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15/10/2024 | FRANCE | N°23VE01256

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 15 octobre 2024, 23VE01256


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme B... et A... C... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2016, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n°2105132 du 4 avril 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :
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Par une requête et des pièces, enregistrées les 6 juin et 3 décembre 2023, M. et Mme C... C..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et A... C... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2016, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n°2105132 du 4 avril 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 6 juin et 3 décembre 2023, M. et Mme C... C..., représentés par Me Marchand, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme C... C... soutiennent que :

- la procédure d'imposition est irrégulière, faute pour le service de leur avoir envoyé une proposition de rectification à leur adresse ; la privation de la possibilité de formuler des observations sur cette proposition qui en résulte est contraire aux stipulations de l'article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'absence de débat oral avec le vérificateur prévu par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales est également de nature à entacher cette procédure d'irrégularité, et constitue une violation du principe des droits de la défense et du devoir de loyauté ;

- la proposition de rectification du 28 septembre 2018 est insuffisamment motivée quant à la base légale retenue par le service pour retenir l'existence de revenus distribués, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- en application des dispositions de l'article 1658 du code général des impôts, les impositions supplémentaires qui lui ont été réclamées auraient dû lui être notifiées par un avis de mise en recouvrement conforme aux prescriptions prévues aux articles L. 256 et R. 256-1 du livre des procédures fiscales ;

- les impositions en litige ne peuvent être fondées sur les dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, faute pour le service de démontrer l'existence d'un désinvestissement en 2016 ;

- elles ne peuvent être fondées sur les dispositions du 2° du 1 de cet article, faute pour le service de démontrer que les sommes ont été effectivement appréhendées.

Par un mémoire en défense et des pièces, enregistrées les 21 et 24 novembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet des conclusions de la requête.

Le ministre fait valoir que :

- les moyens invoqués par M. et Mme C... C... sont infondés ;

- les dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts doivent être substituées à celles du 1° du 1 de cet article pour regarder comme distribuées les sommes correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée due sur les recettes non déclarées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Troalen,

- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... C... est le gérant et l'associé unique de l'EURL Brayan Dis, qui exploite une supérette sous l'enseigne " Franprix " et qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2016, 2017 et 2018, au cours de laquelle le service, regardant la comptabilité comme non probante, a procédé à la reconstitution de ses recettes ainsi qu'à la détermination du bénéfice imposable. Par une proposition de rectification du 26 novembre 2019, dans le cadre d'un contrôle sur pièces et selon la procédure contradictoire, les recettes omises ont été regardées comme des revenus distribués imposables entre les mains de M. C... C..., sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, à hauteur du résultat bénéficiaire hors taxe de 77 926 euros de la société après contrôle, au titre de l'année 2016, et sur le fondement du 2° du 1 du même article, à hauteur de la somme de 7 196 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée due sur ces recettes non déclarées. L'administration fiscale a par conséquent rehaussé les bases d'impositions du foyer fiscal de M. C... C... à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre de l'année 2016. M. et Mme C... C... relèvent appel du jugement du 4 avril 2023, par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de cette rectification au titre de l'année 2016.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. "

3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 26 novembre 2019 a été envoyée à M. et Mme C... C... à l'adresse située à Sartrouville connue de l'administration fiscale et qu'elle est parvenue à cette adresse le 30 novembre 2019. Si M. et Mme C... C... soutiennent qu'à cette date, ils avaient communiqué leur nouvelle adresse, située à Carrières-sous-Poissy, à l'administration fiscale, ils n'en justifient pas. Ainsi, la notification de la proposition de rectification doit être regardée comme régulière bien que le pli n'ait pas atteint M. et Mme C... C... et ait été retourné au service expéditeur. En tout état de cause, il résulte de l'instruction que M. et Mme C... C... ont eu connaissance de cette proposition au plus tard le 21 août 2020, puisqu'ils ont formulé à cette date des observations en réponse, ainsi qu'en atteste la réponse du service aux observations du contribuable du 7 septembre 2020, avant l'émission, le 31 décembre 2020, des avis d'imposition correspondant. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la notification de la proposition de rectification et de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort de la proposition de rectification du 26 novembre 2019 concernant les rectifications en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales que cette proposition a été émise à la suite d'un contrôle sur pièces, effectué après la vérification de comptabilité réalisée au sujet de l'activité de l'EURL Brayan Dis. Ainsi, en l'absence de mise en œuvre d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, M. et Mme C... ne sauraient se prévaloir des garanties de procédure prévues par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales.

5. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. S'agissant de revenus distribués, cette motivation peut résulter de la reproduction de la teneur de la proposition de rectification adressée à la société distributrice.

6. En l'espèce, la proposition de rectification du 26 novembre 2019, qui mentionne qu'elle porte sur l'impôt sur le revenu ainsi que sur les contributions sociales au titre de l'année 2016, comprend un extrait de la proposition de rectification adressée à l'EURL Brayan Dis qui précise que les recettes non comptabilisées par la société sont considérées comme des revenus distribués à hauteur de la somme totale de 85 122 euros au titre de l'année 2016. Cet extrait indique également que les sommes correspondant au montant hors taxes des recettes omises sont regardées comme distribuées en application des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et que la somme correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée due sur ces recettes non déclarées est regardée comme distribuée en application des dispositions du 2° du 1 du même article. Par suite, M. et Mme C... C... ne sont pas fondés à soutenir que cette proposition de rectification ne serait pas suffisamment motivée, faute en particulier de préciser le fondement légal retenu par le service pour retenir l'existence de revenus distribués.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 1658 du code général des impôts : " Les impôts directs et les taxes assimilées sont recouvrés en vertu soit de rôles rendus exécutoires par arrêté du directeur général des finances publiques ou du préfet, soit d'avis de mise en recouvrement ".

8. En émettant un avis d'imposition pour recouvrer les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales en litige plutôt qu'un avis de mise en recouvrement, l'administration fiscale n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 1658 du code général des impôts.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

9. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ".

10. D'une part, il résulte de l'instruction qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet l'EURL Brayan Dis, l'administration fiscale a regardé la comptabilité de cette société comme non probante et procédé à la reconstitution de ses recettes. M. et Mme C... C..., qui ne contestent pas le bien-fondé des sommes ainsi réintégrées dans le bénéfice de la société, ne font état d'aucune décision de mise en réserve ou d'incorporation au capital de ce bénéfice, lequel doit nécessairement être regardé comme ayant été désinvesti. Par suite, l'administration était fondée à regarder comme distribuées les sommes correspondant au montant hors taxe des recettes omises par la société en application des dispositions du 1° de l'article 109 du code général des impôts.

11. D'autre part, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande que les dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts soient substituées à celles du 1° du 1 de cet article comme fondement légal des impositions en litige à hauteur de la somme correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée due sur les recettes non déclarées par la société. Il y a lieu de procéder à cette substitution de base légale, dès lors qu'elle ne prive les contribuables d'aucune garantie et que l'administration était fondée à regarder comme distribuées la somme correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée due sur les recettes non déclarées calculées hors taxes. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 2° du 1 de l'article 109 doit être écarté comme étant inopérant.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande. Par suite, les conclusions de leur requête, y compris les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et A... C... C... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Versol, présidente,

Mme Le Gars, présidente,

Mme Troalen, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 octobre 2024.

La rapporteure,

E. TROALENLa présidente,

F. VERSOLLa greffière,

C. DROUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE01256


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23VE01256
Date de la décision : 15/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués. - Notion de revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERSOL
Rapporteur ?: Mme Elise TROALEN
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : SELARL ZAMOUR ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-15;23ve01256 ?
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