Sur le moyen unique du pourvoi principal de la Compagnie de prospection géophysique et sur le premier moyen du pourvoi incident de la société Réguillon : .
Attendu que, le 10 janvier 1978, Thierry Y... et Serge X..., salariés de la société Réguillon, ont été victimes d'un accident mortel du travail, par suite de l'explosion prématurée d'une charge de dynamite ;
Attendu que la société Réguillon et la Compagnie de prospection géophysique, à la disposition de laquelle la première entreprise avait mis ses salariés, font grief à l'arrêt attaqué (Chambéry, 2 décembre 1985) d'avoir décidé que l'action en reconnaissance de faute inexcusable, engagée par les ayants cause des victimes, n'était pas prescrite, alors, d'une part, que la procédure de conciliation devant la Caisse primaire n'interrompt la prescription biennale que si elle est introduite dans les formes de l'article 2244 du Code civil, par une citation en justice, un commandement ou une saisie, en sorte que la cour d'appel, en affirmant que la saisine de l'organisme social n'était soumise à aucune condition de forme, a violé le texte susvisé ainsi que l'article L. 465 du Code de la sécurité sociale (ancien) ; et alors, d'autre part, que l'engagement, dans les formes légales de la procédure de conciliation est une cause d'interruption du délai de deux ans, dans lequel doit être engagée l'action en majoration de rente, en sorte qu'en énonçant que la procédure de saisine de la caisse, en vue de cette procédure de conciliation, était une cause de suspension du délai de deux ans, la cour d'appel a violé l'article L. 468 du Code de la sécurité sociale (ancien) ;
Mais attendu que la cour d'appel relève qu'au plus tard le 10 février 1978 les consorts Y... et X... avaient saisi la caisse primaire d'assurance maladie à laquelle leurs auteurs étaient affiliés pour que celle-ci tente de parvenir à un accord amiable entre toutes les parties concernées, tant sur l'existence de la faute inexcusable reprochée à l'employeur que sur le montant des majorations de rente et des indemnités complémentaires ; que cette procédure s'est terminée par un constat d'échec, matérialisé dans un procès verbal du 3 avril 1980 ; qu'il résulte du rapprochement de ces dates que le cours de la prescription biennale a été valablement interrompu par cette initiative qui, constituant en la matière un préalable à l'introduction d'une instance contentieuse, équivalait à la citation en justice visée à l'article 2244 du Code civil et qu'elle n'a recommencé à courir que le 3 avril 1980, en sorte que l'action des consorts Z... n'était pas prescrite lorsque, le 27 juin 1980, ils ont saisi la commission de première instance ; que la décision de la cour d'appel, écartant l'exception de prescription, se trouve ainsi justifiée ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi principal et le premier moyen du pourvoi incident ;
Mais sur le second moyen du pourvoi incident, formé par la société Réguillon :
Vu l'article L. 468 du Code de la sécurité sociale (ancien) devenu l'article L. 452-2 dans la nouvelle codification ;
Attendu que l'arrêt attaqué a condamné la société Réguillon à payer aux ayants cause des victimes les majorations de rente qu'il allouait, sur le fondement de la faute inexcusable retenue à la charge de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi alors que le service de ces majorations est assuré par la Caisse primaire d'assurance maladie, qui en récupère le montant contre l'employeur par la voie de cotisations complémentaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la cassation à intervenir n'implique pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond ;
PAR CES MOTIFS :
Vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;
CASSE ET ANNULE, mais uniquement en ce qu'il a condamné la société Réguillon à verser les majorations de rente aux ayants cause des victimes, l'arrêt rendu le 2 décembre 1985, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi