CASSATION sur le pourvoi formé par X..., contre un arrêt de la cour d'appel de Nancy, chambre correctionnelle, en date du 29 avril 1986, qui pour diffamation l'a condamné à 4 000 francs d'amende et à des réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 49, 191, 591 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et des principes généraux du droit :
" en ce que l'arrêt attaqué a été rendu par la cour d'appel de Nancy où siégeaient M. Lilti, président, et MM. Moulet et Depretz, conseillers assesseurs ;
" alors que le conseiller Moulet ayant participé à l'arrêt rendu le 12 novembre 1985 par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nancy et ayant ainsi connu des faits ayant donné lieu au renvoi du prévenu devant la juridiction correctionnelle pour diffamation publique, l'arrêt attaqué ne satisfait pas à l'exigence d'impartialité énoncée par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est contraire aux dispositions de l'article 49 du Code de procédure pénale " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que ne peuvent faire partie de la chambre correctionnelle d'une cour d'appel les magistrats qui, dans l'affaire soumise à cette juridiction, ont participé à un arrêt de la chambre d'accusation dans lequel il a été discuté et statué sur des faits qui ont provoqué pour partie le renvoi des prévenus devant le tribunal correctionnel ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à la suite d'une information ouverte sur une plainte avec constitution de partie civile de Y... du chef de diffamation contre X... le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu partiel qui, sur appel de la partie civile a été soumise à la juridiction du second degré ;
Que par arrêt du 12 novembre 1985 la chambre d'accusation, infirmant l'ordonnance critiquée a décidé le renvoi devant le tribunal correctionnel pour un passage de l'écrit incriminé non retenu par cette décision mais visé dans l'acte initial de poursuite ;
Que sur appels ultérieurs du prévenu et du ministère public contre le jugement ayant condamné X... à raison de l'ensemble des propos diffamatoires relevés aussi bien par le magistrat instructeur que par la chambre d'accusation la cour d'appel a confirmé ledit jugement condamnant le demandeur à 4 000 francs d'amende et 1 franc de dommages-intérêts pour diffamation ;
Mais attendu que l'un des magistrats ayant composé la chambre d'accusation qui avait rendu l'arrêt du 12 novembre 1985 a également fait partie de la chambre correctionnelle dont l'arrêt est attaqué ; qu'il en résulte que la composition de cette juridiction n'était pas régulière au regard du principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 29 avril 1986 et, pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Colmar.