CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Michèle, épouse Y...,
contre un arrêt de la cour d'appel de Limoges, chambre correctionnelle, en date du 26 septembre 1986 qui, ayant rejeté des exceptions de nullité de la procédure, l'a condamnée à 9 amendes d'un montant de 40 francs chacune pour infractions au Code du travail.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 212-6 et R. 261-4 du Code du travail, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mme X... coupable de neuf contraventions pour avoir eu recours au contingent d'heures supplémentaires sans information préalable de l'inspecteur du Travail et l'a condamnée à la peine de neuf amendes de 40 francs ;
" aux motifs qu'il est constant que le rédacteur du procès-verbal, fondement des poursuites, s'est limité à indiquer que neuf salariés étaient concernés par l'infraction sans en préciser les noms ; que la mention des noms des salariés concernés par l'infraction n'est pas un élément indispensable de preuve ; que son omission ne saurait constituer une cause de nullité que ne prévoit aucune disposition légale sur la matière ; que le premier juge a, à tort, prononcé une seule condamnation alors que neuf salariés étaient concernés par l'infraction relevée ;
" alors que les juges, qui se sont abstenus de préciser l'identité des neuf personnes irrégulièrement employées, n'ont pas donné de base légale à leur décision en prononçant neuf amendes de 40 francs " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit être motivé, que l'insuffisance des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Michèle X..., épouse Y..., gérante de la SARL X..., a été poursuivie devant la juridiction répressive sur le fondement de l'article L. 212-6 du Code du travail, pour n'avoir pas informé l'inspection du Travail des heures supplémentaires effectuées en 1984 par neuf de ses salariés dans la limite fixée par le décret n° 82-101 du 27 janvier 1982 ;
Attendu que pour déclarer la prévention établie, condamner Michèle X... à neuf amendes d'un montant de 40 francs chacune et écarter l'exception soulevée avant tout débat au fond par la défense, qui avait conclu à la nullité du procès-verbal base de la poursuite, au motif notamment que ledit procès-verbal ne contenait pas le relevé nominatif des salariés concernés par l'infraction, la cour d'appel énonce que les mentions relatives à l'identité de ces salariés ne sont pas des éléments indispensables de preuve ; que leur omission ne saurait constituer une cause de nullité que ne prévoit aucune disposition légale et qu'il convient, ainsi que l'a fait le premier juge, de rejeter l'exception présentée ;
Mais attendu que si la cour d'appel a, à juste titre, estimé que l'absence de relevé nominatif des salariés aux services desquels la prévenue avait eu irrégulièrement recours n'était pas de nature à entraîner la nullité du procès-verbal en cause, l'article L. 611-10 du Code du travail n'imposant pas de formes particulières pour la rédaction d'une telle pièce, il appartenait cependant à ladite Cour, afin d'appliquer exactement les dispositions de l'article R. 261-4 du même Code qui prévoit que l'amende sanctionnant la contravention définie par l'article L. 212-6 du Code du travail est appliquée autant de fois qu'il y a d'ouvriers indûment employés, de déterminer par tout moyen de preuve et de relever expressément quels salariés étaient en l'espèce concernés par l'infraction ; que faute de l'avoir fait, les juges du second degré n'ont pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la légalité de leur décision ;
Qu'il s'ensuit que le moyen doit être accueilli et que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la cour d'appel de Limoges en date du 26 septembre 1986, et pour qu'il soit à nouveau prononcé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Riom.