Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2010 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à M. C... au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1802332 du 12 octobre 2020, le tribunal administratif d'Orléans a prononcé la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée relatif à une facture du 28 mai 2010 d'un montant de 3 903,50 euros TTC et rejeté le surplus de la demande.
Par un arrêt n° 20VE03159 du 15 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Versailles a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à M. C... au titre des années 2003 à 2007 et des pénalités correspondantes, a réformé le jugement du tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il avait de contraire et a rejeté le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. et Mme C....
Par un arrêt n° 470934 du 30 juin 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur le pourvoi formé par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, a annulé l'arrêt du 15 décembre 2022 de la cour, en tant qu'il prononce la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à M. C..., et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 8 décembre 2020, le 23 mars 2021 et le 11 mai 2021, M. et Mme C..., représentés par Me Bourdin, avocat, doivent être regardés comme demandant à la cour :
1°) d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il rejette le surplus de leur demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure de vérification de comptabilité est irrégulière en ce que la durée des opérations sur place a excédé trois mois, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ;
- l'administration ne pouvait demander communication de leurs relevés de comptes privés dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'activité professionnelle du M. C... ; le service vérificateur les a ainsi privés des garanties attachées à la procédure d'examen de situation fiscale personnelle au titre des années 2003 à 2007 ;
- ils justifient de ce que certains encaissements bancaires ne correspondaient pas à des produits d'activité.
Par des mémoires en défense enregistrés les 20 avril et 6 mai 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Le ministre fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Les parties, qui ont été informées de la reprise d'instance le 21 juillet 2023, n'ont pas présenté de mémoires après cassation partielle.
Par une ordonnance du 15 décembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée, en application de l'article L. 613-1 du code de justice administrative, au 15 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dorion,
- les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2008 à 2010, à l'occasion duquel l'administration a constaté que M. C... exerçait une activité de miroitier-vitrier dans des conditions qu'elle a regardées comme occultes, dès lors qu'il n'avait pas fait connaître cette activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce et n'avait souscrit dans les délais légaux aucune déclaration fiscale au titre de cette activité. L'administration fiscale a alors procédé à une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2010, à l'issue de laquelle le service a réclamé à M C... des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2010 et a assujetti son foyer fiscal à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2003 à 2010. Par un arrêt du 15 décembre 2022, la cour a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à M. C..., au titre des années 2003 à 2007, et rejeté le surplus de la demande. Sur le pourvoi formé par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il a déchargé M. C... des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007 et des pénalités correspondantes, et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " I.-Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois (...) / II.- Par dérogation au I, l'expiration du délai de trois mois n'est pas opposable à l'administration : (...) / 4° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois. (...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : / (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ". L'irrégularité de la vérification de comptabilité d'un contribuable n'est susceptible de vicier la procédure d'imposition d'office de ses revenus que si l'administration n'est pas en mesure de justifier de la situation d'imposition d'office par d'autres moyens que les informations obtenues à l'occasion de la vérification irrégulière.
3. Il résulte de l'instruction que l'activité non déclarée de miroitier-vitrier exercée par M. C... a été découverte à l'occasion de l'examen de situation fiscale personnelle dont son foyer fiscal a fait l'objet au titre des années 2008 à 2010 et que, faute d'avoir déposé dans les délais légaux les déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles il était tenu, les produits de cette activité ont été taxés d'office à la taxe sur la valeur ajoutée en application du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. La situation d'imposition d'office ne résultant pas des constatations effectuées au cours de la vérification de comptabilité, les requérants ne soutiennent pas utilement que la procédure de vérification serait irrégulière du fait que les opérations de contrôle, qui se sont déroulées du 12 juin 2012 au 15 novembre 2012, ont duré plus de trois mois en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales. En tout état de cause, M. C... n'ayant présenté aucune comptabilité, la vérification sur place pouvait régulièrement s'étendre sur une durée n'excédant pas six mois, en vertu du 4° de cet article.
4. Aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées (...) ". Il résulte de ces dernières dispositions que le droit de communication qu'elles prévoient a seulement pour objet de permettre à l'administration fiscale, pour l'établissement et le contrôle de l'imposition d'un contribuable, de demander à un tiers ou, éventuellement au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela nécessite d'investigations particulières ou, dans les mêmes conditions, de prendre connaissance et, le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé. Les documents dont la communication peut être demandée par l'administration fiscale comprennent non seulement les documents comptables et financiers, mais aussi les documents de toute nature pouvant justifier le montant des recettes et dépenses. L'administration est fondée à faire état, à l'encontre d'un contribuable, de renseignements qu'elle recueille sur d'autres contribuables en usant de son droit de communication, dès lors que les renseignements sont nécessaires à la détermination des bases d'imposition du contribuable vérifié. Dans l'exercice de son droit de communication, l'administration n'est pas tenue d'observer, à l'égard des tiers qu'elle n'envisage pas d'imposer, les formalités relatives à la procédure contradictoire d'imposition.
5. Pour procéder aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée restant en litige, le service vérificateur a mis en œuvre le droit de communication qu'il détient en vertu des dispositions rappelées au point 4, à fin d'obtenir la copie des relevés du compte bancaire n° 0005101075069, ouvert au nom de M. B... C..., et des comptes bancaires nos 0005101212906 et 0003412660380, ouverts au nom de Mme A... C.... En se bornant à reconstituer les recettes de l'activité de M. C... au vu des relevés de ses encaissements bancaires obtenus dans l'exercice de son droit de communication, le service vérificateur n'a pas engagé un contrôle de cohérence entre les revenus déclarés par M. C... et sa situation patrimoniale, sa situation de trésorerie ou les éléments de son train de vie au sens de l'article L. 12 du livre des procédure fiscales relatif à l'examen de situation contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle. Les requérants ne sont dès pas fondés à soutenir que l'administration fiscale a procédé à un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2003 à 2007 en les privant des garanties attachées à cette procédure. S'ils font par ailleurs valoir que le service ne pouvait, dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'activité individuelle de M. C..., demander communication des relevés relatifs aux comptes bancaires détenus à titre personnel par Mme C..., étrangère à cette activité, il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 30 novembre 2012, que M. C... a reconnu lors de la première intervention avoir utilisé les comptes n° 0005101075069, ouvert à son nom, et n° 0005101212906, ouvert au nom de son épouse, et que l'administration fait valoir sans être contredite que les renseignements relatifs au compte n° 0003412660380, ouvert au nom de Mme A... C..., n'ont pas servi à fonder les rectifications. Les renseignements demandés étant nécessaires à la détermination des bases d'imposition du contribuable vérifié et l'administration fiscale n'étant pas tenue d'informer Mme C... de l'exercice du droit de communication sur ses comptes bancaires, le moyen doit être écarté dans toutes ses branches.
Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
6. Aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ".
7. Dans le dernier état de leurs écritures, les requérants soutiennent que les sommes de 2 103 euros sur 2003, 6 336 euros sur 2004 et 425 euros sur 2007 ont été intégrées à tort dans la base d'imposition de M. C... à la taxe sur la valeur ajoutée. S'agissant des encaissements pour lesquels ils revendiquent le bénéfice de la présomption de prêts familiaux, pour un montant total de 9 009,02 euros, ils n'apportent aucun élément au soutien de leurs allégations, alors que l'administration fiscale fait valoir que les crédits bancaires identifiés comme provenant des enfants, du frère et de la mère de M. C... ont été extournés au stade du contrôle. En produisant la copie d'un chèque de 425,02 euros émis par la SA MMA IARD, les requérants n'établissent pas davantage que ce chèque, dont le montant ne figure pas dans la liste
des produits imposés annexée à la proposition de rectification, correspond à un encaissement regardé à tort comme un produit.
8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande de décharge des impositions restant en litige.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. et Mme C... soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et Mme A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
Mme Dorion, présidente-assesseure,
Mme Troalen, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 mars 2024.
La rapporteure,
O. DORION La présidente,
F. VERSOLLa greffière,
S. LOUISERE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 23VE01494