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18/04/1988 | FRANCE | N°87-81354

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 avril 1988, 87-81354


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- la société Electrolux, partie civile,
contre un arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Colmar, en date du 23 janvier 1987, qui dans les poursuites exercées sur sa plainte à l'encontre de Albert X... des chefs de contrefaçon de marque et usage de marque sans autorisation, après relaxe du prévenu, l'a déboutée de ses demandes
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 422-1° et 2° du Code pénal, des articles 591 et 593 du Code de procédur

e pénale, de l'article 1382 du Code civil, défaut de motifs et manque de base ...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- la société Electrolux, partie civile,
contre un arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Colmar, en date du 23 janvier 1987, qui dans les poursuites exercées sur sa plainte à l'encontre de Albert X... des chefs de contrefaçon de marque et usage de marque sans autorisation, après relaxe du prévenu, l'a déboutée de ses demandes
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 422-1° et 2° du Code pénal, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 1382 du Code civil, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué relaxe en l'espèce X... des délits d'apposition illicite de marque et d'usage sans autorisation de la marque d'autrui, déboutant la société Electrolux de sa constitution de partie civile ;
" aux motifs que les aspirateurs vendus par ledit X... portaient la marque Volta ayant pour titulaire une société Levin faisant partie du même groupe que la société Electrolux ; que ces deux sociétés ont ainsi des liens étroits et que les produits qu'elles diffusent respectivement sont confectionnés de façon identique dans les mêmes usines ; que dans ces conditions la détention et l'usage par chacune de ces deux sociétés de sa propre marque s'assimilerait à une stratégie commerciale ayant simplement les apparences d'une concurrence et ne pouvant de ce fait recevoir la protection de la loi ;
" alors que l'article 422-1° et 2° précité punit toute apposition et toute utilisation de la marque d'autrui sans l'autorisation de celui-ci ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que X... a apposé sur les produits par lui diffusés la marque Electrolux sans l'autorisation du titulaire de cette marque ; qu'en l'état de ces seules constatations, les délits étaient librement fixés par le titulaire de celle-ci sans être soumise, notamment, à l'existence d'une concurrence pour des produits différents entre des sociétés étrangères l'une à l'autre " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que selon les dispositions de l'article 422 (1° et 2°) du Code pénal, seront punis des peines prévues par ce texte ceux qui auront contrefait une marque ou auront frauduleusement apposé une marque appartenant à autrui et ceux qui auront fait usage d'une marque sans autorisation de l'intéressé ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué qu'Albert X..., qui commercialise des appareils électroménagers de marque Volta, a exposé sur son stand implanté dans une foire un panneau publicitaire portant les inscriptions " Volta-Electrolux " et " Aspirateurs n° 1 en vedette Electrolux-Volta " ; qu'ayant persisté, malgré diverses sommations et mises en demeure, à vendre des appareils sous la marque Electrolux sans l'accord du titulaire de celle-ci, Albert X... a été, à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile de la société Electrolux, renvoyé devant la juridiction correctionnelle des chefs de contrefaçon de marque et d'usage de marque sans l'autorisation de son propriétaire ;
Attendu que pour relaxer le prévenu de ces chefs et débouter la partie civile de ses demandes, la cour d'appel, après avoir constaté que la marque Electrolux est protégée en France et que la partie civile est qualifiée pour la défendre, relève que la société " Levin et Cie " qui diffuse les appareils Volta et la société " Electrolux " appartiennent au même groupe économique ; que ces sociétés ont des associés, des gérants, un siège social et un service après-vente communs et vendent, sous des marques différentes, des produits identiques confectionnés dans les mêmes usines ; que les juges en déduisent que, loin d'être concurrentes, ces sociétés organisent, par une dualité fictive des marques, une stratégie commerciale destinée à créer la confusion dans l'esprit du public, d'autant mieux entretenue que l'une pratique la vente directe et l'autre fait appel au commerce spécialisé ; que selon les juges, cette stratégie est à l'opposé des prévisions de l'article 422 du Code pénal, lequel a pour but de proscrire toutes tentatives de confusion entre plusieurs marques vraiment distinctes et appartenant à des personnes réellement différentes et non seulement différentes par un artifice juridique ; qu'ainsi, en rapprochant sur un panneau publicitaire les marques Volta et Electrolux, X... n'a pas contrevenu aux dispositions de l'article 422 (1° et 2°) visé à la prévention ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que le seul fait pour un commerçant de proposer à sa clientèle sous une marque déterminée, et ce sans l'autorisation du titulaire de cette marque, des produits portant une marque distincte constitue les infractions prévues et réprimées par les 1° et 2° de l'article 422 du Code pénal, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
Que la cassation est dès lors encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Colmar, en date du 23 juin 1987, mais en ses seules dispositions civiles, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-81354
Date de la décision : 18/04/1988
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° MARQUE DE FABRIQUE - Usage frauduleux - Domaine d'application - Vente de produits authentiques de marque non contrefaite - Commercialisation par un revendeur hors du circuit de distribution sélective - Délit constitué (non).

1° L'article 422-2° du Code pénal, qui punit ceux qui auront fait usage d'une marque sans l'autorisation de son titulaire, n'a pas pour objet de sanctionner pénalement les acquéreurs ou revendeurs de produits authentiques, même commercialisés au mépris d'un système de distribution sélective, lorsque la marque utilisée n'a pas été contrefaite. Dès lors, fait l'exacte application du texte précité une cour d'appel qui, pour prononcer relaxe du chef de l'article 422-2° du Code pénal, retient que la mise en vente par un revendeur, étranger au circuit de distribution sélective, de produits de parfumerie authentiques revêtus de la marque apposée par le fabricant lui-même, si elle peut être constitutive d'une faute civile, ne saurait caractériser, à raison d'un défaut d'agrément préalable du titulaire de la marque, le délit poursuivi (arrêt n° 1). En revanche, doit être cassé et sans renvoi, plus rien ne restant alors à juger, l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour entrer en voie de condamnation de ce même chef, se borne à relever que le revendeur de produits de parfumerie authentiques portant une marque non contrefaite n'avait pas obtenu, ni même sollicité, l'agrément du propriétaire de la marque (arrêt n° 2).

2° MARQUE DE FABRIQUE - Apposition d'une marque appartenant à autrui - Domaine d'application - Produits de marque proposés sous une marque distincte.

2° Voir le sommaire suivant.

3° MARQUE DE FABRIQUE - Contrefaçon - Domaine d'application - Produits de marque proposés sous une marque distincte.

3° Voir le sommaire suivant.

4° MARQUE DE FABRIQUE - Usage frauduleux - Domaine d'application - Produits de marque proposés sous une marque distincte - Défaut d'autorisation du propriétaire de cette dernière.

4° Selon les dispositions de l'article 422 (1° et 2°) du Code pénal, sont punis ceux qui auront contrefait une marque ou auront frauduleusement apposé une marque appartenant à autrui et ceux qui auront fait usage d'une marque sans autorisation de l'intéressé. Dès lors, le fait pour un commerçant de proposer à sa clientèle sous une marque déterminée, et ce sans l'autorisation du titulaire de cette marque, des produits portant une marque distincte constitue les infractions visées aux dispositions précitées et il n'importe que les sociétés propriétaires de ces marques concurrentes appartiennent au même groupe économique et disposent de structures juridiques et commerciales communes (arrêt n° 3).

5° CASSATION - Pourvoi - Pourvoi du civilement responsable - Absence de production d'un mémoire - Pourvoi du condamné - Effet.

5° La cassation obtenue par le prévenu doit être étendue au civilement responsable qui s'est pourvu même si ce dernier n'a pas produit de moyens (arrêt n° 2).


Références :

Code pénal 422 al. 1
Code pénal 422 al. 2

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (chambre correctionnelle), 23 janvier 1987

CONFER : (1°). Chambre criminelle, 1987-05-18 , Bulletin criminel 1987, n° 200, p. 541 (cassation sans renvoi) ;

Chambre criminelle, 1987-10-05 , Bulletin criminel 1987, n° 335, p. 895 (cassation) ;

Contra : Chambre criminelle, 1977-05-25 , Bulletin criminel 1977, n° 192, p. 476 (rejet). (1) CONFER : (4°). Chambre criminelle, 1987-05-18 , Bulletin criminel 1987, n° 200, p. 541 (cassation sans renvoi) ;

Chambre criminelle, 1987-10-05 , Bulletin criminel 1987, n° 335, p. 895 (cassation) ;

Contra : Chambre criminelle, 1977-05-25 , Bulletin criminel 1977, n° 192, p. 476 (rejet). (1) CONFER : (5°). A rapprocher : Chambre criminelle, 1960-05-04 , Bulletin criminel 1960, n° 240, p. 498 (cassation partielle) ;

Chambre criminelle, 1963-05-08 , Bulletin criminel 1963, n° 169, p. 344 (sursis à statuer). (2)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 avr. 1988, pourvoi n°87-81354, Bull. crim. criminel 1988 N° 163 p. 420
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1988 N° 163 p. 420

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ledoux
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Bayet
Avocat(s) : Avocats :la SCP Riché, Blondel et Thomas-Raquin (arrêts n°s 1, 2 et 3), M. Guinard (arrêt n° 1), la SCP Tiffreau et Thouin-Palat (arrêts n°s 1 et 2)

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:87.81354
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