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18/02/1986 | FRANCE | N°84-15466;84-15607

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 février 1986, 84-15466 et suivant


Joint les pourvois n° 84-15.466 et n° 84-15.607, formés contre le même arrêt et qui contiennent les mêmes moyens ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que, statuant après divorce sur les difficultés du partage et de la liquidation de la communauté ayant existé entre les époux Z..., l'arrêt attaqué a fait sienne l'évaluation de l'immeuble commun, sis à Prémilhat (Allier), que l'expert judiciaire avait retenue deux ans et trois mois auparavant ; que M. Y... reproche à la Cour d'appel d'avoir statué ainsi, sans répondre aux conclusions qui fa

isaient état d'importantes variations du marché immobilier au cours de cette p...

Joint les pourvois n° 84-15.466 et n° 84-15.607, formés contre le même arrêt et qui contiennent les mêmes moyens ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que, statuant après divorce sur les difficultés du partage et de la liquidation de la communauté ayant existé entre les époux Z..., l'arrêt attaqué a fait sienne l'évaluation de l'immeuble commun, sis à Prémilhat (Allier), que l'expert judiciaire avait retenue deux ans et trois mois auparavant ; que M. Y... reproche à la Cour d'appel d'avoir statué ainsi, sans répondre aux conclusions qui faisaient état d'importantes variations du marché immobilier au cours de cette période, variations liées à la promulgation de la loi du 22 juin 1982 relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs, et à la chute des prix de vente des immeubles sur le marché local consécutive au dépôt du bilan, en octobre 1983, de la société Dunlop implantée dans la ville voisine ; qu'il est aussi soutenu qu'en s'abstenant de préciser en quoi n'étaient pas pertinentes les critiques qui tendaient à démontrer que l'évaluation faite par l'expert n'était pas réaliste en raison de ces perturbations du marché immobilier, la juridiction du second degré n'aurait pas donné de base légale à sa décision ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que, dans son rapport daté du 1er mars 1982, après avoir noté que pour l'année 1982 " l'activité immobilière sur la commune de Prémilhat aurait tendance à s'accélérer du fait du développement résidentiel qui y a pris naissance à la suite de la raréfaction sur le marché de l'offre d'emplacements très prisés dans les communes limitrophes " l'expert a observé toutefois que " les effets d'ordre général (situation économique, décisions législatives relatives aux biens immobiliers) entraînent actuellement dans les agglomérations comparables un ralentissement très sensible des ventes des villas dont le prix est supérieur à 800 000 F " ; que, répondant aux conclusions visées par la première branche du moyen, la Cour d'appel énonce que c'est en tenant compte de ces observations relatives à la situation du marché immobilier local que l'expert a limité son évaluation de l'immeuble à la somme de 800 000 F ;

Attendu, en second lieu, que l'appréciation de l'arrêt attaqué suivant laquelle M. Y... n'apportait aucune critique sérieuse à l'évaluation faite par l'expert est souveraine et justifie la décision sur ce point ;

Qu'en aucune de ses deux branches le premier moyen ne peut être accueilli ;

Le rejette ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1469 alinéa 3 du Code civil ;

Attendu qu'aux termes de cette disposition, la récompense ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la dissolution de la communauté, dans le patrimoine emprunteur ;

Attendu que M. Y... a réclamé à la communauté une récompense calculée selon ces termes, pour avoir investi dans la construction de l'immeuble commun, sis à Prémilhat, la somme de 65 000 F provenant de la vente d'un de ses biens propres ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt attaqué énonce qu'en l'absence de stipulation de remploi des fonds provenant de la vente du bien propre du mari, fonds encaissés par la communauté, il ne saurait être retenu que ceux-ci ont servi exclusivement à la construction de l'immeuble commun, et que, dans ces conditions, l'intéressé ne peut se prévaloir de l'article 1469 alinéa 3 du Code civil et que le chiffre à retenir pour la récompense ne peut être que celui correspondant au prix de vente du bien propre conformément aux dispositions de l'article 1436 du Code civil ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que M. Y... n'invoquait pas un droit de reprise en nature sur l'immeuble, mais réclamait à la communauté une récompense dont Mme X... admettait le principe dans ses conclusions, sans discuter qu'en leur totalité les deniers personnels du mari avaient été utilisés pour la construction du bien commun, bien qui, au jour de la dissolution de la communauté, se retrouvait dans le patrimoine emprunteur, la Cour d'appel a, par refus d'application, violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé à 65 000 F le montant de la récompense due par la communauté à M. Y..., l'arrêt rendu le 28 mai 1984, entre les parties, par la Cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Limoges


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 84-15466;84-15607
Date de la décision : 18/02/1986
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

COMMUNAUTE ENTRE EPOUX - Liquidation - Récompenses - Récompenses dues aux époux - Acquisition, conservation ou amélioration d'un bien de la communauté - Profit subsistant - Absence de clause de remploi - Utilisation des deniers personnels du conjoint pour la construction du bien commun - Défaut de contestation

Aux termes de l'article 1469 alinéa 3 du Code civil, la récompense ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la dissolution de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Encourt dès lors la cassation, l'arrêt qui, pour refuser d'allouer une telle récompense à un conjoint divorcé à raison des fonds provenant de la vente de biens propres qu'il avait investis dans un immeuble commun, se fonde sur l'absence de stipulation de remploi desdits fonds pour décider qu'il y a lieu de faire application de l'article 1436 du même code, alors qu'en l'espèce le conjoint intéressé n'invoquait pas un droit de reprise en nature sur l'immeuble, mais réclamait à la communauté une récompense, dont l'autre époux admettait le principe sans discuter que les deniers personnels de son conjoint avaient bien été utilisés pour la construction du bien commun, qui, au jour de la dissolution de la communauté, se retrouvait dans le patrimoine emprunteur.


Références :

Code civil 1469 al. 3, 1436

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, chambre 1, 28 mai 1984


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 fév. 1986, pourvoi n°84-15466;84-15607, Bull. civ. 1986 I N° 30 p. 26
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 30 p. 26

Composition du Tribunal
Président : Pdt. M. Joubrel
Avocat général : P.Av.Gén. M. Sadon
Rapporteur ?: Rapp. M. Ponsard
Avocat(s) : Av. demandeur : SCP Lyon-Caen Fabiani et Liard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:84.15466
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