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18/06/2024 | FRANCE | N°23VE02290

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 18 juin 2024, 23VE02290


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 3 février 2023 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours.



Par un jugement n° 2303225 du 14 septembre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et des pièces, enregistrées les 14 octobre 2023, 9 février et 27 mai 2024, M. B..., représenté par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 3 février 2023 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2303225 du 14 septembre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 14 octobre 2023, 9 février et 27 mai 2024, M. B..., représenté par Me Monconduit, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise ou au préfet territorialement compétent de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois, et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen de la durée de présence et de sa situation professionnelle, et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 février 2014, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dorion ;

- les observations Me Cabral de Brito, substituant Me Monconduit, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Par l'arrêté contesté du 3 février 2023, le préfet du Val-d'Oise a rejeté la demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée le 13 octobre 2022 par M. B... et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. M. B... relève appel du jugement du 14 septembre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation d'un ressortissant tunisien qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié, et au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., ressortissant tunisien né le 22 juin 1994, entré en France le 16 janvier 2019 avec un visa de court séjour, travaille depuis le 12 mars 2019 pour la société " Chick End Café 5 ", en qualité d'employé polyvalent dans la restauration rapide, en contrat à durée indéterminée à temps plein, soit une durée d'emploi de quatre ans chez le même employeur à la date de l'arrêté contesté. Dès lors que la réalité de l'ancienneté de son intégration dans l'emploi était justifiée par la production de bulletins de paie corroborés par des relevés bancaires et les revenus déclarés depuis 2019, le préfet ne pouvait rejeter la demande d'admission exceptionnelle qui lui était présentée au motif que le courrier réclamant la réactualisation de la demande d'autorisation de travail, adressé à la société " Chick End Café 5 " le 2 novembre 2022 par courrier recommandé avec accusé de réception, est revenu non réclamé. Outre la stabilité de son emploi salarié depuis près de quatre ans à la date de l'arrêté contesté, M. B... justifie s'être logé par ses propres moyens dans le parc privé depuis le 1er mars 2021. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard à l'ancienneté du séjour en France de l'intéressé, à la pérennité de son insertion professionnelle dans un emploi qui, sans être inscrit sur la liste des métiers en tension, connaît des difficultés de recrutement, et alors que M. B... n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, en refusant de l'admettre au séjour en qualité de salarié, à titre exceptionnel, le préfet du Val-d'Oise a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 3 février 2023 du préfet du Val-d'Oise.

5. Le présent arrêt implique nécessairement que le préfet du Val-d'Oise, ou le préfet territorialement compétent, délivre à M. B... un titre de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, et le munisse sans délai d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2303225 du 14 septembre 2023 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du 3 février 2023 du préfet du Val-d'Oise sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise, ou au préfet territorialement compétent, de délivrer à M. B... un titre de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de deux mois et de le munir sans délai d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Versol, présidente de chambre,

Mme Dorion, présidente-assesseure,

M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juin 2024.

La rapporteure,

O. DORION La présidente,

F. VERSOLLa greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 23VE0229000


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23VE02290
Date de la décision : 18/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERSOL
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : LEXGLOBE SELARL CHRISTELLE MONCONDUIT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-18;23ve02290 ?
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