Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 15 mars 2023 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement.
Par un jugement n° 2304966 du 7 décembre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 janvier et 10 avril 2024, M. D... A..., représenté par Me Vitel, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a dénaturé les pièces du dossier et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le tribunal n'a pas statué sur certaines branches du moyen tiré du défaut d'examen sérieux, à savoir l'absence de précision sur les caractéristiques de l'emploi de M. A..., l'erreur de fait tiré de ce que M. A... justifiait de deux contrats cumulés et pouvait ainsi se prévaloir d'une quotité d'heure supérieure à un mi-temps et une erreur de fait tirée de ce que la préfecture a considéré à tort que M. A... était en France depuis 2015 et non depuis 2017 ; cette dernière erreur de fait soulevée n'est d'ailleurs pas visée dans le jugement ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen sérieux ;
- il est entaché d'une erreur de fait s'agissant de la quotité d'heure travaillée par M. A... ;
- il est entaché d'une erreur de droit tirée de la date à laquelle s'est placé le préfet pour prendre sa décision ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire, enregistré le 5 avril 2024, le préfet du Val-d'Oise s'en rapporte à ses écritures devant le tribunal.
Vu :
- la demande d'aide juridictionnelle déposée par M. A... ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Sénégal signé à Dakar le 23 septembre 2006 et l'avenant à cet accord signé à Dakar le 25 février 2008 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florent,
et les observations de Me de Grazia, avocate, pour M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 12 janvier 1987, est entré irrégulièrement en France le 26 octobre 2015, selon ses déclarations. Il sollicité le 13 septembre 2022 un titre de séjour sur le fondement de l'article 4 paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais précité. Par un arrêté du 15 mars 2023, le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 15 mars 2023 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur l'aide juridictionnelle :
2. Selon l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, susvisée : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président. ". Aux termes de l'article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence, (...). L'admission provisoire est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué. ". En raison de l'urgence, il y a lieu d'admettre, à titre provisoire, M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur la régularité du jugement :
3. D'une part, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. A... ne peut donc utilement se prévaloir d'une dénaturation des pièces du dossier ou d'une erreur manifeste d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.
4. D'autre part, M. A... soutient que le tribunal n'a pas statué sur certaines branches du moyen tiré du défaut d'examen sérieux. Il ressort toutefois du jugement attaqué que le tribunal a examiné le moyen dans son ensemble au point 4 de son jugement. Le tribunal a par ailleurs expressément répondu à l'erreur de fait alléguée relative à la quotité de travail prise en compte au point 8 de son jugement et il ressort de la lecture de l'arrêté attaqué que la mention de l'année 2017 comme date de début du séjour de l'intéressé en France constitue une simple erreur matérielle, le préfet ayant bien indiqué par ailleurs au premier considérant de son arrêté que l'intéressé avait déclaré " être entré sur le territoire le 20 octobre 2015 démuni de tout visa ". Dans ces conditions, l'irrégularité du jugement alléguée doit être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement :
5. En premier lieu, la décision attaquée mentionne les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent, permettant à M. A... d'en critiquer utilement le bien-fondé. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de refus de titre doit être écarté.
6. En deuxième lieu, d'une part, contrairement à ce que soutient le requérant, l'arrêté attaqué mentionne bien l'emploi exercé par M. A..., faisant mention du " métier d'agent de service de nettoyage ", d'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 4 du présent arrêt, la mention de l'année 2017 comme date de début du séjour de l'intéressé en France constitue une simple erreur matérielle. Par ailleurs, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'a analysé la vie professionnelle de M. A... que jusqu'en décembre 2021, qui contrairement à ce qu'allègue le requérant, ne correspond pas à la date du dépôt de sa demande de titre de séjour de l'intéressé, laquelle date d'avril 2022. Au demeurant, le requérant ne produit au dossier aucun bulletin de paye postérieurement à février 2022. Enfin, si M. A... a produit à l'appui de sa demande de titre de séjour deux contrats de travail au nom de M. C... B..., attestant d'une quotité d'emploi supérieure à un mi-temps, seul l'un de ses deux employeurs a produit une attestation indiquant avoir employé M. A... sous ce nom d'emprunt. Dans ces conditions, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le préfet n'a pas commis d'erreur de fait en considérant que M. A... ne disposait pas d'une quotité de travail supérieure à un mi-temps et cette affirmation ne saurait révéler un défaut d'examen sérieux de la situation du requérant. Par suite, l'erreur de droit de même que les erreurs de fait alléguées ne sauraient être accueillies.
7. En troisième lieu, à supposer l'ancienneté de séjour de M. A... avant 2017 ainsi qu'une quotité d'emploi équivalente à un plein temps établies, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant l'admission exceptionnelle au séjour du requérant qui a travaillé sous une fausse identité, n'a jamais déclaré ses revenus, ne justifie pas d'une intégration particulière en France et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident toujours ses parents et sa fratrie et où il a lui-même vécu au moins jusqu'à l'âge de 28 ans.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par conséquent, les conclusions du requérant à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : M. A... est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2024, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président de chambre,
M. Pilven, président assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2024.
La rapporteure,
J. FLORENTLe président,
P-L. ALBERTINILa greffière,
F. PETIT-GALLAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 23VE00120