La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/06/2025 | FRANCE | N°23VE02744

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 05 juin 2025, 23VE02744


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 29 juin 2021 par lequel le maire de Mennecy a abrogé les délégations de fonctions et de signature qu'il lui avait accordées en sa qualité de première adjointe au maire, d'annuler la délibération du 16 juillet 2021 par laquelle le conseil municipal de Mennecy s'est prononcé contre son maintien dans ses fonctions d'adjointe au maire, d'enjoindre à la commune de Mennecy de la rétablir dans ses f

onctions d'adjointe au maire déléguée, avec les attributions qui étaient les siennes et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 29 juin 2021 par lequel le maire de Mennecy a abrogé les délégations de fonctions et de signature qu'il lui avait accordées en sa qualité de première adjointe au maire, d'annuler la délibération du 16 juillet 2021 par laquelle le conseil municipal de Mennecy s'est prononcé contre son maintien dans ses fonctions d'adjointe au maire, d'enjoindre à la commune de Mennecy de la rétablir dans ses fonctions d'adjointe au maire déléguée, avec les attributions qui étaient les siennes et les indemnités qui étaient liées, rétroactivement à compter du 29 juin 2021 et, enfin, de condamner la commune de Mennecy à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi.

Par un jugement n° 2107376 du 13 octobre 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2023, Mme C... représentée par Me Blanchetier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette délibération ;

3°) d'enjoindre à la commune de Mennecy de la rétablir dans ses fonctions d'adjointe au maire déléguée, avec les attributions qui étaient les siennes et les indemnités qui étaient liées, rétroactivement à compter du 29 juin 2021 ;

4°) de condamner la commune de Mennecy à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle a subi ;

5°) et de mettre à la charge de la commune de Mennecy la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation ;

- l'arrêté du maire du 29 juin 2021 est dicté par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale ;

- elle n'a jamais conclu d'accord préalable sur sa démission de son poste de première adjointe au maire ;

- la délibération du 16 juillet 2021 doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté portant retrait de délégation ;

- elle a subi un préjudice moral qui doit être indemnisé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2025, la commune de Mennecy, agissant par son maire en exercice, représentée par Me Pintat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, dès lors qu'elle n'expose aucun moyen ni aucune conclusion tendant à l'annulation ou à la réformation du jugement attaqué ;

- les moyens d'annulation soulevés ne sont pas fondés ;

- la commune n'a commis aucune faute de nature à entrainer l'engagement de sa responsabilité.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Balmelle pour la commune de Mennecy.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., élue conseillère municipale de la commune de Mennecy depuis 1994, alors première adjointe au maire et bénéficiaire d'une délégation de fonctions et de signatures lui attribuant des compétences en matière de sport et de vie associative, s'est portée candidate aux élections départementales de l'Essonne du 20 et 27 juin 2021, avec le soutien du maire de la commune. Elle a été élue au conseil départemental de l'Essonne le 27 juin 2021. Par un arrêté du 29 juin 2021, le maire de la commune de Mennecy a abrogé ses délégations de fonctions et de signature puis, par une délibération du 16 juillet 2021, le conseil municipal s'est prononcé contre son maintien dans ses fonctions d'adjointe au maire.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune tiré de l'absence de conclusions et de moyens dirigés contre le jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, applicables à l'introduction de l'instance d'appel en vertu des dispositions de l'article R. 811-13 du même code : " La juridiction est saisie par requête. (...) Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".

3. Par sa requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 décembre 2023, Mme C... conteste le jugement du tribunal administratif n° 2107376 du 13 octobre 2023 portant rejet de sa demande de première instance. Après avoir rappelé les faits et la procédure, l'intéressée a désigné la décision attaquée comme étant celle rendue par le tribunal administratif. Contrairement à ce que soutient la commune de Mennecy, elle doit être regardée, comme saisissant la cour de conclusions d'appel tendant à l'annulation du jugement attaqué et à ce qu'il soit fait droit à ses demandes de première instance. Par suite, la fin de non-recevoir que la commune de Mennecy oppose à ce sujet doit être écartée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Eu égard à l'office du juge d'appel, qui est appelé à statuer, d'une part, sur la régularité de la décision des premiers juges, et, d'autre part, sur le litige qui a été porté devant eux, le moyen tiré de ce que le tribunal a commis une erreur d'appréciation en considérant que le tract de M. D... E... subordonnait son soutien à la démission de Mme C... de son poste de première adjointe, se rattache au bien-fondé du jugement et n'affecte pas sa régularité. La requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir que le jugement est irrégulier sur ce point.

Sur les conclusions à fins d'annulations de l'arrêté du maire du 29 juin 2021 et de la délibération du conseil municipal du 16 juillet 2021 :

5. Aux termes du premier et du dernier alinéa de l'article L. 2121-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. (...) Lorsque le maire a retiré les délégations qu'il avait données à un adjoint, le conseil municipal doit se prononcer sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions. ". Aux termes de l'article L. 2122-20 du même code : " Les délégations données par le maire en application des articles L. 2122-18 et L. 2122-19 subsistent tant qu'elles ne sont pas rapportées. ".

6. Il résulte de ces dispositions que le maire peut, à tout moment, mettre fin aux délégations qu'il a consenties, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale.

7. Il ressort des pièces du dossier, qu'un tract intitulé " Ensemble, faisons gagner Mennecy avec B... C... et Patrick Imbert ", a été distribué quelques jours avant les élections départementales de l'Essonne des 20 et 27 juin 2021. Il ressort des termes de ce tract qu'en cas de succès à ces élections la requérante s'est engagée à rester au conseil municipal mais à quitter ses fonctions d'adjointe au maire. La commune précise en défense dans son mémoire produit en appel que " Mme C... ne peut feindre d'ignorer que le soutien accordé par le maire durant sa campagne électorale était conditionné, en cas de succès, par le passage de relais de sa fonction d'adjoint à un conseiller plus jeune ". Il ressort des pièces du dossier, que lors d'une réunion du groupe majoritaire au conseil municipal de Mennecy qui s'est tenue le lendemain de l'élection, le 28 juin 2021, Mme C... a refusé de présenter sa démission de ses fonctions de première adjointe. Le maire a le même jour envoyé une lettre aux conseillers municipaux du groupe majoritaire mentionnant que le refus de démissionner de la requérante constituait " un manquement à un engagement moral " que celui-ci n'avait " plus la confiance nécessaire pour pouvoir la garder comme première adjointe " car il ne pouvait " accepter le mensonge et la déloyauté ".

8. L'arrêté contesté du 29 juin 2021, par lequel le maire de la commune de Mennecy a abrogé les délégations de fonctions et de signatures qu'il avait consenties à Mme C... n'est pas motivé par un reproche adressé à l'intéressée dans l'exercice de ces délégations, mais par la rupture du lien de confiance entre le maire et son adjointe. Eu égard aux répercussions sur la gestion de la commune du différend décrit au point précédent, exprimé publiquement, l'abrogation de ces délégations ne peut être regardée comme étant illégale au motif qu'elle aurait été inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale. Par suite, le moyen tiré de ce que la délibération du conseil municipal 16 juillet 2021 doit être annulée par voie de conséquence ne peut qu'être écarté.

Sur les conclusions indemnitaires :

9. Mme C... ne pouvant se prévaloir d'aucune illégalité fautive concernant tant l'arrêté du maire de Mennecy du 29 juin 2021 portant abrogation de ses délégations de fonctions et de signature, que la délibération du 16 juillet 2021 par laquelle le conseil municipal de cette commune s'est prononcé contre son maintien dans ses fonctions d'adjointe au maire, ses conclusions indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées.

10. . Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions en litige et à la condamnation de la commune de Mennecy à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis. Ses conclusions à fin d'injonction doivent, par suite, être également rejetées.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mennecy, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la requérante demande au titre de ces dispositions. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... le versement d'une somme au titre de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Mennecy fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à la commune de Mennecy.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, à laquelle siégeaient :

M. A..., premier vice-président, président de chambre,

Mme Mornet, présidente-assesseure,

Mme Aventino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2025.

Le président-rapporteur,

B. A...

La présidente assesseure,

G. Mornet

La greffière,

I. Szymanski

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23VE02744


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE02744
Date de la décision : 05/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : BLANCHETIER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-05;23ve02744 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award