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08/07/2025 | FRANCE | N°23VE01321

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 3ème chambre, 08 juillet 2025, 23VE01321


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2014.



Par un jugement n° 2104698 du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 15 juin 2023, M. D..

., représenté par Me Cercuel, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement ;



2°) de prononcer la déch...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 2104698 du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2023, M. D..., représenté par Me Cercuel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2014 ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- pour évaluer le bien immobilier détenu par la SCI des petits bois, dont il est associé, qui a été cédé le 27 mai 2014, l'administration s'est fondée sur quatre transactions datant de 2009, plus de quatre ans avant le fait générateur de l'imposition litigieuse ; en outre, ces comparables ont une surface bien plus réduite ; ces comparables ne sont pas pertinents, sans qu'il lui soit nécessaire d'apporter lui-même d'autres comparables ;

- par ailleurs, lors de la cession du 27 mai 2014, l'immeuble n'était pas achevé, ainsi qu'en attestent le gérant de la SCI et l'acquéreur des parts de la SCI ; l'ensemble des documents permettant d'attester de l'achèvement des travaux est daté du 1er juin 2014, postérieurement à la cession litigieuse ;

- c'est à tort que l'administration a considéré que la SCI n'avait aucun passif au moment de la cession ;

- la valeur des parts de la SCI des petits bois était donc nulle au moment de leur cession, ainsi qu'en atteste un rapport d'expert-comptable qu'il a mandaté ;

- la majoration pour manquement délibéré est infondée ; il a fondé son évaluation des parts de la SCI sur les éléments de fait à sa disposition, cette évaluation diffère de l'évaluation d'un immeuble ; il n'avait pas d'intérêt à sous-évaluer cette cession.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 janvier 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Liogier,

- et les conclusions de M. Illouz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 27 mai 2014, M. D... a cédé les 50 parts qu'il détenait dans la SCI des petits bois pour un montant de 500 euros, soit un prix unitaire de 10 euros. L'administration a considéré que ce prix était minoré et, sur la base de la valeur vénale qu'elle avait estimée, a notifié à M. D... des rectifications en matière de droits d'enregistrement et d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014 à raison de la plus-value résultant de la cession de ces titres. M. D... fait appel du jugement du 18 avril 2023 du tribunal administratif de Versailles qui a rejeté sa demande de décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à sa charge.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

2. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ". M. D... n'a pas répondu à la proposition de rectification du 22 décembre 2017 qui lui a été adressée en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales. Par suite, il supporte la charge de la preuve de l'exagération de l'imposition mise à sa charge.

En ce qui concerne la plus-value litigieuse :

3. Aux termes du I de l'article 150 du code général des impôts : " I - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH ". Aux termes de l'article 150 V du même code : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UC est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant ". Aux termes de l'article 150 VH de ce code : " I. - Le prix de cession à retenir est le prix réel tel qu'il est stipulé dans l'acte. Lorsqu'une dissimulation de prix est établie, le prix porté dans l'acte doit être majoré du montant de cette dissimulation ".

4. Il résulte de l'instruction que la SCI des petits bois a été constituée, à parts égales, le 4 mai 2006 par M. D... et M. C... en vue de l'acquisition d'un ensemble immobilier sis chemin de la Mare, rue des Petits Bois, à Longnes, et de sa revente par fraction, après démolition d'une ferme en ruine et construction de plusieurs pavillons. Les travaux se sont essentiellement déroulés entre 2007 et 2009, l'ensemble des quinze lots issus de ces travaux ayant été mis en copropriété le 23 juin 2009. Le 27 mai 2014, alors que la SCI disposait encore d'une maison d'habitation de 130 m² et de deux parkings, constituant les lots 6, 14 et 15 de la copropriété, M. D... a vendu les 500 parts qu'il possédait dans la SCI des petits bois pour un prix de 500 euros, prix équivalent à leur valeur nominale, à M. A..., qui souhaitait acquérir le pavillon et les parkings.

5. Pour procéder à l'évaluation de la valeur vénale réelle des parts ainsi cédées, l'administration s'est appuyée sur une comparaison avec trois cessions réalisées par la SCI des Petits Bois résultant de la division en lots des parcelles acquises en 2006, afin d'en déduire la valeur de l'immobilier encore détenu par la SCI lors de la cession des parts. La première de ces cessions, datée du 12 juin 2009, portait sur un ensemble constitué d'une unité d'habitation d'une superficie de 59,52 m² et de deux parkings, pour un montant total de 125 000 euros, soit 2 100 euros par m². La deuxième cession du 4 août 2009, portait sur une unité d'habitation d'une superficie de 52,50 m² et deux parkings, pour un montant total de 105 000 euros, soit 2 000 euros par m². La troisième de ces cessions, réalisée par acte authentique du 14 août 2009, portait sur une unité d'habitation d'une superficie de 79,12 m² et deux parkings, pour un montant de 150 000 euros, soit 1 896 euros par m². L'administration en a déduit que le prix moyen des biens cédés par la SCI des petits bois s'établissait à 1 999 euros par m² et qu'en conséquence, la valeur du bien détenu par la SCI, à la date de la cession de ses parts par M. D..., s'élevait à 259 870 euros, constituant l'actif brut de la société à la date de la cession, le passif de la société étant par ailleurs considéré comme nul à cette même date. L'administration a donc fixé la valeur des parts détenues par M. D... à 129 500 euros, de laquelle elle a déduit le prix d'acquisition, pour estimer que la plus-value imposable était de 107 939 euros avant abattement, et de 94 986 euros après application de l'abattement de 6 % pour durée de détention.

6. Pour contester l'évaluation de l'administration, le requérant fait tout d'abord valoir que les comparables retenus par l'administration ne sont pas pertinents, dès lors qu'ils concernent des biens d'une superficie inférieure et que ces cessions sont intervenues plus de quatre ans avant la cession de ses parts. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point précédent, les comparables sont des cessions immobilières faites par la SCI des petits bois sur des biens issus de la division parcellaire du terrain acquis en 2006 et que ces biens, situés à la même adresse, appartiennent donc au même ensemble immobilier et à la même copropriété que les lots encore en possession de la SCI au moment de la cession des parts. En outre, le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir que la différence de superficie et les quatre ans écoulés entre ces cessions en 2009 et la cession des parts en 2014 auraient eu une influence significative sur la valeur vénale du bien. De plus, en se bornant à produire deux attestations, postérieures au contrôle et produites pour les besoins de la cause, rédigées par le gérant de la SCI des petits bois et l'acquéreur des parts sociales, le requérant ne justifie pas de ce que le pavillon détenu par la SCI n'était pas achevé au moment de la cession des parts, alors que les déclarations d'achèvement ont été déposées, tant par la SCI que par l'acquéreur du pavillon, auprès de l'administration en mentionnant une date d'achèvement au 1er juin 2014, seulement cinq jours après la cession des titres litigieux, rendant très peu probables les allégations du requérant sur l'ampleur des travaux restant à effectuer. Par ailleurs, s'agissant du passif de la SCI des petits bois, il résulte de l'instruction que les emprunts contractés en 2006 pour l'acquisition du terrain, d'un montant de 171 000 euros, ont été entièrement remboursés en 2011, ainsi que le prouve la radiation des hypothèques correspondantes auprès du service de publicité foncière le 22 juillet 2011, grâce au produit des premières cessions des lots s'élevant à 439 000 euros. Si le requérant soutient que la SCI avait contracté un autre emprunt auprès de la famille de son aco-associé en 2007 pour un montant de 150 000 euros qui restait impayé, intérêts compris, à hauteur de 202 500 euros au moment de la cession des titres, il ne justifie pas de cette allégation par la seule production d'un contrat de prêt entre particuliers, non enregistré, qui n'a pas date certaine en l'absence de pièce contemporaine corroborant son existence et d'une attestation du gérant de la SCI des petits bois, qui ne sont tous deux appuyés d'aucune pièce comptable ou financière. Enfin, le requérant se prévaut d'un rapport d'expertise comptable, attestant de ce que la valeur de la SCI au premier semestre de 2014 était négative. Toutefois, il ressort des termes de ce rapport, rédigé en décembre 2020, que l'évaluation n'est corroborée par aucune pièce et est uniquement fondée sur les allégations de la société, notamment sur l'existence d'un passif et l'évaluation des travaux restant à effectuer dans le dernier pavillon, l'expert-comptable précisant d'ailleurs que l'actif est pris en compte pour sa valeur historique, cette valeur devant être " actualisée afin de prendre en compte la plus-value immobilière latente ". Dans ces conditions, M. D... n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération du montant de la plus-value calculée par l'administration.

Sur les pénalités :

7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

8. Pour justifier l'application de la majoration pour manquement délibéré, l'administration fait valoir que M. D..., en sa qualité de professionnel de l'immobilier, ne pouvait ignorer la valeur réelle du bien détenu en pleine propriété par la SCI des Petits Bois, estimée à plus de 250 fois plus que la valeur déclarée par le requérant dans l'acte de cession soumis à l'enregistrement. Dans ces conditions, l'administration apporte la preuve qui lui incombe du caractère délibéré du manquement à ses obligations déclaratives commis par le requérant.

9. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. En l'absence de dépens, les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à leur paiement ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Besson-Ledey, présidente,

M. de Miguel, premier conseiller,

Mme Liogier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2025.

La rapporteure,

C. Liogier La présidente,

L. Besson-Ledey La rapporteure,

C. LIOGIERLa présidente,

L.Besson-Ledey

La greffière,

A. Audrain-Foulon

La greffière,

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23VE01321 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE01321
Date de la décision : 08/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: Mme Claire LIOGIER
Rapporteur public ?: M. ILLOUZ
Avocat(s) : SELARL FEUGAS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-08;23ve01321 ?
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