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24/06/1987 | FRANCE | N°87-82333

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 juin 1987, 87-82333


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Roger,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 6 avril 1987, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de la Guyane sous l'accusation de détournement de deniers publics ou privés par dépositaire public.
LA COUR,
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 76, 56 et 59, 206, 593 et 202 du Code de procédure pénale, 169 et 184 du Code pénal, violation des droits de la défense, défaut et insuffisance de motifs, manque de ba

se légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité d...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Roger,
contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 6 avril 1987, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de la Guyane sous l'accusation de détournement de deniers publics ou privés par dépositaire public.
LA COUR,
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 76, 56 et 59, 206, 593 et 202 du Code de procédure pénale, 169 et 184 du Code pénal, violation des droits de la défense, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la procédure tirée par le demandeur du fait qu'au cours d'une enquête préliminaire, une perquisition suivie de saisie de documents a été effectuée le 14 juin 1982 dans le bureau personnel du président de la chambre des métiers de la Guyane, exposant, en son absence et sans son assentiment ;
" aux motifs que la perquisition et les saisies opérées le 14 juin 1982 l'ont été à la chambre des métiers de Guyane, dans le bureau du président de cet organisme, ce local, mis à la disposition du président ès qualités, ne pouvant être assimilé à une extension de son domicile, et en l'absence du président, le vice-président étant valablement fondé à autoriser une perquisition à laquelle il a assisté, dans un local relevant de son autorité ;
" alors que, d'une part, le bureau affecté à l'activité du président de la chambre des métiers, représentant élu des artisans et non investi par l'autorité publique, constitue un domicile au sens de l'article 184 du Code pénal, de telle sorte que, seul, l'assentiment exprès du président peut autoriser les enquêteurs à y pratiquer perquisition et saisies ;
" alors que, d'autre part, faute d'avoir reçu du président en fonction mission expresse de le représenter, le vice-président n'était pas habilité, en l'absence momentanée de l'intéressé, à donner à la place de ce dernier le consentement prévu par l'article 76 du Code de procédure pénale " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles 56 et 76 du Code de procédure pénale que s'il n'a reçu mandat du juge d'instruction, un officier de police judiciaire ne peut, sans l'assentiment exprès de la personne chez qui l'opération a lieu, légalement procéder à une perquisition ou à une saisie qu'en cas de crime ou de délit flagrants ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de la procédure que des officiers de police judiciaire, agissant dans le cadre d'une enquête préliminaire suivie contre Roger X... du chef " d'escroquerie, abus de confiance " ont effectué une visite domiciliaire dans les locaux de la chambre des métiers de la Guyane à Cayenne après avoir obtenu l'autorisation du vice-président de cet organisme ; qu'au cours de cette opération, ils ont pénétré dans le bureau du président Roger X..., et ce grâce à une clef fournie par Henri Y..., secrétaire général ; que divers documents ont été saisis à cette occasion ;
Attendu que pour refuser d'annuler lesdites perquisition et saisie, l'arrêt attaqué énonce " qu'elles ont été opérées à la chambre des métiers de Guyane dans le bureau du président de cet organisme, ce local mis à la disposition du président ès qualités et non " intuitu personae " ne pouvant de ce fait être assimilé à une extension de son domicile et en l'absence du président, le vice-président étant valablement fondé à autoriser une perquisition à laquelle il a assisté dans un local relevant alors de son autorité ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi alors que le mot domicile ne signifie pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement mais encore le lieu où, qu'elle y habite ou non, elle a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être accueilli ;
Et sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation de l'article 169 du Code pénal, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné un supplément d'information aux fins de procéder à l'inculpation de Roger X... du chef du crime de détournement de deniers publics par un dépositaire public, fait prévu par l'article 169 du Code pénal et à son interrogatoire au fond sur ce nouveau chef d'inculpation ;
" aux motifs que les chambres des métiers sont des établissements publics représentatifs d'un groupe socio-professionnel de même nature juridique que les chambres de commerce et d'industrie et les chambres d'agriculture ; que leurs décisions ont le caractère de décisions administratives et leurs fonds sont des deniers publics ; que, trésorier jusqu'en novembre 1982, X... était à la fois ordonnateur et payeur et doit être considéré comme un dépositaire public recevant et gérant des sommes qu'il détenait en vertu d'un titre légal par l'effet d'une sorte de confiance nécessaire, cette qualité n'impliquant pas nécessairement pour l'intéressé d'avoir le statut de fonctionnaire qu'il n'avait évidemment pas en raison du caractère électif de son mandat ;
" alors que la qualité de fonctionnaire constitue un élément essentiel du crime de détournement de deniers publics par un dépositaire public ; que, par suite, dès lors que le demandeur a été nommé à ses fonctions de président et de trésorier de la chambre des métiers de la Guyane par voie d'élections, et qu'il disposait, à ce titre, de pouvoirs autonomes de gestion des subventions de l'Etat destinées à faire face à des dépenses soumises au vote de l'assemblée générale de l'organisme composé de représentants des artisans, il ne pouvait être, à défaut d'être investi de la moindre portion d'autorité publique, considéré comme un dépositaire public au sens de l'article 169 du Code pénal ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les détournements et soustractions que réprime l'article 169 du Code pénal sont ceux commis dans l'exercice de leurs fonctions par les dépositaires ou comptables publics, sur les deniers ou effets placés entre leurs mains ; que la qualité de fonctionnaire constitue un élément essentiel de l'infraction ;
Attendu que pour déclarer qu'il résultait contre Roger X... charges suffisantes d'avoir à Cayenne courant 1978, 1979, 1980 et 1981 détourné des deniers publics et ordonner son renvoi devant la cour d'assises, l'arrêt attaqué énonce que l'intéressé qui était au moment des faits reprochés président et qui faisait fonction de trésorier de la chambre des métiers, établissement public, devait être considéré comme un dépositaire public au sens où l'entend l'article 169 du Code pénal, " cette qualité n'impliquant pas nécessairement pour l'intéressé d'avoir le statut de fonctionnaire qu'il ne possédait évidemment pas en raison du caractère électif de son mandat " ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi alors qu'il apparaissait clairement de ses propres constatations que X... n'avait pas été investi de ses fonctions par une décision de l'autorité publique, l'arrêt a méconnu les principes ci-dessus énoncés ;
Qu'ainsi la cassation est encore encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Fort-de-France du 6 avril 1987, et pour qu'il soit à nouveau statué à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Fort-de-France autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-82333
Date de la décision : 24/06/1987
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ENQUETE PRELIMINAIRE - Perquisition - Validité - Consentement exprès de l'intéressé - Nécessité.

1° Il résulte des dispositions combinées des articles 56 et 76 du Code de procédure pénale que s'il n'a pas reçu mandat du juge d'instruction, un officier de police judiciaire ne peut, sans l'assentiment exprès de la personne chez qui l'opération a lieu, légalement procéder à une perquisition ou à une saisie qu'en cas de crime ou de délit flagrants

2° ENQUETE PRELIMINAIRE - Perquisition - Domicile - Définition - Bureau du président d'une chambre des métiers.

2° Le terme domicile, au sens des articles 56 et 76 du Code de procédure pénale, ne signifie pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement mais encore le lieu où, qu'elle y habite ou non, elle a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux

3° DETOURNEMENT PAR DEPOSITAIRE PUBLIC - Eléments constitutifs - Qualité de fonctionnaire - Président d'une chambre des métiers (non).

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - Dépositaires publics - Qualité - Président d'une chambre des métiers (non).

3° La qualité de fonctionnaire constitue un élément essentiel du crime de détournement ou soustraction des deniers publics ou privés ; n'a pas cette qualité un président de chambre des métiers qui n'a pas été investi de ses fonctions par une décision de l'autorité publique


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 06 avril 1987

CONFER : (1°). Chambre criminelle, 1980-05-30 Bulletin criminel 1980, n° 165, p. 411 (cassation)

arrêt cité. (2°). Chambre criminelle, 1982-10-13 Bulletin criminel 1982, n° 218, p. 597 (cassation), et les arrêts cités. (3°). Chambre criminelle, 1952-12-11 Bulletin criminel 1952, n° 299, p. 493 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1966-02-23 Bulletin criminel 1966, n° 67, p. 146 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 jui. 1987, pourvoi n°87-82333, Bull. crim. criminel 1987 N° 267 p. 724
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 267 p. 724

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Angevin, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Clerget
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Malibert
Avocat(s) : Avocat :la SCP Nicolay

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:87.82333
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