Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 14 août 2019 par laquelle le maire d'Asnières-sur-Seine a implicitement refusé de la licencier, de condamner la commune d'Asnières-sur-Seine à lui verser la somme de 18 558,25 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation, d'enjoindre à la commune d'Asnières-sur-Seine de recalculer, sous quinzaine à compter de la notification du jugement, le montant des indemnités de congés payés qu'elle aurait dû percevoir du 1er janvier 2015 jusqu'à son départ en retraite le 1er janvier 2021, de condamner, le cas échéant, la commune d'Asnières-sur-Seine à lui verser la différence entre ce montant et les indemnités de congés payés qui lui ont été effectivement payées, si celle-ci lui est favorable, somme assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation, et de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de la commune d'Asnières-sur-Seine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement nos 1912836, 1912837, 1912838, 1912839, 1912840, 1912841, 1912842, 1912843, 1912846, 1912847, 1912849, 1912851, 1912852, 1912854, 1912856, 1912857, 1912859, 1912860, 1912861, 1912862, 1912863, 1912864 du 4 mars 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, notamment, annulé la décision par laquelle le maire de la commune d'Asnières-sur-Seine a refusé de licencier Mme A..., a rejeté le surplus des conclusions de sa demande et les conclusions présentées par la commune d'Asnières-sur-Seine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires, enregistrés respectivement les 6 mai 2022, 1er juin 2022, 13 juin 2023 et 2 janvier 2024, Mme A..., représentée par Me Abbe, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 3 du jugement attaqué en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de sa demande ;
2°) de condamner la commune d'Asnières-sur-Seine à lui verser la somme de 18 558,25 euros ;
3°) d'enjoindre à la commune d'Asnières-sur-Seine de recalculer, sous quinzaine à compter de la notification de la décision à intervenir, le montant des indemnités de congés payés qu'elle aurait dû percevoir du 1er janvier 2015 jusqu'à son départ en retraite le 1er janvier 2021 ;
4°) de condamner, le cas échéant, la commune d'Asnières-sur-Seine à lui verser la différence entre ce montant et les indemnités de congés payés qui lui ont été effectivement payées, si celle-ci lui est favorable, et d'assortir cette somme des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;
5°) de mettre la somme de 2 500 euros à la charge de la commune d'Asnières-sur-Seine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il n'explique pas suffisamment les raisons pour lesquelles le tribunal a refusé d'indemniser la perte de chance de recevoir une indemnité de licenciement ;
- il est entaché d'une double erreur de droit en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la commune à lui verser une indemnité équivalente à l'indemnité de licenciement et un rappel d'indemnité de congés payés ;
- elle aurait dû être licenciée dans un délai raisonnable à compter de son refus d'accepter les modifications de son contrat ; la commune a commis une faute ; elle a perdu une chance de percevoir sur le fondement de l'article D. 423-4 du code de l'action et des familles une indemnité de licenciement qui se serait élevée à la somme de 13 558,25 euros ;
- son préjudice moral s'élève à la somme de 5 000 euros ;
- son indemnité de congés payés n'a été calculée que sur la base du cumul des salaires journaliers, sans prendre en compte les indemnités de congés payés versées au titre de l'année précédente, sur onze mois de salaires ;
- les sommes dues par la commune doivent être assorties des intérêts légaux et de la capitalisation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2023, la commune d'Asnières-sur-Seine représentée par Me Rouquet, avocat, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de Mme A... ;
2°) de mettre à la charge de Mme A... le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par Mme A... ne sont pas fondés et que les conclusions relatives aux congés payés sont irrecevables car sans lien avec le litige et non chiffrées.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Camenen,
- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,
- les observations de Me Abbe, pour Mme A..., et celles de Me Dumont, pour la commune d'Asnières-sur-Seine.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., qui a été employée par la commune d'Asnières-sur-Seine en qualité d'assistante maternelle sous contrat à durée indéterminée jusqu'à son départ à la retraite le 1er janvier 2021, relève appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 4 mars 2022 en tant que le tribunal a rejeté les conclusions de sa demande tendant au versement d'une indemnité équivalente à l'indemnité de licenciement qu'elle aurait dû percevoir à la suite de son refus d'accepter les modifications de son contrat de travail et d'un supplément d'indemnité de congés payés qu'elle estime lui être dû.
Sur les fins de non-recevoir opposées par la commune d'Asnières-sur-Seine :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...). ".
3. Il résulte de l'instruction qu'à la page 5 de sa demande enregistrée au greffe du tribunal administratif le 11 octobre 2019, Mme A... a indiqué qu'il conviendra de condamner la commune d'Asnières-sur-Seine à calculer de nouveau ses indemnités de congés payés et à lui verser la différence entre les indemnités de congés payés qu'elle a perçues et celles qui auraient dû lui être versées sans l'erreur commise concernant les bases de calcul. Si elle n'a pas repris ces conclusions à la dernière page de sa demande, elle doit cependant être regardée, malgré cette omission purement matérielle, comme ayant présenté de telles conclusions dès le 11 octobre 2019. Ainsi, en reprenant ces conclusions dans son mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif le 12 juin 2021, Mme A... ne peut être regardée comme ayant présenté des conclusions nouvelles irrecevables car tardives.
4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que Mme A... a, préalablement à la saisine du juge administratif, saisi l'administration d'une réclamation relative non seulement à l'indemnité de licenciement qu'elle aurait dû percevoir mais aussi au calcul erroné des indemnités de congés payés qui lui ont été versées. Elle a ensuite saisi le tribunal administratif d'une demande portant sur ces deux points. Dès lors qu'ils concernent ainsi des réclamations indemnitaires adressées dans la même demande par un agent à son employeur, la fin de non-recevoir tirée de ce que les conclusions relatives à l'indemnité de congés payés constitueraient un litige distinct sans lien suffisant avec le litige principal doit être écartée.
5. Enfin, si Mme A... n'a pas chiffré son préjudice résultant du calcul erroné de ses indemnités de congés payés, l'indemnité à laquelle elle peut prétendre de ce chef est chiffrable en application de la loi. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de chiffrage de son préjudice doit également être écartée.
Sur la responsabilité de la commune :
6. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, par un courrier du 3 avril 2019, le maire de la commune d'Asnières-sur-Seine a proposé à Mme A... un nouveau contrat de travail. Estimant que ce nouveau contrat entraînait pour elle une perte de rémunération, Mme A... a présenté à son encontre un recours gracieux. Elle doit ainsi être regardée comme ayant refusé de souscrire ce nouveau contrat de travail. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du maire de la commune d'Asnières-sur-Seine refusant de licencier Mme A... au motif que le refus de Mme A... d'accepter des modifications substantielles à son contrat de travail plaçait l'administration dans l'obligation de la licencier. L'illégalité, d'ailleurs non contestée, de cette décision de refus constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune d'Asnières-sur-Seine si elle a été à l'origine d'un préjudice direct et certain.
7. En second lieu, aux termes de l'article L. 423-6 du code de l'action sociale et des familles rendu applicable aux assistants maternels employés par des personnes morales de droit public en vertu de son article L. 422-1, Mme A... devait percevoir une indemnité représentative de congé annuel payé, égale au dixième du total formé par la rémunération reçue et par l'indemnité de congés payés de l'année précédente. Il résulte de l'instruction, en particulier des bulletins de paie de Mme A... ainsi que d'un courriel de l'adjointe au maire d'Asnières-sur-Seine du 15 juin 2017, que les indemnités de congés payés versées par la commune d'Asnières-sur-Seine ont été calculées uniquement sur la base des indemnités journalières versées à l'agent sans prise en compte de l'ensemble de sa rémunération au titre de l'année considérée et des indemnités de congés payés versées l'année précédente. Ainsi, la commune a également commis une faute en retenant un tel calcul erroné.
Sur les préjudices de Mme A... :
8. En premier lieu, en vertu de l'article L. 423-12 du code de l'action sociale et des familles, applicable aux assistants maternels employés par des personnes morales de droit public conformément aux dispositions de son article L. 422-1, une indemnité de licenciement est due à l'assistant maternel justifiant d'une ancienneté d'au moins deux ans au service du même employeur. En vertu de l'article D. 423-4 de ce code, le montant minimum de l'indemnité de licenciement est égal, par année d'ancienneté, à deux dixièmes de la moyenne mensuelle des sommes perçues par l'intéressé au titre des six meilleurs mois consécutifs de salaire versés par l'employeur qui le licencie.
9. Au regard des bulletins de paie de Mme A... pour la période comprise entre juillet et décembre 2018, la moyenne mensuelle des sommes perçues par Mme A... au titre des six meilleurs mois consécutifs de salaires versés par l'employeur s'établit à la somme de 1 471 euros. Mme A..., qui justifiait de 41 années d'ancienneté, aurait pu prétendre au versement d'une indemnité de licenciement d'un montant de 12 062 euros. Dès lors que l'administration était tenue de la licencier et que ce licenciement ne peut plus être prononcé, Mme A... ayant été admise à faire valoir ses droits à la retraite, l'intéressée est fondée à demander la condamnation de la commune d'Asnières-sur-Seine à lui verser une indemnité d'un montant équivalent.
10. En deuxième lieu, la commune d'Asnières-sur-Seine ayant calculé les indemnités de congés payés versées à Mme A... en se fondant uniquement sur le montant de ses indemnités journalières ainsi qu'il a été dit au point 7, il y a lieu de la condamner à verser à la requérante, au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2015 et le 1er janvier 2021, une somme correspondant à la différence entre le montant des indemnités de congés payés qui lui ont été effectivement versées et celui auquel elle pouvait prétendre en calculant ces indemnités par rapport au total formé par la rémunération reçue par l'agent au titre de l'année considérée et par l'indemnité de congés payés de l'année précédente.
11. Enfin, il résulte de l'instruction qu'alors même que Mme A... a refusé la signature du nouveau contrat de travail qui lui a été proposé, la commune d'Asnières-sur-Seine a appliqué les stipulations de ce nouveau contrat à compter du 1er mars 2019, celui-ci entraînant selon elle une baisse de salaire de 4 668 euros entre 2019 et 2020. Toutefois, cette baisse de salaire, dont il n'est d'ailleurs pas demandé réparation, ne suffit pas à établir l'existence d'un préjudice moral dont Mme A... aurait été victime. Il n'est pas davantage établi que Mme A... aurait fait l'objet de mesures vexatoires. Par suite, la requérante n'est pas fondée à demander une indemnité au titre d'un préjudice moral.
12. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Asnières-sur-Seine doit être condamnée à verser à Mme A... la somme 12 062 euros ainsi qu'une somme au titre de la part d'indemnité de congés payés dont la requérante a été privée, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2019 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 11 octobre 2020 et à chaque année ultérieure.
13. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais liés à l'instance :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A..., qui n'est pas la partie perdante, verse une quelconque somme à la commune d'Asnières-sur-Seine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Asnières-sur-Seine le versement à Mme A... de la somme de 2 000 euros sur ce fondement.
DECIDE :
Article 1er : L'article 3 du jugement nos 1912836, 1912837, 1912838, 1912839, 1912840, 1912841, 1912842, 1912843, 1912846, 1912847, 1912849, 1912851, 1912852, 1912854, 1912856, 1912857, 1912859, 1912860, 1912861, 1912862, 1912863, 1912864 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 4 mars 2022 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions indemnitaires de Mme A....
Article 2 : La commune d'Asnières-sur-Seine est condamnée à verser la somme de 12 062 euros à Mme A..., cette somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2019 et de la capitalisation des intérêts à compter du 11 octobre 2020 et à chaque année ultérieure.
Article 3 : La commune d'Asnières-sur-Seine est condamnée à verser à Mme A... une indemnité correspondant à la différence entre le montant des indemnités de congés payés qui lui ont été effectivement versées au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2015 et le 1er janvier 2021 et celui auquel elle pouvait prétendre en calculant ces indemnités sur la base des rémunérations reçues en y incluant les indemnités de congés payés versées les années précédentes, cette indemnité étant assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2019 et de la capitalisation des intérêts à compter du 11 octobre 2020 et à chaque année ultérieure.
Article 4 : La commune d'Asnières-sur-Seine versera la somme de 2 000 euros à Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.
Article 6 : Les conclusions présentées par la commune d'Asnières-sur-Seine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune d'Asnières-sur-Seine.
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.
Le rapporteur,
G. CAMENEN
La présidente,
C. SIGNERIN-ICRE
La greffière,
V. MALAGOLILa République mande et ordonne au préfet des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 22VE01107 2