La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/07/2024 | FRANCE | N°22VE01170

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 16 juillet 2024, 22VE01170


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. L... Q..., Mme G... R..., Mme P... F..., M. E... N..., Mme M... N..., M. C... O..., M. I... N..., M. B... H..., Mme S..., M. K... D... et M. J... A... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 10 mai 2022 par lequel la sous-préfète de Rambouillet a mis en demeure les propriétaires et occupants des véhicules et résidences mobiles stationnés sur le terrain situé sur la route départementale 156 à la Queue-lez-Yvelines de quitter les lieux da

ns un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification, à défaut de quoi il ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. L... Q..., Mme G... R..., Mme P... F..., M. E... N..., Mme M... N..., M. C... O..., M. I... N..., M. B... H..., Mme S..., M. K... D... et M. J... A... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 10 mai 2022 par lequel la sous-préfète de Rambouillet a mis en demeure les propriétaires et occupants des véhicules et résidences mobiles stationnés sur le terrain situé sur la route départementale 156 à la Queue-lez-Yvelines de quitter les lieux dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification, à défaut de quoi il serait procédé à leur évacuation forcée par les forces de l'ordre.

Par un jugement n° 2203709 du 14 mai 2022, la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 mai 2022, M. Q... et autres, représentés par Me Deboosere-Lepidi, avocat, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles et l'arrêté du 10 mai 2022 de la sous-préfète de Rambouillet ;

2°) de mettre à la charge de la commune de la Queue-lez-Yvelines une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2020, faute d'atteinte caractérisée à la salubrité publique, à la tranquillité et à la sécurité publique ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée et méconnaît le principe du contradictoire, faute de visa des dispositions de l'article L. 2212-3 du code général des collectivités territoriales, ni celui d'un quelconque arrêté municipal ni mention du procès-verbal d'infraction au titre des pouvoirs de police du maire et faute de motiver en fait l'existence d'atteintes à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité ;

- l'arrêté attaqué méconnaît la liberté d'aller et de venir et la circulaire du 16 décembre 1986, faute pour la commune de La Queue-lez-Yvelines d'avoir mis en place sur son territoire une aire dédiée au gens du voyage ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elle ne s'appuie sur aucun fait matériellement constaté.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 juin 2022, le préfet des Yvelines conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Tar,

- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. Q... et autres relèvent appel du jugement du 14 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2022 par lequel la sous-préfète de Rambouillet a mis en demeure les propriétaires et occupants des résidences mobiles stationnés sur le terrain situé sur la route départementale 156 à la Queue-lez-Yvelines de quitter les lieux dans un délai de quarante-huit heures.

2. Aux termes de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage : " (...) II. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I. ou au I. bis, le maire, le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain occupé peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. "

3. L'arrêté contesté vise la loi du 5 juillet 2000, notamment son article 9, et comporte la mention des éléments de fait qui expliquent en quoi le stationnement litigieux a été considéré comme portant atteinte à la salubrité et à la sécurité publiques. Il comporte donc la mention des principes de droit et des éléments de fait qui fondent la décision de mise en demeure contestée. Cette décision est ainsi suffisamment motivée.

4. Il résulte des dispositions de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000, lesquelles ouvrent un recours suspensif devant le juge, organisent les garanties dont bénéficient les gens du voyage pour pouvoir exercer utilement ce recours et fixent les délais dans lesquels il doit être présenté et jugé, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles le préfet met en demeure les occupants sans droit ni titre d'un terrain de quitter les lieux et, par suite, exclure l'application des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de ce même code. Dès lors, M. Q... et autres ne peuvent utilement soutenir que la procédure contradictoire préalable prévue par l'article L. 121-1 de ce code n'a pas été suivie.

5. En autorisant les communes ou établissements publics qui remplissent les conditions des 2°, 4° et 5° des I et I bis de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 à interdire le stationnement des résidences mobiles sur leur territoire, le législateur a apporté une restriction à la liberté de circulation des gens du voyage. Toutefois, cette restriction sert notamment l'intérêt public de sauvegarder l'ordre public, de préserver les droits des tiers et d'accroître les offres d'accueil des gens du voyage en incitant les communes et établissement publics à engager volontairement des actions en faveur des gens du voyage.

6. Il ressort des pièces du dossier que la commune de la Queue-lez-Yvelines compte moins de 5 000 habitants et a transféré à la communauté de communes Cœur d'Yvelines sa compétence en matière de création, d'aménagement, de gestion et d'entretien des aires d'accueil des gens du voyage. Or cette communauté de communes, en raison de la création d'une aire d'accueil sur le territoire de la commune de Beynes, respecte les obligations qui lui sont imparties par le schéma départemental pour l'accueil des gens du voyage dans le département des Yvelines. Par voie de conséquence, c'est légalement et donc sans méconnaître la liberté d'aller et de venir des requérants que la sous-préfète de Rambouillet a pu se fonder sur les dispositions de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage pour édicter la mise en demeure contestée.

7. Les requérants ne peuvent pas utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire n° 86-370 du 16 décembre 1986 du ministère de l'intérieur sur le stationnement des caravanes des gens du voyage, laquelle est dépourvue de caractère réglementaire.

8. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le stationnement litigieux a donné lieu à plusieurs branchements sur des placards électriques qui ont été ouverts pour ce faire, ce qui expose les passants à un danger d'électrocution. La sous-préfète de Rambouillet pouvait, pour ce seul motif, considérer que le stationnement litigieux était de nature à porter atteinte à la sécurité publique. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 ou de l'erreur de droit, faute d'atteinte caractérisée à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publique doit être écarté. Pour les mêmes motifs, c'est sans erreur d'appréciation que la sous-préfète de Rambouillet a pris la décision contestée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. Q... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter leurs conclusions aux fins d'annulation ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. Q... et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... Q..., Mme G... R..., Mme P... F..., M. E... N..., Mme M... N..., M. C... O..., M. I... N..., M. B... H..., Mme S..., M. K... D..., M. J... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Yvelines.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Versol, présidente de chambre,

Mme Dorion, présidente assesseure,

M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2024.

Le rapporteur,

G.TAR La présidente,

F. VERSOLLa greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE01170


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22VE01170
Date de la décision : 16/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-03 Police. - Polices spéciales. - Police des gens du voyage.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERSOL
Rapporteur ?: M. Gabriel TAR
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : DEBOOSERE-LEPIDI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-16;22ve01170 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award