Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 4 novembre 1982), que M. Enes Y..., au service depuis 1965 de M. X..., entrepreneur, en qualité de maçon, a été absent pour maladie à partir du mois d'avril 1980, que, le 6 janvier 1981, il a été déclaré, par le médecin du travail inapte à tenir son emploi, que, le 18 mars suivant, après un entretien, son employeur lui a signifié prendre acte de la rupture du contrat de travail ;
Attendu que M. Enes Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement de l'indemnité de licenciement, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel s'est contentée d'affirmer que l'absence de M. Enes Y... n'était pas liée à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, sans autres explications, qu'elle aurait pourtant dû prendre la peine de fournir, étant donné l'importance des conséquences juridiques attachées au sort du contrat de travail d'un salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ; qu'ainsi la cour d'appel n'a pas motivé sa décision de ce chef, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, alors, d'autre part, que l'inaptitude physique d'un salarié aux tâches pour lesquelles il avait été embauché constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement, la rupture du contrat de travail provient du fait de l'employeur ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors constater que la décision prise par M. X... de rompre le contrat de travail de M. Enes Y... pour inaptitude physique de celui-ci n'était pas imputable à l'employeur ; qu'en statuant de cette façon, la cour d'appel a violé les articles L. 122-4 et L. 122-9 du Code du travail, alors, en outre, que la rupture du contrat de travail pour inaptitude physique du salarié peut être imputable à celui-ci dans les hypothèses où l'employeur n'était pas en mesure de lui confier un poste adapté à ses possibilités, ou qu'une telle offre avait été refusée par l'intéressé ; que la cour d'appel aurait dû, par conséquent, rechercher en l'espèce si M. X... avait été en mesure d'offrir à M. Enes Y... un nouveau poste ainsi qu'elle y avait été invitée par les conclusions de ce dernier, ce qui aurait pu étayer sa décision de faire peser l'imputabilité de la rupture du contrat de travail sur M. Enes Y..., qu'en ne procédant pas à une telle recherche, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle, entachant ainsi sa décision d'un manque de base légale, et violant les articles L. 122-4 et L. 122-9 du Code du travail, alors, enfin, que la cour d'appel aurait dû non seulement décider que la rupture du contrat de travail intervenue était bien un licenciement, mais encore rechercher si ce licenciement avait une cause réelle et sérieuse, ce qui était loin d'être établi en l'espèce, comme le soulignait M. Enes Y... qui précisait dans ses conclusions qu'il n'avait pas été remplacé ; qu'en effet, la cour d'appel aurait dû rechercher si la rupture du contrat de travail décidée par l'employeur était justifiée par la nécessité de la bonne marche de l'entreprise, si l'absence de M. Enes Y... occasionnait à celle-ci une gêne grave nécessitant éventuellement un remplacement ; qu'en omettant de rechercher l'existence de telles circonstances pouvant seules justifier le licenciement de
M. Enes Y..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision et violé l'article L. 122-14.3 du Code du travail ;
Mais attendu, d'une part, que, devant les juges du fond, M. Enes Y... s'était borné à soutenir, sans prétendre que son absence était due à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, que la longue maladie n'entraînait pas la rupture du contrat du fait du salarié ; d'où il suit que le motif selon lequel l'absence du salarié n'était pas liée à un accident du travail ou à une maladie professionnelle est surabondant ;
Attendu, d'autre part, que si la maladie temporaire nécessitant le remplacement du salarié absent peut constituer une cause réelle et sérieuse du licenciement qui reste imputable à l'employeur, en revanche, l'inaptitude physique prolongée, telle que celle de M. Enes Y..., autorise l'employeur à prendre l'initiative du licenciement sans alors que celui-ci lui soit imputable ;
Attendu, en outre, que l'employeur qui, pas plus que le salarié ne peut se voir imposer, unilatéralement, une modification d'un élément substantiel du contrat de travail, n'est pas tenu de fournir un emploi différent au salarié physiquement inapte à accomplir la tâche pour laquelle il a été engagé ; qu'ainsi la cour d'appel n'avait pas à rechercher si M. X... avait été en mesure d'offir à M. Enes Y... un nouveau poste ;
Attendu, enfin, que M. Enes Y..., soutenant que la rupture du contrat était imputable à l'employeur, se bornait à réclamer l'indemnité de licenciement due par celui-ci, que le licenciement ait ou non une cause réelle et sérieuse ; que les juges du fond n'avaient donc pas à rechercher si une telle cause existait ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli dans aucune de ses quatre branches ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. Enes Y... reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à M. X... une somme représentant les charges afférentes au logement qu'il avait occupé, alors, selon le pourvoi, que l'intégralité des charges avait toujours été supportée par l'employeur de M. Enes Y..., qui n'a pas été contredit sur ce point, comme le souligne l'arrêt attaqué, et que la rupture du contrat de travail ne pouvait en elle-même rendre M. Enes Y... redevable de charges qu'il n'avait jamais assumées, même s'il avait encore occupé le logement après ladite rupture, le temps de pouvoir se reloger ; qu'en ayant statué comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 1728 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que la redevance pour consommation d'eau et la taxe d'habitation étant liées à l'usage par le salarié d'un logement de fonction, n'avaient pas été acquittées par lui pendant la durée de son contrat de travail ; qu'elle a pu en déduire que ces sommes étaient dues par lui pour la période écoulée depuis son licenciement jusqu'à la remise des clefs ; qu'ainsi le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi