Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 30 août 2019 par laquelle le président de l'université de Tours a refusé son inscription en première année de master mention " cognition, neurosciences et psychologie " pour l'année universitaire 2019-2020, d'enjoindre au président de l'université de Tours de l'inscrire à cette formation au titre de l'année universitaire 2021-2022 et de mettre à la charge de l'université de Tours la somme de 2 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1902294 du 9 mars 2021, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du président de l'université de Tours du 30 août 2019, a enjoint au président de l'université de Tours de réexaminer la candidature de M. B... dans les meilleurs délais et a mis à la charge de l'université de Tours la somme de 1 200 euros à verser à M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 mai 2021 et le 3 juin 2021, l'université de Tours, représentée par Me Nuret, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a entaché son jugement d'une erreur de droit dès lors que la décision fixant la composition du jury de sélection est un acte individuel n'ayant pas à être publié, mais simplement à être notifié aux intéressés ; en tout état de cause, cette décision a été affichée dans les locaux de l'université ; enfin, la circonstance que cette décision n'aurait pas été publiée est sans incidence sur la légalité des décisions prises sur son fondement ;
- le tribunal a statué ultra petita en considérant que M. B... avait soulevé un moyen tiré du défaut de publication de la décision créant la commission de sélection ;
- en exigeant la production d'un accusé de réception de la délibération n° 2018-94 du 17 décembre 2018, le tribunal a renversé la charge de la preuve et ainsi commis une erreur de droit ou, a minima, une erreur de fait ; cette délibération a été transmise au rectorat et publiée sur le site internet de l'université ; elle a été certifiée exécutoire par l'université ; aucun texte n'exige la délivrance d'un accusé de réception.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2021, M. A... B..., représenté par Me Verdier, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'université de Tours la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Houllier,
- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,
- et les observations de Me Nuret, pour l'université de Tours.
Considérant ce qui suit :
1. L'université de Tours " François Rabelais " demande à la cour d'annuler le jugement du 9 mars 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du président de l'université du 30 août 2019 refusant d'inscrire M. A... B... sur liste principale pour l'admission dans le parcours " Cognition, Neurosciences et Psychologie " de la mention de master psychologie.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, si la requérante soutient que le tribunal administratif aurait " statué ultra petita " en répondant à un moyen tiré du défaut de publication de l'arrêté du 30 avril 2019 fixant la composition des commissions de sélection en master, alors qu'un tel moyen n'avait pas été soulevé par M. B..., il ressort du dossier de première instance que ce dernier soutenait, dans son mémoire du 14 janvier 2021, que cet arrêté " aurait dû lui aussi faire l'objet de mesures régulières de publicité au titre de l'article L. 221-2 du code des relations entre le public et l'administration pour entrer en vigueur. / Sans éléments rapportés par l'université sur ces mesures, l'arrêté n'est pas entré en vigueur et n'est pas opposable ". Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a regardé ce moyen comme ayant été soulevé et y a répondu.
3. En second lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. L'université requérante ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de droit ou de fait qu'aurait commises le tribunal pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur les motifs d'annulation retenus par le tribunal administratif :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 719-7 du code de l'éducation : " Les décisions des présidents des universités et des présidents ou directeurs des autres établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ainsi que les délibérations des conseils entrent en vigueur sans approbation préalable, à l'exception des délibérations relatives aux emprunts, prises de participation et créations de filiales mentionnées à l'article L. 719-5 et sous réserve des dispositions du décret prévu à l'article L. 719-9. Toutefois, les décisions et délibérations qui présentent un caractère réglementaire n'entrent en vigueur qu'après leur transmission au recteur de région académique, chancelier des universités. (...) ".
5. Par une délibération n° 2018-94 du 17 décembre 2018, le conseil d'administration de l'université de Tours a approuvé les propositions de la commission de la formation et de la vie universitaire de l'université sur les critères de sélection et les capacités d'accueil en master.
6. M. B... soutient que cette délibération n'ayant pas été régulièrement transmise au recteur, conformément aux dispositions précités de l'article L. 719-7 du code de l'éducation, la décision du 30 août 2019 refusant son admission en master était dépourvue de base légale. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la délibération du 17 décembre 2018 a été transmise au recteur le 21 décembre 2018 ainsi que cela ressort des mentions apposées sur cette délibération, mentions qui font foi jusqu'à la preuve du contraire. En outre, l'université de Tours a produit, en première instance, l'email, adressé au rectorat, contenant cette délibération ainsi que ses annexes et qui a, comme cela ressort de la pièce produite par l'université en réponse à la mesure d'instruction faite par le tribunal, été transféré d'un service du rectorat vers un autre, attestant ainsi de sa réception effective. Enfin, s'il ressort des pièces du dossier que le rectorat de l'académie Orléans-Tours n'établit pas d'accusé de réception lorsqu'il reçoit de telles décisions, la requérante a produit, pour la première fois en appel, une attestation de la rectrice de l'académie Orléans-Tours du 27 mai 2021 affirmant avoir reçu cette délibération ainsi que ses annexes le 21 décembre 2018. Les mentions de cette attestation, dont l'authenticité n'est pas remise en cause par l'intimé, font foi jusqu'à la preuve du contraire, quand bien même elle n'a été établie que dans le cadre de l'instance contentieuse. Dans ces conditions, alors qu'il ne peut, au demeurant, être exigé de l'université qu'elle produise des pièces inexistantes, la délibération n° 2018-94 du 17 décembre 2018 a été régulièrement transmise au rectorat. Par suite, c'est à tort que les juges de première instance ont retenu ce motif pour annuler la décision attaquée.
7. En second lieu, M. B... soutient que la décision du 30 août 2019 était privée de base légale en raison de l'absence de publication de l'arrêté du président de l'université de Tours du 30 avril 2019 fixant la composition des commissions de sélection. Toutefois, la désignation des membres du jury a le caractère d'un acte individuel et aucune disposition législative ou réglementaire n'a prescrit que le jury ne pourrait siéger qu'autant que l'arrêté comportant cette désignation ait été publié ou que les noms de ses membres aient été portés à la connaissance des candidats. Dès lors, la circonstance que la désignation des membres de la commission de sélection n'a pas fait l'objet d'une publicité est par elle-même sans influence sur la régularité de ses délibérations. Par suite, c'est également à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce moyen, qui est inopérant, pour annuler la décision du 30 août 2019.
8. Il résulte de ce qui précède que l'Université de Tours est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence de transmission au recteur de la délibération du 17 décembre 2018 et sur l'absence de publication de l'arrêté du 30 avril 2019 pour annuler la décision du 30 août 2019.
9. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif d'Orléans.
Sur les autres moyens soulevés en première instance :
10. En premier lieu, si M. B... soutient que la délibération du 17 décembre 2018 ne fixe pas précisément les critères de sélection, ni le nombre de places ouvertes pour le master mention psychologie, il ressort des pièces du dossier, et notamment des mentions apposées sur la délibération, qu'étaient annexés à cette dernière plusieurs documents établis par la commission de la formation et de la vie universitaire déterminant précisément ces éléments, y compris pour le master 1 mention " psychologie " ainsi que cela ressort des pages 71 et 72 de ces annexes. Dans ces conditions, il ne saurait être sérieusement soutenu que cette délibération serait irrégulière pour ce motif.
11. En second lieu, si M. B... soutient que la délibération du 17 décembre 2018 n'a pas été régulièrement publiée, il ressort des mentions de cette délibération, qui font foi jusqu'à la preuve du contraire, que la délibération a été mise en ligne sur le site internet de l'université le 21 décembre 2018. Par ses allégations, M. B... n'établit pas que ces mentions seraient erronées. Ce moyen doit, par suite, être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que l'université de Tours est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision de son président du 30 août 2019. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction, présentées par M. B... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'université de Tours, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par l'université de Tours sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1902294 du 9 mars 2021 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif d'Orléans ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de l'Université de Tours présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'université de Tours " François Rabelais " et à M. A... B.... Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie Orléans-Tours.
Délibéré après l'audience du 19 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.
La rapporteure,
S. HoullierLa présidente,
C. Signerin-IcreLa greffière,
C. Fourteau
La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 21VE01380