Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 3 août 2023 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2307125 du 29 décembre 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 janvier 2024, M. B..., représenté par Me Khiat Cohen, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 décembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 août 2023 du préfet des Yvelines ;
3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de Français, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à défaut de lui délivrer un récépissé de demande de titre avec autorisation de travail, dans un délai de quinze jours, et de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les 2) et 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- il méconnaît les articles L. 423-1, L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Le Gars,
- et les observations de Me Khiat Cohen, représentant M. B....
Une note en délibéré présentée pour M. B... a été enregistrée le 16 janvier 2025.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 3 mars 1987, entré en France le 23 mars 2022 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des 2) et 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 3 août 2023, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ".
4. Aux termes de l'article 22 de la convention signée à Schengen le19 juin 1990 : " I- Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités compétentes de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent ". Aux termes de l'article L. 621-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger en provenance directe du territoire d'un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 peut se voir appliquer les dispositions de l'article L. 621-2 lorsqu'il est entré ou a séjourné sur le territoire français (...) sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité ". L'article R. 621-2 du même code dispose : " (...) l'étranger souscrit la déclaration d'entrée sur le territoire français mentionnée à l'article L. 621-3 auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. A cette occasion, il lui est remis un récépissé qui peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage. / (...) ".
5. Il résulte de ces stipulations et dispositions que, d'une part, la délivrance d'un certificat de résidence d'un an à un ressortissant algérien en qualité de conjoint de Français est subordonnée à la justification d'une entrée régulière sur le territoire français et, d'autre part, un ressortissant étranger soumis à l'obligation de présenter un visa ne peut être regardé comme entré régulièrement sur le territoire français au moyen d'un visa Schengen délivré par un État autre que la France que s'il a effectué une déclaration d'entrée sur le territoire.
6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, qui se prévaut d'un visa de court séjour Schengen délivré par les autorités espagnoles, aurait déclaré son entrée sur le territoire français conformément à l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990. Il ne peut donc se prévaloir d'une entrée régulière sur le territoire français. Le préfet des Yvelines a pu ainsi refuser pour ce seul motif de lui délivrer le certificat de résidence sollicité en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit, par suite, être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord précité : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".
8. M. B... soutient qu'il a rencontré son épouse, Mme C..., de nationalité française, en 2019 et qu'ils se sont mariés le 19 novembre 2022, qu'ils résident ensemble depuis leur mariage et qu'il contribue financièrement à la vie du foyer. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B..., entré récemment sur le territoire français, en 2022, ne justifie d'aucune communauté de vie avec son épouse de nationalité française antérieurement à leur mariage le 19 novembre 2022 ni d'aucune autre attache familiale que les proches de celle-ci, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et où il a vécu jusqu'à trente-cinq ans, et qu'il justifie d'une activité professionnelle antérieure de moins d'un mois à la date de la décision attaquée. Dans ces conditions, le préfet des Yvelines n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels l'arrêté a été pris. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien doivent être écartés.
9. En dernier lieu, M. B..., dont la situation est régie de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ne peut utilement invoquer la méconnaissance des articles L. 423-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni la méconnaissance de l'article L. 435-1 du même code, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que sa demande de titre de séjour serait fondée sur les dispositions de ces articles.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent par conséquent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Yvelines.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
Mme Le Gars, présidente-assesseure,
M. Tar, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2025.
La rapporteure,
A.C. Le GarsLa présidente,
F. Versol
La greffière,
A. Gauthier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 24VE00212