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28/04/1987 | FRANCE | N°86-90357

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 avril 1987, 86-90357


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Dominique, tant en son nom personnel qu'en qualité d'administrateur des biens de ses enfants mineurs,
- Y... Marie-José, épouse X...,
- X... Daniel, tant en son nom personnel qu'en qualité d'administrateur des biens de ses enfants mineurs,
contre un arrêt de la cour d'appel d'Angers, 2e Chambre, en date du 17 décembre 1985, qui, dans la procédure suivie contre Z... du chef d'homicides et blessures involontaires et de contraventions au Code de la route, s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu le

s mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cas...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Dominique, tant en son nom personnel qu'en qualité d'administrateur des biens de ses enfants mineurs,
- Y... Marie-José, épouse X...,
- X... Daniel, tant en son nom personnel qu'en qualité d'administrateur des biens de ses enfants mineurs,
contre un arrêt de la cour d'appel d'Angers, 2e Chambre, en date du 17 décembre 1985, qui, dans la procédure suivie contre Z... du chef d'homicides et blessures involontaires et de contraventions au Code de la route, s'est prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 et 1384 du Code civil, 319 et 320 du Code pénal, R. 10, R. 10-1, R. 40, R. 41-2, R. 232, R. 239 et L. 13 et suivants du Code de la route, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Dominique X... responsable pour un tiers des conséquences dommageables de l'accident litigieux ;
" aux motifs adoptés du premier juge que " X... circulait en pleine nuit sur une route non éclairée à une vitesse de 130 km / h, en utilisant ses seuls feux de croisement, alors qu'il aurait dû ou bien utiliser ses feux de pleine route, ou bien, réduire sa vitesse du fait de l'usage de feux à moyenne portée " (jugement p. 5 § 4) ;
" et aux motifs propres que " tout conducteur devant constamment rester maître de sa vitesse et mener avec prudence son véhicule, le fait pour Dominique X... d'avoir circulé à 130 km / h, fût-ce sur autoroute, en utilisant ses seuls feux de croisement, procurant une visibilité de l'ordre de 25 mètres alors que la distance de freinage est très largement supérieure, constitue une faute, ainsi que l'a estimé le premier juge, qui a fixé correctement le partage de responsabilité " (jugement p. 5 § 6) ;
" alors que les feux de croisement doivent être employés à l'exclusion des feux de route lorsque le véhicule risque d'éblouir d'autres usagers ; qu'en ne recherchant pas si X... n'avait pas roulé en feux de croisement pour éviter de gêner les conducteurs sur l'autre voie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Z..., conduisant de nuit un ensemble routier sur une autoroute, a perdu le contrôle de son véhicule qui s'est renversé en travers de la chaussée, tous feux éteints ; que Z... n'a pas assuré la présignalisation de l'obstacle ; que l'automobile conduite par Dominique X..., survenant à vive allure et en feux de croisement, a percuté le poids lourd, et que X... et son épouse ont été blessés, tandis que les époux Henri X..., père et mère de Dominique, ont été tués ;
Attendu que, statuant sur l'action civile engagée contre Z... par les époux Dominique X... personnellement ainsi que par les ayants droit des époux Henri X..., la cour d'appel, après avoir énoncé que tout conducteur doit constamment rester maître de sa vitesse et mener avec prudence son véhicule, a imputé à Dominique X... la faute d'avoir circulé de nuit à 130 km / h, " fût-ce sur autoroute ", en utilisant ses feux de croisement qui procuraient une visibilité d'environ 25 mètres alors que la distance de freinage était largement supérieure ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi et en en déduisant que la responsabilité de X... était engagée dans une mesure souverainement appréciée par elle la juridiction du second degré n'a violé aucun des textes visés au moyen ;
Qu'en effet, l'obligation faite à tout conducteur par l'article R. 40 du Code de la route d'utiliser exclusivement ses feux de croisement lorsque son véhicule risque d'éblouir d'autres usagers, et notamment lorsqu'il s'apprête à croiser un autre véhicule, ne supprime pas celle énoncée à l'article R. 10 (devenu l'article R. 11-1) du même Code, prescrivant à tout conducteur de réduire sa vitesse lorsque la visibilité est limitée du fait de l'usage des feux de croisement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 et 6 de la loi du 5 juillet 1985, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le partage de responsabilité opposable aux victimes non conducteurs pour réduire d'un tiers le montant de leur indemnisation ;
" aux motifs qu'en vertu de l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985, dont les termes sont dépourvus de toute ambiguïté, ce partage est opposable aux autres parties civiles " (arrêt p. 5 dernier §) ;
" alors qu'en vertu des articles 2 et 6 de la loi du 5 juillet 1985, les victimes et leurs héritiers ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d'un tiers par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur ; qu'en l'espèce, Mme Marie-José X..., passagère, grièvement blessée lors de l'accident, a demandé la réparation de son préjudice personnel ; que Daniel X... et les mineurs Sonia, Stéphanie, Delphine et Willy, respectivement fils et petits-enfants des époux X..., également passagers, décédés lors de l'accident, ont demandé la réparation de leur préjudice moral du fait du décès de ces derniers ; que Z... leur a opposé la faute de Dominique X... pour obtenir la réduction de leur indemnisation ; que la cour d'appel ne pouvait pas faire droit à cette demande sans violer les textes susvisés " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les limitations ou exclusions applicables à la réparation des dommages subis par la victime directe d'un accident s'étendent, selon l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985, au seul préjudice subi par des tiers du fait même desdits dommages et non à celui qui atteint d'autres victimes directes ou les ayants droit de ces dernières ;
Attendu que pour déclarer le partage de responsabilité opposable à Marie-José Y..., épouse Dominique X..., qui demandait réparation de son préjudice corporel, ainsi qu'aux enfants et petits-enfants des époux Henri X..., qui sollicitaient la réparation du dommage moral causé par le décès de leurs auteurs, les juges se sont fondés sur les dispositions de l'article 6 précité ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi alors que Marie-José Y..., personne transportée à laquelle aucune faute n'était imputable, ne pouvait se voir opposer le partage de responsabilité, et qu'il en était de même des ayants droit des époux Henri X..., la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte précité ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel d'Angers du 17 décembre 1985, mais seulement en ce qu'il a dit le partage de responsabilité opposable à Marie-José Y..., épouse X..., et aux ayants droit des époux Henri X..., et a fixé le montant des indemnités allouées auxdites parties civiles, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues, et pour qu'il soit à nouveau statué conformément à la loi dans la limite de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-90357
Date de la décision : 28/04/1987
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Victime d'un accident de la circulation - Faute du conducteur - Opposabilité - Opposabilité aux personnes transportées ou à leurs ayants droit (non)

Les limitations ou exclusions applicables à la réparation des dommages subis par la victime directe d'un accident s'étendent, selon l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985, au seul préjudice subi par des tiers du fait même desdits dommages et non à celui qui atteint d'autres victimes directes ou les ayants droit de ces dernières.


Références :

Loi 85-677 du 05 juillet 1985 art. 2, art. 6

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 17 décembre 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 avr. 1987, pourvoi n°86-90357, Bull. crim. criminel 1987 N° 168 p. 451
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 168 p. 451

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bruneau, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :Mme Pradain
Rapporteur ?: Rapporteur :M. de Bouillane de Lacoste
Avocat(s) : Avocats :M. Copper-Royer et la SCP Rouvière, Lepitre et Boutet.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:86.90357
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