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20/03/1973 | FRANCE | N°72-90866

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 mars 1973, 72-90866


CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI FORME PAR X... (LUCIEN), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE MONTPELLIER, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, DU 10 FEVRIER 1972, QUI S'EST PRONONCE SUR LES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES D'UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION AU COURS DUQUEL L'ABBE Y... (SAUVEUR) A TROUVE LA MORT ET DONT LE DEMANDEUR A ETE RECONNU ENTIEREMENT RESPONSABLE. LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE;

SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 2 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 1382 DU CODE CIVIL, ENSEMBLE VIOLATION DE L'ARTICLE 485 DU CODE DE PROCEDURE

PENALE POUR DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, ...

CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI FORME PAR X... (LUCIEN), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE MONTPELLIER, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, DU 10 FEVRIER 1972, QUI S'EST PRONONCE SUR LES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES D'UN ACCIDENT DE LA CIRCULATION AU COURS DUQUEL L'ABBE Y... (SAUVEUR) A TROUVE LA MORT ET DONT LE DEMANDEUR A ETE RECONNU ENTIEREMENT RESPONSABLE. LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE;

SUR LE

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 2 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 1382 DU CODE CIVIL, ENSEMBLE VIOLATION DE L'ARTICLE 485 DU CODE DE PROCEDURE PENALE POUR DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE DEMANDEUR A VERSER UNE INDEMNITE GLOBALE DE 30000 FRANCS A LA DAME Z...;

" AU MOTIF QUE SA QUALITE D'ANCIENNE SERVANTE DE LA VICTIME, LES SENTIMENTS D'ATTACHEMENT QUE CELLE-CI EPROUVAIT A SON EGARD AINSI QUE POUR SES FILLE ET PETITE-FILLE, ET LE FAIT QUE LE DECES DE LA VICTIME L'AVAIT LAISSEE DANS UN ETAT DE DENUEMENT TOTAL JUSTIFIAIENT L'OCTROI D'UNE TELLE INDEMNITE;

" ALORS QUE LE FAIT QUE LA DAME Z... EUT ETE AINSI AU SERVICE DE LA VICTIME, FUT-CE SANS REMUNERATION PECUNIAIRE, NE L'AUTORISAIT PAS A EXERCER UNE ACTION CIVILE CONTRE L'AUTEUR DE L'ACCIDENT ";

ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL ETAIT SAISIE PAR A... (MARIA), EPOUSE Z..., D'UNE DEMANDE EN REPARATION DU PREJUDICE TANT MORAL QUE MATERIEL QUE LUI A CAUSE L'ACCIDENT MORTEL DONT L'ABBE Y... (SAUVEUR) A ETE VICTIME LE 11 OCTOBRE 1970 ET A RAISON DUQUEL X... (LUCIEN) A ETE CONDAMNE POUR HOMICIDE INVOLONTAIRE;

ATTENDU QUE POUR FAIRE DROIT A CETTE DEMANDE L'ARRET ATTAQUE CONSTATE QUE Z... (MARIA) ETAIT ENTREE AU SERVICE DE L'ABBE Y... EN 1945, EN QUALITE DE GOUVERNANTE, ALORS QU'ELLE VENAIT D'ETRE ABANDONNEE PAR SON MARI AVEC UNE FILLETTE EN BAS AGE;

QUE DEPUIS CETTE EPOQUE ELLE AVAIT SERVI LE PRETRE AVEC CONSTANCE ET DEVOUEMENT;

QUE, DE SON COTE, L'ABBE Y..., QUI NE DONNAIT AUCUN SALAIRE A SA GOUVERNANTE, AVAIT POURVU A TOUS LES BESOINS DE LA MERE ET DE LA FILLE;

QU'APRES LE MARIAGE ET LE DECES DE CETTE DERNIERE, LE PRETRE AVAIT RECUEILLI L'ENFANT QU'ELLE LAISSAIT ET DONT LE PERE SE DESINTERESSAIT;

QUE LES JUGES ENONCENT QUE CETTE LONGUE COMMUNAUTE DE VIE ET D'INTERET AVAIT DONNE NAISSANCE ENTRE L'ECCLESIASTIQUE ET SA GOUVERNANTE A DES LIENS D'ATTACHEMENT ET D'AFFECTION D'UNE NATURE TRES DIFFERENTE DE CEUX EXISTANT HABITUELLEMENT ENTRE UN PATRON ET SON EMPLOYEE;

QUE LE DECES ACCIDENTEL DE L'ABBE Y... A FAIT PERDRE SON SOUTIEN MATERIEL ET MORAL A Z... (MARIA), LAQUELLE, EN RAISON DE SON AGE ET DE SON ETAT DE SANTE, NE PEUT TROUVER DE NOUVELLE PLACE OU ELL SERAIT ADMISE AVEC SA PETITE-FILLE AGEE ACTUELLEMENT DE 6 ANS;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS QUI ETABLISSENT LES LIENS STABLES ET PROLONGES QUI UNISSAIENT LE PRETRE A SA GOUVERNANTE, LA COUR D'APPEL A PU, SANS VIOLER LES TEXTES VISES AU MOYEN, ADMETTRE L'EXISTENCE D'UN PREJUDICE TANT MATERIEL QUE MORAL RESULTANT DIRECTEMENT POUR LA PARTIE CIVILE DU DELIT DONT LE DEMANDEUR A ETE DECLARE COUPABLE;

QUE DES LORS LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI;

SUR LE

SECOND MOYEN DE CASSATION :
PRIS DE LA VIOLATION DES MEMES TEXTES, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE DEMANDEUR A VERSER UNE INDEMNITE DE 30000 FRANCS AU DEMI-FRERE DE LA VICTIME, DONT UNE PARTIE A TITRE DE REPARATION DU PREJUDICE MATERIEL;

" AU MOTIF, EN CE QUI CONCERNE CE DERNIER, QUE LE DECES DE L'ABBE Y... AVAIT ENTRAINE POUR Y... (RENE) L'OBLIGATION DE SUBVENIR SEUL AUX BESOINS DE SA MERE, ET, NOTAMMENT, DE PAYER LA PENSION DE LA MAISON DE RETRAITE OU ELLE S'ETAIT RETIREE;

" ALORS QUE CETTE CIRCONSTANCE NE SAURAIT ETRE CONSIDEREE COMME UNE CONSEQUENCE DIRECTE DU DELIT IMPUTE AU DEMANDEUR ";

VU LESDITS ARTICLES;

ATTENDU QU'UN PREJUDICE DIRECT PEUT SEUL DONNER NAISSANCE A L'ACTION CIVILE DEVANT LES TRIBUNAUX DE REPRESSION;

QUE L'EXERCICE DE L'ACTION CIVILE DEVANT LA JURIDICTION PENALE EST UN DROIT EXCEPTIONNEL QUI, EN RAISON DE SA NATURE, DOIT ETRE STRICTEMENT RENFERME DANS LES LIMITES FIXEES PAR LE CODE DE PROCEDURE PENALE;

ATTENDU QUE POUR FAIRE DROIT A LA DEMANDE DE REPARATION DU PREJUDICE MATERIEL QUI AURAIT ETE SUBI PAR Y... (RENE) EN RAISON DU DECES DE Y... (SAUVEUR), LA COUR D'APPEL ENONCE QUE CE FRERE CONSANGUIN DE LA VICTIME DEVRA, A L'AVENIR, SUBVENIR AUX BESOINS DE SA MERE QUE LE DEFUNT AVAIT RECUEILLIE A SON DOMICILE ET DONT IL ASSURAIT ENTIEREMENT LA SUBSISTANCE BIEN QUE CETTE FEMME, SECONDE EPOUSE DE SON PERE, NE FUT PAS SA VERITABLE MERE;

MAIS ATTENDU QUE CES ENONCIATIONS NE CONFERENT PAS A L'ELEMENT DE PREJUDICE AINSI ADMIS LE CARACTERE D'UN DOMMAGE DIRECTEMENT CAUSE A LA PARTIE CIVILE AU SENS DE L'ARTICLE 2 DU CODE DE PROCEDURE PENALE PAR L'INFRACTION RETENUE A LA CHARGE DU DEMANDEUR;

D'OU IL SUIT QUE L'ARRET ENCOURT CASSATION DE CE CHEF;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE MONTPELLIER, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, DU 10 FEVRIER 1972, MAIS UNIQUEMENT EN CE QUI CONCERNE LES DISPOSITIONS RELATIVES AU PREJUDICE MATERIEL ALLEGUE PAR Y... (RENE), TOUTES LES AUTRES DISPOSITIONS DUDIT ARRET ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES;

ET POUR QU'IL SOIT STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE;

RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE NIMES


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 72-90866
Date de la décision : 20/03/1973
Sens de l'arrêt : Cassation partielle rejet cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1) ACTION CIVILE - Recevabilité - Gouvernante - Conditions.

ACTION CIVILE - Préjudice direct - Gouvernante de la victime - Liens stables d'affection et d'intérêt la liant à son employeur - Constatations suffisantes.

Justifie l'allocation au profit d'une femme abandonnée par son mari, de dommages-intérêts en raison du préjudice résultant pour elle du décès accidentel de l'ecclésiastique qui l'avait recueillie depuis 25 ans, à titre de gouvernante non rétribuée et avait subvenu à ses besoins ainsi qu'à ceux de sa fille et de sa petite-fille, l 'arrêt qui constate l'existence des liens stables et prolongés d 'affection et d'intérêt qui unissaient le prêtre à sa gouvernante (1 ).

2) ACTION CIVILE - Préjudice - Préjudice direct - Nécessité.

Un Préjudice direct peut seul donner naissance à l'action civile devant les tribunaux répressifs ; l'exercice de l'action civile devant la juridiction pénale est un droit exceptionnel qui, en raison de sa nature, doit être strictement renfermé dans les limites fixées par le code de procédure pénale (2).


Références :

Code de procédure pénale 2
Code de procédure pénale 485

Décision attaquée : Cour d'appel Montpellier (Chambre des appels correctionnels), 10 février 1972

(1) Cour de Cassation (Chambre criminelle) 2O-04-1972 Bulletin Criminel 1972 N. 134 P. 333 (REJET) et l'arrêt cité (2) Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1970-12-10 Bulletin Criminel 1970 N. 333 P. 810 (CASSATION Partielle) et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 mar. 1973, pourvoi n°72-90866, Bull. crim. N. 137 P. 331
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle N. 137 P. 331

Composition du Tribunal
Président : Pdt M. Costa CDFF
Avocat général : Av.gén. M. Albaut
Rapporteur ?: Rpr M. Provansal
Avocat(s) : Av. Demandeur : MM. Talamon

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1973:72.90866
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