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07/02/2025 | FRANCE | N°23VE01018

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 07 février 2025, 23VE01018


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Levallois-Perret a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 24 février 2021 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a fixé à zéro euro, d'une part, le montant du prélèvement sur ses ressources fiscales visé à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, au titre de l'inventaire des logements locatifs sociaux établi au 1er janvier 2020, d'autre part, le montant de la majoration prévue à l'article L. 302-9

-1 du code de la construction et de l'habitation et résultant de l'arrêté de carence du 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Levallois-Perret a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 24 février 2021 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a fixé à zéro euro, d'une part, le montant du prélèvement sur ses ressources fiscales visé à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation, au titre de l'inventaire des logements locatifs sociaux établi au 1er janvier 2020, d'autre part, le montant de la majoration prévue à l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation et résultant de l'arrêté de carence du 21 décembre 2020, et de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2105560 du 7 mars 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 5 mai 2023 et le 29 octobre 2024, la commune de Levallois-Perret, représentée par Me Bodin avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté DRIHL/SHRU n°2021-43 du 24 février 2021 du préfet des Hauts-de-Seine ;

3°) et de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- la minute du jugement n'a pas été signée, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- sa demande n'était pas irrecevable, dès lors que l'arrêté en litige lui fait grief ;

- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé et est entaché de contradiction de motifs ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors que le nombre de logements sociaux retenus pour l'application du L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation lui a été notifié tardivement ;

- il est illégal par voie d'exception, du fait de l'illégalité de l'arrêté du 21 décembre 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a prononcé sa carence ; cet arrêté est insuffisamment motivé et est entaché de plusieurs vices de procédure ; d'une part, la commune n'a reçu notification du compte-rendu de la commission départementale chargée de l'examen du respect des obligations de réalisation des logements sociaux que postérieurement à l'arrêté de carence et de ce fait aucun examen précis de la situation de la commune n'a été effectué ; d'autre part, le comité régional de l'habitat et de l'hébergement a émis son avis sans que la commune ait été mise à même de présenter des observations, préalablement comme durant la réunion, en violation du principe du contradictoire et des droits de la défense et des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ; enfin, la commission nationale prévue au II de l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation a émis un avis dans des conditions irrégulières, dès lors que la maire de la commune de Levallois-Perret n'a pas été entendue préalablement, que cet avis n'a pas été rendu public, et qu'il est donc impossible de s'assurer qu'il est suffisamment motivé ; il méconnaît le principe d'impartialité, dès lors que la procédure de sanction instaurée par l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation confère à une seule et même autorité le pouvoir d'instruire et de sanctionner une commune, en méconnaissance des stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 100-2 du code des relations entre le public et l'administration ; le constat de carence est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, au regard du degré d'engagement de la commune pour atteindre ses objectifs et des difficultés qu'elle a rencontrées ; le prononcé de la sanction est entaché d'une erreur d'appréciation ; le taux de majoration du prélèvement opéré sur les ressources fiscales de la commune, fixé à 150% soit un coefficient multiplicateur de 2,5, est disproportionné ;

- le montant des dépenses déductibles excédentaires reportables est entaché d'une erreur de calcul en sa défaveur ; l'erreur entachant les arrêtés n° 2018-56 du 28 février 2018, n° 2019-27 du 27 février 2019 et n° 2020-22 du 24 février 2020, relatifs au montant des dépenses déductibles excédentaires reportables au titre des années précédentes, se répercute sur ce même montant, tel qu'il a été pris en compte dans l'arrêté du 24 février 2021 ;

- il n'est pas justifié de l'exactitude de nombre de résidences principales décomptées sur le territoire communal au 1er janvier 2020, fixé à 32 059.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2024, le ministre du logement et de la rénovation urbaine conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable faute d'intérêt à agir, la décision en litige ne faisant pas grief à la commune ;

- à titre subsidiaire, les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 5 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 décembre 2024, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Cozic,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Bodin, représentant la commune de Levallois-Perret.

Considérant ce qui suit :

1. En raison de l'insuffisance de logements sociaux constatée au titre de la période 2017-2019 sur le territoire de la commune de Levallois-Perret, le préfet des Hauts-de-Seine a, par un arrêté du 21 décembre 2020, prononcé la carence de la commune en application de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, et fixé à 150% le taux de majoration prévu par ce même article à appliquer au montant du prélèvement par logement vacant, à compter du 1er janvier 2021 et pour une durée de trois ans maximum. Par un arrêté du 24 février 2021, le préfet des Hauts-de-Seine a fixé à zéro euro, d'une part, le montant du prélèvement 2021 sur les ressources fiscales de la commune, d'autre part, le montant de la majoration prévue à l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, au titre de l'inventaire des logements locatifs sociaux établis au 1er janvier 2020. La commune de Levallois-Perret demande à la cour d'annuler le jugement n° 2105560 du 7 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté du 24 février 2021.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs (...), la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".

3. Il ressort de la minute du jugement attaqué que celui-ci a été signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur ainsi que la greffière d'audience, conformément aux exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré du défaut de signature du jugement manque en fait et doit être écarté.

Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 février 2021 :

4. Aux termes de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation : " Les dispositions de la présente section s'appliquent aux communes dont la population est au moins égale à 1 500 habitants en Ile-de-France (...) qui sont comprises, au sens du recensement de la population, dans une agglomération ou un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre total de logements locatifs sociaux représente, au 1er janvier de l'année précédente, moins de 25 % des résidences principales ". Aux termes des premier et deuxième alinéas de l'article L. 302-7 du même code, dans sa version applicable au présent litige : " Il est effectué chaque année un prélèvement sur les ressources fiscales des communes visées à l'article L. 302-5 (...). / Ce prélèvement est fixé à 25 % du potentiel fiscal par habitant défini à l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales multipliés par la différence entre 25 % ou 20 % des résidences principales, selon que les communes relèvent des I ou II de l'article L. 302-5, et le nombre de logements sociaux existant dans la commune l'année précédente, comme il est dit à l'article L. 302-5, sans pouvoir excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice. ". Le quatrième alinéa de ce même article prévoit que le prélèvement sur les ressources fiscales prévu à l'article L. 302-5 précité est diminué du montant de certaines des dépenses effectuées par la commune. Le cinquième alinéa de ce même article prévoit que : " Si le montant de ces dépenses et moins-values de cession est supérieur au prélèvement d'une année, le surplus peut être déduit du prélèvement des deux années suivantes. Dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, ces dépenses sont déductibles les années suivantes au prorata du nombre de logements locatifs sociaux qu'elles permettent de réaliser au regard des obligations triennales définies à l'article L. 302-8 ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine a fixé à 2 541 948,50 euros le montant brut majoré du prélèvement définitif appliqué en 2021 sur les ressources de la commune de Levallois-Perret, en application des dispositions de l'article L. 302-7 précité. Au titre du prélèvement 2021, le préfet a retranché de ce montant certaines dépenses déductibles engagées par la commune les années précédentes, ce qui a conduit à un montant nul du prélèvement sur les ressources de la commune prévu à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation au titre de l'inventaire des logements locatifs sociaux établi au 1er janvier 2020. De même, cette opération a généré un montant nul de la majoration prévue à l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation. De ce fait, l'arrêté en litige ne fait aucunement grief à la commune requérante, et la circonstance, à la supposer même établie, que le préfet des Hauts-de-Seine aurait commis une erreur dans le calcul des dépenses déductibles prises en compte pour le prélèvement 2021, qui obérerait celles reportables au titre des prélèvements ultérieurs, est sans incidence. Faute de pouvoir justifier d'un intérêt à agir, la commune de Levallois-Perret n'est pas recevable à demander l'annulation de l'arrêté du 24 février 2021.

6. Il résulte de ce qui précède que la commune de Levallois-Perret n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur les frais de justice :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Levallois-Perret au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Levallois-Perret est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Levallois-Perret et au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.

Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

- Mme Mornet, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Aventino, première conseillère,

- M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2025.

Le rapporteur,

H. COZICLa présidente,

G. MORNET

La greffière,

S. DE SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE01018


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE01018
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Finances communales.

Logement - Habitations à loyer modéré.


Composition du Tribunal
Président : Mme MORNET
Rapporteur ?: M. Hervé COZIC
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : IDEO SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-07;23ve01018 ?
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