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23/02/1987 | FRANCE | N°86-93194

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 février 1987, 86-93194


ANNULATION sur le pourvoi formé par :
- X... Guy,
contre un arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 16 mai 1986, qui, statuant sur renvoi après cassation et pour délit assimilé à la pratique de prix illicites, l'a condamné à 2 500 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur les deux premières branches du moyen unique de cassation proposé et pris de la violation des articles 66 de la constitution du 4 octobre 1958, de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 378 du Code pénal, 15, § 2 de l'ordonnance n

° 45-1484 du 30 juin 1945, 593 du Code de procédure pénale et l'article 1er ...

ANNULATION sur le pourvoi formé par :
- X... Guy,
contre un arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 16 mai 1986, qui, statuant sur renvoi après cassation et pour délit assimilé à la pratique de prix illicites, l'a condamné à 2 500 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur les deux premières branches du moyen unique de cassation proposé et pris de la violation des articles 66 de la constitution du 4 octobre 1958, de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 378 du Code pénal, 15, § 2 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, 593 du Code de procédure pénale et l'article 1er de l'arrêté du 28 juin 1982, défaut de motifs et manque de base légale :
" il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré un masseur-kinésithérapeute coupable du délit de pratique illicite de prix et de l'avoir condamné à une amende ;
" au motif, d'une part, que les dispositions légales et réglementaires conformément auxquelles le procès-verbal a été dressé ne sont contraires à aucun texte législatif postérieur ni à aucun traité international ;
" alors que les dispositions de l'article 15 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945 sont contraires à l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958 et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en ce qu'elles autorisent la communication et la saisie de documents, la consultation de tous documents détenus par des organismes publics ou soumis au contrôle de l'Etat, sans contrôle de l'autorité judiciaire gardienne des libertés individuelles, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour a violé l'article 66 de la Constitution de 1958 et l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" aux motifs, d'autre part, que la consultation de feuilles de soins par les agents de l'Administration tenus par le secret professionnel ne lèse en rien les clients du prévenu qui les ont eux-mêmes adressées à la sécurité sociale, que sur la photocopie des feuilles de soins figurant au dossier de l'Administration, les noms des patients sont masqués de sorte que l'établissement de ces pièces et leur utilisation dans la procédure ne violent pas le secret médical ;
" alors que l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945 relative à la constatation, la répression et la poursuite des infractions est un texte d'interprétation stricte, qui ne prévoit en son article 15 § 2 que la consultation des documents dans les administrations publiques ou contrôlées par l'Etat, qu'en déclarant légale la prise de copies de ces documents, peu important que le nom des clients soit occulté ultérieurement lors de la production de ces pièces en justice, la cour d'appel a violé les articles 378 et 405 du Code pénal et l'article 15 § 2 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945 " ;
Attendu que le moyen, en ses deux premières branches lesquelles remettent en cause la validité de la procédure d'enquête préliminaire et arguent de diverses nullités qui auraient été commises à ce stade de la procédure, est irrecevable, conformément aux dispositions de l'article 385 du Code de procédure pénale, lesdites nullités n'ayant pas été soulevées avant tout débat au fond devant le tribunal correctionnel ; que si la cour d'appel a cru devoir, pour les rejeter, répondre à ces conclusions dont elle se trouvait personnellement saisie, la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer, au vu des mentions du jugement du tribunal correctionnel de Guingamp du 5 août 1983, que les juges du premier degré n'avaient pas été saisis de ces prétendues nullités ;
Que dès lors en ses deux premières branches, le moyen proposé est irrecevable ;
Mais sur le moyen relevé d'office pris de l'entrée en vigueur le 1er janvier 1987 du titre I de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ;
Vu ledit texte et son décret d'application n° 86-1309 du 29 décembre 1986 ;
Attendu qu'en l'absence de dispositions contraires expresses une loi nouvelle, même de nature économique qui, pour des incriminations pénales déterminées, prévoit désormais des peines plus douces, s'applique aux faits commis avant son entrée en vigueur et non définitivement jugés ;
Attendu que le demandeur au pourvoi, kinésithérapeute de sa profession, ayant méconnu les dispositions d'un arrêté ministériel n° 82-36 du 28 juin 1982 lequel pour l'ensemble des professions médicales et paramédicales avait décidé de bloquer, à une date déterminée, le prix de leurs services, a été déclaré coupable de délit assimilé à la pratique de prix illicites, infraction prévue par les articles 1er, alinéa 2, 16 et 36 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 et punie de peines correctionnelles spécifiées aux articles 1er, alinéa 2 et 40 de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945 ;
Attendu que tous les textes sus-énumérés, à l'exception de l'arrêté ministériel n° 82-36 du 28 juin 1982, ont été explicitement abrogés à compter du 1er janvier 1987 par l'article 1er, alinéa 1er et par l'article 57 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, pris en application de la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 ; que cependant l'article 61 de ladite ordonnance a prévu qu'à titre transitoire demeuraient en vigueur un certain nombre d'arrêtés dont l'énumération serait faite au décret d'application de l'ordonnance promulguée ; que ce dernier décret du 29 décembre 1986, en son annexe I, mentionne explicitement le maintien en vigueur et à titre transitoire dudit arrêté du 28 juin 1982 ;
Qu'enfin l'article 33, alinéa 1er, du décret d'application du 29 décembre 1986 spécifie que la sanction pénale désormais attachée à la répression, en cas de méconnaissance de cet arrêté, sera le prononcé des seules amendes contraventionnelles de cinquième classe ;
Que dès lors l'arrêt attaqué qui n'avait à trancher que sur l'action publique doit être annulé, pour permettre à la Cour de renvoi de réexaminer les faits poursuivis au regard des nouveaux textes qui prévoient des pénalités plus douces, et d'apprécier éventuellement s'il y a lieu de prononcer une ou plusieurs peines contraventionnelles encourues ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les 3e et 4e branches du moyen proposé par le demandeur au pourvoi :
ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Caen du 16 mai 1986 en toutes ses dispositions,
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Angers.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-93194
Date de la décision : 23/02/1987
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° LOIS ET REGLEMENTS - Réglementation économique - Rétroactivité - Loi plus douce - Loi modifiant les peines applicables à une infraction - Effet - Pourvoi en cours.

1° Voir le sommaire suivant.

2° REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Prix - Pratiques illicites - Ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence - Décret d'application - Application dans le temps - Loi plus douce - Loi modifiant les peines applicables à une infraction - Effet - Pourvoi en cours.

2° Voir le sommaire suivant.

3° CASSATION - Annulation - Loi modifiant les peines applicables à une infraction - Loi plus douce - Rétroactivité - Effet.

3° En l'absence de dispositions contraires expresses, une loi nouvelle, même de nature économique, qui, pour des incriminations pénales déterminées, prévoit désormais des peines plus douces s'applique aux faits commis avant son entrée en vigueur et non définitivement jugés. Face à un prévenu, poursuivi pour pratique de prix illicites, infraction prévue par les articles 1er, alinéa 2, 16 et 36 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, et par l'arrêté ministériel n° 82-36 du 28 juin 1982, et condamné avant le 1er janvier 1987 à des peines correctionnelles sur le fondement des articles 1er, alinéas 2 et 40, de l'ordonnance n° 45-1484 du 30 juin 1945, l'application du principe sus-énoncé conduit à constater que tous les textes de la prévention, à l'exception de l'arrêté n° 82-36 du 28 juin 1982 maintenu en survie par les articles 61 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, l'article 33, alinéa 1er, du décret d'application du 29 décembre 1986 et son annexe I se trouvent abrogés ; cependant, la sanction pénale désormais attachée à cette infraction à l'arrêté non abrogé étant l'amende contraventionnelle de 5e classe, peine plus douce, il y a lieu à annulation de l'arrêt attaqué avec renvoi aux juges du fond pour réexaminer les faits poursuivis au regard des nouveaux textes et apprécier s'il y a lieu éventuellement, de prononcer une ou plusieurs des peines contraventionnelles encourues


Références :

Arrêté 82-36/A du 28 juin 1982
Décret 86-1309 du 29 décembre 1986 art. 33 al. 1
Ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945 art. 1 al. 2, art. 16, art. 36
Ordonnance 45-1484 du 30 juin 1945 art. 1 al. 2, art. 40
Ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 1 al. 1, art. 57, art. 61

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 16 mai 1986

CONFER : Cour de Cassation, chambre criminelle, 1987-02-23, (arrêts n° 86-93.191 à 86-93.200 non publiés).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 fév. 1987, pourvoi n°86-93194, Bull. crim. criminel 1987 N° 89 p. 242
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 89 p. 242

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Ledoux
Avocat général : Avocat général :M. Clerget
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Tacchella
Avocat(s) : Avocat :M. Goutet.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:86.93194
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