Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Eiffage Energie Ile-de-France et la société EDEIS ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat à leur verser la somme de 1 172 384,30 euros HT, à parfaire, assortie des intérêts moratoires à compter du 17 janvier 2016 et de la capitalisation des intérêts à compter du 1er janvier 2017 puis à chaque échéance annuelle, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1709033 du 6 mai 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'Etat à verser à la société Eiffage Energie Ile-de-France la somme de 52 482,84 euros, assortie des intérêts à taux légal à compter du 19 mars 2015 et de leur capitalisation à compter du 19 mars 2016 puis à chaque échéance annuelle, et rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces, enregistrées le 7 juillet 2021 et le 18 avril 2024, la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France et la société EDEIS, représentées par Me Crapart, avocat, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de leur demande ;
2°) de condamner l'Etat à verser à la société EDEIS la somme de 93 697,78 euros HT au titre du solde du marché (poste 1), assortie des intérêts moratoires à compter du 19 mars 2015, capitalisés à compter du 19 mars 2016 puis à chaque échéance annuelle ;
3°) de condamner l'Etat à verser à la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France la somme de 1 006 388,50 euros HT au titre du solde du marché (poste 2), assortie des intérêts moratoires à compter du 19 mars 2015, capitalisés à compter du 19 mars 2016 puis à chaque échéance annuelle ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros à verser à chacune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- au titre du poste 1, la société EDEIS a été contrainte de mobiliser du personnel en dehors des prévisions du marché pour préparer l'interruption du chantier, pendant cette interruption et pour préparer la reprise du chantier et doit être indemnisée des sommes engagées à ce titre à hauteur de 26 636 euros ;
- au titre du poste 2, la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France a droit à être indemnisée des sommes engagées au titre de la préparation de l'interruption du chantier à hauteur de 31 961 euros dès lors qu'elle justifie de manière probante la mobilisation de son personnel sur cette période ;
- elle a droit à l'indemnisation des sommes engagées au titre de la mobilisation de son personnel pendant la période d'interruption du chantier à hauteur de 22 065,83 euros ;
- elle a droit à l'indemnisation des sommes engagées au titre de la mobilisation de son personnel pour la reprise des travaux à hauteur de 43 119 euros ;
- elle a suffisamment justifié des surcoûts résultant de la prolongation du délai du marché et a droit à l'indemnisation de ces sommes à hauteur de 96 333,16 euros ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a refusé de faire entièrement droit à sa demande de règlement des intérêts moratoires non versés au titre des retards de règlement des acomptes à hauteur de 16 621,02 euros ;
- c'est à tort que les premiers juges ont refusé de faire droit à sa demande de règlement des surcoûts consécutifs aux retards de règlement des acomptes à hauteur de 6 801,86 euros ;
- au titre du poste 1, c'est à tort que les juges de première instance ont refusé de faire droit à la demande de la société EDEIS tendant à l'indemnisation des préjudices résultant des conditions d'exécution des travaux et des décalages de planning, à hauteur de 49 583 euros, eu égard à la carence du maître d'ouvrage dans l'exercice de ses pouvoirs de direction et de contrôle du marché ;
- au titre du poste 2, c'est à tort que le tribunal administratif a refusé de faire droit à la demande de la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France tendant à l'indemnisation des préjudices résultant des conditions d'exécution des travaux et des décalages de planning compte tenu de la carence du maître d'ouvrage dans l'exercice de ses pouvoirs de direction et de contrôle du marché ; elle doit être indemnisée à hauteur de 165 214,25 euros au titre de la mobilisation de son personnel et de 413 496,46 euros au titre de la mobilisation de ses autres moyens matériels ;
- la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France a droit à la rémunération des travaux supplémentaires réalisés et non prévus dans le prix global et forfaitaire à hauteur de 24 239,54 euros au titre des travaux supplémentaires rendus indispensables du fait de la défaillance imprévisible des installations techniques existantes, à hauteur de 725 euros au titre de la réalisation de multiples dossiers des ouvrages exécutés (DOE) du fait des modifications ordonnées par la maîtrise d'ouvrage, à hauteur de 34 355,13 euros au titre des travaux supplémentaires résultant des ordres de service n°s 38, 40, 41 et 44 et à hauteur de 104 600,12 euros au titre des travaux supplémentaires non inscrits dans le décompte alors même qu'ils avaient été régularisés par un ordre de service en cours d'exécution du marché ;
- elles ont droit au règlement des sommes non versées en cours d'exécution du marché au titre de la révision de prix, soit la somme de 2 778,78 euros HT au titre du poste 1 et la somme de 61 556,23 euros HT au titre du poste 2.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérantes la somme de 2 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les requérantes ne justifient pas de la réalité des montants réclamés ;
- les conclusions tendant au versement des sommes correspondant aux travaux supplémentaires résultants des ordres de service n°s 40, 41 et 44 et au versement des sommes correspondant à la révision des prix sont irrecevables car nouvelles en appel ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Houllier,
- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,
- et les observations de Me Crapart, pour les sociétés Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France et EDEIS.
Considérant ce qui suit :
1. Les sociétés EDEIS et Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France, respectivement titulaires des postes 1 et 2 du marché de conception et réalisation du remplacement des systèmes de détection incendie et de mise en sécurité incendie de certaines structures de l'hôpital d'instruction des armées Percy à Clamart, font appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 6 mai 2021 en tant que le tribunal a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à leur payer les sommes qu'elles estiment leur être dues en exécution de ce marché.
Sur les préjudices résultant des retards de règlement des acomptes :
2. Il résulte de l'instruction que les acomptes relatifs aux travaux réalisés entre avril et septembre 2012 n'ayant pas été payés, les travaux ont été interrompus par le groupement à compter du 28 novembre 2012 et jusqu'au 2 mai 2013 en application des stipulations de l'article 49.2.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux. Les sociétés requérantes demandent la condamnation de l'Etat à les indemniser des préjudices qu'elles estiment avoir subis en conséquence de cette interruption.
En ce qui concerne le poste 1 :
3. La société EDEIS a sollicité, dans sa demande de rémunération complémentaire du fait de la modification des conditions d'exécution des prestations objet du poste 1 qu'elle a adressée au maître d'ouvrage le 8 juin 2015, le versement de la somme de 26 636 euros correspondant à l'immobilisation de son personnel à raison de l'interruption de l'opération. Elle fait en particulier valoir que la préparation de l'interruption du marché a nécessité la mobilisation d'un directeur de projet, d'un ingénieur OPC et d'un coordonnateur SSI, que l'interruption du chantier a nécessité la mise à disposition d'un directeur de département, d'un chef de projet et d'un secrétariat à raison de plusieurs heures par semaine et que la préparation de la reprise des opérations a nécessité la mobilisation d'un directeur de département, d'un chef de projet et d'un ingénieur OPC. Toutefois, elle n'établit pas, par les seuls tableaux insérés dans sa demande de rémunération complémentaire, la réalité de ces immobilisations ni, s'agissant des phases de préparation de l'interruption et de reprise des opérations, que ces personnels n'auraient pas été en tout état de cause mobilisés au titre de l'exécution du marché. Dans ces conditions, les conclusions présentées à ce titre doivent être rejetées.
En ce qui concerne le poste 2 :
S'agissant de l'immobilisation des personnels :
Quant à la période de préparation de l'interruption des travaux :
4. La société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient avoir dû mobiliser, sur cette période, un responsable d'affaires, un directeur de département, un conducteur de travaux, un responsable de chantier et des équipes de montage pour assurer la planification de l'interruption, assurer l'arrêt du chantier et procéder au rangement et à l'évacuation des zones de chantier. Toutefois, si la requérante produit deux comptes rendus de visite et d'état des lieux en date du 26 novembre et du 3 décembre 2012 ainsi qu'un registre de journal de réunion qui attestent de la propreté et du nettoyage des lieux, ainsi que de la remise en place des faux-plafonds et grilles de ventilation et désenfumage, la requérante n'établit pas, notamment par le tableau de ventilation des coûts de main de d'œuvre, avoir dû mobiliser spécifiquement certains de ses personnels pour ces tâches, ni que cette préparation aurait entraîné une mobilisation accrue des équipes.
Quant à la période d'interruption des travaux :
5. La société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient que c'est à tort que le tribunal administratif n'a condamné l'Etat à l'indemniser de la mobilisation de ses personnels sur cette période qu'à hauteur de la somme de 18 634,17 euros. Toutefois, si elle soutient avoir droit au reliquat de 22 065,83 euros, qui correspondrait, selon elle, à l'immobilisation de ses personnels au titre des mois d'avril et mai 2013, les pièces qu'elle produit, qui sont tronquées et sans en-tête, ne font pas apparaître la rémunération réellement versée sur cette période et ne revêtent pas un caractère suffisamment probant pour établir la réalité de la dépense qu'elle soutient avoir exposée.
Quant à la période de reprise des travaux :
6. Si la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient avoir dû mobiliser, sur cette période, un responsable d'affaire, un directeur de département, le responsable de chantier, le projeteur ainsi qu'une équipe de montage de quatre personnes, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que la mobilisation de ces équipes serait la conséquence directe du redémarrage des travaux et de la reprise en main du chantier et non des travaux eux-mêmes conformément à son engagement contractuel.
S'agissant de l'absence de couverture des frais généraux :
7. Si la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient que le décalage de vingt-deux mois des travaux a eu pour effet de réduire le chiffre d'affaires mensuel du chantier et donc la couverture des frais généraux de siège et d'agence, elle n'établit pas, par le seul tableau inséré dans la demande de rémunération complémentaire, dont la valeur probante n'est pas établie, la réalité et le quantum des surcoûts qu'elle soutient avoir supportés à ce titre. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées.
S'agissant des intérêts moratoires résultant des retards de règlement des acomptes :
8. Si les sociétés requérantes soutiennent que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté le surplus de leur demande tendant au règlement de la somme de 16 621,02 euros au titre des intérêts moratoires, elles n'apportent aucun élément précis de nature à établir qu'elles auraient droit à un montant supérieur à la somme de 9 239,39 euros acceptée par le ministre des armées en première instance alors, au surplus, que le tableau de la réclamation préalable correspondant au poste 2 fait uniquement état d'un reliquat de 5 887,41 euros TTC dû à ce titre.
S'agissant des autres surcoûts :
9. Si la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient que l'interruption des travaux a engendré des surcoûts au titre, notamment, du suivi administratif, de l'immobilisation du matériel d'outillage, des coûts d'extension des garanties des fournisseurs et des garanties bancaires pendant la période d'interruption du marché, la seule production du grand livre comptable de l'opération ne permet pas d'établir la réalité de ces surcoûts. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées.
Sur les difficultés rencontrées dans l'exécution du marché :
10. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.
En ce qui concerne le poste 1 :
11. La société EDEIS soutient qu'elle a droit au paiement de la somme de 49 853 euros au titre des préjudices résultant de la carence du maître d'ouvrage dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché. Toutefois, en se bornant à renvoyer aux difficultés rencontrées dans la gestion des plannings et l'obtention de certains permis, sans indiquer en quoi ces difficultés l'auraient contrainte, ainsi qu'elle le soutient, à organiser des réunions de chantier supplémentaires et à adapter les plans d'architecte, elle n'établit pas la réalité de ces surcoûts, ni leur imputabilité à une faute du maître d'ouvrage.
En ce qui concerne le poste 2 :
12. Aux termes de l'article 3.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché : " Les prestations faisant l'objet du marché sont réglées par un prix forfaitaire global précisé à l'acte d'engagement. Dans le cadre de son obligation de résultat, ces prix présentés par les titulaires comprennent l'intégralité des prestations, marges, couverture pour risques, frais généraux, etc. nécessaires à une complète réalisation des prestations conformément aux objectifs fixés au programme. / Les descriptifs techniques pouvant être rédigés en termes d'objectifs à atteindre, les entreprises se doivent de prendre en compte toutes les prestations pour atteindre ces objectifs. Ainsi, toutes les prestations non décrites, intellectuelles ou de travaux correspondant à une parfaite exécution et complète finition des ouvrages sont dues au présent marché. (...) / A. Contenu des prix : / En complément des stipulations de l'article 10.1 du CCAG Travaux, les prix du marché sont hors TVA et sont établis en tenant compte : / Concernant le site et les interférences : / - Des diverses servitudes inhérentes aux infrastructures existantes et conservées durant les travaux / - De l'obligation faite aux entrepreneurs et à leurs personnels de se conformer aux consignes et règlements édictés par le médecin-chef de l'hôpital, relatifs à la police et à la sécurité intérieure de l'immeuble dans lequel les travaux sont exécutés / - Du fait que les travaux se feront en site occupé, en milieu hospitalier (maintien du niveau sanitaire requis par le CLIN (Comité de lutte contre les infections nosocomiales), maintien du niveau de sécurité des locaux en activité) (...) / Concernant l'exécution des travaux et l'entretien maintenance : / - Du fait que les travaux devront être réalisés parfois durant certaines plages horaires spécifiées au programme / (...) ".
13. La société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient que les difficultés d'exécution du marché ont généré pour elle un surcoût en moyens humains évalué à 165 214,25 euros, des surcoûts induits par la mobilisation de ses moyens matériels, en particulier pour les frais d'études et administratifs, l'outillage et la sous-couverture des frais généraux, qu'elle évalue à hauteur de 76 030,31 euros, et qu'elle a également droit au paiement de la somme de 337 466,15 euros au titre des prestations réalisées du fait du non-respect du programme N101-401, notamment à raison de difficultés d'accessibilité et de retards de plannings. S'il résulte de l'instruction que la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France a, à plusieurs reprises, alerté le maître d'ouvrage des difficultés rencontrées dans l'accès aux locaux, en particulier au regard du planning initialement établi, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que les surcoûts et les prestations supplémentaires allégués, notamment relevés dans le devis n° 26753TS09B, excèderaient ce qui était envisageable en milieu occupé, conformément aux stipulations précitées de l'article 3.1 du CCAP, ni qu'ils seraient directement imputables à une faute du maître d'ouvrage.
Sur les travaux supplémentaires :
14. L'entreprise titulaire d'un marché a droit au paiement des travaux non-prévus au marché initial qui lui ont été commandés par ordre de service régulier. En outre, même en l'absence d'un ordre de service, et nonobstant le caractère forfaitaire du prix du marché, le cocontractant de 1'administration est fondé à demander le règlement des travaux indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art.
En ce qui concerne les travaux résultant d'un ordre de service :
15. En premier lieu, la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France sollicite le paiement de la somme de 34 355,13 euros correspondant à des travaux supplémentaires induits, selon elle, par les ordres de service n°s 38, 40, 41, 42 et 44 et dont elle aurait fait état dans ses réserves sur l'étendue des travaux rendus nécessaires par ces modifications. Toutefois, d'une part, il ressort des termes mêmes du point 26 du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le tribunal administratif, qui a bien répondu à cette demande, y a partiellement fait droit en condamnant l'Etat à payer la somme de 14 538,90 euros TTC correspondant à la réalisation de trappes supplémentaires d'accès au plafond, demandée par l'ordre de service n° 40, et la réalisation de travaux PCS, demandée par l'ordre de service n° 42. D'autre part, s'agissant des ordres de service n°s 38 et 41, elle n'apporte aucun élément de nature à préciser la nature de sa demande, ni à en étayer le bien-fondé.
16. En second lieu, les requérantes soutiennent qu'une partie des travaux prévus par les ordres de service n°s 40, 41 et 44 n'a pas été réintégrée dans le décompte général qui leur a été notifié le 21 décembre 2016. Toutefois, les sociétés requérantes, qui se bornent à renvoyer à un tableau établi par leurs soins, n'établissent pas, par les pièces qu'elles produisent, que ces ordres de service n'auraient pas fait l'objet d'une prise en compte au titre du décompte notifié ou n'auraient pas été réglés par ailleurs. En outre, s'il résulte de l'instruction que le maître d'ouvrage a accepté, par ordre de service n° 44, le devis n° 26753TS12 relatif à la libération de la zone de parking, il ressort du courrier du 7 août 2014 émettant des réserves sur cet ordre de service que ce dernier n'a pas validé le montant des prestations à réaliser, ni le caractère définitif des prix du devis. Dans ces conditions, ces conclusions doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité.
En ce qui concerne les travaux indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art :
17. En premier lieu, la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient qu'elle a dû réaliser des travaux supplémentaires pour un montant total de 24 239,54 euros HT. Elle produit ainsi un devis n° 26753TS14 du 20 octobre 2014 pour le remplacement inter proximité et départs disjoncteur sur les moteurs de désenfumage, un devis n° 26753TS15 du 20 octobre 2014 pour une recherche de pannes suite à l'arrêt des tortues, un devis n° 26753TS17 du 27 février 2014 pour l'obtention d'éléments CTA et un audit de recherche et un devis n° 26753TS18 du 17 novembre 2014 pour indisposition des moteurs pendant la phase d'essais en août et septembre 2014. Toutefois, elle n'établit pas, par ces pièces et les échanges de courriels avec le maître d'ouvrage, que ces travaux, qui ne résultent pas d'un ordre de service du maître d'ouvrage, auraient été indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art au-delà des obligations au demeurant prévues par l'article 3.1 du CCAP rappelé au point 12 du présent arrêt. Par suite, cette demande doit être rejetée.
18. En deuxième lieu, s'agissant des sommes réclamées au titre du devis n° 26753TS16, d'un montant de 535,03 euros HT, et du devis n° 26753TS19, d'un montant de 21 704,28 euros HT, il n'est pas établi que ces travaux, dont il est constant qu'ils n'ont jamais été régularisés par un ordre de service, revêtiraient un caractère indispensable ou excèderaient les obligations mises à la charge de l'entreprise au titre de l'article 3.1 du CCAP précité au point 12. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées.
19. En dernier lieu, si la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France soutient qu'elle a droit au paiement de la somme de 725 euros visant à couvrir la réalisation de multiples dossiers des ouvrages exécutés (DOE), elle n'établit pas que cette prestation présenterait un caractère effectivement supplémentaire eu égard aux stipulations contractuelles rappelées au point 12 du présent arrêt.
Sur les sommes dues au titre de la révision des prix :
20. Aux termes de l'article 3.4 du CCAP applicable au marché litigieux : " 3.4.1. Variation des prix / Les prix sont révisables suivant les modalités fixées au 3.4.3 et au 3.4.4 du présent CCAP. / (...) 3.4.4. Modalités de variation des prix / Le coefficient de révision Cn applicable pour le calcul de l'acompte du mois n d'exécution des prestations est donné par la formule : Cn = 0,15 + (0,85 In / I0) / Dans laquelle I0 et In sont les valeurs prises par l'index de référence I du marché ou de la section technique concernée, respectivement au mois zéro et au mois n ".
21. Les sociétés requérantes soutiennent qu'elles ont droit au paiement, au titre de la révision des prix, de la somme de 2 778,78 euros HT s'agissant du poste 1 et de 61 556,23 euros HT s'agissant du poste 2, ainsi que cela ressort du projet de décompte final établi par leurs soins. Toutefois, elles n'apportent, en dépit de la mesure d'instruction qui leur a été adressée en ce sens, aucun élément probant de nature à établir qu'elles auraient droit à de telles révisions.
22. Il résulte de tout ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus de leur demande.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les sociétés requérantes demandent à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'Etat sur ce fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête des sociétés EDEIS et Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Etat présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eiffage Energie Systèmes Ile-de-France, à la société EDEIS et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.
La rapporteure,
S. HoullierLa présidente,
C. Signerin-IcreLa greffière,
C. Fourteau
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 21VE01986