978-05-30 , Bulletin criminel 1978, n° 178, p. 448 (rejet). (2) CONFER : (3°). Chambre criminelle, 1977-11-19 , Bulletin criminel 1977, n° 343, p. 872 (cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1985-11-06 , Bulletin criminel 1985, n° 348, p. 891 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1986-03-05 , Bulletin criminel 1986, n° 91, p. 225 (cassation). (3)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 mai. 1988, pourvoi n°87-83273, Bull. crim. criminel 1988 N° 193 p. 496
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1988 N° 193 p. 496

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Angevin, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Rabut
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Diemer
Avocat(s) : Avocat :la SCP Delaporte et Briard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:87.83273
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