REJET du pourvoi formé par X..., partie civile, contre un arrêt de la cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 5 juin 1987, qui, dans les poursuites exercées à sa requête contre Y..., Z..., V..., T... et S... pour diffamation publique envers un particulier, a prononcé la nullité de la poursuite et l'a débouté de sa demande.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 29 et suivants, 50 de la loi du 29 juillet 1881, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement de première instance, qui avait prononcé la nullité du réquisitoire introductif et de tous les actes de procédure qui l'ont suivi, et débouté la partie civile de ses demandes ;
" aux motifs que l'omission, dans la plainte, de l'article 32, § 1, qui réprime le délit poursuivi, qui est la diffamation publique envers les particuliers, et l'indication des articles 30 et 33, qui sont tout à fait étrangers aux poursuites, permettent de constater que la nullité du réquisitoire introductif, qui qualifie mais n'articule pas, ne peut être réparée par la plainte avec constitution de parties civiles, qui articule mais ne qualifie pas ;
" alors que, d'une part, la plainte de la victime de diffamation ou d'injures publiques ne relève pas des dispositions des articles 50 et 53 ; qu'il en résulte que si la partie civile est tenue d'articuler les faits dont elle entend qu'ils soient poursuivis, elle n'est tenue ni de qualifier ces faits, ni de viser les textes dont l'application est requise ;
" alors que, d'autre part, dans sa plainte avec constitution de partie civile, le visa de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, cité à propos des passages et des termes diffamatoires expressément reproduits, ne pouvait laisser aux personnes poursuivies aucun doute sur la nature du délit qui leur était reproché, nonobstant le visa de textes surabondants ou l'omission du texte édictant les peines applicables ; qu'ainsi, la plainte avec constitution de partie civile avait mis en oeuvre l'action publique sans que l'insuffisance alléguée des mentions contenues dans le réquisitoire introductif puisse vicier la procédure ;
" alors, enfin, que dès lors l'incertitude ne peut subsister dans l'esprit des prévenus quant aux infractions dont ils ont à répondre, il n'est pas nécessaire que le texte incriminé soit littéralement reproduit dans le réquisitoire, ou la citation ; il suffit qu'il y soit désigné avec précision, notamment par les premier et dernier mots " ;
Attendu que X..., directeur adjoint de l'Union départementale des sociétés mutualistes, s'est constitué partie civile le 16 septembre 1985 devant le juge d'instruction en portant plainte " pour diffamation publique ", délit prévu et réprimé par les articles 29, 30, 33, 35 et 42 de la loi du 29 juillet 1881, à la suite de la diffusion par le syndicat Force Ouvrière, le 30 août 1985, d'un tract retenu à raison de trois passages expressément articulés ;
Qu'après consignation de la somme fixée en application de l'article 88 du Code de procédure pénale, le procureur de la République a pris le 12 décembre 1985 un réquisitoire introductif faisant référence à la plainte et à l'ensemble du tract identifié par ses premiers et ses derniers mots, retenant la qualification de diffamation publique envers un particulier et visant les articles 23, alinéa 1er, 32 et 42 de la loi du 29 juillet 1881 applicables aux poursuites ;
Attendu que pour déclarer nuls ce réquisitoire et les actes de la procédure ultérieurs la juridiction du second degré relève que la plainte ne contient pas le visa exact des textes applicables ni la qualification des faits et que le réquisitoire introductif, qui n'articule pas les faits mais se réfère seulement à l'ensemble du tract, " ne peut être réparé par la plainte " ;
Attendu qu'en cet état, abstraction faite de motifs erronés, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'en effet, d'une part, la plainte de la partie civile ne répondant pas aux exigences de l'article 50 de la loi susvisée était nulle et n'avait pu mettre en mouvement l'action publique ;
Que, d'autre part, s'il est vrai que le réquisitoire introductif aurait pu venir au soutien de cette plainte, encore eût-il fallu qu'il ait été pris dans les délais de la prescription édictée par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, ce qui n'a pas été le cas, la constitution de partie civile n'ayant pu par elle-même, en raison de sa nullité, interrompre le cours de la prescription ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.