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27/10/2023 | FRANCE | N°21VE03205

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 27 octobre 2023, 21VE03205


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Greenfee a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2019 par lequel le maire de la commune de Vernouillet a refusé de lui délivrer un permis d'aménager six lots, dont cinq à bâtir, sur les parcelles cadastrées D 479, 480 et 1100, sises 7 rue du Louvre, chemin rural n°8, à Meulan - hameau de Marsinval, et la décision du 25 octobre 2019 portant rejet de son recours gracieux, d'enjoindre au maire de cette commune d'instruire à nouveau sa demande de permis

d'aménager et de mettre à la charge de la commune le versement de la somme ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Greenfee a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2019 par lequel le maire de la commune de Vernouillet a refusé de lui délivrer un permis d'aménager six lots, dont cinq à bâtir, sur les parcelles cadastrées D 479, 480 et 1100, sises 7 rue du Louvre, chemin rural n°8, à Meulan - hameau de Marsinval, et la décision du 25 octobre 2019 portant rejet de son recours gracieux, d'enjoindre au maire de cette commune d'instruire à nouveau sa demande de permis d'aménager et de mettre à la charge de la commune le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1909887 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 11 juillet 2019 et la décision du 25 octobre 2019, a enjoint au maire de Vernouillet de délivrer à la SARL Greenfee le permis d'aménager sollicité, dans un délai de trois mois à compter de la notification de ce jugement et a mis à la charge de cette commune le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 novembre 2021 et le 6 octobre 2023 sous le numéro 21VE03205, la commune de Vernouillet, représentée par Me Saint-Supery, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de la SARL Greenfee ;

3°) et de mettre à la charge de la SARL Greenfee le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier car les premiers juges n'ont pas suffisamment motivé leur jugement en tant qu'il écarte le moyen tiré de la substitution de motif selon lequel le permis d'aménager devait être refusé au titre de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme du fait des risques présentés par la desserte du terrain pour la sécurité des usagers de la voie publique ;

- il est entaché d'une contradiction de motifs tenant à ce que les premiers juges ont estimé, d'une part, que la Sente des Cours d'en bas permet le passage, tout au long de celle-ci et dans des conditions de sécurité suffisantes, des véhicules de lutte contre les incendies et de ramassage des ordures, mais d'autre part, que cette voie ne permet pas le croisement de deux véhicules en tous points ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a jugé que l'arrêté de refus de permis d'aménager ne pouvait être fondé sur les articles UHa 3.2 et N 3.2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet, la Sente des Cours d'en bas ne remplissant pas les conditions de viabilité et d'ouverture à la circulation que prévoient cet article ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a jugé que l'arrêté de refus de permis d'aménager ne pouvait être fondé sur le motif tiré de la protection de l'aspect champêtre des chemins et de la paisibilité du voisinage, qui doit être regardé comme fondé sur l'article 11 du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme, lequel renvoie à l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, plus généralement, sur l'intégralité du plan local d'urbanisme visé dans l'arrêté querellé et enfin sur les objectifs, fixés par le projet d'aménagement et de développement durables, de " préserver les villages de Marsinval et de Brezolles dans leurs composantes actuelles ainsi que le domaine de Marsinval ", d'" encadrer et maîtriser l'évolution des quartiers pavillonnaires afin de conserver leurs caractéristiques ", de " préserver le caractère paysager (...) des secteurs pavillonnaires " et de " prendre en compte la présence du GR 1 " ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a refusé de faire droit à la demande de substitution de motif tiré de ce que le projet est contraire à l'article 11 du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme en ce qu'il porte atteinte à l'intérêt des lieux et aux paysages naturels avoisinants ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a refusé de faire droit à la demande de substitution de motif tiré de ce que le projet est contraire à l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, lequel est relatif à la sécurité publique du projet du fait de sa situation, de ses caractéristiques et de son importance ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a refusé de faire droit à la demande de substitution de motif tiré de ce que le projet prenait son accès sur un sentier touristique, en méconnaissance de l'article UHa - UHs 3.2 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a refusé a refusé de faire droit à la demande de substitution de motif tiré de ce que le refus de permis d'aménager pouvait être fondé sur l'article 13.1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune ;

- il peut être procédé, pour la première fois en appel, à une substitution de motif tiré de ce que le projet est contraire au plan local d'urbanisme, en tant que celui-ci délimite, dans son plan de zonage, une bande d'inconstructibilité en lisière de la forêt.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2022, la SARL Greenfee, représentée par Me Koerfer Boulan, demande à la cour de rejeter la requête en appel de la commune de Vernouillet et de mettre à la charge de celle-ci le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

II. Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2021 sous le numéro 21VE03207, la commune de Vernouillet, représentée par Me Saint-Supery, demande à la cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative ou, à titre subsidiaire, de l'article R. 811-17 de ce code, le sursis à exécution de ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de la SARL Greenfee le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient d'une part, à titre principal, que les conditions prévues à l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont réunies, dès lors que les moyens de sa requête en appel sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué ainsi que le rejet des demandes de première instance présentées par la SARL Greenfee, et d'autre part, à titre subsidiaire, que les conditions prévues à l'article R. 811-17 du code de justice administrative sont réunies.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2022, la SARL Greenfee, représentée par Me Koerfer Boulan, avocate, demande à la Cour de rejeter la demande de sursis à exécution du jugement n°1909887 du 1er octobre 2021 et de mettre à la charge de la commune de Vernouillet le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Even,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Saint-Supery, avocat, représentant la commune de Vernouillet, et de Me Lepoutre, avocat, représentant la SARL Greenfee.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 21VE03205 et n° 21VE03207, qui tendent respectivement à l'annulation et au prononcé du sursis à exécution du même jugement, présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. La SARL Greenfee a sollicité, le 18 avril 2019, la délivrance d'un permis d'aménager portant sur la création d'un lotissement de six lots, dont cinq à bâtir, desservis par une voie commune, sur un terrain cadastré D n° 479, 480 et 1100, d'une superficie totale de 5634 m², situé au 7 rue du Louvre à Vernouillet (78540). Cette demande a été rejetée par un arrêté du maire de cette commune du 11 juillet 2019. Le recours gracieux introduit contre cette décision a été rejeté le 25 octobre 2019. Par un jugement n° 1909887 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 11 juillet 2019 et la décision du 25 octobre 2019 et a enjoint au maire de Vernouillet de délivrer à la SARL Greenfee le permis d'aménager sollicité. La commune de Vernouillet fait appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il résulte du jugement attaqué que le tribunal administratif de Versailles, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a pour l'ensemble des moyens invoqués cité les textes dont il a fait application et précisé les motifs de droit et de fait retenus. Il a ainsi motivé son jugement de manière à permettre aux parties d'en critiquer le bien-fondé. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait insuffisamment motivé doit être écarté.

4. En second lieu, la commune de Vernouillet soutient encore que le jugement attaqué serait entaché d'une contradiction de motifs dès lors qu'il précise que la Sente des Cours d'en-bas " permet le passage, tout le long de celle-ci, des véhicules de lutte contre les incendies et de ramassage des ordures, dans des conditions de sécurité suffisantes ", tout en indiquant que cette voie " ne permet pas le croisement de deux véhicules en tous points ". Toutefois, d'une part, la contradiction de motifs affectant le bien-fondé d'une décision juridictionnelle et non sa régularité, ce moyen ne peut qu'être écarté. D'autre part, en tout état de cause, la contradiction alléguée manque en fait dès lors que les premiers juges ont précisé que le croisement de deux véhicules n'est empêché qu'en certains points.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité des motifs de la décision initiale :

5. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme : " Le règlement national d'urbanisme est applicable aux constructions et aménagements faisant l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une déclaration préalable ainsi qu'aux autres utilisations du sol régies par le présent code. / Toutefois les dispositions des articles R. 111-3, R. 111-5 à R. 111-19 et R. 111-28 à R. 111-30 ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu ". En outre, aux termes des dispositions de l'article 3.2 du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet : " Pour être constructible, un terrain doit avoir un accès à une voie publique ou privée ouverte à la circulation automobile et en état de viabilité, éventuellement obtenu par l'application des dispositions de l'article 682 du Code Civil (fonds enclavés). Lorsque le terrain est riverain de deux ou plusieurs voies publiques, l'accès sur celle de ces voies qui présenterait une gêne ou un risque pour la circulation peut être interdit. / Toute opération doit prendre le minimum d'accès sur les voies publiques. Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. Les plates-formes d'accès au terrain réalisés sur emprise publique ou privée des voies de desserte doivent préserver la continuité des traitements de sols existants (chaussée, trottoirs, caniveau, etc.). (...) ". Enfin, aux termes du glossaire du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet : " Accès et voie nouvelle : L'accès est constitué par la limite entre le terrain et la voie qui le dessert. La voie nouvelle est une emprise publique ou privée qui permet de desservir plusieurs propriétés distinctes ".

6. La commune de Vernouillet soutient que le projet litigieux méconnaît l'article 3.2 du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme de sa commune en ce que la voie de desserte la Sente des Cours d'en bas ne serait pas ouverte à la circulation, ni viable. Toutefois, d'une part, aucune pièce du dossier n'établit que la voie de desserte ne serait pas ouverte à la circulation, la présence d'une barrière ouverte ne suffisant pas à démontrer ces faits. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la sente des cours d'en bas, goudronnée en sa majeure partie, est viable. Les circonstances qu'à son entrée, la Sente des Cours d'en bas soit trop étroite pour permettre le croisement de deux véhicules ou que des véhicules stationneraient régulièrement le long de celle-ci, ce qui n'est pas établi, sont sans incidence sur sa condition de viabilité. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la Sente des Cours d'en bas ne permet pas le passage de véhicules lourds, tels que ceux de collecte des ordures ménagères, de chantier ou de lutte contre l'incendie. Par suite, ce moyen de la commune doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet : " Rappel : En application de l'article R 111-21 du Code de l'Urbanisme, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales (...) ". Par ailleurs, les dispositions du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) ne sont pas directement opposables aux autorisations de construire.

8. La commune requérante soutient qu'elle pouvait fonder le refus de permis de construire sur le motif tiré de l'atteinte à l'aspect champêtre et au caractère paisible des lieux. Toutefois, il ressort de la rédaction de l'arrêté litigieux selon lequel " l'aspect champêtre de ces chemins ainsi que la paisibilité du voisinage doivent être respectés et protégés " que le maire de la commune de Vernouillet ne s'est pas fondé sur l'article 11 du règlement des zones UHa et N ou sur toute autre disposition du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet. En outre, si la commune soutient se prévaloir du projet d'aménagement et de développement durables de son plan local d'urbanisme, il est constant les dispositions de ce projet ne sont pas opposables aux autorisations de construire. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne les demandes de substitution de motifs présentées par la commune :

9. La commune de Vernouillet qui soutient que d'autres motifs sont susceptibles de fonder la décision de refus contestée sollicite plusieurs substitutions de motifs.

10. En premier lieu, elle reprend tout d'abord en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance tiré de ce que le refus de permis d'aménager pouvait être fondé sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que la situation du terrain, ses conditions d'accès et les éventuels risques de propagation d'un incendie du massif forestier jouxtant la parcelle en litige, ne satisfont pas aux impératifs de sécurité publique. Il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Versailles aux points 15 à 20 du jugement de première instance.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet : " Rappel : En application de l'article R 111-21 du Code de l'Urbanisme, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. / Les constructions doivent être conformes aux prescriptions présentées ci-dessous. Toutefois, en cas d'extension modérée ou de projet d'architecture contemporaine, d'autres dispositions peuvent être retenues à condition de s'insérer qualitativement avec les constructions existantes avoisinantes ". Ces dispositions ont le même objet que celles de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, devenu R. 111-27 dudit code, et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité de l'arrêté attaqué.

12. Il résulte des dispositions de l'article 11 du règlement du plan local d'urbanisme précité que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente doit refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel ou urbain de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel ou urbain sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

13. Si la commune soutient que le projet de la SARL Greenfee est contraire à l'article 11 du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme, d'une part, il ressort des pièces du dossier que le projet se situe pour partie en zone N, laquelle abrite un espace boisé classé, et en majeure partie en zone UHa, définie dans le plan local d'urbanisme comme une zone d'" habitat pavillonnaire diffus " dans laquelle " le règlement permet une évolution de ces quartiers en donnant un peu plus de possibilités de construire tout en veillant à conserver leur identité par une maîtrise des hauteurs et la préservation d'espaces de jardin ".

14. D'autre part, s'agissant de l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site, si la commune de Vernouillet soutient que le projet de lotissements contrevient à l'objectif de la commune de maîtriser la densité des constructions de la zone, les cinq lots à construire demeurent à hauteur raisonnable et des espaces de jardin sont conservés. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier, en particulier des plans de situation, que le projet induit une densification dépassant les limites prévues par le plan local d'urbanisme en zone UHa. En outre, il ressort des pièces du dossier que la création prévue des lots à bâtir, destinés à accueillir des maisons individuelles, se fera sans aucun empiètement des constructions sur la zone N ou l'espace boisé classé. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le lotissement projeté concourrait à la densification de l'habitat dans des proportions qui porteraient atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ni qu'il méconnaitrait la vocation du secteur UHa d'accueillir de l'habitat pavillonnaire diffus.

15. En troisième lieu, la commune reprend, en appel, les moyens qu'elle avait invoqués en première instance tirés de ce qu'elle aurait pris la même décision en se fondant sur les dispositions de l'article 3.2. du règlement des zones UHa et N du plan local d'urbanisme en tant qu'il prévoit qu'" aucune opération ne peut prendre accès sur les pistes cyclables, les sentiers touristiques ", et en se fondant sur les dispositions de l'article 13.1 dudit règlement dès lors que le projet envisagé n'a pas pour ambition de respecter le principe de la conservation des éléments paysagers, en particulier des arbres, mais aura pour effet la suppression totale de ces derniers au profit de constructions à destination d'habitat. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Versailles aux points 24 à 26 et 30 à 31 du jugement de première instance.

16. En quatrième et dernier lieu, le plan de zonage du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet et sa légende délimitent une " une bande de 50 mètres à partir des lisières forestières des massifs de plus de 100 ha identifiés au titre du SDRIF ", qui distingue par ailleurs cette bande entre les zones en " espace naturel et agricole " et en " site urbain constitué ". Par ailleurs, aux termes des dispositions du schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF) applicables à la date d'édiction du plan local d'urbanisme de la commune de Vernouillet : " En dehors des sites urbains constitués, à l'exclusion des bâtiments à destination agricole, toute nouvelle urbanisation ne peut être implantée qu'à une distance d'au moins 50 mètres des lisières des massifs boisés de plus de 100 hectares. Un ensemble de constructions éparses ne saurait être regardé comme un site urbain constitué ". L'imprécision du plan de zonage du règlement du plan local d'urbanisme a pour effet de rendre inopposables aux demandeurs d'autorisations d'urbanisme les dispositions concernées.

17. La commune de Vernouillet soutient, pour la première fois en appel, qu'elle aurait pu légalement fonder sa décision de refus de permis d'aménager sur le motif tiré de ce que le projet méconnait le plan de zonage du règlement du plan local d'urbanisme en tant qu'il délimite une bande d'inconstructibilité en lisière du massif forestier. Toutefois, d'une part, le plan de zonage du plan local d'urbanisme se borne à énoncer de manière approximative l'existence d'" une bande de 50 mètres à partir des lisières forestières des massifs de plus de 100 ha identifiés au titre du SDRIF ", qui distingue par ailleurs cette bande entre les zones en " espace naturel et agricole " et en " site urbain constitué ", sans préciser, en reprenant les orientations réglementaires prévues par le SDRIF, que cette bande prévoit en son sein une servitude non aedificandi, ni qu'une exception s'applique dans l'hypothèse d'une construction dans un site urbain constitué. Dans ces conditions, la délimitation de cette " bande " par un simple document graphique qui n'est pas suffisamment précise ne saurait pas elle-même être opposée aux autorisations d'urbanisme sollicitées.

18. D'autre part, il est constant que le SDRIF n'est pas au nombre des documents d'urbanisme sur le fondement desquels le maire d'une commune peut se fonder pour refuser une autorisation d'urbanisme, de sorte que la référence faite à ce schéma directeur dans la légende du plan de zonage du PLU ne peut utilement fonder le moyen susvisé.

19. Il résulte de ce qui précède que la commune de Vernouillet n'aurait pas pris la même décision si elle s'était fondée sur les motifs qu'elle a invoqués en cours d'instance. Il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande de substitution de motifs qu'elle présente en défense.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

20. Lorsque le juge annule un refus d'autorisation d'urbanisme après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui, eu égard aux dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme, demeurent applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date de la décision juridictionnelle y fait obstacle.

21. Il ne résulte pas de l'instruction que les dispositions en vigueur à la date de l'arrêté annulé interdisaient la délivrance du permis d'aménager sollicité pour un autre motif que ceux que le présent jugement censure ou ne retient pas. Il ne résulte pas non plus de l'instruction qu'un changement dans les circonstances de fait se soit produit depuis l'édiction de l'arrêté annulé, ni à plus forte raison que la situation de fait existant à la date du présent jugement fasse obstacle à la délivrance de ce permis. Dès lors, il y a lieu de confirmer l'injonction retenue par le tribunal administratif de Versailles.

22. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Vernouillet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté portant refus de permis d'aménager du 11 juillet 2019 et lui a enjoint à délivrer cette autorisation. Par voie de conséquence il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant au sursis à exécution de ce même jugement.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Greenfee qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Vernouillet, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, en application de ces mêmes dispositions de mettre à la charge de la commune de Vernouillet une somme totale de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SARL Greenfee et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Vernouillet enregistrée sous le numéro 21VE03205 est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête enregistrée sous le numéro 21VE03207 tendant qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif.

Article 3 : La commune de Vernouillet versera à la SARL Greenfee la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Greenfee et à la commune de Vernouillet.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Even, premier vice-président de la Cour, président de chambre,

Mme Aventino, première conseillère,

M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2023.

Le président-rapporteur,

B. EVEN

L'assesseure la plus ancienne,

B. AVENTINO

La greffière,

I. SZYMANSKI

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 21VE03205 - 21VE03207


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE03205
Date de la décision : 27/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : SCP BOULAN KOERFER PERRAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-10-27;21ve03205 ?
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