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22/02/2024 | FRANCE | N°20VE01138

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 22 février 2024, 20VE01138


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Montfermeil a demandé au tribunal administratif de Montreuil :



1°) à titre principal, de condamner solidairement les sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie (OGI), Qualiconsult et Multiclo à lui verser la somme de 440 576,40 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait des désordres constatés sur le ponton en bois de la digue, augmentée des intérêts au taux légal ;



2°) de condamner solidairement les

sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult et Urbaine de Travaux à lui verser la somme de 9 504 euros TTC en réparation...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Montfermeil a demandé au tribunal administratif de Montreuil :

1°) à titre principal, de condamner solidairement les sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie (OGI), Qualiconsult et Multiclo à lui verser la somme de 440 576,40 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait des désordres constatés sur le ponton en bois de la digue, augmentée des intérêts au taux légal ;

2°) de condamner solidairement les sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult et Urbaine de Travaux à lui verser la somme de 9 504 euros TTC en réparation du préjudice subi en raison des désordres causés par l'absence de joints de dilatation sur la partie en béton de la digue, augmentée des intérêts au taux légal ;

3°) de condamner solidairement les sociétés OGI et Urbaine de travaux à lui verser la somme de 112 200 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait des désordres causés par l'absence de récupération des eaux de pluie en tête de digue, augmentée des intérêts au taux légal ;

4°) de condamner solidairement les sociétés OGI, Qualiconsult, Urbaine de travaux et Segex à lui verser la somme de 87 007,8 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait des désordres affectant la membrane d'étanchéité du lac amont, augmentée des intérêts au taux légal ;

5°) de condamner solidairement les sociétés OGI, Qualiconsult et Urbaine de Travaux à lui verser la somme de 161 040 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait des désordres affectant les garde-corps de la partie en béton de la digue, augmentée des intérêts au taux légal ;

6°) de condamner solidairement les sociétés OGI, Qualiconsult, Urbaine de Travaux et Segex à lui verser la somme de 88 331,76 euros TTC en réparation du préjudice subi en raison des désordres affectant le cheminement piétonnier longeant la rive du lac aval, augmentée des intérêts au taux légal ;

7°) de condamner solidairement les sociétés OGI et Urbaine de Travaux à lui verser la somme de 38 477,5 euros TTC en réparation du préjudice financier résultant de l'obligation de contrôle de stabilité de l'ouvrage, augmentée des intérêts au taux légal ;

8°) de condamner solidairement les sociétés OGI, Qualiconsult, Urbaine de Travaux et Segex à lui verser la somme de 61 020 euros TTC en réparation du préjudice subi en raison des frais de vidange nécessaires pour la réalisation des travaux de reprise de l'ouvrage, augmentée des intérêts au taux légal ;

9°) à titre subsidiaire, si la responsabilité solidaire n'est pas retenue, de condamner les sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult, Urbaine de Travaux, Segex et Multiclo à lui verser respectivement les sommes de 68 462,46 euros TTC, de 379 958,63 euros TTC, de 86 173,59 euros TTC, de 184 184,68 euros TTC, de 59 089,89 euros TTC et de 220 288,20 euros TTC, ces sommes devant être augmentées des intérêts au taux légal ;

10°) à titre infiniment subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité contractuelle de la maîtrise d'œuvre pour défaut de conseil, de condamner les sociétés Paso Doble et OGI, membres du groupement solidaire de maîtrise d'œuvre, à lui verser la somme totale de 998 157,46 euros TTC en réparation de l'ensemble des préjudices résultant des désordres constatés sur l'ouvrage, augmentée des intérêts au taux légal ;

11°) en tout état de cause, à titre principal sur le fondement de la responsabilité décennale, de condamner les sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult, Urbaine de Travaux, Segex et Multiclo à lui verser solidairement la somme de 705 953,61 euros TTC au titre des travaux non pris en compte par l'expert, la somme de 150 924,68 euros TTC au titre des frais d'expertise ainsi que la somme de 30 000 euros au titre du préjudice d'image et de jouissance ou, à défaut, à due proportion de leurs responsabilités respectives, ces sommes devant être augmentées des intérêts au taux légal ;

12°) à titre subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, de condamner les sociétés Paso Doble et OGI, membres du groupement solidaire de maîtrise d'œuvre, à lui verser la somme de 705 953,61 euros TTC au titre des travaux supplémentaires, non pris en compte par l'expert, ou, à défaut, à due proportion de leurs responsabilités respectives, augmentée des intérêts au taux légal ;

13°) de condamner solidairement les sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult, Urbaine de Travaux, Segex et Multiclo à lui verser la somme de 150 924,68 euros TTC au titre des frais d'expertise ou, à défaut, à due proportion de leurs responsabilités respectives, augmentée des intérêts au taux légal ;

14°) de condamner solidairement les sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult, Urbaine de Travaux, Segex et Multiclo à lui verser la somme de 30 000 euros TTC au titre du préjudice d'image et de jouissance ou, à défaut, à due proportion de leurs responsabilités respectives, augmentée des intérêts au taux légal ;

15°) dans tous les cas, d'ordonner la capitalisation des intérêts moratoires ;

16°) de mettre à la charge des sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult, Urbaine de Travaux, Segex et Multiclo le versement de la somme totale de 20 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1710134 du 6 février 2020, le tribunal administratif de Montreuil a :

1°) condamné solidairement les sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie (OGI), Multiclo et le bureau de contrôle Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 440 576 euros TTC au titre des désordres affectant le ponton de la digue, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

2°) condamné les sociétés Omnium Général Ingénierie, Multiclo, le bureau de contrôle Qualiconsult et la société Paso Doble à se garantir respectivement à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives fixées à 40 % pour la société Omnium Général Ingéniérie, 15 % pour la société Multiclo, 10 % pour le bureau de contrôle Qualiconsult et 5 % pour la société Paso Doble, de la condamnation prononcée à l'article 1er du présent jugement et décidé que les sociétés Urbaine de Travaux et Segex, qui ont été appelées en garantie par les sociétés Paso Doble, Multiclo, Omnium Général Ingéniérie et le bureau de contrôle Qualiconsult, les garantiront à hauteur de leurs parts de responsabilité fixées à 20 % pour la société Urbaine de travaux et 10 % pour la société Segex ;

3°) condamné solidairement les sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux et le bureau de contrôle Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 9 504 euros TTC au titre des désordres résultant de l'absence de joints de dilatation sur la digue en béton, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

4°) condamné les sociétés Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux et le bureau de contrôle Qualiconsult à se garantir respectivement à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives fixées à 40 % pour la société Omnium Général Ingéniérie, 20 % pour la société Urbaine de Travaux et 20% pour le bureau de contrôle Qualiconsult, de la condamnation prononcée à l'article 3 du jugement, et décidé que la société Segex, qui a été appelée en garantie par les sociétés Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux et le bureau de contrôle Qualiconsult, les garantira à hauteur de sa part de responsabilité fixée à 20 % et que la société Paso Doble sera garantie à hauteur de 100 % par les sociétés Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux, Segex et le bureau de contrôle Qualiconsult à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives ;

5°) condamné solidairement les sociétés Omnium Général Ingénierie et Urbaine de Travaux à verser à la commune de Montfermeil la somme de 112 200 euros TTC au titre des désordres résultant de l'absence de système de recueil des eaux pluviales sur la digue, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

6°) condamné les sociétés Omnium Général Ingénierie et Urbaine de Travaux à se garantir à hauteur respectivement de leurs parts de responsabilité respectives fixées à 60% pour la société Omnium Général Ingéniérie et 40 % pour la société Urbaine de Travaux de la condamnation prononcée à l'article 5 du jugement ;

7°) condamné solidairement les sociétés Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux, Segex et le bureau de contrôle Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 87 007,80 euros TTC au titre des désordres affectant l'absence d'étanchéité en tête de digue du lac amont, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

8°) condamné les sociétés Omnium Général Ingénierie, Segex, Urbaine de Travaux et le bureau de contrôle Qualiconsult à se garantir respectivement à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives fixées à 40% pour la société Omnium Général Ingéniérie, 30 % pour la société Segex, 20 % pour la société Urbaine de Travaux et 10% pour le bureau de contrôle Qualiconsult de la condamnation prononcée à l'article 7 du jugement ;

9°) condamné solidairement les sociétés Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux et le bureau de contrôle Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 161 040 euros TTC au titre des désordres résultant de l'absence de fondation hors gel des gardes corps de la digue en béton, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

10°) condamné les sociétés Urbaine de Travaux, Omnium Général Ingénierie et le bureau de contrôle Qualiconsult à se garantir respectivement à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives fixées à 65 % pour la société Urbaine de Travaux, 25% pour la société Omnium Général Ingéniérie et 10 % pour le bureau de contrôle Qualiconsult, de la condamnation prononcée à l'article 9 du jugement ;

11°) condamné solidairement les sociétés Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux, Segex et Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 88 331 euros TTC au titre des désordres affectant le cheminement piétonnier du lac aval, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

12°) condamné les sociétés Omnium Général Ingénierie, Segex, Urbaine de Travaux et le bureau de contrôle Qualiconsult à se garantir respectivement à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives fixées à 40% pour la société Omnium Général Ingéniérie, 30 % pour la société Segex, 20 % pour la société Urbaine de Travaux et 10% pour le bureau de contrôle Qualiconsult de la condamnation prononcée à l'article 11 du jugement ;

13°) condamné solidairement les sociétés Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Travaux, Segex et Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 61 020 euros TTC au titre des frais de vidange du lac amont, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

14°) condamné la société Omnium Général Ingénierie à garantir à hauteur de sa part de responsabilité fixée à 100 % le bureau de contrôle Qualiconsult et les sociétés Urbaine de Travaux et Segex de la condamnation prononcée à l'article 13 du jugement ;

15°) condamné solidairement les sociétés Omnium Général Ingénierie et Urbaine de Travaux à verser à la commune de Montfermeil la somme de 38 477,5 euros TTC au titre de l'obligation de contrôle de stabilité de l'ouvrage public, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

16°) condamné les sociétés Omnium Général Ingénierie et Urbaine de Travaux à se garantir mutuellement à hauteur de leur part de responsabilité respective fixée à 50 % de la condamnation prononcée à l'article 15 du jugement ;

17°) condamné solidairement les sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie, Multiclo, Segex, Urbaine de Travaux et le bureau de contrôle Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 8 000 euros au titre des préjudices d'image et de jouissance, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2018 et les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

18°) condamné les sociétés Paso Doble, OGI, Multiclo, Segex et le bureau de contrôle Qualiconsult à se garantir mutuellement à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives de la condamnation prononcée à l'article 17 du jugement et décidé que la société Urbaine de Travaux garantira les sociétés Paso Doble, OGI, Multiclo, Qualiconsult et Segex à hauteur de sa part de responsabilité et que la société Urbaine de Travaux sera garantie par les sociétés Paso Doble, OGI, Segex et le bureau de contrôle Qualiconsult à hauteur de leurs parts de responsabilité ;

19°) condamné les sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie, Urbaine de travaux, Segex, Multiclo et le bureau de contrôle Qualiconsult à verser à la commune de Montfermeil la somme de 139 644,68 euros TTC au titre des frais d'expertise dans les conditions prévues aux points 47 à 50 du jugement, les intérêts échus à la date du 23 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

20°) condamné les sociétés Paso Doble, OGI, Multiclo, Segex et le bureau de contrôle Qualiconsult à se garantir mutuellement à hauteur de leurs parts de responsabilité respectives de la condamnation prononcée à l'article 18 du jugement et décidé que la société Urbaine de Travaux garantira les sociétés Paso Doble, OGI, Multiclo, Qualiconsult et Segex à hauteur de sa part de responsabilité et que la société Urbaine de Travaux sera garantie par les sociétés Paso Doble, OGI, Segex et le bureau de contrôle Qualiconsult à hauteur de leurs parts de responsabilité ;

21°) rejeté les conclusions d'appel en garantie de la société Segex contre la société Alpes Géos comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

22°) mis à la charge des sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie, Urbaine de Tavaux, Segex, Multiclo et le bureau de contrôle Qualiconsult la somme de 1 000 euros à verser, chacune, à la commune de Montfermeil au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

23°) rejeté le surplus des conclusions de la demande ;

24°) rejeté le surplus des conclusions présentées par les sociétés Paso Doble, Omnium Général Ingénierie, Urbaine de travaux, Segex, Multiclo et le bureau de contrôle Qualiconsult au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 6 avril 2020, le 18 mars 2021 et le 20 décembre 2021, la société Omnium Général Ingénierie, représentée par Me Briand, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) rejeter la demande de la commune de Montfermeil présentée devant le tribunal administratif de Montreuil en tant qu'elle recherche sa responsabilité ;

3°) à titre subsidiaire :

- d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 25% de la responsabilité des dommages liés à l'absence de joints de dilatation et de limiter sa responsabilité à 10% sur ce fondement ;

- d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 25% de la responsabilité des dommages au titre de l'absence de formation hors-gel des garde-corps et de limiter sa responsabilité à 10% sur ce fondement ;

- d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 60% de la responsabilité des dommages au titre de l'absence de dispositif de recueil des eaux pluviales et de limiter sa responsabilité à 10% sur ce fondement ;

- d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 50% de la responsabilité au titre des frais de surveillance de l'ouvrage et 100% au titre des frais de vidange, de limiter sa responsabilité à 10% sur ces fondements et de limiter la durée des mesures de surveillance à deux ans ;

- d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 20% de la responsabilité des dommages au titre de la mise en œuvre d'un bois de qualité insuffisante et de limiter sa responsabilité à 10% sur ce fondement ;

- d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 40% de la responsabilité des dommages au titre du défaut d'ancrage de la membrane d'étanchéité du lac amont et de limiter sa responsabilité à 10% sur ce fondement ;

- d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 40% de la responsabilité des dommages au titre de l'affaissement du chemin piétonnier du lac aval et de limiter sa responsabilité à 10% sur ce fondement ;

- d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamnée à assumer 40% des frais d'expertise judiciaire et de limiter sa responsabilité à 10% sur ce fondement ainsi qu'au titre des frais irrépétibles ;

- de condamner solidairement les sociétés Urbaine de travaux, Segex, Multiclo, Paso Doble et Qualiconsult à la garantir du surplus des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge solidaire des sociétés Urbaine de Travaux, Segex, Multiclo, Paso Doble et Qualiconsult la somme de 20 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché de plusieurs erreurs de qualification juridique des faits, erreurs de droit et erreurs d'appréciation ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il n'a pas répondu à ses observations selon lesquelles l'absence d'ouvrage ne saurait constituer un désordre décennal et que cette absence d'ouvrage ne lui est pas imputable eu égard à l'article 6.5.10.2 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il n'a pas tenu compte de ses observations sur la responsabilité des désordres constatés sur le cheminement piéton du lac aval ;

- les désordres allégués sur la partie en béton de la digue ne portent pas atteinte à la solidité de l'ouvrage, ni ne le rendent impropre à sa destination, et ne sauraient donc relever de la garantie décennale des constructeurs ; l'ouvrage a dépassé le délai d'épreuve décennal et ne présente aucun désordre affectant son usage ou sa sécurité ; le seul fait que l'expert préconise la pose de joints de dilatation ne suffit pas à caractériser un désordre décennal dès lors que les fissurations et écrasements aux jonctions des garde-corps qu'il souligne n'ont aucune conséquence sur la solidité ou la destination de l'ouvrage ; le soulèvement de la dalle piétonnière n'a présenté aucune évolution depuis dix ans et n'est pas susceptible de conduire à la fermeture de la digue ; il n'existe aucun risque de basculement des garde-corps, ni de phénomène de dévers des garde-corps; un dispositif de recueil et d'évacuation des eaux pluviales a été prévu ; tout au plus, ce dispositif était insuffisant mais cela n'est pas démontré ;

- le coût des mesures de surveillance et de contrôle de la stabilité de la digue doit rester à la charge de la commune de Montfermeil dès lors que cet ouvrage est parfaitement stable et ne présente aucun risque ;

- l'absence de mécanisme de vidange du lac amont n'est pas de nature à causer un désordre décennal de telle sorte que les frais de vidange ne sauraient être mis à sa charge ;

- les désordres constatés sur le platelage en bois de la digue de l'étang aval ne constituent qu'une impropriété partielle à sa destination et n'emportent aucune conséquence structurelle sur la digue ; ces désordres trouvent leur origine exclusive dans le choix d'un bois de qualité inférieure aux exigences du CCTP, ainsi que dans des défauts ponctuels de mise en œuvre du platelage, entièrement imputables à la société Multiclo ; si l'implication de la maîtrise d'œuvre devait être constatée, seule la société Paso Doble pourrait être regardée comme responsable ;

- les désordres affectant le cheminement piéton du lac aval résultent exclusivement d'une erreur de la société Urbaine de Travaux et de son sous-traitant, la société Alpesgeos ; le tribunal administratif a donc entaché le jugement attaqué d'une erreur manifeste d'appréciation en retenant sa responsabilité sur ce point ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé sur le préjudice d'image et de jouissance de la commune de Montfermeil ;

- ce préjudice n'est pas avéré ;

- à titre subsidiaire, l'évaluation de sa responsabilité est excessive et devra être réduite ;

- l'ouvrage tel qu'il a été réalisé ne résulte pas de la conception initialement exposée, mais de modifications proposées par la société Urbaine de Travaux pour tenir compte des études de sol ;

- l'absence de joints de dilatation procède d'un défaut d'exécution imputable à l'entreprise chargée de leur réalisation ; si sa responsabilité devait être engagée pour défaut de surveillance, elle ne pourrait l'être qu'à hauteur de 10% ; les sociétés Urbaine de Travaux et Segex devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- les désordres constatés sur les garde-corps résultent d'une variante de conception proposée par la société Urbaine de Travaux ; c'est la société Urbaine de Travaux qui était en charge de la réalisation des garde-corps " en L " ; la société Qualiconsult aurait dû alerter le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre d'éventuelles insuffisances de fondation de ces garde-corps ; si sa responsabilité devait être engagée pour défaut de surveillance, elle ne pourrait l'être qu'à hauteur de 10% ; les sociétés Urbaine de Travaux, Segex et Qualiconsult devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- les désordres constatés sur le dispositif d'évacuation des eaux pluviales, les frais de surveillance de la digue et les frais de vidange résultent d'une variante de conception proposée par la société Urbaine de Travaux et sont exclusivement imputables à cette dernière ; les sociétés Urbaine de Travaux et Segex devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- s'agissant du défaut d'ancrage de la membrane du lac amont, des frais de surveillance et de vidange, sa part de responsabilité est surévaluée dès lors qu'elle ne peut résulter que d'un défaut de surveillance ; les désordres résultent d'un changement de conception dont elle n'est pas à l'origine ; elle n'a eu de cesse de solliciter la reprise de l'ancrage ; le défaut d'ancrage n'était plus visible à la date de la réception ; ce défaut d'ancrage est exclusivement imputable à l'entreprise chargée de sa réalisation ; les sociétés Urbaine de Travaux, Segex et Qualiconsult devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- les désordres constatés sur le platelage sont exclusivement imputables à la société Multiclo ; sa responsabilité sera ramenée à 10% ; les sociétés Multiclo, Qualiconsult et Paso Doble devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- sa responsabilité dans les désordres concernant le dispositif d'évacuation des eaux pluviales devra être ramenée à 10% ; les sociétés Urbaine de Travaux et Segex devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- sa responsabilité dans les désordres concernant le défaut d'ancrage de la membrane d'étanchéité devra être ramenée à 10% ; les sociétés Urbaine de Travaux, Segex et Qualiconsult devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- sa responsabilité dans les désordres concernant le cheminement piéton du lac aval devra être ramenée à 10% ; les sociétés Urbaine de Travaux et Segex devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- sa part des dépens devra être ramenée à 10% ; les sociétés Urbaine de Travaux, Segex, Multiclo, Paso Doble et Qualiconsult devront la garantir et relever indemne de toute condamnation ;

- elle n'était pas en mesure d'apprécier la non-conformité du platelage au jour de la réception ; elle n'a commis aucune faute lors des opérations de réception ; la commune était parfaitement informée de la modification proposée par la société Multiclo ;

- la société Paso Doble est impliquée au-delà de la simple conception architecturale du site ; en sa qualité de paysagiste, elle a eu en charge la validation de l'essence retenue pour le platelage en bois.

Par des mémoires, enregistrés le 12 octobre 2020, le 20 janvier 2021, le 1er avril 2021, le 27 juillet 2021 et le 6 janvier 2022, la société Multiclo, représentée par Me Le Febvre demande à la cour de :

1°) rejeter la requête ;

2°) réformer le jugement attaqué et annuler les condamnations prononcées à son encontre ;

3°) à titre subsidiaire :

- rejeter les demandes de condamnation formées à son encontre ;

- rejeter les appels en garantie formés à son encontre ;

- condamner les sociétés OGI, Paso Doble, Qualiconsult, Segex et Urbaine de Travaux à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

4°) mettre à la charge de la commune de Montfermeil ou de toute partie perdante la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- les désordres constatés ne revêtent pas un caractère décennal ; le platelage litigieux constitue un élément d'équipement dissociable de l'ouvrage et ne relève ainsi pas de la garantie décennale mais de la garantie biennale de l'article 1792-3 du code civil, de telle sorte que l'action de la commune de Montfermeil est prescrite ;

- à titre subsidiaire, la société OGI n'est pas fondée à demander sa condamnation en l'absence de toute faute dans le choix de l'essence de bois qui a été validé par la maîtrise d'œuvre ; en tout état de cause, les désordres ne résultent pas du choix du bois mais de son exposition imprévue à une humidité quasi-permanente et excessive liée à un défaut de conception de l'évacuation des eaux pluviales, qui ne relevait pas de sa responsabilité ; seul le coût de la fourniture en remplacement des bois doit figurer dans le poste C-1 fixé par l'expert ;

- elle n'avait pas la responsabilité des joints de dilatation ;

- elle doit être garantie par les sociétés OGI, Paso Doble, Qualiconsult, Segex et Urbaine de Travaux de toute condamnation prononcée à son encontre.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 21 octobre 2020, le 18 décembre 2020, le 24 février 2021 et le 11 juin 2021, la commune de Montfermeil, représentée par Me Salamand, avocat, demande à la cour de :

1°) rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire :

- condamner la société Paso Doble et le BET OGI à l'indemniser à hauteur de 440 576,40 euros TTC au titre des désordres relatifs au ponton ;

- condamner la société Paso Doble et le BET OGI à l'indemniser à hauteur de 9 504 euros TTC au titre des désordres relatifs à l'absence de joints de dilatation ;

- condamner la société Paso Doble et le BET OGI à l'indemniser à hauteur de 112 200 euros TTC au titre des désordres relatifs à l'absence de récupération des eaux pluviales en tête de digue ;

- condamner la société Paso Doble et le BET OGI à l'indemniser à hauteur de 87 007,78 euros TTC au titre des désordres affectant la membrane d'étanchéité du lac amont ;

- condamner la société Paso Doble et le BET OGI à l'indemniser à hauteur de 161 040 euros TTC au titre des désordres affectant les garde-corps ;

- condamner la société Paso Doble et le BET OGI à l'indemniser à hauteur de 88 331,76 euros TTC au titre des désordres affectant le cheminement du lac aval ;

3°) mettre à la charge de chaque partie perdante la somme de 5 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

- le délai d'engagement de la responsabilité décennale n'est pas expiré dès lors qu'il a été interrompu par l'introduction d'un recours contentieux ;

- la partie en béton de la digue est régulièrement fermée au public pour des questions de sécurité, sans qu'un relevé précis de ces dates de fermeture ne soit tenu ;

- les désordres affectant le ponton rendent, à eux-seuls, l'ensemble de l'ouvrage impropre à sa destination ; le ponton n'est pas dissociable du reste de la digue ; en tout état de cause, dès lors que les désordres rendent l'ouvrage impropre à sa destination, il importe peu que l'équipement soit dissociable ; les désordres ont rendu l'ouvrage impropre à sa destination dès lors que le ponton est inutilisable ;

- la circonstance que la société Multiclo ne justifie pas d'une assurance décennale ne saurait suffire à écarter sa responsabilité ;

- les désordres revêtent un caractère décennal en ce qu'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination ; ils doivent être pris dans leur globalité et non isolément dès lors qu'ils forment un tout interdépendant ;

- aucun joint de dilatation n'a été prévu sur les longrines de l'ouvrage, ni sur le dallage ; or, l'absence d'un équipement, tels que des joints de dilatation, peut être de nature à engager la responsabilité décennale du constructeur ;

- le désordre affectant les garde-corps est lié à une fondation insuffisante et non hors-gel qui provoque leur basculement vers l'extérieur, ce qui a des conséquences esthétiques mais aussi en termes de sécurité pour les usagers de la digue ;

- l'absence de dispositif de récupération des eaux pluviales entraîne des conséquences tant pour le ponton en bois, exposé à l'humidité stagnante, que pour le dallage, dont les eaux de pluie ne sont ni recueillies, ni évacuées, les remblais supérieurs ainsi que les garde-corps ;

- le défaut d'étanchéité est un désordre de nature décennale ;

- le ponton a dû être fermé à la circulation du public en raison de son caractère glissant ; ces désordres nécessitent la réfection totale de l'ouvrage et trouvent leur source dans le choix du bois, la rétention d'eau sur certains assemblages, la section insuffisante de tasseaux d'assemblage et l'absence de plans d'exécution ;

- c'est à bon droit que le tribunal a admis l'indemnisation de l'exposante à raison des mesures de surveillance de la digue ; tant l'expert, que le sapiteur, concluent à la nécessité de mettre en place des mesures de surveillance et de maintenance de la digue, pour un montant de 12 858,80 euros HT par an ;

- c'est à bon droit que le tribunal a admis l'indemnisation du coût de la vidange ; l'absence de système de vidange entraîne des coûts estimés à 50 850 euros HT ;

- les désordres constatés lui causent un préjudice de jouissance et d'image ;

- c'est à bon droit que les premiers juges ont mis les dépens à la charge des constructeurs ;

- à titre subsidiaire, si la cour ne reconnaissait pas le caractère décennal des désordres, la réception de l'ouvrage ne met pas fin à la responsabilité contractuelle du maître d'œuvre à raison des fautes commises lors des opérations de réception ; le maître d'œuvre engage sa responsabilité pour manquement à son devoir de conseil dès lors qu'il aurait pu avoir connaissance du vice s'il avait accompli sa mission selon les règles de l'art ; la responsabilité du groupement de maîtrise d'œuvre est engagée au titre de sa mission d'assistance aux opérations de réception (AOR) pour défaut de conseil s'agissant des désordres affectant le ponton, liés à l'absence de joints de dilatation, affectant la récupération des eaux pluviales en tête de digue, affectant la membrane d'étanchéité du lac amont, affectant les garde-corps et affectant le cheminement du lac aval ;

- la responsabilité de la société Multiclo est engagée en raison du choix du bois et de la réalisation de travaux sans plans ; les désordres constatés trouvent leur origine dans ces fautes ;

- les désordres affectant le ponton résultent en partie des désordres affectant la membrane d'étanchéité et relèvent, par suite, de la responsabilité de la société Segex ;

- le groupement de maîtrise d'œuvre était un groupement solidaire et aucune répartition claire et précise des tâches n'a été indiquée dans les pièces du marché ; les membres du groupement de maîtrise d'œuvre n'ont pas signé de convention de groupement alors même qu'il s'agissait d'un groupement solidaire ; ainsi, tous les membres du groupement répondent de la responsabilité des autres co-traitants sans pouvoir se prévaloir de la répartition des tâches entre eux ;

- la responsabilité de la société Qualiconsult peut être engagée dès lors que sa mission avait notamment trait à la sécurité des personnes ; cette société entre dans le champ des articles 1792 et suivants du code civil conformément à l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation ; le contrôleur technique est soumis à une obligation de résultat vis-à-vis du maître d'ouvrage.

Par des mémoires, enregistrés le 4 novembre 2020 et le 28 février 2022, la société Segex, représentée par Me Gibeault, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a engagé la responsabilité décennale des constructeurs et retenu sa responsabilité au titre des désordres affectant la membrane d'étanchéité, le cheminement piétonnier, l'absence de joint de dilatation sur la digue et le ponton ;

2°) de rejeter la demande formée par la commune de Montfermeil devant le tribunal administratif de Montreuil ;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter les appels en garantie formés par les sociétés OGI, Qualiconsult, Multiclo, Urbaine de Travaux, Paso Doble et, le cas échéant, de condamner les sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult et Urbaine de travaux à la relever et garantir indemne de toute condamnation prononcée à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 2 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les désordres affectant la digue en béton et le cheminement du lac aval ne peuvent recevoir la qualification de désordres décennaux ; les défauts affectant la membrane d'étanchéité et le cheminement du lac aval ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination, ni ne portent atteinte à la solidité de l'ouvrage ; les désordres affectant le cheminement du lac aval ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination, ni n'affectent sa solidité ;

- il n'existe aucun lien de causalité entre les désordres affectant le ponton en bois et ceux affectant la membrane d'étanchéité ;

- la commune ne démontre pas avoir subi un préjudice d'image ;

- aucune faute ne peut être retenue à son encontre ;

- à titre subsidiaire, si des condamnations devaient être prononcées à son encontre, elle appelle en garantie les sociétés Paso Doble, OGI, Urbaine de Travaux et Qualiconsult ;

- les appels en garantie formés à son encontre doivent être rejetés.

Par un mémoire, enregistré le 6 novembre 2020, la société Paso Doble, représentée par Me Del Rio, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a admis sa responsabilité au titre du platelage de bois et du joint de dilatation, ainsi que des postes accessoires, en tant qu'il a laissé à sa charge 5% de la condamnation relative au platelage de bois et en tant qu'il l'a condamnée au titre du préjudice d'image et de jouissance de la commune de Montfermeil ;

2°) de rejeter les conclusions tendant à sa mise en cause ;

3°) de condamner les sociétés BET OGI, Multiclo, Segex et Qualiconsult à la relever et garantir indemne de toute condamnation ;

4°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 4 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- l'existence d'un désordre décennal ne saurait être retenue dès lors que seule la partie du platelage en bois a été fermée au public et que la promenade et l'accès à la digue sont toujours restés ouverts à la circulation des piétons ; l'impropriété n'est donc pas établie ; malgré les désordres affectant le bois, la digue est toujours praticable ;

- elle ne saurait voir sa responsabilité engagée dès lors que la maîtrise d'œuvre n'est pas responsable des désordres constatés ; les désordres affectant le platelage en bois du ponton relèvent de la responsabilité exclusive de la société Multiclo ;

- la maîtrise d'œuvre ne saurait être mise en cause pour manquement à son devoir de conseil lors de la réception dès lors qu'elle n'avait pas connaissance de ces désordres à cette date ;

- le quantum de la demande doit être ramené à 207 330 euros dès lors que c'est à tort que l'expert judiciaire a écarté la vérification effectuée par le cabinet I3E s'agissant des travaux de reprise ;

- elle ne saurait être tenue pour responsable de l'absence de joints de dilatation sur la longrine de rive ; à supposer que sa responsabilité puisse être engagée au titre du groupement solidaire de maîtrise d'œuvre, elle ne devrait garder aucune quote-part de responsabilité ;

- sa responsabilité ne saurait être engagée sur le fondement contractuel soulevé à titre subsidiaire par la commune de Montfermeil dès lors qu'aucun manquement ne peut être invoqué au titre de sa mission de paysagiste ; seule la société OGI était en charge des opérations préalables à la réception ;

- à titre subsidiaire, seule la société OGI était responsable de la validation de l'essence retenue pour le platelage bois et l'exposante ne saurait se voir imputer une quote-part de responsabilité de 5% ;

- seule la société OGI était responsable de la définition des joints de dilatation ;

- elle n'est jamais intervenue dans la définition des fondations hors-gel, des dispositifs de recueil des eaux pluviales, des membranes d'étanchéité en tête de digue du lac amont, du cheminement piéton et ne saurait donc voir sa responsabilité engagée au titre des désordres constatés sur ces ouvrages ainsi qu'au titre des mesures de vidange et des mesures de contrôle de l'ouvrage ;

- elle est fondée à appeler en garantie, s'agissant des désordres affectant le platelage bois du ponton, la société OGI sur le fondement contractuel, la société Multiclo et la société Qualiconsult sur les fondements délictuel et quasi-délictuel ;

- elle est fondée à appeler en garantie, s'agissant de la création de joints de dilatation sur la longrine de rive et les autres désordres, la société OGI sur le fondement contractuel, les sociétés Segex, Urbaine de Travaux, Multiclo et Qualiconsult sur les fondements délictuel et quasi-délictuel ;

- elle est fondée à appeler en garantie, s'agissant du préjudice de jouissance, les frais irrépétibles et les dépens, la société OGI sur le fondement contractuel, les sociétés Segex, Urbaine de Travaux, Multiclo et Qualiconsult sur les fondements délictuel et quasi-délictuel.

Par des mémoires, enregistrés le 9 novembre 2020, le 20 novembre 2020, le 14 janvier 2021, le 19 avril 2021 et le 7 mars 2022, la société Qualiconsult, représentée par Me Mauduy-Dolfi, avocat, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement attaqué en ce qu'il retient sa responsabilité ;

2°) à titre subsidiaire :

- de rejeter la requête ;

- de rejeter les appels en garantie formés à son encontre ;

- de limiter sa part de responsabilité à celle retenue par l'expert ;

- de condamner solidairement les sociétés OGI, Paso Doble, Urbaine de Travaux, Segex et Multiclo à la relever et garantir indemne de toute condamnation prononcée à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la société OGI ou toute partie perdante la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son appel incident est recevable ;

- c'est à tort que le tribunal l'a condamnée à supporter la charge des travaux de reprise en sa qualité de contrôleur technique dès lors, d'une part, que les conditions d'engagement de la responsabilité décennale du contrôleur technique ne sont pas réunies, d'autre part, que les désordres ne sont pas en lien avec ses missions et, enfin, que ces dernières ont été parfaitement accomplies ; seule la mission " L " est susceptible d'être concernée par les désordres litigieux, mais cette mission ne vise qu'au contrôle de la solidité des fondations et non pas au contrôle de l'absence d'impropriété ; les désordres constatés sont sans lien avec sa mission relative à la solidité des ouvrages ; le contrôleur technique n'est pas un constructeur ; elle a émis de nombreux avis et observations sur le lot gros œuvre dès la phase de conception ; il ne lui appartenait pas d'assurer le suivi du chantier ;

- aucune condamnation solidaire ne saurait être prononcée à son encontre ;

- aucun des équipements pour lesquels la commune de Montfermeil entend engager sa responsabilité décennale ne relève de la mission " SEI " ; ni le ponton en bois, ni la digue en béton, ni le cheminement piéton du lac aval ne constituent des établissements recevant du public ou des immeubles de grande hauteur ;

- la commune de Montfermeil ne peut se prévaloir de l'insécurité des ouvrages alors qu'elle n'a engagé aucun travaux de reprise ;

- à titre subsidiaire, les recours en garantie formés par les sociétés OGI, Segex, Multiclo, Paso Doble et Urbaine de Travaux à son encontre doivent être rejetés comme non fondés en l'absence de faute de l'exposante ;

- le rapport d'expert ne lui impute pas le désordre survenu sur le cheminement piétonnier ;

- aucune condamnation solidaire ne peut être prononcée à son encontre ;

- sa responsabilité ne peut dépasser la quote-part définie par l'expert.

Par un mémoire, enregistré le 9 novembre 2020, la société Urbaine de Travaux, représentée par Me Aberlen, avocat, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il reconnaît sa responsabilité et la condamne à indemniser la commune de Montfermeil ;

2°) à titre subsidiaire :

- de juger qu'elle ne pourra être condamnée à verser une somme excédant 105 732 euros au titre de la reprise des éléments nécessaires sur la digue, une somme excédant 96 538 euros au titre de la reprise des éléments nécessaires sur les membranes d'étanchéité des bassins amonts et aval et une somme excédant 53 748 euros au titre de la reprise des cheminements amonts et aval ;

- de rejeter toute demande d'indemnisation au titre de la surveillance périodique de la digue ;

- de juger que sa responsabilité ne saurait excéder les parts définies par l'expert ;

- de condamner les sociétés Paso Doble, OGI, Qualiconsult et Segex à la relever et garantir indemne de toute condamnation allant au-delà des parts fixées par l'expert ;

- d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a mis à sa charge 20% du coût de la réparation du ponton ;

- de rejeter tous les appels en garantie dirigés à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les désordres constatés sur la digue, tant ses garde-corps que le cheminement, ne revêtent pas un caractère décennal dès lors qu'ils ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination ; la commune de Montfermeil ne démontre pas l'existence de dommages de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ;

- le montant des condamnations doit être ramené à 256 018 euros ;

- sa condamnation devra être limitée à la quote-part fixée par l'expert à savoir 20% au titre des membranes, 15% au titre de l'évacuation des eaux sous le dallage et le caniveau, 65% au titre des fondations sur garde-corps, un tiers au titre de la reprise des joints de dilatation et 50% du contrôle de stabilité des ouvrages ;

- c'est à tort que les juges de première instance ont mis à sa charge une garantie au profit d'OGI, à hauteur de 20%, s'agissant des désordres affectant le ponton en bois.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Houllier,

- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,

- et les observations de Me Barbier, substituant Me Briand, pour la société Omnium Général Ingénierie, de Me Congard, substituant Me Salamand, pour la commune de Montfermeil, de Me Del Rio, pour la société Paso Doble, et de Me de Riberolles, substituant Me Le Febvre, pour la société Multiclo.

Considérant ce qui suit :

1. La société Omnium Général Ingénierie (OGI), membre du groupement solidaire de maîtrise d'œuvre du projet d'aménagement d'un parc de dix hectares dont la commune de Montfermeil est maître d'ouvrage, relève appel du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 6 février 2020 la condamnant, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs, à indemniser la commune de Montfermeil des désordres constatés sur la digue et le cheminement piétonnier du lac aval de l'arboretum de ce parc.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort du jugement attaqué, qui caractérise avec précision le caractère décennal des désordres constatés, l'imputabilité de ces désordres aux différents constructeurs et les responsabilités de chacune des entreprises au regard de chacun des désordres, que les juges de première instance, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments des parties, ont suffisamment motivé leur jugement sur ces points. De même, le tribunal administratif a suffisamment motivé son jugement quant à l'appréciation du préjudice d'image allégué par la commune de Montfermeil, notamment aux points 30 et 45 de sa décision. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement de ce chef doit être écarté.

3. En second lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. La société requérante ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de droit, d'appréciation et de qualification juridique des faits commises par les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.

En ce qui concerne la condamnation de la société requérante à indemniser le maître d'ouvrage sur le fondement de la garantie décennale :

4. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. La responsabilité décennale du constructeur peut être recherchée pour des dommages survenus sur des éléments d'équipement dissociables de l'ouvrage s'ils rendent celui-ci impropre à sa destination. La circonstance que les désordres affectant un élément d'équipement fassent obstacle au fonctionnement normal de cet élément n'est pas de nature à engager la responsabilité décennale du constructeur si ces désordres ne rendent pas l'ouvrage lui-même impropre à sa destination.

S'agissant du caractère décennal des désordres :

Quant aux désordres affectant le ponton en bois :

5. La digue créée au milieu du lac de l'arboretum, d'une largeur de six mètres, est composée d'une partie en béton et d'une partie en bois, chacune d'une largeur de trois mètres. Il résulte de l'instruction, notamment des conclusions de l'expert désigné par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montreuil en date du 24 janvier 2013 et du sapiteur désigné pour examiner le ponton en bois, que ce dernier subit des soulèvements de lattes, des fissures, de la pourriture, des écarts entre les planches, une désolidarisation du support et un affaissement vers le lac nécessitant sa réfection totale. Eu égard à leur nature et à leur gravité, ces désordres, qui ont d'ailleurs conduit à sa fermeture à la circulation du public, rendent cet ouvrage impropre à sa destination. A cet égard, la circonstance que cette fermeture ne concerne qu'une partie de la digue et n'interdit pas la circulation sur la partie en béton ne fait pas, dans les circonstances de l'espèce, obstacle à la qualification de désordre décennal compte tenu de l'ampleur des dégâts constatés, qui affectent la moitié de l'ouvrage et limitent la circulation à une portion réduite de ce dernier. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ces désordres ne sont pas de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs.

Quant aux désordres affectant la partie en béton de la digue :

6. Il résulte de l'instruction que la partie en béton de la digue est affectée de décollements des jointures, d'un basculement des garde-corps de 8,5%, du soulèvement d'une dalle en béton ainsi que de fissurations, d'un tassement de la crête de digue et de déformations. Si le sapiteur a conclu à l'absence de risque pour la stabilité générale de la digue et à l'absence de risque de glissement généralisé, il reconnaît toutefois la possibilité que des mouvements se produisent encore et préconise, pour cette raison, la surveillance de la digue pour une période de cinq ans. Dans ces conditions, eu égard à leur ampleur et à leur nature, les désordres constatés sont de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage et à la rendre impropre à sa destination, alors même qu'à ce jour, il n'est pas établi que la digue aurait été fermée au public pour des raisons liées à ces désordres. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ces désordres ne sont pas de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs.

Quant aux désordres affectant le cheminement piétonnier le long de la rive du lac aval :

7. Il résulte du rapport d'expertise que ce cheminement subit un affaissement de quinze centimètres sur quinze mètres de long et de vingt-cinq centimètres sur trente-six mètres de long provoquant des fissures et des différences de niveaux. Compte tenu de leur ampleur et de leur nature, ces désordres, que l'expert qualifie " d'importants ", affectent la solidité de l'ouvrage et sont de nature à le rendre impropre à sa destination. Dans ces conditions, c'est à bon droit, contrairement à ce que soutient la requérante, que le tribunal administratif a jugé que la commune de Montfermeil était fondée à rechercher la responsabilité décennale des constructeurs pour ces désordres.

S'agissant de l'imputabilité des désordres :

Quant aux désordres affectant le ponton en bois :

8. Il résulte de l'expertise que les désordres constatés sur le ponton en bois trouvent leur origine dans le choix d'une essence de bois inadaptée à la présence d'humidité, la présence trop importante d'aubier, la rétention d'eau sur certains assemblages, la section insuffisante des tasseaux d'assemblages et l'absence de plans d'exécution.

9. D'une part, il résulte des stipulations du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot n° 4 " serrurerie, menuiserie, clôture " que l'entreprise titulaire de ce lot devait sélectionner un bois de classe IV sans aubier ou soumettre à l'approbation de la maîtrise d'œuvre toute modification. Si la société requérante soutient que le choix de l'essence de bois relève ainsi exclusivement de la responsabilité de la société Multiclo, titulaire du lot n°4, il résulte toutefois de l'instruction que cette dernière a, par un mail du 16 novembre 2004, soumis à l'approbation de la maîtrise d'œuvre différentes essences de bois, dont l'azobé de classe IV et le chêne de classe III, en indiquant que ce dernier devrait convenir compte tenu de l'absence de contact direct avec le sol. Il ressort du compte rendu de la réunion de chantier du 23 février 2005 que cette dernière proposition a été retenue par la société Paso Doble, paysagiste et mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre, " pour la réalisation du plancher de la digue ". Dans ces conditions, la société requérante, en sa qualité de membre du groupement solidaire de maîtrise d'œuvre, n'est pas fondée à soutenir que ce désordre ne lui serait pas imputable. Au surplus, il résulte de l'instruction qu'elle a été destinataire du mail du 16 novembre 2004 et qu'elle n'a pas émis d'observations de sorte qu'elle doit être regardée comme ayant implicitement validé le choix du chêne de classe III. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de ces désordres serait exclusivement imputable à d'autres constructeurs.

10. D'autre part, il résulte du rapport du sapiteur que les désordres constatés sur le ponton résultent de zones anormales de rétention d'eau et d'une humidité excessive, qui accentuent les difficultés liées au choix du bois et à la présence d'aubier, et qui résultent de l'absence de dispositif d'évacuation des eaux pluviales et de l'absence de relèvement de la membrane d'étanchéité. Si la société requérante soutient qu'un dispositif de collecte et d'évacuation des eaux pluviales a bien été prévu, elle n'établit pas, par les photographies qu'elle produit, l'existence de ce dispositif que l'expertise n'a jamais permis d'identifier. Or, il résulte des stipulations du CCTP qu'un tel dispositif aurait dû être réalisé et que son absence est donc imputable à un défaut de surveillance des travaux imputable à la société Omnium Général Ingénierie en sa qualité de maître d'œuvre. En outre, il résulte du rapport d'expertise que l'étanchéité en tête de digue n'est pas assurée en l'absence de relèvement et de fixation de la membrane d'étanchéité sur la longrine. Or, il résulte des pièces du marché que cette membrane, qui était prévue dans le descriptif des travaux, est restée repliée et visible sur le chantier pendant plusieurs mois sans que la société requérante n'intervienne pour en assurer la fixation et le relèvement. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ce désordre ne lui serait pas imputable.

11. Enfin, le rapport d'expertise relève que le défaut d'assemblage des lattes résulte de l'absence de plan d'exécution. Or, une telle absence aurait dû alerter la maîtrise d'œuvre et notamment la société requérante. Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne saurait être regardée comme responsable de ces désordres.

Quant aux désordres affectant la partie en béton de la digue :

12. Il résulte du rapport d'expertise que les désordres constatés sur la partie en béton de la digue résultent de l'absence de joints de dilatation sur les longrines, le dallage et les garde-corps, de l'absence de fondations hors-gel des murs en " L ", de l'absence de relèvement de la membrane d'étanchéité et de l'absence de dispositif d'évacuation des eaux pluviales.

13. D'une part, il résulte du rapport d'expertise que les joints de dilatation auraient dû être prévus sur les longrines pour éviter les tensions internes à l'origine des désordres constatés. Cette omission, qui résulte notamment d'une erreur de conception, est ainsi pour partie imputable à la société requérante qui n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle ne saurait être tenue pour responsable de ces désordres.

14. D'autre part, il résulte du rapport d'expertise que le mur en " L " faisant office de garde-corps sur la partie en béton de la digue est assis sur un " simple béton de propreté " sans mise hors gel des fondations. Ce défaut d'exécution, qui est de nature à porter atteinte à la stabilité du mur, relève au moins pour partie de la maîtrise d'œuvre et, notamment, de la société requérante en sa qualité de bureau technique chargé du suivi des travaux. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne saurait être tenue pour responsable de ces désordres.

15. Enfin, s'agissant de l'absence de dispositif d'évacuation des eaux pluviales et de l'absence d'étanchéité faute de relèvement de la membrane, il résulte de ce qui a été exposé au point 10 du présent arrêt que ces désordres sont, pour partie, imputables à la société requérante. Par suite, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne saurait être tenue pour responsable de ces désordres.

Quant aux désordres affectant le cheminement piétonnier :

16. Il résulte du rapport d'expertise que les désordres affectant le cheminement piétonnier le long de la rive du lac aval sont dus à l'absence de relèvement et de fixation de la membrane d'étanchéité du lac aval causant des infiltrations d'eau à l'origine de l'affaissement du cheminement piétonnier. Pour les mêmes motifs que ceux relevés au point 10 concernant la membrane d'étanchéité du lac amont, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que la société requérante était responsable, pour partie, des désordres constatés.

S'agissant des préjudices :

17. Le maître d'ouvrage a droit à la réparation intégrale des préjudices qu'il a subis lorsque la responsabilité décennale du constructeur est engagée, sans que l'indemnisation qui lui est allouée à ce titre puisse dépasser le montant des travaux strictement nécessaires pour rendre l'ouvrage conforme à sa destination en usant des procédés de remise en état les moins onéreux possible. Il a également droit à l'indemnisation des troubles d'image et de jouissance qui constituent un préjudice distinct.

18. En premier lieu, si la société Omnium Général d'Ingénierie soutient que l'absence d'un dispositif de vidange n'est pas de nature à causer un désordre décennal et qu'elle ne saurait donc supporter le coût des frais de vidange, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que la mise en œuvre des travaux de reprise sur la membrane d'étanchéité va nécessiter une vidange, au moins partielle, du lac. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que ce préjudice devait être indemnisé à hauteur de 61 020 euros, ce montant n'étant au demeurant pas contesté par la requérante.

19. En deuxième lieu, si la société requérante soutient que les mesures de surveillance et de contrôle de la stabilité de la digue doivent rester à la charge de la commune de Montfermeil en l'absence de risque pour sa stabilité, il résulte de ce qui précède, et notamment de ce qui a été exposé au point 6, que la digue a subi des tassements et que des mouvements restent encore possibles en raison de certaines erreurs de conception. Par suite, ce préjudice est indemnisable, sans que la somme de 38 744,50 euros fixée par le tribunal ne soit contestée par la requérante.

20. En dernier lieu, la société requérante soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a accepté d'indemniser le préjudice d'image et de jouissance de la commune de Montfermeil dès lors que la réalité de ce préjudice n'est pas établie. Toutefois, il résulte de ce qui précède qu'une partie de la digue a dû être fermée au public et que l'autre partie, ainsi que le cheminement piétonnier le long de la rive du lac aval, subissent des désordres importants, visibles par les usagers, de nature à porter atteinte à l'image de la commune et à la jouissance de ses biens. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que ce préjudice était établi et qu'il pouvait être indemnisé à hauteur de 8 000 euros.

En ce qui concerne la condamnation de la société requérante à garantir les autres constructeurs :

21. Un constructeur dont la responsabilité est recherchée par un maître d'ouvrage est fondé à demander à être garanti par un autre constructeur si et dans la mesure où les condamnations qu'il supporte correspondent à un dommage imputable à ce constructeur. Dans le cas d'un groupement, il appartient au juge administratif d'apprécier l'importance des fautes respectives de chaque membre de celui-ci pour déterminer le montant de cette garantie en se fondant, le cas échéant, sur la répartition des tâches prévue dans l'acte d'engagement.

S'agissant du ponton en bois :

22. Il résulte de l'instruction que les désordres affectant le ponton sont dus, ainsi qu'il a été dit au point 10, à l'absence de dispositif de recueil des eaux pluviales en surface, à l'absence d'étanchéité de la digue en amont ainsi qu'au choix du bois et au travail de l'entreprise Multiclo. La société OGI soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a fixé à 60% sa part de responsabilité dans l'absence de dispositif de recueil des eaux pluviales, à 40 % sa part de responsabilité dans l'absence d'étanchéité du lac amont et à 20% sa part de responsabilité dans le choix du bois et le travail d'assemblage.

23. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé au point 9 du présent arrêt que, si la société Multiclo doit être regardée comme principalement responsable des désordres qui résultent du choix du bois et de son assemblage, la société requérante, en sa qualité de membre du groupement de maîtrise d'œuvre, porte également une part de responsabilité que le tribunal a justement évaluée à 20% sur ce point dès lors que la société Paso Doble, autre membre solidaire du groupement de maîtrise d'œuvre, est également responsable pour la même quote-part. Si la société requérante soutient avoir été abusée par le courrier adressé le 16 novembre 2004 par la société Multiclo, ce courrier décrivait, sans ambigüité possible, les différents types de bois ainsi que leur classe. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal a retenu la responsabilité de la société OGI à hauteur de 20% au titre du choix du bois et de son assemblage.

24. En deuxième lieu, la société requérante soutient que les variantes observées sur le dispositif de recueil des eaux pluviales résultent d'une proposition du groupement d'entreprises titulaire du lot n°3 dont la société Urbaine de Travaux était mandataire et qu'elles ne sauraient donc lui être imputées. Toutefois, il résulte de ce qui a été précédemment exposé au point 10, que la société OGI, qui était chargée de la rédaction du CCTP correspondant, aurait dû prévoir un tel dispositif et vérifier sa mise en œuvre au titre de sa mission de maîtrise d'œuvre. Par suite, et compte tenu également de la responsabilité de la société Urbaine de Travaux à ne pas avoir alerté sur l'absence d'un tel dispositif, c'est à bon droit que le tribunal administratif a retenu la responsabilité de la société OGI à hauteur de 60% au titre de l'absence de dispositif de recueil des eaux pluviales.

25. Enfin, la société requérante soutient que les défauts d'exécution consistant en l'absence de fixation et de relèvement de la membrane d'étanchéité relèvent d'un changement de conception dont elle n'est pas à l'origine et qu'elle n'a eu de cesse de solliciter la reprise de l'ancrage. Toutefois, elle n'établit pas avoir réellement cherché à redresser ce défaut d'exécution qui relevait de sa surveillance au titre de sa mission de maîtrise d'œuvre. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal a estimé qu'elle devait être regardée comme responsable de ces désordres à hauteur de 40%.

S'agissant de la partie en béton de la digue :

26. En premier lieu, il résulte de l'instruction et de ce qui a été exposé au point 13 que des joints de dilatation n'étaient pas prévus par les stipulations contractuelles alors que de tels joints étaient nécessaires. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a retenu la responsabilité de la société OGI à hauteur de 40% au titre de sa mission de maîtrise d'ouvrage et de bureau d'études techniques.

27. En deuxième lieu, il ressort des stipulations du CCTP applicables que des fondations hors-gel étaient prévues et auraient dû être réalisées. Si la société OGI soutient que leur absence résulte d'une variante d'exécution de la part du groupement d'entreprises titulaire du lot n°3 dont elle n'a pas été informée, il résulte toutefois de sa mission de maîtrise d'œuvre et de ce qui a été exposé au point 14 qu'elle aurait dû contrôler l'exécution de cette tâche. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a retenu la responsabilité de la société OGI à ce titre à hauteur de 25%.

28. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède, notamment de ce qui a été exposé au point 24, que c'est à bon droit que le tribunal administratif a fixé à 60% la responsabilité de la société OGI au titre de l'absence de dispositif de recueil et d'évacuation des eaux pluviales.

29. Enfin, il résulte de ce qui précède, notamment de ce qui a été exposé au point 25, que c'est à bon droit que le tribunal administratif a fixé à 40% la responsabilité de la société OGI au titre de l'absence d'étanchéité du lac amont.

S'agissant du cheminement piétonnier :

30. Il résulte l'instruction et ainsi qu'il a été dit au point 16, que les désordres constatés sur le cheminement piétonnier sont dus à un défaut d'étanchéité lié à l'absence de fixation et de relèvement de la membrane. Il résulte de ce qui précède, notamment de ce qui a été exposé au point 25, que c'est à bon droit que le tribunal administratif a fixé à 40% la responsabilité de la société Omnium Général d'Ingénierie sur ce point.

S'agissant des dépens :

31. Il résulte de ce qui précède, eu égard au partage de responsabilité opéré, que c'est à bon droit que le tribunal administratif a mis à la charge de la société OGI 40% de la somme de 139 644,68 euros TTC au titre des dépens.

32. Il résulte de tout ce qui précède que la société OGI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil l'a condamnée, solidairement avec d'autres constructeurs, à indemniser la commune de Montfermeil des désordres constatés sur plusieurs ouvrages de l'arboretum du parc de la ville et l'a condamnée à garantir les autres constructeurs à hauteur de sa part de responsabilité.

Sur les appels incidents :

33. Les sociétés Paso Doble, Qualiconsult et Urbaine de Travaux demandent, par la voie de l'appel incident, à être entièrement garanties par la société OGI, appelant principal, des condamnations prononcées à leur encontre. Toutefois, il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le tribunal administratif a procédé au partage de responsabilité susrappelé. Par suite, ces appels incidents doivent être rejetés.

Sur les appels provoqués :

34. Les conclusions des sociétés Paso Doble, Segex, Urbaine de Travaux, Multiclo et Qualiconsult, qui ont été provoquées par l'appel de la société OGI et présentées après l'expiration du délai d'appel, en vue d'obtenir la décharge ou la réduction des condamnations prononcées à leur encontre ne seraient recevables qu'au cas où la société OGI, appelant principal, obtiendrait la décharge ou une réduction de l'indemnité qu'elle a été solidairement condamnée à verser à la commune de Montfermeil. Le présent arrêt rejetant l'appel de la société OGI, les conclusions présentées par les sociétés Paso Doble, Segex, Urbaine de Travaux, Multiclo et Qualiconsult tendant à l'annulation du jugement attaqué et à la réduction de leurs condamnations ne sont pas recevables. Elles doivent, par suite, être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

35. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Montfermeil et des sociétés Urbaine de Travaux, Segex, Multiclo, Paso Doble et Qualiconsult, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, le versement à la société requérante d'une somme sur ce fondement. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société OGI le versement d'une telle somme sur le fondement des mêmes dispositions.

36. La présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions tendant au remboursement de ces frais doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de société Omnium Général d'Ingénierie est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Omnium Général d'Ingénierie, à la commune de Montfermeil, à la société Paso Doble, à la société Qualiconsult, à la société Urbaine de Travaux, à la société Segex et à la société Multiclo.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,

M. Camenen, président-assesseur,

Mme Houllier, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 février 2024.

La rapporteure,

S. HoullierLa présidente,

C. Signerin-Icre

La greffière,

T. René-Louis-Arthur

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 20VE01138


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01138
Date de la décision : 22/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. - Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. - Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Sarah HOULLIER
Rapporteur public ?: Mme JANICOT
Avocat(s) : CABINET FIDUCIAL LEGAL BY LAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-22;20ve01138 ?
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