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08/07/2025 | FRANCE | N°24VE00463

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 4ème chambre, 08 juillet 2025, 24VE00463


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- d'annuler la décision du 16 février 2022 par laquelle le directeur de la maison d'arrêt d'Osny a refusé de mettre à sa disposition, en cellule, sa couette de lit hypoallergénique ainsi que divers autres biens ;

- d'enjoindre au directeur de la maison d'arrêt de procéder à cette mise à disposition dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à inter

venir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de l'Etat u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- d'annuler la décision du 16 février 2022 par laquelle le directeur de la maison d'arrêt d'Osny a refusé de mettre à sa disposition, en cellule, sa couette de lit hypoallergénique ainsi que divers autres biens ;

- d'enjoindre au directeur de la maison d'arrêt de procéder à cette mise à disposition dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2202772 du 14 décembre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du directeur de la maison d'arrêt d'Osny du 16 février 2022, en ce qu'elle refuse implicitement à M. B... la mise à disposition en cellule d'une tondeuse, d'un home cinéma, d'un ouvre-boîte, de deux plaques chauffantes, d'une cafetière, d'une chaîne hifi, d'un presse-agrumes, d'un plat en verre, d'un couvercle, d'une machine Senseo et d'une console de jeux (article 1er), enjoint au directeur de la maison d'arrêt d'Osny de réexaminer, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, la demande de mise à disposition, en cellule, de la tondeuse, du home cinéma, de l'ouvre-boîte, des deux plaques chauffantes, de la cafetière, de la chaîne hifi, du presse-agrumes, du plat en verre, du couvercle, de la machine Senseo et de la console de jeux de M. B... (article 2), mis à la charge de l'État le versement au conseil de M. B... d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative (article 3) et a rejeté le surplus de la demande (article 4).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2024, le ministre de la justice demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 3 de ce jugement ;

2°) de rejeter l'intégralité de la demande de M. B....

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a jugé que la décision contestée ne constituait pas, en ce qui concerne les biens litigieux, une mesure d'ordre intérieur insusceptible de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M. B... qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Etienvre,

- et les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., incarcéré à la maison d'arrêt d'Osny, a demandé au directeur de l'établissement, les 20 décembre 2021, 21 janvier 2021 et 28 janvier 2023, la mise à disposition, dans sa cellule, d'une couette et de plusieurs biens lui appartenant (tondeuse, home cinéma, ouvre-boîte, deux plaques chauffantes, cafetière, chaine hifi, presse-agrumes, plat en verre, couvercle, machine Senseo, four et console de jeux). Cette demande a été rejetée par une décision du 16 février 2022 dont M. B... a demandé l'annulation au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Par un jugement n° 2202772 du 14 décembre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du directeur de la maison d'arrêt d'Osny du 16 février 2022, en ce qu'elle a refusé à M. B... la mise à disposition en cellule d'une tondeuse, d'un home cinéma, d'un ouvre-boîte, de deux plaques chauffantes, d'une cafetière, d'une chaîne hifi, d'un presse-agrumes, d'un plat en verre, d'un couvercle, d'une machine Senseo et d'une console de jeux (article 1er), enjoint au directeur de la maison d'arrêt d'Osny de réexaminer, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, la demande de mise à disposition, en cellule, de la tondeuse, du home cinéma, de l'ouvre-boîte, des deux plaques chauffantes, de la cafetière, de la chaîne hifi, du presse-agrumes, du plat en verre, du couvercle, de la machine Senseo et de la console de jeux de M. B... (article 2), mis à la charge de l'État le versement au conseil de M. B... d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative (article 3) et a rejeté le surplus de la demande (article 4). Le ministre de la justice demande à la cour d'annuler les articles 1er, 2 et 3 de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour déterminer si une mesure prise par l'administration pénitentiaire à l'égard d'un détenu constitue un acte administratif susceptible de recours pour excès de pouvoir, il y a lieu d'apprécier sa nature et l'importance de ses effets sur la situation du détenu.

3. Il ressort des pièces du dossier qu'en l'espèce, la demande de M. B... avait pour objet de lui permettre de disposer en cellule de la cantine que tout détenu peut acquérir et dont le contenu est lié à sa capacité de réaliser des préparations en cellule, de s'y distraire et d'assurer son rasage. Les mêmes pièces du dossier révèlent que l'ensemble des objets demandés avaient été mis à la disposition de M. B... dans son précédent lieu de détention. Dans ces conditions, le refus de mettre les différents biens en cause à disposition de M. B... doit être regardé comme étant de nature à aggraver les conditions de détention de celui-ci. Le ministre n'est en conséquence pas fondé à soutenir que la décision attaquée constitue une mesure d'ordre intérieur insusceptible de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir. Le jugement attaqué n'est donc pas irrégulier.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Le ministre soutient que globalement le grand nombre d'objets demandés entraînerait un encombrement de la cellule de M. B... susceptible de porter atteinte à la sécurité de l'établissement. Toutefois, si le ministre soutient que les consoles communicantes sont interdites, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce soit le cas de celle demandée par le requérant, qui en disposait déjà dans un autre lieu de détention. Concernant la tondeuse, le presse-agrumes, le couvercle, l'ouvre-boîte, la machine Senseo et la tondeuse, le ministre ne présente aucune argumentation sur la dangerosité de ces équipements. Le " home cinema " est en réalité une série d'enceintes qui, faute pour le ministre de donner des éléments sur la taille et la configuration de la cellule, n'apparaissent pas en l'état de l'instruction de nature, par leur dimension et leur nombre, à gêner ou retarder les contrôles. S'agissant du plat en verre, cet objet peut, en revanche, être cassé pour faciliter un suicide ou constituer une arme dans le cadre d'une agression. En ce qui concerne, enfin, les plaques électriques, le ministre soutient, sans être contesté, que la capacité électrique de l'établissement s'y opposait. Il suit de là que l'administration n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de mettre à la disposition de M. B... ces deux seuls éléments. Le ministre est par suite seulement fondé à demander l'annulation des articles 1 et 2 du jugement contesté en tant qu'ils annulent la décision implicite du directeur de la maison d'arrêt d'Osny de mettre à disposition de M. B... en cellule un plat en verre et deux plaques chauffantes et lui enjoignent de réexaminer la demande de M. B... concernant ces deux effets.

D É C I D E :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement contesté sont annulés en tant qu'ils annulent la décision implicite du directeur de la maison d'arrêt d'Osny de refus de mettre à disposition de M. B... en cellule un plat en verre et deux plaques chauffantes et lui enjoignent de réexaminer la demande de M. B... concernant ces deux effets.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, à laquelle siégeaient :

M. Etienvre, président de chambre,

M. Pilven, président-assesseur,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025.

Le président-assesseur,

J-E. PilvenLe président-rapporteur,

F. Etienvre

La greffière,

S. Diabouga

La République mande et ordonne au ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 24VE00463 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24VE00463
Date de la décision : 08/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ETIENVRE
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-08;24ve00463 ?
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