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16/07/2024 | FRANCE | N°22VE02153

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 16 juillet 2024, 22VE02153


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.



Par un jugement n° 1811005 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a réduit les bases d'imposition aux contributions sociales auxquelles M. A... a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 du

montant correspondant à l'application du coefficient de 1,25 prévu au 7 de l'article 158 du code ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1811005 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a réduit les bases d'imposition aux contributions sociales auxquelles M. A... a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 du montant correspondant à l'application du coefficient de 1,25 prévu au 7 de l'article 158 du code général des impôts, prononcé la décharge des impositions correspondantes et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 août 2022, M. A..., représenté par Me Elbaz, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande d'assistance administrative internationale effectuée dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'EURL HCC International n'a pas été adressée aux autorités des Etats-membres interrogés au moyen du formulaire-type prévu par l'article 8 du règlement (UE) n° 904/2010 du 7 octobre 2010 ;

- la proposition de rectification du 5 octobre 2015 ne comporte pas de référence à l'impôt, ni à la période, concernés ; la proposition de rectification qui lui a été adressée n'est pas motivée par référence à la proposition de rectification de la société HCC International ou même un renvoi à cette dernière, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- l'administration fait référence aux informations obtenues via des demandes d'informations aux clients particuliers de la société HCC sans préciser quelle est la nature des documents obtenus, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; elle ne précise pas les destinataires des demandes d'assistance administrative internationale ;

- l'administration ne justifie pas de l'absence de comptabilisation d'un produit à hauteur de 9 500 euros suite à la vente d'un véhicule, ni du rehaussement des produits issus des demandes non contraignantes d'informations, ni des majorations de charge ;

- l'administration n'apporte pas la preuve du désinvestissement des revenus réputés lui avoir été distribués ;

- en indiquant dans sa réponse aux observations du contribuable du 19 novembre 2015, " les rectifications qui vous ont été proposées sont abandonnées en totalité. ", le service a pris une position formelle opposable.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 mai 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dorion ;

- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... était le gérant et l'associé unique de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) HCC International, qui exerçait une activité de commerce de véhicules d'occasion. L'EURL HCC International a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, à l'issue de laquelle le service vérificateur a notamment réintégré au résultat imposable de ses exercices des années 2012 et 2013 des produits omis, des charges majorées ou non justifiées, ainsi que des apports en compte courant non justifiés. Par une proposition de rectification du 5 octobre 2015, l'administration fiscale a notifié à M. A..., dans le cadre d'un contrôle sur pièces, des rehaussements d'imposition, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en conséquence des rectifications apportées aux résultats de l'EURL HCC International au titre de l'année 2012. Parallèlement, M. A... a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2013 et 2014, à l'issue duquel des rehaussements d'imposition procédant également des revenus réputés lui avoir été distribués par l'EURL HCC International ont été mis à sa charge au titre de l'année 2013. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé la réduction des impositions supplémentaires qui en ont résulté, en ce qui concerne l'application du coefficient de 1,25 prévu au 7 de l'article 158 du code général des impôts à la base des contributions sociales au titre des années 2012 et 2013 et rejeté le surplus de la demande de décharge de M. A.... Celui-ci relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, M. A... soutient que la demande d'assistance administrative internationale effectuée dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'EURL HCC International n'a pas été adressée aux autorités des Etats-membres interrogés au moyen du formulaire-type prévu par l'article 8 du règlement (UE) n° 904/2010 du 7 octobre 2010 concernant la coopération administrative et la lutte contre la fraude dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée. Ce moyen est toutefois inopérant, ainsi que l'a à bon droit jugé le tribunal, en vertu du principe d'indépendance des procédures d'imposition.

3. En deuxième lieu, si M. A... soutient que la proposition de rectification du 5 octobre 2015 ne comporte pas la référence à l'impôt visé, ni à la période sur laquelle elle porte, il ressort des mentions de cette proposition qu'elle porte sans ambiguïté sur l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux de l'année 2012. La circonstance que l'impôt concerné n'apparaisse qu'en page 5 est sans incidence sur la conformité de cette proposition de rectification aux prescriptions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. Par ailleurs, cette proposition, qui reproduit les motifs de rehaussement proposés dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'EURL HCC International et se réfère expressément à la proposition adressée à M. A... en qualité de gérant de cette société, est suffisamment motivée.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. / (...) ". L'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus de tiers qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée. Les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales instituent ainsi une garantie au profit de l'intéressé. Toutefois, la méconnaissance de ces dispositions par l'administration demeure sans conséquence sur le bien-fondé de l'imposition s'il est établi qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu du contribuable, celui-ci n'a pas été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, de cette garantie.

5. La proposition de rectification adressée à M. A... pouvait, sans que le contribuable ne soit privé de la garantie prévue par ces dispositions, se borner à indiquer que l'administration s'était fondée, pour déterminer les omissions de produits et charges non justifiées en litige, sur les documents obtenus par le service dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'EURL HCC International, sans mentionner de manière plus détaillée les documents en cause, dès lors que cette information était nécessairement connue par M. A..., gérant et associé unique de l'EURL HCC International, destinataire de la proposition du 20 juillet 2015 adressée à l'EURL HCC International, laquelle précise en détail l'origine et la teneur des renseignements externes obtenus, dans le cadre de la vérification de comptabilité de cette société, auprès de ses clients et dans le cadre de l'assistance administrative auprès des autorités fiscales européennes. Il s'ensuit que le moyen peut être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Et aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...). " Aux termes de l'article 47 de l'annexe II au même code : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées ". Les sommes réintégrées par l'administration dans le résultat imposable d'une société ne peuvent être regardées comme des revenus distribués au sens de ces dispositions que dans la mesure où elles ont été effectivement appréhendées par leur bénéficiaire et ne sont pas demeurées investies dans la société. Il appartient en principe à l'administration, lorsque le contribuable a régulièrement contesté les rectifications, d'apporter la preuve de l'existence et du montant de ces distributions ainsi que de leur appréhension. Elle est toutefois dispensée de démontrer que ce dernier a effectivement disposé des sommes distribuées, lorsqu'il est établi qu'il est le seul maître de l'affaire, au sens où il exerce la responsabilité effective de l'ensemble de la gestion administrative, commerciale et financière de la société et dispose sans contrôle de ses fonds.

7. En premier lieu, M. A... soutient que l'administration fiscale ne justifie pas de la réalité des omissions de produits et majorations de charges ayant conduit au rehaussement du résultat imposable de l'EURL HCC International au titre de l'exercice clos de l'année 2012. Toutefois, après avoir rejeté la comptabilité de la société comme non probante, le service vérificateur a constaté, lors de la vérification de comptabilité de cette société, l'absence de comptabilisation d'une vente de véhicule le 29 septembre 2012 pour un montant de 9 500 euros TTC et la comptabilisation de quatre ventes pour des montants inférieurs aux prix indiqués par les clients particuliers de la société en réponse aux demandes non contraignantes d'informations qui leur ont été adressées. Le service a également constaté l'enregistrement à deux reprises d'achats pour des fournisseurs et montants identiques le 21 août 2012 de 9 500 euros et le 16 décembre 2013 de 16 000 euros. Par ailleurs, la comparaison des factures des fournisseurs recueillies par le service et des documents présentés par le gérant a révélé des différences entre le montant mentionné sur le quitus et celui mentionnée sur la facture. Enfin, le service a remis en cause une charge injustifiée de 12 000 euros. Les minorations de résultat sont, ainsi, suffisamment établies.

8. En deuxième lieu, les rehaussements du résultat de l'EURL HCC International procèdent de la réintégration dans ses résultats des omissions de produits et des charges injustifiées rectifiées par le service. Les produits omis et minorations de résultat injustifiées n'ont pas été mis en réserve ou incorporés au capital. Par suite, l'administration apporte la preuve du désinvestissement des distributions constatées, réputées distribuées à M. A..., seul maître de l'affaire, en vertu du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

9. En dernier lieu, une mention portée par l'administration dans un acte de procédure conduisant à l'imposition contestée ne saurait constituer une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales. Il s'ensuit que M. A... ne saurait utilement se prévaloir de ce que la mention " les rectifications qui vous ont été proposées sont abandonnées en totalité " n'a pas été rayée dans la réponse à ses observations.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de décharge des impositions restant en litige. La requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Versol, présidente de chambre,

Mme Dorion, présidente-assesseure,

M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 juillet 2024.

La rapporteure,

O. DORION La présidente,

F. VERSOLLa greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 22VE02153


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22VE02153
Date de la décision : 16/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERSOL
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : ELBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-16;22ve02153 ?
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