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20/10/1987 | FRANCE | N°87-84729

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 octobre 1987, 87-84729


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Alain,
inculpé de vol avec port d'arme,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles du 23 juillet 1987 qui a rejeté sa demande de mise en liberté.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, § 1, 3 et 4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 144 à 148, 83 et 186, alinéas 1 et 3, et 186-1, 171, 201, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de b

ase légale :
" en ce que la chambre d'accusation a rejeté la demande de mise e...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Alain,
inculpé de vol avec port d'arme,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles du 23 juillet 1987 qui a rejeté sa demande de mise en liberté.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, § 1, 3 et 4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 144 à 148, 83 et 186, alinéas 1 et 3, et 186-1, 171, 201, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que la chambre d'accusation a rejeté la demande de mise en liberté directement formée par l'inculpé, ensemble l'exception de nullité de titre de détention de X... ;
" aux motifs qu'il existe des présomptions sur la participation de X... à un vol à main armée en date du 3 octobre 1984 dans une agence bancaire ayant donné lieu à une fusillade et à l'inculpation finale de 13 personnes ; qu'il est reproché à X... d'avoir pris en location, par l'intermédiaire de Y..., une camionnette retrouvée devant l'agence et qui devait servir à l'exécution du vol prévu ; que les serrures de cette camionnette ont été retrouvées intactes lors même que Y... en avait déclaré le vol le 3 octobre à 9 heures ; qu'il en résulte que ce véhicule était bien en la possession de l'inculpé au moment des faits bien que Y... ait modifié sa déclaration dans un sens plus favorable à X... le 16 juin 1986 ; qu'aucune violation de l'article 5, § 3, de la Convention européenne de sauvegarde ne peut être invoquée ; qu'en effet l'inculpé a été traduit devant un magistrat judiciaire ; que les faits sont de nature criminelle ; que le système de défense de l'intéressé est appuyé sur des explications qui ne pourraient être rapidement contrôlées que s'il révélait les noms des personnes qui sont censées pouvoir avaliser ses dires, mais dont il tait soigneusement les noms, prenant ainsi délibérément le parti de laisser piétiner l'information ; que la nécessité d'entendre les témoins en cause sans qu'ils soient l'objet de pression explique la nécessité du maintien en détention ; qu'on ne peut se contenter de déplorer la stagnation de l'information ; qu'il y a lieu de recommander au juge d'instruction de hâter vigoureusement désormais le règlement définitif de cette procédure ; que sur la nullité de procédure par ailleurs soulevée par l'inculpé, l'article 5-4 de la Convention européenne " ne confère pas pour autant à la chambre d'accusation le pouvoir de se saisir desdites nullités supposées sur le seul fondement d'une demande de mise en liberté " ;
" que les prescriptions de l'article 171 du Code de procédure pénale constituent un préalable obligatoire ; que ce n'est qu'en cas de refus explicite ou implicite auxdites prescriptions qu'il pourrait être fait référence à l'article 5-4 de la Convention ; qu'en outre, l'inculpé est impliqué dans des faits de nature criminelle opérés par une bande organisée dont les membres n'ont pas hésité à s'en prendre aux fonctionnaires de police et qui, pour la plupart, contestent toute participation au vol ; que des confrontations sont à envisager ; que le butin n'a pas été retrouvé ; que X... a déjà été condamné entre 1970 et 1979 ; qu'il n'a pu être appréhendé que le 13 septembre 1985 ; que la peine encourue est grave ; que les garanties de représentation de l'inculpé sont insuffisantes ; qu'il est à craindre qu'il cherche à se soustraire à l'action de la Justice ; que la réitération de l'infraction est à craindre ; que la détention provisoire est nécessaire (arrêt analyse page 3 à 6) ;
" alors que, d'une part, le délai prévu par l'article 5-3 de la Convention européenne de sauvegarde relativement au maintien en détention cesse d'être raisonnable en cas de lenteur anormale de l'instruction ; que l'inculpé, placé en détention provisoire le 13 septembre 1985 et dont les dernières déclarations tendant à sa mise hors de cause devant le juge d'instruction, le 16 juin 1986, n'ont fait l'objet d'aucune vérification durant plus d'un an, est fondé au terme d'une détention longue de 22 mois à solliciter sa mise en liberté ; qu'après avoir déploré la " stagnation de l'information ", la chambre d'accusation s'est bornée à recommander au juge d'instruction de " hâter vigoureusement désormais le règlement définitif de la procédure " quand elle devait prononcer la mise en liberté de l'inculpé, seule sanction adéquate suivant l'article 5-3 de la Convention ;
" alors que, d'autre part, la chambre d'accusation s'est bornée à affirmer l'existence d'un risque de suppression des preuves, de pression sur les témoins, d'un danger de fuite et de réitération de l'infraction sans rechercher si lesdits motifs étaient " pertinents et suffisants " au sens de l'article 5-3 de la Convention pour le maintien en détention de X... au regard des éléments concrets de l'espèce ;
" alors que, de troisième part, la légalité du titre de détention est un moyen d'ordre public qui n'est pas soumis au préalable de l'article 171 du Code de procédure pénale ;
" alors enfin que l'article 83 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction antérieure à la loi du 10 décembre 1985, exige que la désignation du magistrat instructeur intervienne pour chaque information et il ne peut y être suppléé par un tableau de roulement non prévu par la loi ; qu'il suit de là que la désignation suivant tableau de roulement du 8 juin 1984 du juge d'instruction était nulle ensemble le mandat de dépôt incompétemment délivré par ledit magistrat le 13 septembre 1985 ; qu'ainsi X... devait être remis en liberté " ;
Sur les troisième et quatrième branches réunies du moyen :
Attendu que la nullité alléguée qui résulterait de ce que le juge d'instruction chargé de l'information n'aurait pas été désigné conformément aux dispositions de l'article 83 du Code de procédure pénale concerne la régularité de la procédure et comme telle ne saurait être examinée à l'occasion d'une demande de mise en liberté présentée directement à la chambre d'accusation en vertu de l'article 148-4 du Code de procédure pénale ;
Qu'en effet en permettant aux inculpés de saisir directement la chambre d'accusation d'une demande de mise en liberté dans le cas qu'il prévoit, ce texte, dont les dispositions sont limitatives, leur a attribué un droit exceptionnel dont ils ne sauraient s'autoriser pour faire juger à l'occasion de cette procédure spéciale des questions étrangères à son unique objet ;
D'où il suit que le moyen, en ses troisième et quatrième branches, ne peut être accueilli ;
Sur la première branche du moyen :
Vu les articles visés audit moyen ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit être motivé ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que la chambre d'accusation devant laquelle il était invoqué qu'aux termes de l'article 5 § 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales toute personne détenue a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou d'être libérée a énoncé en premier lieu " que c'est l'inculpé qui, par son système de défense, a pris le risque de laisser ainsi piétiner l'information " et, en second lieu, " qu'on ne peut se contenter de déplorer la stagnation de l'information ", puis, " qu'il y a lieu de recommander au juge d'instruction de hâter vigoureusement désormais le règlement de la procédure " ;
Mais attendu que par ces motifs contradictoires qui énoncent, les uns, que l'inculpé est responsable de la durée de l'information dont il se plaint, les autres, que cette information n'a pas été conduite avec la célérité voulue, les juges n'ont pas justifié leur décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles du 23 juillet 1987 et, pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-84729
Date de la décision : 20/10/1987
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CHAMBRE D'ACCUSATION - Détention provisoire - Demande de mise en liberté - Article du Code de procédure pénale - Portée - Question étrangère à son unique objet (non).

CHAMBRE D'ACCUSATION - Arrêts - Arrêt statuant sur la détention provisoire - Motifs - Question étrangère à la détention provisoire (non) * DETENTION PROVISOIRE - Demande de mise en liberté - Chambre d'accusation saisie en application de l'article du Code de procédure pénale - Portée - Question étrangère à son unique objet (non).

1° En permettant aux inculpés de saisir directement la chambre d'accusation d'une demande de mise en liberté dans le cas qu'il prévoit, l'article 148-4 du Code de procédure pénale, dont les dispositions sont limitatives, leur a attribué un droit exceptionnel dont ils ne sauraient s'autoriser pour faire juger, à l'occasion de cette procédure spéciale, des questions étrangères à son unique objet

2° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 5 - 3 - Détention provisoire - Délai raisonnable - Chambre d'accusation - Demande de mise en liberté - Rejet - Motifs contradictoires.

CHAMBRE D'ACCUSATION - Arrêts - Arrêt statuant sur la détention provisoire - Convention européenne des droits de l'homme - Article 5 - paragraphe 3 - Délai raisonnable - Motifs contradictoires.

2° Dès lors que l'inculpé réclamait sa mise en liberté en faisant valoir que celle-ci devait intervenir en raison du non-respect du délai raisonnable prévu par l'article 5, paragraphe 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, la chambre d'accusation qui rejette cette demande par des motifs contradictoires sur la durée de la procédure ne donne pas de base légale à sa décision


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (chambre d'accusation), 23 juillet 1987

CONFER : (1°). Chambre criminelle, 1961-01-06 , Bulletin criminel 1961, n° 6, p. 9 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1971-08-07 , Bulletin criminel 1971, n° 247, p. 612 (cassation partielle) ;

Chambre criminelle, 1983-07-23 , Bulletin criminel 1983, n° 225, p. 575 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1987-05-12 , Bulletin criminel 1987, n° 195, p. 527 (cassation) ;

à rapprocher : Chambre criminelle, 1987-10-20 , Bulletin criminel 1987, n° 357, p. 953 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 oct. 1987, pourvoi n°87-84729, Bull. crim. criminel 1987 N° 356 p. 950
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 356 p. 950

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Berthiau, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Galand
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Zambeaux
Avocat(s) : Avocat :M. Bouthors.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:87.84729
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