Vu la procédure suivante :
Par un arrêt avant-dire droit du 20 juin 2023, la cour, après avoir écarté les autres moyens soulevés, a, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur la requête de l'association Riverains Clos de Lapanty dirigée contre le permis de construire du 21 décembre 2020 délivré à la SARL Fleurim jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification de l'arrêt pour permettre la notification à la cour, par la commune de Fleury-les-Aubrais et la SARL Fleurim, d'un permis de construire régularisant les vices tirés de l'incompatibilité du projet avec les objectifs relatifs à la hauteur des nouvelles constructions de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 2 et la méconnaissance des articles UP-I.2.3 et UP. II-4-2 du règlement du plan local d'urbanisme.
Par deux mémoires enregistrés respectivement les 14 décembre 2023 et 20 février 2024, ainsi qu'un mémoire enregistré le 28 mars 2024 qu'il n'a pas été jugé utile de communiquer, la SARL Fleurim, représentée par Me Deldique, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association Riverains Clos de Lapanty une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le permis de construire modificatif délivré par le maire de Fleury-les-Aubrais le 8 décembre 2023 régularise les vices relevés par la cour ;
- les moyens soulevés par l'association Riverains Clos de Lapanty ne sont pas fondés.
Par deux mémoires du 31 janvier et 13 mars 2024, l'association Riverains Clos de Lapanty, représentée par Me Dutoit, avocat, persiste dans ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du 4 avril 2022 du tribunal administratif d'Orléans et de l'arrêté du permis de construire du 21 décembre 2020 et demande l'annulation du permis de construire du 8 décembre 2023 et à ce que soit mis à la charge de la commune de Fleury-les-Aubrais une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le permis de construire modificatif n'a pas eu pour effet de régulariser les vices relevés par la cour ;
- la modification de l'emplacement des places n°13 et n°14 ne régularise pas les vices affectant le parc de stationnant dès lors que 31 places de stationnement méconnaissaient les règles du plan local d'urbanisme métropolitaine (PLUM) relatives à la largeur minimale exigée de 2 m 50 compte tenu de la présence de poteau de soutènement ou de la présence du mur d'enceinte situé au nord-est du projet ainsi que les règles relatives à l'accessibilité des places s'agissant de la place n° 26 ; les places ne sont par ailleurs pas desservies par une voie interne d'une largeur minimale de 4 m 50 ;
- le projet ne fait pas apparaître les locaux affectés au stockage des déchets respectant les exigences de l'article DC-4-7 du PLUM ;
- l'implantation de la pergola et de la rampe d'accès au parking ne respectent pas les règles relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives ;
- le calcul de l'emprise au sol par le pétitionnaire est erroné dès lors qu'il ne tient pas compte de la pergola et de la rampe d'accès ;
- le projet méconnaît les règles de hauteur et des distances d'implantation par rapport aux limites séparatives dès lors que la terrasse d'accès au R+2 ne se situe pas sur la limite séparative et que la terrasse d'accès au R+4 ne se situe pas à 4 mètres minimum de la limite latérale ; le niveau R+ 4 devrait par ailleurs être implanté à au moins 9m de la limite séparative ;
- les pares vues ou les treillages pour la végétation ne sont pas autorisés au-delà de la hauteur maximale de 18 mètres fixée par l'article DC-2.6.3 du PLUM ;
- le projet ne respecte pas l'OAP n°2 dès lors que la déclivité des constructions prévue est trop brutale et disproportionnée en faveur des R+3 et R+4 ;
- la seule modification du PLUM ne permet pas de régulariser le permis de construction qui ne modifie pas le projet sur ce point ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2024, ainsi qu'un mémoire enregistré le 29 mars 2024 qu'il n'a pas été jugé utile de communiquer, la commune de Fleury-les-Aubrais, représentée par Me Tissier-Lotz, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association Riverains Clos de Lapanty la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le permis de construire modificatif délivré à la SARL Fleurim le 8 décembre 2023 régularise les vices relevés par la cour ;
- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florent,
- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,
- et les observations de Me Dutoit pour l'association Riverains Clos de Lapanty, de Me Hallé pour la commune de Fleury-les-Aubray et de Me Giorno pour la SAS Fleurim.
Une note en délibéré présentée par l'association Riverains Clos de Lapanty a été enregistrée le 18 juin 2024.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
2. L'association " Riverains Clos de Lapanty " relève appel du jugement du 4 avril 2022 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2020 par lequel la maire de la commune de Fleury-les-Aubrais a délivré à la SARL Fleurim un permis de construire un immeuble comprenant trente-cinq logements, deux établissements recevant du public, deux commerces et un parking en sous-sol. Par un arrêt avant-dire droit du 28 janvier 2022, la cour, après avoir relevé que le permis de construire litigieux était incompatible avec les objectifs relatifs à la déclivité progressive des constructions de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 2 du plan local d'urbanisme de la commune et méconnaissait les articles UP-I.2.3 et UP. II-4-2 de ce document en tant qu'il prévoyait l'installation d'une crèche et ne respectait pas la longueur des dégagements pour deux places de stationnement, a estimé que ces vices étaient susceptibles d'être régularisés, a sursis à statuer en application des dispositions précitées du code de l'urbanisme et accordé un délai de six mois à la commune de Fleury-les-Aubrais et la SARL Fleurim pour procéder à la régularisation de ces vices. Par un arrêté du 8 décembre 2023, le maire de Fleury-les-Aubrais a délivré à la SARL Fleurim un permis de construire modificatif dont l'association requérante demande également l'annulation.
3. A compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. A ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Elles ne peuvent en revanche soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse d'un moyen déjà écarté par la décision avant-dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.
Sur la régularisation des vices retenus dans l'arrêt avant-dire droit :
4. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Fleury-les-Aubrais est désormais couverte par le plan local d'urbanisme métropolitain (PLUM) d'Orléans Métropole, approuvé le 7 avril 2022, qui classe le terrain d'assiette du projet en zone UP. La légalité du permis de régularisation délivré le 8 décembre 2023 doit dès lors être examinée au regard de ces nouvelles dispositions.
En ce qui concerne la méconnaissance des orientations d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme :
5. Une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu'elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme et, en particulier, en contrarient les objectifs.
6. L'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) du PLUM concernant la zone Sud Desseaux prévoit notamment : " Hauteur des constructions. Les nouvelles constructions observeront un gradient d'épannelage dégressif de l'Est vers l'Ouest. Ainsi les constructions observeront des hauteurs plus basses (R+1/R+2) à l'Ouest du site en lien avec le tissu pavillonnaire environnant par rapport aux constructions " écrans " le long de la rue André Dessaux qui chercheront à créer un vélum plus élevé (R+3/R+4). Ce secteur a pour objectif de permettre d'éviter une rupture d'échelle trop importante et d'adoucir l'épannelage de la ZAC Interives 1 avec les secteurs pavillonnaires de la rue Lazare Carnot ". L'OAP indique au droit du terrain d'assiette des constructions pouvant être édifiées en R+3 et R+4. L'OAP prévoit également à cet endroit un principe de mixité verticale, avec des logements en hauteur et des bureaux et services en rez-de-chaussée et une recherche de verticalité dans le souci de créer un écran sonore pour les pavillons de la rue Carnot.
7. Alors que le permis de construire initial du 6 juillet 2021 prévoyait des hauteurs uniformes sur les façades ouest et était incompatible avec les objectifs de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 2 visant à assurer une déclivité du bâtiment en fond de parcelle, les plans joints au permis de régularisation font état d'une modification de la façade ouest du bâtiment en intégrant un épannelage progressif des hauteurs de l'est vers l'ouest (R+1 au R+4) afin de s'intégrer plus harmonieusement avec le quartier pavillonnaire de la Lazare Carnot. Par cette configuration, le projet est compatible avec l'OAP visant à éviter la rupture d'échelle trop importante. Ainsi, le projet, en prévoyant une déclivité du bâtiment en fond de parcelle, ne contrarie pas l'orientation précitée. Ce vice doit ainsi être regardé comme régularisé.
En ce qui concerne la méconnaissance du règlement de la zone UP du plan local d'urbanisme métropolitain :
8. En premier lieu, lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par un permis modificatif si la règle relative à l'utilisation du sol qui était méconnue par le permis initial a été entretemps modifiée. Dans un tel cas de figure, un permis qui prend acte de la conformité du projet initial aux règles nouvellement applicables, constitue une mesure de régularisation. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que les " équipements d'intérêts collectifs et services publics " sont désormais autorisés dans la zone d'implantation du projet. Ainsi, le permis de construire modificatif de la SARL Fleurim, qui maintient l'installation d'une crèche, ne méconnaît pas les dispositions du PLU nouvellement applicable sur le territoire de la commune de Fleury-les-Aubrais. La modification du règlement a dès lors, contrairement à ce que soutient l'association requérante, régularisé le vice retenu par la cour dans son arrêt avant-dire droit.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article DC 3.7.2 du PLUM, qui réglemente les normes des emplacements de stationnement des véhicules motorisés : " 1. Les places de stationnement pour véhicules légers doivent être facilement accessibles et respecter une longueur utile de 5 m au minimum et une largeur utile de 2,5 m au minimum. Dans les parcs de stationnement ouvragés, des dégagements de 5,5 m de longueur utile minimum seront aménagés. (...). "
10. Il ressort du dossier de demande de régularisation du permis de construire que les places n°13 et n°14 qui ne respectaient pas les règles de dégagement imposées par l'ancien article II-4-2 du règlement du plan local d'urbanisme, reprises à l'article DC 3.7.2 du PLUM précitée, ont été pivotées de 90° afin de respecter la règle de distance de 5,5 mètres de dégagement. Dans ces conditions, le permis de construire modificatif a également régularisé cette troisième illégalité.
11. En troisième lieu, l'association requérante fait valoir que la largeur de la place n°14, impactée par le permis de construire modificatif, est désormais insuffisante. Il résulte néanmoins des plans soumis à l'appui de la demande du pétitionnaire que la largeur des places de stationnement pour les véhicules respecte, d'axe à axe, la largeur de 2,50 mètres. Contrairement à ce qu'allègue l'association, il n'y a pas lieu par ailleurs de tenir compte de la réduction induite par un poteau qui ne se situe pas au niveau de l'ouverture des portières.
12. En dernier lieu, les requérants ont invoqué à nouveau le non-respect des règles d'emprise au sol du projet, modifiée à l'occasion du permis de régularisation par l'avancée du niveau R+1 en vue de permettre l'épannelage du bâtiment. Ainsi qu'il a toutefois été jugé par la cour dans son arrêt avant-dire droit, la pergola, constituée d'un cadre métallique ajouré, recouvrant la rampe d'accès au parking, située sous le niveau du sol, ne constitue pas, en l'espèce, une construction susceptible de créer de l'emprise au sol. Il en est de même de la rampe d'accès elle-même dès lors qu'elle est située sous le niveau du sol. Quant aux balcons, si le règlement du PLUM ne prévoit plus leur exclusion du calcul de l'emprise au sol et renvoie à l'article R. 420-1 du code de l'urbanisme, il n'apparaît pas que leur seule prise en compte conduirait au dépassement de la limite réglementaire de 75 % d'emprise au sol fixée par le PLUM.
13. Il résulte de tout ce qui précède que les vices constatés par l'arrêt avant-dire droit de la cour ont été régularisés. Les autres moyens soulevés par l'association ont par ailleurs déjà été écartés par cet arrêt ou constituent des moyens nouveaux irrecevables en application des principes rappelés au point 3 dès lors que le permis de construire modificatif n'a pas porté sur ni impacté les éléments discutés. Par suite, l'association Riverains Clos de Lapanty n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Sur les frais liés à l'instance :
14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ". Il résulte de ces dispositions que le paiement des sommes exposées et non comprises dans les dépens ne peut être mis à la charge que de la partie qui perd pour l'essentiel. La circonstance qu'au vu de la régularisation intervenue en cours d'instance, le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre la décision initiale, dont le requérant était fondé à soutenir qu'elle était illégale et dont il est, par son recours, à l'origine de la régularisation, ne doit pas à elle seule, pour l'application de ces dispositions, conduire le juge à mettre les frais à sa charge ou à rejeter les conclusions qu'il présente à ce titre.
15. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la nature des vices initialement constatés par la cour, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Fleury-les-Aubrais une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rejeter les conclusions présentées par la commune au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association Riverains Clos de Lapanty est rejetée.
Article 2 : La commune de Fleury-les-Aubrais versera à l'association Riverains Clos de Lapanty une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Fleury-les-Aubrais au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Riverains Clos de Lapanty, à la commune de Fleury-les-Aubrais et à la société Fleurim.
Délibéré après l'audience du 16 juin 2024, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président
M. Pilven, président assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024.
La rapporteure,
J. FLORENTLe président,
P.-L. ALBERTINI
La greffière,
F. PETIT-GALLAND
La République mande et ordonne au préfet du Loiret en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 22VE01483