Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Beaulieu-Lès-Loches a demandé au tribunal administratif d'Orléans :
1°) de condamner solidairement la société Euro Peinture 37, Mme B..., la société C2A et la société Effilios à lui verser une somme de 10 575,83 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2019 avec capitalisation des intérêts échus par année entière, en réparation du préjudice matériel subi du fait de désordres affectant l'isolation thermique par l'extérieur de l'école maternelle communale ;
2°) de condamner solidairement la société Domingues, Mme B..., la société C2A et la société Effilios à lui verser une somme de 93 182,17 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2019 avec capitalisation des intérêts échus par année entière, en réparation du préjudice matériel subi du fait de désordre affectant l'isolation des faux-plafonds de l'école communale, ainsi que les gaines de ventilation double-flux situées dans les combles ;
3°) de condamner solidairement la société Euro Peinture 37, la société Effilios, la société Domingues, la société C2A et Mme B... à lui verser une somme de 21 170,62 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2019 avec capitalisation des intérêts échus par année entière, en réparation des préjudices de jouissance et financier subis ;
4°) de condamner solidairement la société Euro Peinture 37, la société Effilios, la société Domingues, la société C2A et Mme B... à lui verser une somme de 10 066,80 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2019 avec capitalisation des intérêts échus par année entière, correspondant au coût de l'expertise judiciaire, à titre principal, au titre des dépens et, à titre subsidiaire, en réparation du préjudice financier subi.
A titre reconventionnel, Mme B... a demandé la condamnation de la commune de Beaulieu-lès-Loches à lui verser la somme de 8 051,06 euros toutes taxes comprises (TTC) et 240 euros TTC, sommes assorties des intérêts au taux légal.
Par un jugement n° 1901094 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif d'Orléans a condamné, dans son article premier, la société Euro Peinture 37, la société C2A, la société Effilios et Mme B... solidairement à verser à la commune de Beaulieu-Lès-Loches la somme de 9 345,18 euros T.T.C. au titre des désordres se rapportant à l'isolation thermique par l'extérieur, dans son article 4, condamné la société Euro Peinture 37, la société Domingues, la société C2A, la société Effilios et Mme B... solidairement à verser à la commune de Beaulieu-Lès-Loches la somme de 23 737,42 euros en réparation du préjudice financier subi, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2019, avec capitalisation des intérêts à compter du 27 mars 2020 et le cas échéant à chaque échéance annuelle ultérieure, dans son article 5, la société Domingues, la société C2A, la société Effilios, la société Euro Peinture 37 et Mme B... solidairement à verser à la commune de Beaulieu-Lès-Loches la somme de 3 500 euros en réparation du préjudice de jouissance subi, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 27 mars 2019, avec capitalisation des intérêts à compter du 27 mars 2020 et le cas échéant à chaque échéance annuelle ultérieure. Par ailleurs, le tribunal a condamné, dans son article 6, la société Euro Peinture 37 à garantir la société C2A, la société Effilios et Mme B... à hauteur de 10 % des condamnations prononcées à leur encontre à l'article 1er de ce jugement. Enfin, le tribunal a rejeté la demande reconventionnelle formée par Mme B....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2022, Mme A... B..., représentée par la Selarl CMetB associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ou de le réformer en tant qu'il a rejeté sa demande reconventionnelle ;
2°) de condamner la commune de Beaulieu-lès-Loches à lui verser la somme de 8 051,06 euros TTC ainsi que la somme de 240 euros TTC, assorties des intérêts au taux légal ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Beaulieu-Lès-Loches la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- aucune réponse de la commune n'a été apportée à sa demande du 25 novembre 2020 de sorte qu'elle était fondée à former une réclamation, reçue par la commune le 26 novembre 2020, et à réclamer le solde dû au titre du marché de maîtrise d'œuvre ;
- le tribunal administratif a retenu à tort que sa demande présentée au contentieux était irrecevable, dès lors que le mémoire en réclamation aurait été présenté hors délai ; or, le différend avec la commune n'est né qu'au 25 novembre 2020.
Par deux mémoires, enregistrés les 19 décembre 2022 et 8 avril 2024, la commune de Beaulieu-lès-Loches, représentée par la Selarl Walter et Garance avocats, conclut :
1°) au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, à limiter la demande de condamnation à la somme de 6 440,45 euros hors taxes ;
2°) à ce que soit mis à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande formée par Mme B... était irrecevable dès lors qu'elle a été formée plus de deux mois après la saisine du tribunal administratif ; la réclamation du 17 décembre 2019 a été par suite formée plus de deux mois après le 27 mars 2019 ;
- en tout état de cause, les demandes de Mme B... ne sont pas fondées.
Par ordonnance du 24 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mai 2024, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pilven,
- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,
- les observations de Me Tuilleaux, pour la commune de Beaulieu-Lès-Loches.
Considérant ce qui suit :
1. Par acte d'engagement du 19 novembre 2015, la commune de Beaulieu-Lès-Loches a confié au groupement constitué de la société Effilios, bureau d'étude fluides, de la société C2A, économiste de la construction, et de Mme B..., architecte mandataire, la maîtrise d'œuvre des travaux de rénovation de l'école maternelle communale. Le lot n° 2, qui concernait l'isolation par l'extérieur, a été confié à la société Euro Peinture 37. Le lot n° 4 qui concernait la plâtrerie, l'isolation et les raccords sol et peinture a été confié à la société Domingues. La réception des travaux a été prononcée avec réserves le 3 août 2017. En l'absence de levée des réserves à l'issue des délais convenus, par une ordonnance du 27 mars 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Tours a prescrit une mesure d'expertise. L'expert a déposé son rapport le 10 décembre 2018. La commune de Beaulieu-Lès-Loches a demandé au tribunal de condamner la société Euro Peinture 37, la société Effilios, la société C2A, la société Domingues et Mme B... à l'indemniser des préjudices subis. Mme B... a demandé, à titre reconventionnel, la condamnation de la commune de Beaulieu-Lès-Loches à lui verser les sommes de 8 051,06 euros T.T.C. et 240 euros T.T.C., assorties des intérêts au taux légal.
2. Mme B... demande en appel d'annuler le jugement du 23 novembre 2021 ou de le réformer en tant qu'il ne fait pas droit à sa demande formée à titre reconventionnel et de condamner la commune à lui verser la somme de 8 051,06 euros toutes taxes comprises ainsi que la somme de 240 euros toutes taxes comprises, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune :
3. Aux termes de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles (CCAG PI), approuvé par l'arrêté du 16 septembre 2009 : " Le pouvoir adjudicateur et le titulaire s'efforceront de régler à l'amiable tout différend éventuel relatif à l'interprétation des stipulations du marché ou à l'exécution des prestations objet du marché. / Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'une lettre de réclamation exposant les motifs de son désaccord et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Cette lettre doit être communiquée au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. / Le pouvoir adjudicateur dispose d'un délai de deux mois, courant à compter de la réception de la lettre de réclamation, pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation (...) ".
4. En l'absence de décompte général, il résulte des dispositions de l'article 37 du CCAG-PI que le différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet, préalablement à toute instance contentieuse, d'un mémoire en réclamation de la part du titulaire du marché.
5. Le tribunal administratif a retenu l'irrecevabilité des conclusions à fin de paiement présentées par Mme B... tant en son nom personnel qu'en qualité de mandataire du groupement au motif que le mémoire en réclamation a été formé le 17 décembre 2019, soit après l'expiration du délai de deux mois visé par les stipulations de l'article 37 du CCAG-PI, courant à compter de la naissance du différend, le 27 mars 2019, date d'introduction de la requête devant le tribunal administratif par la commune de Beaulieu-lès-Loches aux fins d'indemnisation des préjudices subis.
6. Il résulte toutefois de l'instruction qu'une mise en demeure du 24 septembre 2020 mentionne qu'une première demande de paiement du solde du marché a été présentée au maitre d'ouvrage le 26 avril 2019. Par ailleurs, le courrier du 17 décembre 2019, qui indique que le maître d'œuvre fait injonction au maître de l'ouvrage de payer Mme B... et la société Effilios dans un délai de quinze jours à compter de la réception des factures et du décompte général définitif, doit être regardé comme une mise en demeure. En l'absence de réponse du maître de l'ouvrage à cette mise en demeure dans un délai de quinze jours à compter de la réception de ce courrier le 19 décembre 2019, un différend est né le 4 janvier 2020. Ainsi, en adressant au maître de l'ouvrage son mémoire en réclamation le 26 novembre 2020, la demande de Mme B... était tardive au sens de l'article 37 du CCAG PI. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à se plaindre que le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande de paiement du solde comme irrecevable.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce fondement par Mme B.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Beaulieu-Lès-Loches au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Mme B... versera la somme de 2 000 euros à la commune de Beaulieu-Lès-Loches en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et la commune de Beaulieu-Lès-Loches.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Etienvre, président de chambre,
M. Pilven, président assesseur,
Mme Pham, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.
Le rapporteur,
J-E. PilvenLe président,
F. EtienvreLa greffière,
F. Petit-Galland
La République mande et ordonne à la préfète d'Indre-et-Loire en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 22VE00176002