Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 7 septembre 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé la SAS Europe services déchets à le licencier pour motif disciplinaire.
Par un jugement nos 2011507, 2013450 du 13 octobre 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 7 septembre 2020. Il a annulé la décision du 1er décembre 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a retiré celle du 7 septembre 2020 et a à nouveau autorisé le licenciement de M. B.... Le tribunal a également condamné l'État à verser à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a enfin rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 novembre 2022 et 17 novembre 2023, la SAS Europe services déchets, représentée par Me Cap, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 octobre 2022 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. B... ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'absence de mention du mandat de conseiller du salarié détenu depuis le 11 septembre 2020 par M. B..., donc postérieurement à la décision initiale du 7 septembre 2020 mais antérieurement à la décision du 1er décembre 2020 en litige, n'était pas de nature à entacher cette dernière d'illégalité ;
- l'inspectrice du travail des Hauts-de-Seine était compétente pour prendre la décision contestée ;
- la procédure de licenciement a été régulièrement menée ; en particulier, la procédure disciplinaire et la consultation du comité social et économique (CSE) ont été respectées ;
- le licenciement de M. B... était justifié au vu des violences qui ont eu lieu à l'occasion de l'altercation qui l'a opposé à un autre salarié sur leur lieu de travail et au cours des heures de travail.
Par un mémoire, enregistré le 20 septembre 2023, la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 2011507, 2013450 du 13 octobre 2022 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. B....
Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... dans sa demande de première instance ne sont pas fondés en se rapportant à son mémoire de première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2023, M. A... B..., représenté par Me Dadi, demande à la cour :
1°) d'annuler la décision du 1er décembre 2020 par laquelle l'inspectrice du travail a retiré la décision du 7 septembre 2020 et a à nouveau autorisé son licenciement ;
2°) de mettre à la charge de la SAS Europe services déchets la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 13 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 14 mars 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hameau,
- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... était employé par la SAS Europe services déchets en tant que conducteur de véhicule d'enlèvement à son dépôt de Gennevilliers. Il était délégué syndical de l'établissement et, à ce titre, représentant syndical au sein du comité social et économique de l'établissement nord de cette entreprise. Il a acquis le 11 septembre 2020 la qualité de conseiller du salarié. Par une décision du 7 septembre 2020, retirée puis remplacée par une décision du 1er décembre 2020, l'inspectrice du travail de la section 1-1 des Hauts-de-Seine a accordé à l'entreprise l'autorisation de le licencier pour faute, au motif que M. B... a pris part à une violente altercation survenue, le 11 juin précédent, sur son lieu de travail et aux horaires de travail. Le licenciement de M. B... a été prononcé le 9 décembre 2020 par la SAS Europe services déchets. Cette société et la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles font appel du jugement du 13 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 1er décembre 2020 ayant autorisé ce licenciement.
2. Ainsi que l'a rappelé à juste titre le tribunal dans le jugement attaqué, pour opérer les contrôles auxquels elle est tenue de procéder lorsqu'elle statue sur une demande d'autorisation de licenciement, l'autorité administrative doit prendre en compte chacune des fonctions représentatives du salarié. Lorsque l'administration a eu connaissance de chacun des mandats détenus par l'intéressé, la circonstance que la demande d'autorisation de licenciement ou la décision autorisant le licenciement ne fasse pas mention de l'un de ces mandats ne suffit pas, à elle seule, à établir que l'administration n'a pas, comme elle le doit, exercé son contrôle en tenant compte de chacun des mandats détenus par le salarié protégé.
3. Il ressort des pièces du dossier que, d'une part, la décision du 1er décembre 2020 ne mentionne pas le mandat de conseiller du salarié obtenu par M. B... le 11 septembre 2020. D'autre part, le mémoire en défense de première instance, auquel la ministre se rapporte intégralement en appel, mentionne expressément que la décision en litige, prise pour remplacer celle du 7 septembre 2020, " n'a donc pas conduit à un réexamen de la demande ou des motifs du licenciement ", et révèle ainsi que l'administration n'a pas pris en compte le mandat de conseiller du salarié obtenu entre la décision initiale du 7 septembre 2020 et celle du 1er décembre 2020, qui l'a remplacée, et n'a donc pas respecté les principes exposés au point 2 du présent arrêt.
4. Il résulte de ce qui précède que la SAS Europe services déchets et la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision d'autorisation de licenciement de M. B... datée du 1er décembre 2020.
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS Europe services déchets ni de l'Etat les sommes que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la SAS Europe services déchets soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS Europe services déchets et les conclusions de la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de M. B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Europe services déchets, à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 13 mai 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
M. Tar, premier conseiller,
Mme Hameau, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mai 2025.
La rapporteure,
M. HameauLa présidente,
F. VersolLa greffière,
A. Gauthier
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22VE02640