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11/07/2019 | FRANCE | N°18VE02581

France | France, Cour administrative d'appel de Versailless, 7ème chambre, 11 juillet 2019, 18VE02581


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1708054 du 22 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté en tant qu'il pro

nonce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1708054 du 22 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté en tant qu'il prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 juillet 2018, M.B..., représenté par Me Chakri, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 16 novembre 2017 en tant qu'il l'oblige à quitter sans délai le territoire français et fixe le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative et de le munir, dans cette attente, d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, Me Chakri, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière, son droit à être entendu avant son adoption ayant été méconnu ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation administrative ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

- cette décision a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des garanties de représentation dont il justifie ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- cette décision a été signée par une autorité incompétente ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Illouz, conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant ivoirien entré en France en 2012 selon ses déclarations, a fait l'objet, par arrêté du préfet du Val-d'Oise du 16 novembre 2017, d'une obligation de quitter sans délai le territoire français assortie d'une décision fixant le pays à destination duquel il était susceptible d'être renvoyé d'office et d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. L'intéressé relève régulièrement appel du jugement du 22 novembre 2017 en tant que, par ce jugement, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de renvoi.

2. Il résulte des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont issues de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui a procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.

3. M. B...fait valoir pour la première fois devant la Cour que le préfet du Val-d'Oise ne l'a pas mis à même de présenter des observations avant de l'obliger à quitter le territoire français. En l'espèce, l'arrêté attaqué ne fait effectivement état d'aucune audition préalable à son adoption au cours de laquelle M. B...aurait été susceptible de formuler de telles observations. Par ailleurs, le préfet ne produit aucun élément de nature à révéler que l'appelant aurait été entendu avant l'adoption des décisions en litige. Dans ces conditions, l'autorité administrative ne met pas la juridiction à même de s'assurer de la régularité de la procédure suivie. L'appelant est, dès lors, fondé à soutenir que son droit à être entendu préalablement à l'adoption de l'obligation de quitter le territoire français a été méconnu.

4. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

5. La faculté de présenter des observations écrites ou de faire valoir des observations orales devant l'autorité administrative lorsque celle-ci examine sa situation présente le caractère d'une garantie pour l'étranger susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit de M. B...à être entendu préalablement à l'adoption de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre doit être accueilli.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 16 novembre 2017 par laquelle le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, ainsi, par voie de conséquence, que celles dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi concomitamment prise.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. L'exécution du présent arrêt, qui annule une mesure d'éloignement et une décision fixant le pays de renvoi, n'implique pas que le préfet du Val-d'Oise délivre à l'appelant une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". En revanche, il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la situation administrative de M. B...dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

8. M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Chakri, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Chakri de la somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1708054 du Tribunal administratif de Versailles du 22 novembre 2017 et l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 17 novembre 2017, en tant qu'il oblige M. B... à quitter sans délai le territoire français et fixe le pays de renvoi, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la situation administrative de M. B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Me Chakri, avocat de M.B..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Chakri renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

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N° 18VE02581


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailless
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02581
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. TRONEL
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : CHAKRI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailless;arret;2019-07-11;18ve02581 ?
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