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07/02/2025 | FRANCE | N°24VE00999

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 07 février 2025, 24VE00999


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... D... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 2 mai 2023 par lequel le préfet du Loir-et-Cher a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par deux jugements n° 2301952 des 23 septembre 2023 et 21 mars 2024, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande.



Procédure deva

nt la cour :



I) Par une requête enregistrée le 19 octobre 2023, Mme C..., représentée par Me Mortelette, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 2 mai 2023 par lequel le préfet du Loir-et-Cher a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par deux jugements n° 2301952 des 23 septembre 2023 et 21 mars 2024, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête enregistrée le 19 octobre 2023, Mme C..., représentée par Me Mortelette, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 23 septembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 mai 2023 du préfet du Loir-et-Cher en ce qu'il l'oblige à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et en ce qu'il fixe le pays de destination.

Elle soutient que :

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 janvier 2024, le préfet du Loir-et-Cher conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

II) Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 avril 2024 et 29 avril 2024, Mme C..., représentée par Me Mortelette, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 mars 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 mai 2023 du préfet du Loir-et-Cher en ce qu'il refuse la délivrance d'un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loir-et-Cher de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, en méconnaissance des stipulations de articles 3 à 5 et 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet du Loir-et-Cher a produit le 20 janvier 2025, après la clôture de l'instruction, un mémoire en défense qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces des dossiers.

Le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Versailles a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme C... par une décision du 23 janvier 2024.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Mornet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante congolaise (République du Congo) née le 8 janvier 1980, est entrée en France en septembre 2018. Le 22 août 2022, elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour auprès du préfet du Loir-et-Cher. Par un arrêté du 2 mai 2023, ce dernier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... demande à la cour d'annuler les jugements des 23 septembre 2023 et 21 mars 2024 par lesquels le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contenues dans cet arrêté.

Sur la jonction :

2. Les requêtes susvisées n° 23VE02307 et n° 24VE00999, présentées par Mme C..., concernent le même arrêté préfectoral, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Mme C... soutient qu'elle est entrée en France en septembre 2018, accompagnée de ses trois enfants nés en 1999, 2005 et 2014, et qu'elle ne dispose plus d'attaches personnelles dans son pays d'origine, la République du Congo. Elle fait valoir qu'elle est hébergée chez une compatriote résidant à Blois et que ses enfants sont scolarisés sur le territoire français depuis septembre 2018. Il est constant toutefois qu'elle n'a présenté de demande de délivrance d'un titre de séjour qu'en août 2022, au titre de l'admission exceptionnelle au séjour. Par ailleurs, elle n'établit pas disposer en France de liens personnels ou familiaux et ne justifie d'aucune intégration sociale ou professionnelle. Si elle indique qu'elle souffre de douleurs articulaires, elle n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ; alors que la pose d'une prothèse de hanche peut être envisagée pour la traiter, un certificat médical du docteur A..., rhumatologue, daté du 9 février 2023, relève de faibles douleurs et une gêne fonctionnelle limitée. Enfin, elle n'établit aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que ses enfants poursuivent leur scolarité et études dans leur pays d'origine, où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de trente-huit ans. Dans ces conditions, et compte tenu de la brève durée du séjour en France de l'intéressée, le préfet du Loir-et-Cher n'a pas porté d'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme C... en prenant l'arrêté litigieux, eu égard aux buts de ce dernier. Il n'a pas, pour les mêmes motifs, commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de son arrêté sur sa situation personnelle.

5. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article 4 de cette convention : " 1. Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude / 2. Nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire. (...) ". Aux termes de l'article 5 de ladite convention : " 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté (...) ". Enfin, aux termes de l'article 9 de la même convention : " 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion (...) 2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. Mme C... fait valoir qu'elle encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, en raison notamment de problèmes de santé liés à des douleurs articulaires, du comportement violent de sa belle-famille et de la situation économique, sociale et politique qui règne en République du Congo. Toutefois, elle n'établit par aucune des pièces qu'elle produit la réalité de menaces la visant personnellement et susceptibles de constituer des atteintes aux droits mentionnés par les stipulations précitées, alors au demeurant que l'arrêté attaqué ne contient aucune décision privative de liberté au sens des stipulations précitées de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il est par ailleurs constant qu'elle n'a pas formulé de demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade, et les documents médicaux versés au dossier ne démontrent pas, en tout état de cause, que son état de santé justifierait des soins dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Les moyens tirés de la violation des stipulations citées au point 5 du présent arrêt ne peuvent donc qu'être écartés.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 mai 2023 du préfet du Loir-et-Cher. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Loir-et-Cher.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Mornet, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Aventino, première conseillère,

- M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2025.

La présidente rapporteure,

G. MORNETL'assesseure la plus ancienne,

B. AVENTINO

La greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23VE02307, 24VE00999


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24VE00999
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MORNET
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : JF MORTELETTE;JF MORTELETTE;JF MORTELETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-07;24ve00999 ?
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