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07/02/2025 | FRANCE | N°23VE01447

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 07 février 2025, 23VE01447


Vu les autres pièces du dossier.



Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique,

- le code de la santé publique,

- le code de justice administrative.



Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.



Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mornet,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Charbonnel, représentant l'EPFIF.


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Considérant ce qui suit :



1. Par un arrêté du 3 février 2016, le maire de la commune d'Ézanville a déclaré l'immeuble sit...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique,

- le code de la santé publique,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mornet,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Charbonnel, représentant l'EPFIF.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 3 février 2016, le maire de la commune d'Ézanville a déclaré l'immeuble situé 1, avenue de Verdun, à Ézanville, appartenant à la société Immogex, en état de péril imminent, et a notamment ordonné son évacuation. Le 13 janvier 2016, un carreau de carrelage du sol de la salle de bains de l'appartement n° 5 s'était en effet effondré sous le poids d'un des enfants des locataires, pour s'écraser dans l'appartement du dessous, entraînant un désordre portant atteinte à la solidité du bâtiment, et un rapport d'expertise avait été établi le 26 janvier 2016, préconisant l'évacuation des habitants et des mesures conservatoires dans l'attente d'une réhabilitation complète en raison de l'ampleur des dégradations. La société Immogex a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler cet arrêté, demande qui a été rejetée par un jugement n° 1603370 du 20 février 2018. Par un arrêté du 25 février 2016, le préfet du Val-d'Oise a déclaré l'immeuble irrémédiablement insalubre, en application des dispositions de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique, et a interdit définitivement les locaux à l'habitation. La société Immogex a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler cet arrêté, demande qui a été rejetée par un jugement n° 1603920 du 20 février 2018. Par un arrêté du 11 avril 2019, le maire d'Ézanville a interdit toute occupation et utilisation de l'immeuble et a demandé à la société Immogex de prendre toutes mesures pour garantir la sécurité des occupants et du public. Par une délibération du 28 novembre 2019, le conseil municipal d'Ézanville a autorisé le maire à constituer un dossier d'expropriation et a demandé au préfet du Val-d'Oise de prendre un arrêté portant déclaration d'utilité publique et de cessibilité en vue de l'expropriation du bien, sur le fondement des dispositions des articles L. 511-1 et suivants du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Une convention d'intervention foncière, dont le périmètre inclut l'immeuble litigieux, a été conclue entre la commune d'Ézanville et l'EPFIF le 21 juin 2018, modifiée par un avenant du 21 octobre 2019. Par un arrêté du 9 mars 2020, le préfet du Val-d'Oise a déclaré d'utilité publique, au bénéfice de l'EPFIF, l'acquisition de l'immeuble, en vue de résorber le péril et de supprimer l'insalubrité de cet habitat. Par ce même arrêté, ledit immeuble a été déclaré cessible immédiatement et en totalité au bénéfice de l'EPFIF, et une indemnité provisionnelle a été fixée. M. A..., gérant de la société Immogex, laquelle a été placée en liquidation judiciaire par une ordonnance du tribunal de grande instance de Pontoise du 17 juin 2014, a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 9 mars 2020. M. A... relève appel du jugement du 21 avril 2023 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, M. A... reprend en appel les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué du 9 mars 2020 et du vice de forme affectant les visas de ce dernier, déjà soulevés en première instance, sans développer d'argumentation nouvelle à leur appui, ni aucun élément de droit ou de fait de nature à remettre en cause l'analyse et la motivation du tribunal. Il y a lieu par suite d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement attaqué.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique, alors en vigueur : " Lorsqu'un immeuble, bâti ou non, vacant ou non, attenant ou non à la voie publique, un groupe d'immeubles, un îlot ou un groupe d'îlots constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins, le représentant de l'Etat dans le département, saisi d'un rapport motivé du directeur général de l'agence régionale de santé ou, par application du troisième alinéa de l'article L. 1422-1, du directeur du service communal d'hygiène et de santé concluant à l'insalubrité de l'immeuble concerné, invite la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques à donner son avis dans le délai de deux mois : / 1° Sur la réalité et les causes de l'insalubrité ; / 2° Sur les mesures propres à y remédier. / L'insalubrité d'un bâtiment doit être qualifiée d'irrémédiable lorsqu'il n'existe aucun moyen technique d'y mettre fin, ou lorsque les travaux nécessaires à sa résorption seraient plus coûteux que la reconstruction. (...) ". Et aux termes de l'article L. 1331-28, alors en vigueur, du même code : " I.- Lorsque la commission ou le haut conseil conclut à l'impossibilité de remédier à l'insalubrité, le représentant de l'Etat dans le département déclare par arrêté l'immeuble insalubre à titre irrémédiable, prononce l'interdiction définitive d'habiter et, le cas échéant, d'utiliser les lieux et précise, sur avis de la commission, la date d'effet de cette interdiction, qui ne peut être fixée au-delà d'un an. Il peut également ordonner la démolition de l'immeuble. / Le représentant de l'Etat dans le département prescrit toutes mesures nécessaires pour empêcher l'accès et l'usage de l'immeuble au fur et à mesure de son évacuation. Les mêmes mesures peuvent être décidées à tout moment par le maire au nom de l'Etat. Ces mesures peuvent faire l'objet d'une exécution d'office. / II.- Lorsque la commission ou le haut conseil conclut à la possibilité de remédier à l'insalubrité, le représentant de l'Etat dans le département prescrit par arrêté les mesures adéquates ainsi que le délai imparti pour leur réalisation sur avis de la commission ou du haut conseil et prononce, s'il y a lieu, l'interdiction temporaire d'habiter et, le cas échéant, d'utiliser les lieux. (...) ".

4. L'ensemble formé par un arrêté déclarant un immeuble insalubre à titre irrémédiable et l'arrêté préfectoral déclarant d'utilité publique le projet d'acquisition de cet immeuble et prononçant sa cessibilité, en vue de permettre la réalisation de nouvelles constructions, constitue une opération complexe.

5. D'une part, M. A... soutient que l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 25 février 2016, préalable à l'adoption de l'arrêté préfectoral en litige, a été pris au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions précitées de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique, dans la mesure où la commission départementale de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques ne se serait pas prononcée sur la réalité et les causes de l'insalubrité de l'immeuble, ni sur les mesures propres à y remédier. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de la séance du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques du Val-d'Oise du 18 février 2016, que les membres de ce dernier ont examiné les causes de l'insalubrité de l'immeuble appartenant à la société Immogex, présentées par un rapport détaillé de la technicienne sanitaire habilitée et assermentée de l'agence régionale de santé d'Île-de-France, qu'ils ont également pris connaissance du coût des nombreux travaux à réaliser pour remédier à l'insalubrité de cet immeuble, avant d'émettre, au regard de leur importance et du placement en liquidation judiciaire de la société propriétaire, un avis favorable, à l'unanimité, à la déclaration d'insalubrité irrémédiable. Le moyen tiré, par voie d'exception, du vice de procédure affectant l'arrêté du 25 février 2016, doit donc être écarté.

6. D'autre part, M. A... fait valoir que l'arrêté préfectoral du 25 février 2016 déclarant irrémédiablement insalubre l'immeuble appartenant à la société Immogex est entaché d'erreur d'appréciation. Le préfet du Val-d'Oise était cependant tenu, au regard du sens de l'avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques du 18 février 2016 et des dispositions précitées de l'article L. 1331-28, alors en vigueur, du code de la santé publique, de prendre cet arrêté. En tout état de cause, M. A..., qui au demeurant agit dans la présente instance en son nom propre, et non en sa qualité de gérant de la société propriétaire, laquelle a au surplus été placée en liquidation judiciaire par une ordonnance du tribunal de grande instance de Pontoise du 17 juin 2014, se borne à se prévaloir d'un rapport de l'agence régionale de santé du 22 décembre 2015 estimant l'insalubrité remédiable, et n'établit pas, ni même n'allègue, qu'à la date à laquelle a été pris l'arrêté portant déclaration d'utilité publique, au bénéfice de l'EPFIF, de l'acquisition de l'immeuble, en vue d'en résorber le péril, et le déclarant cessible immédiatement, le coût des travaux de réhabilitation de l'immeuble aurait été inférieur au coût de travaux de reconstruction. Le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de l'arrêté préfectoral du 25 février 2016 ne peut donc qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mars 2020 du préfet du Val-d'Oise.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme à M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le versement de la somme de 2 000 euros à l'EPFIF sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera la somme de 2 000 euros à l'EPFIF en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à l'établissement public foncier d'Île-de-France et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Mornet, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Aventino, première conseillère,

- M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2025.

La présidente rapporteure,

G. MORNETL'assesseure la plus ancienne,

B. AVENTINO

La greffière,

S. DE SOUSALa présidente rapporteure,

G. MORNETL'assesseure la plus ancienne,

B. AVENTINO

La greffière,

XXX

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23VE01447


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE01447
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MORNET
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : AARPI BARATA CHARBONNEL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-07;23ve01447 ?
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