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29/04/2025 | FRANCE | N°22VE02772

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 29 avril 2025, 22VE02772


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Salsarulo Pharma a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 et des pénalités correspondantes pour un montant total de 29 539 euros.



Par un jugement n° 1909392 du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.



Procédure

devant la cour :



Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 décembre 2022, 20 juin, 11 août, 14...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Salsarulo Pharma a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 et des pénalités correspondantes pour un montant total de 29 539 euros.

Par un jugement n° 1909392 du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 décembre 2022, 20 juin, 11 août, 14 décembre 2023 et 14 janvier 2025, la société Salsarulo Pharma, représentée par Me Jouatte, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2022 ;

2°) de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2013, 2014 et 2015 et des pénalités correspondantes pour un montant total de 29 539 euros.

3°) d'ordonner une expertise afin d'apprécier la nature des dépenses de recherche et développement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas pu bénéficier d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ou l'expert ;

- l'expert du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche désigné n'a aucune compétence en matière de développement des médicaments ;

- le redressement est insuffisamment motivé alors que la charge de la preuve incombe à l'administration fiscale ;

- elle a une activité de développement de médicaments et assure donc une activité de recherche pour cela, et a d'ailleurs obtenu plusieurs brevets nationaux et internationaux ;

- les dépenses liées à l'obtention d'autorisation de mise sur le marché de médicaments doivent être prises en charge au titre du crédit d'impôt de recherche (CIR);

- les dépenses liées aux essais cliniques sont éligibles au CIR, notamment les dépenses relatives au " Contract Research Organization " (CRO) ;

- les sous-traitants Arc Pharma, Icon et RPS ont reçu l'agrément CIR du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ; leurs experts dispensent des avis scientifiques et conseils de travaux ;

- le rejet des dépenses des CRO Icon et PRS est fondé sur des motifs administratifs alors que l'objet des dépenses n'a pas été apprécié ;

- l'ANSM et le Bfarm, organismes publics, n'ont pas besoin de l'agrément CIR et sont incontournables pour obtenir les autorisations de mise sur le marché ;

- les dépenses concernant Polytekhne portent sur les recherches contenant/contenu, indispensables et l'université de Paris sud IX n'a pas besoin d'un agrément CIR ; le rapport des travaux réalisés par cette université a été produit ;

- les dépenses de Pharmatis étaient nécessaires pour la fabrication de lots unidoses pour réaliser ensuite des tests d'analyse ;

- les dépenses de Pharma Consulting CRO étaient nécessaires pour des essais cliniques pour obtenir une autorisation de mise sur le marché en Allemagne ;

- les lots de fabrications spécifiques des laboratoires Chemineau et Pharmatis étaient nécessaires pour des essais cliniques ;

- le comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche n'a pas rendu d'avis négatif ;

- elle a consulté un expert biologiste qui a rendu un avis le 28 novembre 2023 concluant qu'elle exerce une activité de recherche et développement dans le domaine pharmaceutique, que la recherche documentaire est préliminaire et indispensable à toute recherche, que son activité est caractérisée par des travaux innovants, menés dans un contexte d'incertitude et répondant aux critères du CIR.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 22 mai 2023 et 24 juillet 2023, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le vérificateur n'était pas tenu d'engager un débat oral et contradictoire en l'absence d'une seconde demande d'informations complémentaires prévue par l'article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales ; en outre la vérification de comptabilité a eu lieu dans les locaux de l'entreprise où étaient présents les représentants de la société ; enfin, les voies de recours ont été utilisées et le comité consultatif du crédit d'impôt recherche a été saisi ;

- l'expert n'a pas été désigné par l'administration fiscale ; la circonstance que la société juge les diplômes de l'expert insuffisants ne permet pas d'établir un manque de compétence ;

- la proposition de rectification du 18 octobre 2017 mentionne l'impôt concerné, l'année d'imposition, le montant des rectifications envisagées et les textes applicables ; elle permettait à la société de présenter utilement des observations ;

- l'obtention de l'agrément CIR ne suffit pas à valider les dépenses comme éligibles au CIR ;

- les dépenses pour Arc Pharma ont été considérées par l'expert comme des travaux documentaires préparatoires aux demandes d'autorisation de mise sur le marché ou aux essais cliniques et la requérante a déposé antérieurement des brevets sur les deux produits phare ; le courrier du 12 juillet 2019 évoque des prestations d'assistance technico-règlementaires relatives à la constitution de dossiers et des prestations de conseils ;

- pour la société RPS, l'expert a considéré que les dépenses concernaient des travaux de préparation de dossiers pharmaceutiques en vue d'une soumission à l'autorité américaine ; le courriel du 11 juillet 2013 de cette société se rattache à des prestations de conseil et d'accompagnement ;

- pour la société ICON, le montant déclaré concerne un rapport d'évaluation des réponses de l'autorité américaine pour le médicament Laxidose ;

- les travaux confiés à l'ANSM n'ont pas été décrits, ce qui empêche de déterminer la nature des opérations confiées ; cet organisme ne réalise pas d'essais cliniques ; il en est de même pour Bfarm, l'expert a considéré que les travaux confiés consistaient en des travaux d'enregistrement de dossiers d'autorisations de mise sur le marché ;

- concernant les dépenses de Polytekhne, l'expert n'a mentionné aucun travail de recherche et développement ; le comité consultatif n'a d'ailleurs pas pu se prononcer et lever les incertitudes ; les explications de la société sur les interactions contenant/contenu ne sont pas établies par le devis du 6 avril 2013 qui ne prouve pas que les études expérimentales ont été exécutées et facturées ;

- la société Pharmatis n'est pas agréée pour le CIR ;

- la société Pharma consulting n'est pas agréée pour le CIR et l'expert a considéré que les travaux déclarés étaient préparatoires aux demandes d'autorisations de mise sur le marché ou aux essais cliniques .

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Gars,

- les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public,

- et les observations de Me Provost pour la société Salsarulo.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Salsarulo Pharma, qui a pour activité la création et commercialisation de médicaments de gastro-entérologie et d'analgésiques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, prolongée jusqu'au 30 juin 2016 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. À la suite de ce contrôle, l'administration l'a informée par une proposition de rectification en date du 18 octobre 2017, selon la procédure contradictoire, de la remise en cause de crédits d'impôt pour dépenses de recherche obtenus au titre des années 2013, 2014 et 2015. La société a présenté des observations, le 5 décembre 2017, auxquelles l'administration a répondu, le 7 janvier 2018, en confirmant les rectifications. Après saisine de l'interlocuteur départemental et du comité consultatif du crédit d'impôt pour les dépenses de recherche, ces impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement le 14 décembre 2018 et contestées par la société requérante par une réclamation préalable du 6 février 2019. L'administration a rejeté cette réclamation par une décision du 27 mai 2019. La société relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 et des pénalités correspondantes pour un montant de 29 539 euros.

Sur la régularité de la procédure :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales : " I. - La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt mentionné à l'article 244 quater B du code général des impôts est vérifiée soit par un agent dûment mandaté par le directeur général pour la recherche et l'innovation, soit par un délégué régional à la recherche et à la technologie ou un agent dûment mandaté par ce dernier. (...) II. - Dans le cadre de cette procédure, l'agent chargé du contrôle de la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses déclarées envoie à l'entreprise contrôlée une demande d'éléments justificatifs. L'entreprise répond dans un délai de trente jours, éventuellement prorogé de la même durée à sa demande. L'entreprise joint à sa réponse les documents nécessaires à l'expertise de l'éligibilité des dépenses dont la liste est précisée dans la demande d'éléments justificatifs (...) L'agent chargé du contrôle peut envoyer à l'entreprise contrôlée une demande d'informations complémentaires à laquelle celle- ci doit répondre dans un délai de trente jours. Si les éléments fournis par l'entreprise en réponse à cette demande ne permettent pas de mener l'expertise à bien, l'agent chargé du contrôle peut envoyer à l'entreprise contrôlée une seconde demande d'informations à laquelle celle- ci doit répondre dans un délai de trente jours. Dans ce délai, l'entreprise a la faculté de demander un entretien afin de clarifier les conditions d'éligibilité des dépenses. L'agent chargé du contrôle peut se rendre sur place après l'envoi d'un avis de visite (...) III. - L'avis sur la réalité de l'affectation des dépenses à la recherche est émis par les agents chargés du contrôle au vu de la réponse de l'entreprise à la demande d'éléments justificatifs qui lui a été adressée, des documents mentionnés au II, et, le cas échéant, des réponses aux demandes d'informations complémentaires et des éléments recueillis à l'occasion des échanges avec l'entreprise lors de l'entretien dans les locaux de l'administration ou de la visite sur place. (...) L'avis est notifié à l'entreprise et communiqué à la direction générale des finances publiques. Il est motivé lorsque la réalité de l'affectation à la recherche de dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt est contestée ".

3. Les dispositions précitées n'imposent ni à l'administration ni à l'expert désigné par celle-ci d'engager avec l'entreprise un débat oral et contradictoire sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses. Il résulte de l'instruction que l'expert désigné par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche n'a pas adressé de demande d'informations complémentaires à la suite de la réception des éléments justificatifs d'une centaine de pages fournis par la société. La société Salsarulo ne se trouvait ainsi pas dans le cas où la faculté de demander un entretien pour clarifier sa situation est prévue. Par ailleurs, l'avis de l'expert a été adressé à la société préalablement à la proposition de rectification, lui permettant ainsi de faire valoir ses observations, ce qu'elle a fait le 5 décembre 2017, ainsi que dans le cadre de son recours hiérarchique. Elle a également pu être entendue par l'interlocuteur départemental le 23 mai 2018, ainsi que par le comité consultatif du crédit d'impôt pour les dépenses de recherche lors de la séance du 16 octobre 2018. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure pour absence de débat oral et contradictoire doit, par suite, être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

5. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 18 octobre 2017 indique les impôts concernés, le montant des paiements rejetés au titre du crédit d'impôt pour la recherche et le motif de rejet pour chacune des trois années concernées, et mentionne que les conséquences financières de ces rejets sont détaillées en annexe, dans un tableau récapitulant chacun des montants rejetés payés à des sociétés ou organismes tiers ainsi que les motifs pour chacun des montants en litige. Elle est ainsi suffisamment motivée.

6. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que l'expert scientifique ayant donné son avis sur les dépenses de recherche a été désigné par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. La circonstance qu'il aurait à tort considéré que la société Salsarulo Pharma n'exerçait pas elle-même d'activités de recherche mais avait recours à des sous-traitants est sans incidence sur le bien-fondé de l'avis qu'il a rendu dès lors que des dépenses de recherche confiées à des sous-traitants sont éligibles au crédit d'impôt recherche et n'ont pas été rejetées pour ce motif, mais en raison de l'objet des travaux financés, destinés à obtenir une autorisation de mise sur le marché d'un médicament, en Allemagne ou aux Etats-Unis, travaux qui ne sont pas qualifiés de travaux de recherche. Cette distinction ne nécessitait pas de porter une appréciation sur le caractère innovant dans le domaine scientifique de ces travaux. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'expert désigné ne détient pas de compétence en matière d'industrie pharmaceutique et n'était pas compétent pour rendre un avis.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) / II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) d) (...) 2° Des établissements d'enseignement supérieur délivrant un diplôme conférant un grade de master (...) d bis) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à des organismes de recherche privés agréés par le ministre chargé de la recherche (...) ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, qui pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ; / b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. / Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. ". Lorsqu'une entreprise confie à un organisme mentionné au d) ou au d) bis du II de l'article 244 quater B du code général des impôts l'exécution de prestations nécessaires à la réalisation d'opérations de recherche qu'elle mène, les dépenses correspondantes peuvent être prises en compte pour la détermination du montant de son crédit d'impôt quand bien même les prestations sous-traitées, prises isolément, ne constitueraient pas des opérations de recherche.

8. En vertu des dispositions combinées des articles L. 192 et L. 59 du livre des procédures fiscales et 1653 F du code général des impôts, en cas de saisie du comité consultatif des crédits d'impôt pour dépenses de recherche, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par le comité.

Sur les dépenses facturées par la société Arc Pharma, Icon et RPS :

9. Pour remettre en cause l'éligibilité de ces dépenses au bénéfice du crédit d'impôt recherche, l'administration s'est fondée sur l'avis de l'expert qui a considéré que les travaux déclarés étaient des travaux documentaires préparatoires aux demandes d'autorisation de mise sur le marché des médicaments, ou aux essais cliniques et des travaux de préparation de dossiers pharmaceutiques. Plus spécifiquement pour la société RPS, les prestations visent à préparer les dossiers pharmaceutiques en vue d'une soumission à la Food Drug Administration pour obtenir une autorisation de mise sur le marché américain. Il résulte de l'instruction que la société a indiqué le 5 décembre 2017 en réponse à la proposition de rectification, que ces entreprises sont toutes les trois agréées par le MESRI, qu'elles confectionnent les dossiers réglementaires à partir des travaux ou gèrent des projets dans un objectif de recherche clinique et que trois fournisseurs intervenaient ainsi en aval des opérations de recherche. Elle soutient en appel que les experts scientifiques de ces sociétés la conseillent dans les hypothèses techniques et pharmaceutiques. Toutefois, une telle activité de conseil et d'avis ne constitue pas une activité de recherche au sens des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts.

Sur les dépenses exposées auprès de l'ANSM et de Bfarm :

10. L'administration soutient que ces deux autorités d'autorisation et de police sanitaire, compte tenu des missions confiées par les pouvoirs publics, n'effectuent pas elles-mêmes des travaux de recherche, mais vérifient les résultats des études, les protocoles d'essais cliniques et le respect des normes exigées. La circonstance alléguée par la société que ces organismes constituent des administrations incontournables pour obtenir des autorisations pour les essais cliniques et pour mettre à jour les dossiers pharmaceutiques ne permet pas de remettre en cause l'absence de caractère éligible au crédit d'impôt recherche de ces frais.

Sur les dépenses facturées par les sociétés Pharmatis et Pharma consulting CRO :

11. Il n'est pas contesté que ces deux sociétés ne bénéficient pas de l'agrément délivré par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, exigé par les dispositions précitées de l'article 244 quater B du code général des impôts pour que la société requérante puisse bénéficier du crédit d'impôt recherche pour les travaux confiés à ces sociétés.

Sur les dépenses facturées par la société Polytekhne :

12. L'administration soutient que les documents produits par la société devant le comité consultatif du crédit d'impôt pour les dépenses de recherche n'ont pas permis à ce dernier de se prononcer compte tenu de la " confusion entretenue par la société " entre les dépenses relevant d'une recherche scientifique et celles se rapportant à une démarche commerciale, et que ni le rapport d'études produit par la société sur le travail réalisé par l'université Paris XI ni le devis produit n'établissent que la prestation aurait eu lieu au cours de l'année considérée. La société soutient que l'étude concernait l'interaction entre le contenant et le contenu pour le produit Transidose dans un moindre dosage et visait à permettre des essais cliniques au sein de l'université allemande de Magdeburg. Il résulte toutefois de l'instruction que cette étude est nécessitée par la nouveauté du dosage et du conditionnement du produit pour les besoins de sa commercialisation en Allemagne, mais que la formule du principe actif demeure celle commercialisée en France depuis plusieurs années. Si les dépenses d'études qu'implique ce projet comportent une part de recherche, elles ne peuvent être regardées comme visant à permettre de lever un verrou technologique de nature à rendre les frais exposés correspondants comme éligibles au crédit d'impôt recherche.

13. Enfin, s'il n'est pas contesté que la société Salsarulo exerce elle-même une activité de recherche et développement, qu'elle a mené des travaux innovants et a obtenu des brevets, cette circonstance ne permet pas de considérer, compte tenu des éléments précédemment énoncés, que les dépenses en cause auprès d'organismes extérieurs au titre des années 2013, 2014 et 2015, relèveraient de prestations nécessaires à la réalisation d'opérations de recherche menées par la société.

14. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que la SAS Salsarulo Pharma n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par conséquent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Salsarulo Pharma est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Salsarulo Pharma et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Massias, présidente de la cour,

Mme Le Gars, présidente-assesseure,

M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025 .

La rapporteure,

A.C. Le GarsLa présidente,

N. MassiasLa greffière,

A. Gauthier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances, et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 22VE02772


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22VE02772
Date de la décision : 29/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine LE GARS
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : SELARL LAETITIA JOUATTE AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-29;22ve02772 ?
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