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02/07/2024 | FRANCE | N°22VE01357

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 02 juillet 2024, 22VE01357


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'établissement public Voies Navigables de France (VNF) a déféré au tribunal administratif de Versailles, comme prévenus d'une contravention de grande voirie, Mme B... C... et M. D... A..., en demandant à ce qu'ils soient condamnés au paiement d'une amende de 150 euros, à ce qu'il leur soit enjoint, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de libérer le domaine public fluvial dans un délai de quinze jours, et à ce qu'il soit mis à leur charge la somme de 250 euros cor

respondant aux frais d'établissement du procès-verbal, de sa notification, ainsi que d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public Voies Navigables de France (VNF) a déféré au tribunal administratif de Versailles, comme prévenus d'une contravention de grande voirie, Mme B... C... et M. D... A..., en demandant à ce qu'ils soient condamnés au paiement d'une amende de 150 euros, à ce qu'il leur soit enjoint, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de libérer le domaine public fluvial dans un délai de quinze jours, et à ce qu'il soit mis à leur charge la somme de 250 euros correspondant aux frais d'établissement du procès-verbal, de sa notification, ainsi que de la notification du jugement par huissier de justice.

Par un jugement n° 1706602 du 8 avril 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles a enjoint à Mme C... et à M. A... d'enlever leur bateau du domaine public fluvial, dans un délai d'un mois suivant la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, a autorisé, s'il y a lieu, l'établissement public VNF a procéder d'office, à l'expiration de ce délai et au besoin avec le concours de la force publique, à l'enlèvement de ce bateau, et a mis à leur charge une somme de 111,70 euros au titre des frais de notification du jugement par huissier de justice.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juin 2022, Mme C..., représentée par Me Normand, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement, dont la date de notification à l'intéressée n'est pas établie et dont elle a eu connaissance le 6 juillet 2021 ;

2°) de mettre à la charge de l'établissement public VNF la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué a été pris en méconnaissance des droits de la défense ;

- elle doit être mise hors de cause à défaut d'être propriétaire du bateau qui est l'objet de la présente procédure de contravention de grande voirie.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 juin 2024, l'établissement public VNF, représenté par Me Caron, avocat, conclut au rejet de la demande et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C....

Il soutient que les moyens de Mme C... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée le 18 avril 2024 à M. A..., qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Even,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Meyer, substituant Me Caron, pour l'établissement public VNF.

Considérant ce qui suit :

1. L'établissement public Voies Navigables de France (VNF) a, par un procès-verbal dressé le 30 mai 2017, constaté le stationnement sans droit ni titre sur le domaine public fluvial, sur le territoire de la commune de Poissy, du bateau " Arome " qu'elle estime appartenir à Mme C... et à M. A.... VNF les a déférés au tribunal administratif de Versailles comme prévenus d'une contravention de grande voirie. Mme C... fait appel du jugement du 8 avril 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles les a enjoint de procéder à l'enlèvement de leur bateau " Arome " du domaine public fluvial qu'il occupe, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à l'expiration du délai de quinze jours suivant la notification du jugement, et a autorisé, s'il y a lieu, VNF à procéder d'office à l'enlèvement de ce bateau, à l'expiration de ce délai et au besoin avec le concours de la force publique.

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les riverains, les mariniers et autres personnes sont tenus de faire enlever les pierres, terres, bois, pieux, débris de bateaux et autres empêchements qui, de leur fait ou du fait de personnes ou de choses à leur charge, se trouveraient sur le domaine public fluvial. (...) ". La présence d'un bateau en stationnement sans autorisation sur le domaine public fluvial constitue un empêchement au sens des dispositions précitées.

3. La personne qui peut être poursuivie pour contravention de grande voirie est soit celle qui a commis ou pour le compte de laquelle a été commise l'action qui est à l'origine de l'infraction, soit celle sous la garde de laquelle se trouvait l'objet qui a été la cause de la contravention.

4. Aux termes de l'article 1304-6 du code civil : " L'obligation devient pure et simple à compter de l'accomplissement de la condition suspensive. / Toutefois, les parties peuvent prévoir que l'accomplissement de la condition rétroagira au jour du contrat. La chose, objet de l'obligation, n'en demeure pas moins aux risques du débiteur, qui en conserve l'administration et a droit aux fruits jusqu'à l'accomplissement de la condition. (...) ".

5. Il est constant que le bateau dénommé " Arome ", ayant appartenu à Mme C... et à M. A... est stationné, sans autorisation, sur la rive gauche de la Seine, au point kilométrique 79,550, à Poissy (Yvelines). Ce fait est constitutif d'une contravention de grande voirie qui a été constatée par un procès-verbal du 30 mai 2017 sur le fondement de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques précité.

6. Il résulte de l'instruction que, par un acte notarié, Mme C... et M. A... ont divorcé et procédé à un acte de liquidation et de partage, signé le 17 janvier 2017, devenu définitif le 13 avril 2017, dont la condition suspensive a été signée le 21 juin suivant avec un effet rétroactif. Ainsi, alors même que le 30 mai 2017, date d'établissement du procès-verbal précité, cette condition suspensive n'avait pas encore été signée, Mme C..., dont il n'est pas contesté qu'elle n'avait plus la garde matérielle du bateau, ne peut plus être regardée comme la personne ayant commis l'infraction de stationnement sans autorisation, ni comme la personne pour le compte de laquelle cette infraction a été commise, ni comme la personne ayant la garde du bateau, cause de la contravention. Par suite, Mme C... est fondée à soutenir qu'elle ne pouvait pas se voir enjoindre de procéder à l'enlèvement du bateau " Arome ".

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles lui a enjoint de procéder à l'enlèvement du bateau " Arome " et a mis à sa charge les frais de notification de ce jugement par huissier de justice. Par suite, le jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles du 8 avril 2019 doit être annulé en tant qu'il concerne Mme C... et cette dernière doit être relaxée des fins des poursuites engagées contre elle.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'établissement public VNF la somme de 1 500 euros à verser à Mme C... au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1706602 du 8 avril 2019 est annulé en tant qu'il concerne Mme C....

Article 2 : Mme C... est relaxée des poursuites engagées à son encontre sur le fondement du procès-verbal du 30 mai 2017.

Article 3 : L'établissement public VNF versera à Mme C... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à l'établissement public Voies navigables de France.

Copie en sera adressée à M. D... A....

Délibéré après l'audience du 20 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Aventino, première conseillère,

M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

Le président-rapporteur,

B. EVEN

L'assesseure la plus ancienne,

B. AVENTINOLa greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE01357


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE01357
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-03-01-03 Domaine. - Domaine public. - Protection du domaine. - Contraventions de grande voirie. - Personne responsable.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : C.J. ALAIN BOT, YANNICK NORMAND ET MARIE-PASCALE CREN ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;22ve01357 ?
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