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29/04/2025 | FRANCE | N°22VE02845

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 29 avril 2025, 22VE02845


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge en droits, majorations et intérêts de retard des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014.



Par un jugement n° 2008582 du 27 octobre 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :


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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge en droits, majorations et intérêts de retard des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 2008582 du 27 octobre 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 décembre 2022, M. et Mme B..., représentés par Me Pommerolle, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de le condamner aux dépens.

Ils soutiennent que :

- le tribunal a commis une erreur dans la dévolution de la charge de la preuve ;

- il a commis une erreur de droit et inexactement qualifié les faits en retenant que la somme en litige est une libéralité qu'ils ont consentie à la SARL ADC ;

- c'est à l'administration qu'il revient de prouver qu'ils ont consenti cette libéralité ;

- la somme de 28 300 euros réintégrée à leurs revenus fonciers de l'année 2014 n'était pas une libéralité consentie par M. B... à la SARL ADC, puisque cette société était dans l'impossibilité de payer ces loyers.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la France conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hameau,

- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Aménagement décoration conseil (ADC), qui avait pour objet social l'aménagement, la décoration et l'installation de tous biens meubles relatifs aux travaux du bâtiment, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité, à l'issue de laquelle des rectifications lui ont été proposées notamment au titre de l'exercice 2014. L'administration en a tiré les conséquences en notifiant au foyer fiscal de son gérant de droit M. B..., selon la procédure de rectification contradictoire, des rehaussements de son revenu imposable, notamment au titre de l'année 2014, et en particulier dans la catégorie des revenus fonciers. Les époux B... font appel du jugement du 27 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande en décharge des impositions supplémentaires qui ont résulté de ce rehaussement.

Sur la régularité du jugement :

2. Les époux B... soutiennent que le jugement attaqué est entaché d'erreurs de droit et de qualification des faits. Cependant, ces moyens se rapportent au bien-fondé du jugement et sont sans incidence sur sa régularité. En tant que tels, ils sont inopérants et doivent être écartés.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne la dévolution de la charge de la preuve :

3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours (...) ". D'autre part, aux termes de l'article R. 194-1 du même livre : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) ".

4. Il n'est pas contesté que les contribuables n'ont pas présenté d'observation sur la proposition de rectification du 4 avril 2016 notifiée le 16 avril suivant. Dès lors, il leur appartient, en application des dispositions précitées, de démontrer le caractère exagéré de l'imposition.

En ce qui concerne l'administration de la preuve :

5. Aux termes de l'article 29 du code général des impôts : " (...) le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location, est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires. (...) ".

6. Il résulte de l'instruction que la SARL ADC, qui louait ses locaux à son propre gérant, M. B..., n'a pas versé les loyers dont elle était redevable au titre des six derniers mois de son exercice 2014, mais a inscrit la somme correspondante, soit 28 300 euros, dans ses écritures sur un compte de " charges à payer ". L'administration a estimé que ces loyers avaient ainsi été abandonnés par M. B... et que, cet abandon n'étant pas justifié par des difficultés financières de la SARL ADC, il constituait une libéralité devant être réintégrée aux revenus imposables du foyer fiscal de M. B... au titre de l'année 2014. Les époux B... contestent ce rehaussement.

7. Pour ce faire, ils affirment que l'administration n'établit pas que, compte tenu de ses difficultés financières, la SARL ADC disposait des capacités de trésorerie nécessaires pour payer les loyers abandonnés. Ils font état du solde constamment débiteur du compte courant de la SARL ADC en 2014, du résultat déficitaire et du montant de capitaux propres négatif à la clôture de cet exercice, ainsi que de la baisse drastique de la rémunération de M. B... au cours de celui-ci. Ils arguent, par ailleurs, que l'administration n'est pas fondée à leur opposer de prétendus choix de gestion de la SARL ADC, et ne justifie pas, d'ailleurs, que cette société aurait dû faire primer le paiement de son loyer sur le paiement des fournisseurs tiers. Ils estiment aussi que l'administration n'est pas fondée à opposer l'absence de démarches effectuées auprès de la SARL ADC afin de recouvrer les loyers impayés, dès lors que M. B... est à la fois gérant de cette société et propriétaire des locaux loués par celle-ci. Les requérants se prévalent, en tout état de cause, des capacités de trésorerie insuffisantes de la SARL pour payer ces loyers. Ils arguent encore de ce que la SARL ADC n'a pas omis de déclarer des recettes dans sa comptabilité, mais que l'inscription de certaines de ses recettes a seulement été décalée dans le temps. Ils doivent ainsi être regardés comme soutenant que la comptabilité de la SARL ADC, régulière et dont ressort l'insuffisance de ses capacités de trésorerie pour payer les loyers dus au titre du second semestre de l'année 2014, est opposable à l'administration. Ils soutiennent enfin que, dès lors que le litige porte sur leurs revenus fonciers et non sur des charges déductibles des bénéfices de la SARL ADC, il ne peut leur être utilement reproché de ne pas avoir fait d'avenant au bail afin d'abaisser le loyer de cette société. Cependant, M. et Mme B... ne justifient pas, par leurs arguments, de la réalité des difficultés financières de la SARL ADC qui démontreraient l'intérêt économique que représentait, pour M. B..., l'abandon de loyers à cette société dont il était le gérant de droit. Par ailleurs, l'administration fait précisément valoir que M. B..., en cette qualité, avait un rôle déterminant dans la prise de décision de l'inscription des loyers en compte de charges à payer, et que la dette " fournisseur " de 180 667 euros constatée au bilan social de l'exercice litigieux, ainsi que la situation constamment débitrice en 2014 du compte courant de la société, doivent être mises en regard des créances sociales, notamment des " créances clients " de 297 643 euros constatées au bilan du même exercice. L'administration ajoute que les mouvements constatés sur les relevés bancaires fournis démontrent l'existence des disponibilités bancaires de la SARL ADC pour payer ses charges. M. et Mme B... n'établissent donc pas, comme il leur revenait pourtant de le faire après avoir tacitement accepté les rectifications litigieuses, que les loyers abandonnés ne constituaient pas une libéralité consentie à la SARL ADC et ne devaient donc pas, par suite, être réintégrés à leur revenu imposable au titre de l'année 2014.

8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, celles tendant à la condamnation de l'État aux dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la France.

Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques de la région Île-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Massias, présidente de la cour,

Mme Le Gars, présidente-assesseure,

Mme Hameau, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025.

La rapporteure,

M. HameauLa présidente,

N. MassiasLa greffière,

A. Gauthier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la France en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22VE02845


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22VE02845
Date de la décision : 29/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: Mme Manon HAMEAU
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : POMMEROLLE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-29;22ve02845 ?
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