Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme L... G..., M. J... G..., M. C... A..., Mme B... P..., M. E... P..., Mme K... D..., M. S... D..., Mme O... R..., M. M... R..., la société SCF 26 Worldwide, la société civile immobilière (SCI) FRGB, la société civile professionnelle (SCP) Laporte, Mme I... H... et M. Q... D... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 par lequel le préfet du Cher a délivré à la société par actions simplifiée (SAS) Biogaz en Haut Berry un permis de construire portant sur une unité de méthanisation située sur le territoire de la commune de Brécy.
Par un jugement n° 2004449 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 8 décembre 2023, le 6 novembre 2024 et le 3 janvier 2025, Mme L... G..., M. J... G..., M. C... A..., Mme B... P..., M. E... P..., Mme K... D..., M. S... D..., Mme O... R..., M. M... R..., la société SCF 26 Worldwide, la SCI FRGB, la SCP Laporte et M. Q... D..., représentés par Me Lepage, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 du préfet du Cher ;
3°) de mettre à la charge du préfet du Cher et de la SAS Biogaz en Haut Berry la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête est recevable dès lors que chacun des requérants justifie d'un intérêt à agir ;
- le jugement est entaché d'une erreur d'appréciation concernant l'irrégularité de l'avis de la commune de Brécy, signé au nom du maire de cette commune, qui s'avère être associé de la SAS Biogaz Berry et bénéficiaire d'une partie du digestat produit par l'installation en litige ;
- le jugement est entaché d'une erreur d'appréciation quant à l'insuffisance de la description, dans le dossier de demande de permis de construire, de l'insertion du projet dans son environnement, ainsi que des risques pour la sécurité routière ;
- le jugement est entaché d'une erreur d'appréciation quant à la méconnaissance par l'arrêté du préfet des dispositions de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune ;
- il est entaché d'une erreur d'appréciation quant à la méconnaissance par l'arrêté du préfet des dispositions de l'article N3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune et de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme ;
- il est entaché d'une erreur d'appréciation quant à la méconnaissance par l'arrêté en litige des dispositions de l'article N11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense enregistrés le 22 mars 2024, le 24 novembre 2024 et le 20 janvier 2025, la SAS Biogaz en Haut Berry, représentée par Me Descubes, conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête en raison de son irrecevabilité ;
2°) à titre subsidiaire, au rejet de la requête au fond ;
3°) à titre infiniment subsidiaire, à ce qu'elle soit invitée à déposer une demande de permis de construire tendant à régulariser un éventuel vice de légalité de l'arrêté de permis de construire du 12 octobre 2020 en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, ou, à défaut, à ce que soit prononcée l'annulation partielle de l'arrêté en litige en application des dispositions de l'article L. 600-5 du même code ;
4°) et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable faute d'intérêt à agir des requérants ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
- à titre subsidiaire, la cour pourra faire application des pouvoirs qu'elle tire des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2024, le ministre du logement et de la rénovation urbaine conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les requérants ne justifient d'aucun intérêt à agir ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
- à titre subsidiaire, la cour pourra faire application des pouvoirs qu'elle tient des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Vu les autres pièces du dossier.
Par une ordonnance du 27 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des dispositions des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Cozic,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- et les observations de Me Begel pour M. et Mme G... et autres, et de Me Jarroux, pour la SAS Biogaz en Haut Berry.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Biogaz en Haut Berry a conçu un projet d'unité de méthanisation devant être implanté au lieu-dit " le champ des Brosses ", sur le territoire de la commune du Brécy (18220). En vue de la réalisation de ce projet, le préfet du Cher a, d'une part, délivré par arrêté du 12 octobre 2020 un permis de construire à la SAS Biogaz en Haut Berry, d'autre part, enregistré l'unité de méthanisation au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, par un arrêté du 18 février 2021. Par un jugement n° 2004449 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande tendant à l'annulation de l'arrêté de permis de construire. Dans leur requête, M. et Mme G..., M. A..., M. et Mme P..., M. et Mme D..., M. et Mme R..., la société SCF 26 Worldwide, la SCI FRGB, la SCP Laporte et M. D... demandent l'annulation de ce jugement et de l'arrêté de permis de construire du 12 octobre 2020.
Sur la légalité de l'arrêté du 12 octobre 2020 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme : " Par exception aux dispositions du a de l'article L. 422-1, l'autorité administrative de l'Etat est compétente pour se prononcer sur un projet portant sur : (...) b) Les ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d'énergie (...). Lorsque la décision est prise par le préfet, celui-ci recueille l'avis du maire (...) ". Aux termes de l'article L. 422-7 du même code : " Si le maire (...) est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis (...), soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune (...) désigne un autre de ses membres pour prendre la décision ".
3. Les requérants font valoir que le maire de la commune de Brécy, qui est associé de la SAS Biogaz en Haut Berry, est intéressé au projet pour lequel le permis de construire en litige a été délivré, et qu'en conséquence, le deuxième adjoint au maire, M. N... F..., ne pouvait légalement signer l'avis favorable rendu le 11 mai 2020, au nom du maire qui lui avait délégué sa signature. Ils soutiennent que le conseil municipal de la commune de Brécy aurait dû désigner un autre de ses membres, afin que ce dernier rende l'avis sollicité par le préfet du Cher. Toutefois, au soutien du moyen qu'ils invoquent, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir, contre l'avis en cause, des dispositions précitées de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme, qui ne sont pas applicables dans les cas où, comme en l'espèce, l'État est compétent pour prendre la décision de signer un permis de construire. En tout état de cause, cet avis favorable, rendu le 11 mai 2020, " sous réserve des règles d'exploitation en vigueur ", se borne à préciser la situation du projet en cause, les équipements desservant le terrain, ainsi que la fiscalité applicable sur le territoire communal. Il ne saurait en l'espèce être regardé, au regard de son contenu et de sa portée, comme ayant été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise par le préfet ou comme ayant privé les intéressés d'une garantie.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement ". Les dispositions de l'article R. 431-9 du même code prévoient en outre que : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. (...) / Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder ". Enfin, aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. "
5. Les requérants soutiennent que la composition du dossier de demande de permis de construire était insuffisante concernant, d'une part, la description de l'insertion du projet dans l'environnement, et d'autre part, la description des risques pour la sécurité routière engendrés par le projet.
6. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la notice du projet architectural jointe à la demande de permis de construire indique que le lieu d'implantation du projet en cause se situe dans le Cher, à 20 kilomètres de Bourges, sur une parcelle cultivée de 6,6 hectares, " au milieu d'une plaine agricole de la champagne berrichonne ", dans un secteur " essentiellement à vocation agricole, avec de grandes parcelles en cultures et prairies ". La notice précise encore que le terrain concerné est actuellement utilisé en culture et fait état des caractéristiques de l'habitat dans les environs du projet. Sur ce point, la notice distingue les centres-bourgs éloignés du site et les trois habitations situées chacune à quelques centaines de mètres du site, qu'elle désigne et localise précisément, à savoir, sur les lieux-dits de l'Orme Diot, les Allioux et Maisonneuve. Si le plan de cadastre joint au dossier de demande de permis de construire ne représente que deux de ces trois habitations situées à proximité du site d'implantation et si les vues n'ont été prises qu'à partir de ces deux habitations, situées au sud du projet, le plan de situation, joint aux " compléments d'information à la demande de permis de construire " adressés au service instructeur, représente, certes à grande échelle mais distinctement, le lieu d'implantation du projet, les trois habitations et le bois, situés à proximité. En outre, l'une des vues versées au dossier permet d'entre-apercevoir le lieu-dit des Allioux depuis l'Orme Diot. Diverses photographies sont également jointes au dossier, donnant un aperçu, sous différentes perspectives, de l'insertion paysagère du projet, en distinguant l'état existant et celui résultant du projet.
7. D'autre part, la notice descriptive du projet architectural indique que " le site est desservi par la D52 " et que " l'accès au site d'étude est possible depuis la route de Sainte Solange-Brécy, la départementale 52 puis via le chemin des Brosses ". Le plan de situation précité, joint aux " compléments d'information à la demande de permis de construire ", représente dans toute sa longueur le " chemin des Brosses " ou voie communale n° 7, desservant le site d'implantation du projet, reliant la route départementale 52 au sud à la route départementale 12 au nord. Les plans de masse fournis au dossier de demande de permis de construire permettent également de visualiser l'accès au site ainsi que les espaces de circulation en son sein, en figurant notamment la zone de retournement, identifiable, à défaut d'être expressément mentionnée en légende.
8. Au regard de ces éléments, mentionnés aux points 6 et 7 ci-dessus, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier de demande de permis de construire serait entaché d'omissions, inexactitudes ou insuffisances, de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
9. En troisième lieu, l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Brécy dispose que : " sont interdits : / dans le secteur N, toute construction nouvelle et toute nature d'occupation du sol autre que : - les constructions, ouvrages et installations liées à la réalisation des équipements d'infrastructure et d'intérêt collectif (...) ". Aux termes de l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme : " I.- Dans les zones agricoles, naturelles ou forestières, le règlement peut : / 1° Autoriser les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière du terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages (...) ". L'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime prévoit que : " Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation. (...) Il en est de même de la production et, le cas échéant, de la commercialisation, par un ou plusieurs exploitants agricoles, de biogaz, d'électricité et de chaleur par la méthanisation, lorsque cette production est issue pour au moins 50 % de matières provenant d'exploitations agricoles. (...) ". Enfin, l'article R. 311-18 du même code précise que : " Pour que la production et, le cas échéant, la commercialisation de biogaz, d'électricité et de chaleur par la méthanisation soient regardées comme activité agricole en application de l'article L. 311-1, l'unité de méthanisation doit être exploitée et l'énergie commercialisée par un exploitant agricole ou une structure détenue majoritairement par des exploitants agricoles. Ces exploitants agricoles sont, soit des personnes physiques inscrites au registre mentionné à l'article L. 311-2, soit des personnes morales dont au moins l'un des associés, détenant au moins 50 % des parts de la société, est un exploitant agricole inscrit à ce registre. (...) ".
10. Il ressort des pièces du dossier que l'unité de méthanisation en projet doit être implantée sur une parcelle située en zone N du territoire de la commune de Brécy.
11. D'une part, ainsi que l'ont relevé les premiers juges au point 14 du jugement attaqué, l'unité de méthanisation en cause, qui permettra d'injecter du biogaz dans le réseau public de distribution de gaz, constitue une installation liée à la réalisation d'équipements d'infrastructures et d'intérêt collectif, au sens des dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Brécy.
12. D'autre part, l'unité de méthanisation en projet constitue en l'espèce une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime. En effet, les statuts de la SAS Biogaz en Haut Berry indiquent que la société est composée de douze associés, personnes physiques ou personnes morales, représentant onze exploitations agricoles, situées sur les communes de Brécy, Sainte Solange, Nohant-en-Goût et Rians. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le processus de méthanisation sera réalisé sur le site à partir de diverses matières d'origine agricole, à savoir du fumier de volailles, de bovins et équins, du lisier de bovins avec restes de fourrage et jus de plateforme d'ensilage, des déchets de céréales, de luzerne verte, d'ensilage de céréales, mais aussi d'eaux usées industrielles issues du lavage de process de productions alimentaires, ainsi que de tontes de pelouse. L'ensemble des intrants proviendront à 79 % des exploitations des associés, alors que le reste proviendra de l'extérieur, sur le fondement de contrats. L'épandage du digestat doit par ailleurs être réalisé sur les parcelles exploitées par les douze associés de la SAS Biogaz en Haut Berry, ce qui concerne quatorze structures dans un rayon de 10 kilomètres autour du projet. De ce fait, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les installations en cause seraient incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, quelle que soit la surface que celles-ci vont occuper sur la parcelle d'implantation du projet.
13. En outre, il ressort des pièces du dossier que l'implantation de l'unité de méthanisation, à proximité du bois des Brosses, n'implique aucun déboisement. Si les requérants font valoir que l'activité de chasse dans ce bois sera affectée par la présence et le fonctionnement de l'unité de méthanisation, ils n'apportent aucun document à l'appui d'une telle assertion. Ils ne versent pas davantage de pièces au dossier en vue d'établir les répercussions de l'installation sur l'état de la faune et de la végétation vivant dans le bois des Brosses. Les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le projet en cause porterait atteinte à la sauvegarde des espaces naturels.
14. Enfin, l'atteinte à la sauvegarde des paysages alléguée par les requérants apparaît limitée, du fait de l'absence de caractère spécial ou singulier du paysage environnant et dès lors que plusieurs aménagements vont faciliter l'insertion visuelle de l'unité de méthanisation en projet, notamment le choix des matériaux et des couleurs des différents éléments de construction, ainsi que la réalisation de merlons arborés sur trois côtés du site.
15. Pour l'ensemble des motifs ci-dessus mentionnés, aux points 11 à 14 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Brécy et de l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme, doit être écarté.
16. En quatrième lieu, aux termes de l'article N3 du règlement du plan local d'urbanisme de Brécy : " Voirie : / Les dimensions, formes et caractéristiques techniques des voies nouvelles doivent être adaptées aux usages qu'elles auront à supporter ou aux constructions ou installations qu'elles devront desservir. Elles devront en particulier satisfaire aux exigences de la défense contre l'incendie, de la protection civile et de l'enlèvement des ordures ménagères. / Accès : / Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. / Au long des routes nationale et départementales, les accès sont limités à un seul par îlot de propriété. Ils sont interdits pour les terrains desservis par une autre voie ".
17. À la date de l'adoption du plan local d'urbanisme de la commune de Brécy, le 30 novembre 2007, l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme, dans sa version issue du décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007, entrée en vigueur le 1er octobre 2007, prévoyait que les dispositions du nouvel article R. 111-5 du même code, relatives à la desserte du terrain d'un projet par des voies publiques ou privées et aux conditions d'accès au terrain, auparavant codifiées à l'article R. 111-4, n'étaient pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme. Ainsi, les requérants ne sauraient utilement se prévaloir de ces dispositions du règlement national d'urbanisme, mais uniquement des dispositions précitées de l'article N3 du règlement du plan local de la commune de Brécy.
18. Or, les dispositions précitées de l'article N3 du règlement du plan local d'urbanisme de Brécy ne sont relatives qu'aux " accès " ainsi qu'aux " voies nouvelles ", et ne sauraient donc être utilement invoquées par les requérants au soutien de l'allégation selon laquelle le chemin des Brosses, ou voie communale 7, ainsi que la route départementale 12 au nord du site et la route départementale 52 au sud de celui-ci, seraient de dimensions et de structure insuffisantes pour accueillir le trafic de véhicules induit par le projet d'unité de méthanisation porté par la SAS Biogaz en Haut Berry.
19. En tout état de cause, le chemin des Brosses, qui dessert le site d'implantation du projet, actuellement peu emprunté, devrait l'être davantage du fait de l'exploitation de l'unité de méthanisation, mais seulement à hauteur de un à deux véhicules avec bennes ou tonnes supplémentaires par jour en " période normale ", c'est-à-dire dix mois sur douze, et à hauteur de vingt à vingt-trois véhicules avec bennes ou tonnes par jour pendant la période d'ensilage, uniquement durant deux mois sur douze. Il ressort en outre des pièces du dossier que, depuis le site de méthanisation, le trafic devrait être réparti dans trois directions, vers l'ouest, via la route départementale 52 en direction de Sainte-Solange, vers l'est, via la route départementale 52 en direction de Brécy, et vers le nord, via la du chemin des brosses (voie communale 7) en direction de la route départementale 12. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne ressort pas des pièces du dossier que le chemin des Brosses comporterait des virages dangereux ou ne permettrait pas une visibilité suffisante pour assurer la sécurité du trafic. Il est constant que le site d'implantation du projet se situe hors de toute agglomération, à proximité de routes peu fréquentées, au milieu de paysages assurant une large visibilité depuis les routes empruntées. Il ressort en outre du rapport d'expertise versé au dossier par les requérants que la bande de roulement du chemin des Brosses est en moyenne de trois mètres, suffisante pour le gabarit des engins qui seront utilisés pour le transport de matière et de digestat. Si, se fondant sur le rapport d'expert qu'ils ont mandaté, les requérants émettent des doutes sur la qualité des fondations et de la structure de la voie communale n° 7 et préconisent l'élargissement de la voie à au moins 5,50 mètres pour assurer la possibilité de croisement des véhicules, ni le SDIS, ni le département, ni la commune, n'ont émis d'avis défavorable s'agissant de la qualité des voies et dessertes du site d'implantation de l'unité de méthanisation, à l'exception de la largeur de la route départementale 52, au niveau de l'embranchement avec le chemin des Brosses. Toutefois, l'arrêté en litige formule plusieurs prescriptions à respecter, notamment l'aménagement du carrefour de la route départementale 52 et du chemin des Brosses, afin de permettre à cet endroit les girations des véhicules dans de bonnes conditions. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article N3 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.
20. En dernier lieu, l'article N11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Brécy se borne à indiquer qu'il est fait application des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, dont les dispositions ont depuis été reprises à l'article R. 111-27 du même code, aux termes duquel, dans sa version applicable au présent litige : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".
21. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
22. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'unité de méthanisation est situé dans une plaine agricole, essentiellement constituée de grandes parcelles cultivées et de prairies. Le paysage environnant ne présente pas de caractéristique particulière ni de perspective remarquable. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le bois de neuf hectares, situé à proximité du site d'implantation du projet, serait altéré par celui-ci. La présence de ce bois permettra en revanche de diminuer la visibilité de l'installation depuis les habitats situés au nord-est du site. Des mesures sont par ailleurs envisagées afin de limiter la visibilité de l'installation, comme l'emploi de couleurs neutres pour les éléments de constructions, ainsi que l'aménagement de merlons arborés sur les parties nord-ouest, sud-ouest et sud-est du site. Au regard de ce qui précède, les dispositions de l'article N11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune et de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnues.
23. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense par la SAS Biogaz en Haut Berry et par le préfet du Cher, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Sur les frais de justice :
24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SAS Biogaz en Haut Berry, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. et Mme G..., M. A..., M. et Mme P..., M. et Mme D..., M. et Mme R..., la société SCF 26 Worldwide, la SCI FRGB, la SCP Laporte et M. Q... D..., la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SAS Biogaz en Haut Berry et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme L... G..., M. J... G..., M. C... A..., M. B... P..., M. E... P..., Mme K... D..., M. S... D..., Mme O... R..., M. M... R..., la société SCF 26 Worldwide, la SCI FRGB, la SCP Laporte et M. Q... D... est rejetée.
Article 2 : Mme L... G..., M. J... G..., M. C... A..., M. B... P..., M. E... P..., Mme K... D..., M. S... D..., Mme O... R..., M. M... R..., la société SCF 26 Worldwide, la SCI FRGB, la SCP Laporte et M. Q... D... verseront, ensemble, à la SAS Biogaz en Haut Berry, la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme L... G..., première dénommée, pour l'ensemble des requérants, à la SAS Biogaz en Haut Berry et au ministre du logement et de la rénovation urbaine.
Copie en sera adressée au préfet du Cher.
Délibéré après l'audience du 10 avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Mornet, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
Mme Aventino, première conseillère,
M. Cozic, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2025.
Le rapporteur,
H. CozicLa présidente,
G. Mornet
La greffière,
S. de Sousa
La République mande et ordonne au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23VE02692