Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 2 novembre 1982), que, selon bail authentique du 26 décembre 1972, M. Arthur X... et son épouse, née Julia A..., ont donné en location à M. Z... une propriété agricole de 30 hectares qu'ils avaient cultivée jusqu'alors ; que ce bail conclu pour une durée de 25 ans prévoyait qu'il serait renouvelé " par période de 9 ans minimum sans pouvoir y mettre fin chaque année ", " les bailleurs déclarant renoncer à délivrer congé 4 ans avant la fin du bail, cette renonciation engageant eux-mêmes et leurs héritiers " ; qu'après le décès de la bailleresse survenu le 12 avril 1980, ses deux enfants, Albert X... et Geneviève X..., épouse Y..., invoquant les troubles mentaux dont Mme A..., épouse X..., aurait été atteinte lors de la signature du bail et la non-conformité de la clause de renouvellement au regard de l'article 870-25 du Code rural ont assigné M. Arthur X... et M. Z... pour faire annuler le bail ; que M. Arthur X... a sollicité l'annulation de la seule clause de renouvellement ;
Attendu que M. Albert X... fait grief à l'arrêt d'avoir, pour le débouter de sa demande en nullité du bail fondée sur l'existence d'un trouble mental de la bailleresse, retenu que ce bail ne contenait aucune énonciation incohérente ou illogique de nature à établir un tel trouble, alors, selon le moyen, " qu'en se prononçant par ce seul motif, qui procède d'une conception limitative, injustifiée, des possibles manifestations du " trouble mental " envisagé par la loi, et en s'abstenant, en conséquence, de rechercher, comme il lui était demandé de le faire, si la fixation d'une durée du bail anormalement longue, résultant, au surplus, de la combinaison de deux clauses dont l'une a été reconnue illicite par l'arrêt attaqué lui-même, n'était pas de nature à entraîner, au préjudice des enfants et au profit d'une personne étrangère à la famille, des conséquences telles qu'elles ne pouvaient pas avoir été voulues par la bailleresse, dont l'absence de discernement et de consentement sains était ainsi démontrée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 489 et 489-1 du Code civil " ;
Mais attendu qu'après avoir exactement rappelé que, selon l'article 489-1 du Code civil, un acte ne peut être attaqué, après la mort de son auteur, pour cause d'insanité d'esprit que s'il porte en lui-même la preuve d'un trouble mental, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si la conclusion d'un bail de longue durée était de nature à porter préjudice aux enfants de la bailleresse et qui a constaté l'absence d'énonciation incohérente ou illogique dans le bail de nature à constituer la preuve d'un trouble mental, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir réputé non écrite la clause relative au renouvellement du bail litigieux, alors, selon le moyen, que, " si, aux termes de l'article 870-25, alinéa 6, du Code rural, les parties ont la faculté, pour les baux conclus pendant 25 ans au moins, de prévoir une tacite reconduction d'année en année, la loi régissant alors la date d'effet de congé, ce texte n'interdit pas aux parties de prévoir des conditions différentes de renouvellement du bail dès lors que ces dernières sont conformes au 2e alinéa dudit article, qu'ainsi, c'est à tort que la cour d'appel a estimé que les parties ne pouvaient prévoir, dès la conclusion du bail, que les conditions de renouvellement prévues par l'alinéa 6 de l'article 870-25 qui ne concerne que la tacite reconduction, l'ordre public n'imposant aucune limitation aux droits des bailleurs " (sic) ;
Mais attendu que l'arrêt, qui relève que les bailleurs se sont interdit de donner congé pour l'expiration du bail et retient justement que la clause qui stipule cette interdiction restrictive des droits des bailleurs doit être réputée non écrite est, par ces seuls motifs, légalement justifié de ce chef ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu que Albert X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que la nullité de la clause du bail déclarée non écrite ne devait pas entraîner la nullité du bail en son entier, alors, selon le moyen, " que la durée d'un bail constituant l'un des éléments essentiels de celui-ci, la nullité de la clause litigieuse, qui participait à la détermination de la durée du bail, devait nécessairement être étendue à la totalité du bail lui-même ; que, pour avoir décidé le contraire, l'arrêt attaqué procède d'une violation des articles 1134 et 1709 du Code civil " ;
Mais attendu qu'une clause réputée non écrite étant censée n'avoir jamais été rédigée, l'arrêt, en décidant qu'elle ne peut entraîner la nullité du bail lui-même, ne viole aucun texte, d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi incident